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Une nouvelle phase dans la vie de Dess ;)


Chapitre n°17 :
La Marche Obscure

[An 1 033 après J.C. / -1 002 avant Yavin]


Le soleil jaune de Phaseera se trouvait juste au-dessus de leurs têtes et baignait la vallée luxuriante ainsi que le campement où Dess et ses compagnons, des soldats Sith, attendaient. À l'ombre d'un arbre cydera, Dess inspectait rapidement son fusil blaster TC-22, histoire de passer le temps. La cellule énergétique de l'arme était entièrement rechargée, et offrait donc une capacité de cinquante tirs. Son chargeur énergétique dorsal était également plein. La visée semblait légèrement décalée, un problème récurrent sur les modèles TC. Si ces fusils disposaient d'une longue portée de tir et d'une puissance de feu redoutable, leurs lunettes de visée perdaient en précision avec le temps. Un réglage rapide lui permit de la réajuster.

Ses mains se déplacèrent sur l'arme avec une rapidité et une assurance qui résultaient d'un millier de répétitions. Au cours des douze derniers mois, il avait tellement pris l'habitude de régler son arme qu'il n'avait pratiquement plus besoin de se concentrer pour le faire. L'examen des armes avant le combat était facultatif dans l'armée Sith, mais c'était devenu pour Dess un geste routinier qui lui avait maintes fois sauvé la vie.

L'armée Sith grandissait avec une telle rapidité que la logistique militaire ne parvenait plus à répondre à toutes les demandes des soldats. Les meilleurs équipements étaient réservés aux vétérans et aux officiers, et les nouvelles recrues se débrouillaient avec le matériel restant.

Maintenant qu'il était sergent, il aurait pu demander un modèle supérieur, mais le TC-22 était la première arme avec laquelle il avait appris à tirer et il était assez habile à la manier. Dess pensait qu'il était préférable de passer un peu de temps à entretenir son arme, plutôt que d'apprendre à maîtriser les nuances subtiles d'un autre modèle.

En revanche, il était en possession d'un excellent pistolet blaster. Tous les soldats Sith n'en recevaient pas. Pour la plupart d'entre eux, un fusil semi-automatique de moyenne portée était bien suffisant. Au combat, ils seraient probablement déjà morts avant d'avoir pu se rapprocher suffisamment de leurs adversaires pour dégainer leur pistolet. Mais Dess avait largement eu le temps de prouver, à de nombreuses reprises, qu'il n'était pas qu'un simple soldat servant de chair à canon. Les soldats suffisamment chevronnés pour survivre au premier assaut et se mêler aux lignes ennemies avaient besoin d'une arme de combat rapproché.

Pour Dess, il s'agissait d'un ISG-21D, le meilleur pistolet fabriqué par les Industries et Solutions Galactiques. Sa portée maximale était de vingt mètres seulement, mais il était capable de désintégrer armures, chairs et blindages droïdes avec la même efficacité. Le 21D était illégal dans la plupart des secteurs de la galaxie contrôlés par la République, preuve de son incroyable potentiel de destruction. La cellule énergétique permettait de tirer une douzaine de coups, mais il en fallait rarement plus d'un pour abattre un ennemi.

Dess glissa le pistolet dans l'étui à blaster fixé à sa ceinture, vérifia la vibrolame rangée dans sa botte, et reporta finalement son attention sur ses soldats. Tout autour de lui, les hommes et les femmes de son unité l'imitaient, inspectant leur propre matériel, en attendant les ordres. Il ne put s'empêcher de sourire – il les avait bien entraînés.

Il avait rejoint les rangs de l'armée Sith une année standard auparavant, et il ne lui avait pas fallu beaucoup de temps pour s'adapter et même apprécier la vie de soldat. Il existait une réelle camaraderie parmi ceux et celles qui combattaient à ses côtés, un lien qui s'était rapidement étendu à Dess. Il n'avait jamais ressenti aucune amitié à l'égard des mineurs d'Apatros, et s'était même toujours considéré comme un solitaire.

Il avait trouvé sa véritable voie dans l'armée. Il était à l'aise avec les soldats. Ses soldats.

Le soldat de première classe Adanar remarqua son regard, et y répondit en frappant légèrement, deux fois de suite, de son poing fermé contre sa poitrine, juste au-dessus du cœur. C'était un geste connu des seuls membres de l'unité, un signe de loyauté et de fidélité, un symbole du lien qui les unissait tous.

Dess lui répondit avec le même geste. Lui et Adanar faisaient partie de la même unité depuis le premier jour de leur entrée dans l'armée. La recruteuse les avait enrôlés en même temps, et assignés à la Marche Obscure, l'unité du lieutenant Ulabore.

Adanar ramassa son fusil, et avança d'un pas nonchalant vers son ami.

- Tu crois vraiment que tu vas avoir besoin de ton pistolet blaster, sergent ?

- On ne sait jamais, répliqua Dess en faisant tourner son arme sur elle-même avant de la rengainer à nouveau dans son étui.

- J'attends avec impatience qu'on nous donne le feu vert, grommela Adanar. Cela fait deux jours que nous sommes en position. Combien de temps vont-ils encore attendre ?

Dess haussa les épaules.

- Nous ne pouvons pas y aller tant qu'ils ne sont pas prêts à attaquer avec l'armée principale. La stratégie toute entière tomberait à l'eau si nous agissions trop tôt.

La Marche Obscure avait gagné une belle renommée l'année passée. Ses membres avaient participé à des dizaines de batailles, sur une demi-douzaine de planètes différentes, et avaient remporté un bon nombre de victoires. Comme des centaines d'autres, leur unité était, à l'origine, une force de frappe susceptible d'être sacrifiée, mais elle faisait désormais partie des troupes d'élite assignée aux missions critiques. Elle devait jouer le rôle principal dans la capture du monde-industrie de Phaseera – encore fallait-il qu'ils reçoivent l'ordre d'agir.

En attendant, ils tuaient le temps comme ils le pouvaient dans leur campement situé en pleine jungle, à une heure de marche seulement de leur objectif. Cela faisait à peine quelques jours qu'ils s'y trouvaient, mais l'attente commençait déjà à être pénible.

Adanar se mit à faire les cent pas. Dess était tranquillement assis dans l'ombre, et observait son ami aller et venir.

- Ne te fatigue pas, lui dit-il finalement. De toute manière, nous ne partirons pas avant la tombée de la nuit. Tu ferais mieux de te reposer.

Adanar s'arrêta.

- Le lieutenant a déclaré que ce serait une mission très facile, lui confessa-t-il en adoptant un ton désinvolte. Tu crois qu'il a raison ?

Le lieutenant Ulabore avait reçu de nombreuses distinctions pour le féliciter de la réussite de ses troupes, mais tous les soldats de l'unité savaient qui était véritablement aux commandes quand les tirs de blasters commençaient.

C'était même devenu parfaitement clair presque un an auparavant sur Kashyyyk, où Dess et Adanar participaient à leur première vraie bataille. La Confrérie des Ténèbres avait tenté de s'implanter dans la Bordure Médiane en envahissant le système, et avait dépêché d'innombrables flots de soldats pour capturer la patrie des Wookiees, une planète riche en ressources. Mais Kashyyyk était un bastion de la République, et cette dernière refusait de l'abandonner – et ce, quel que soit le nombre de soldats Sith qui devaient y déferler.

Lorsque la flotte Sith s'était posée, ses ennemis s'étaient tout simplement évanouis dans la forêt. L'invasion se transforma en une guerre d'usure, une longue et épuisante campagne menée en altitude au milieu des branches des arbres wroshyr, bien au-dessus du sol. Plusieurs milliers de soldats Sith furent éliminés, la plupart trouvant la mort sans même apercevoir l'ennemi ayant décoché le coup fatal. Les Maîtres Sith avaient cependant continué d'envoyer de plus en plus de soldats.

La Marche Obscure avait fait partie de la seconde vague de renforts. Ils furent séparés des lignes de combat principales dès la première bataille, et éloignés du reste de l'armée. Seul et encerclé par d'innombrables ennemis, le lieutenant Ulabore avait paniqué. Sans aucun ordre direct, il n'avait pas su quelles actions mener pour sauver son unité.

Heureusement, Dess avait pris les choses en main et les avait tous sauvés.

Dess avait le don de détecter la présence de l'ennemi avant de le voir, et même de localiser ses adversaires. Il n'avait aucune explication rationnelle à cette aptitude si particulière, et avait même cessé d'en chercher. Il essayait simplement de l'utiliser au mieux.

Avec Dess comme guide, les membres de la Marche Obscure parvinrent à éviter les pièges et embuscades, et à rejoindre peu à peu le gros des troupes Sith. Il leur fallut batailler trois jours et trois nuits, déjouer d'innombrables assauts et effectuer une marche quasi-interminable en territoire ennemi avant d'y parvenir. Malgré tous les combats, l'unité ne perdit qu'une poignée d'hommes, et les survivants surent qu'ils en étaient redevables à Dess.

Le récit de la Marche Obscure devint un emblème pour le reste de l'armée Sith, permettant aux troupes de recouvrer leur moral. Si une unité à elle seule pouvait survivre trois jours durant, les soldats s'imaginaient qu'un millier d'unités pouvait bien réussir à gagner la guerre. Il leur fallut presque deux mille unités pour mener le combat, mais Kashyyyk finit par tomber.

En tant que chef de l'héroïque Marche Obscure, le lieutenant Ulabore reçut une belle récompense et maintes louanges. Il ne se soucia cependant pas de préciser que Dess était en réalité l'unique responsable de leur victoire. Il se montra toutefois suffisamment astucieux pour promouvoir Dess au rang de sergent, et il s'arrangea pour disparaître à chaque fois que la situation devenait difficile.

- Alors ? répéta Adanar. T'en penses quoi, Dess ? Lorsque nous recevrons l'ordre de partir, cette mission sera vraiment une partie de plaisir ?

- Le lieutenant nous dit simplement ce qu'il pense que nous voulons entendre.

- Je le sais, ça, c'est bien pour ça que je te pose la question. Je veux savoir ce qui nous attend vraiment.

Dess y réfléchit quelques instants. Ils étaient retranchés dans la jungle, à la périphérie d'une étroite vallée – la seule route menant à la capitale de Phaseera, où l'armée de la République avait installé son camp de base. Un avant-poste de la République se dressait sur une colline voisine qui surplombait la vallée. Si l'armée Sith tentait d'avancer, même de nuit, l'avant-poste les repérerait avec certitude. Et les soldats de la République avertiraient le camp de base pour que leurs défenses se préparent et agissent bien avant que l'ennemi ne les atteigne.

La mission était simple : détruire l'avant-poste afin que le reste de l'armée puisse lancer une attaque-surprise sur le camp de base de la République. Ils étaient équipés d'émetteurs à interférence – du matériel de brouillage à courte portée qu'ils utiliseraient pour empêcher l'avant-poste de transmettre tout signal en direction du camp principale –, mais ils devraient les frapper par surprise. L'avant-poste délivrait son rapport chaque jour à l'aube, et si la Marche Obscure attaquait trop tôt, la République comprendrait que quelque chose n'allait pas en ne recevant pas ledit rapport.

Il était donc primordial de frapper au bon moment. L'unité d'élite devait les éliminer juste avant que l'armée Sith ne pénètre dans la zone. Ce qui leur laisserait quelques heures pour rejoindre l'avant-poste et l'attaquer sans qu'il s'y attende. L'objectif était réalisable, mais seulement si les différentes actions étaient parfaitement coordonnées. La Marche Obscure était en place, mais l'armée Sith n'était pas encore prête.

- Je suis inquiet, finit par admettre Dess. Il ne sera pas facile de capturer cet avant-poste. Dès que nous recevrons l'ordre d'attaquer, nous n'aurons aucun droit à l'erreur. Nous devrons agir à la perfection. Et si d'aventure la République nous réservait des surprises, nous pourrions être dans de sales draps !

Adanar cracha au sol.

- Je le savais ! Tu as un mauvais pressentiment, n'est-ce pas ? Comme si Hsskhor revenait encore nous hanter.

Hsskhor avait été un désastre. Après la chute de Kashyyyk, les soldats de la République survivants avaient fui sur le monde voisin de Trandosha. Vingt unités de troopers Sith, parmi lesquelles la Marche Obscure, les avaient poursuivis. Ils les avaient rattrapés sur les plaines désertiques à l'extérieur de la cité de Hsskhor.

Une journée entière de violents combats engendra de lourdes pertes dans les deux camps, sans toutefois qu'aucun véritable vainqueur n'apparaisse. Dess s'était senti mal à l'aise durant toute cette bataille, sans pour autant savoir pourquoi. Son malaise était allé grandissant avec la tombée de la nuit, et les deux camps avaient battu en retraite de chaque côté du champ de bataille pour se regrouper. Les Trandoshans les avaient attaqués quelques heures plus tard.

La nuit noire ne posait aucun problème aux Trandoshans reptiliens, car ils avaient le don de voir dans l'obscurité. Ils parurent surgir de nulle part et se matérialisèrent au milieu des ténèbres comme un cauchemar qui prendrait forme. Contrairement aux Wookiees, les Trandoshans n'étaient alliés à aucun des deux camps, alors les chasseurs de primes et les mercenaires frappèrent indifféremment les rangs des deux armées, dans le seul but de tirer profit de leurs meurtres.

Les détails de ce massacre ne furent jamais véritablement révélés. Dess s'était trouvé au milieu du carnage, et parvenait encore à peine à comprendre ce qui s'était passé. Lorsque le soleil se leva sur les plaines, la moitié des troupes Sith était déjà tombée. Dess perdit un grand nombre de camarades dans ce massacre – des camarades qu'il aurait pu sauver s'il avait prêté davantage attention aux prémonitions funestes qu'il avait ressenties lorsqu'il avait posé le pied sur ce monde désertique oublié. Et il s'était juré de ne plus jamais laisser la Marche Obscure subir un tel sort.

Les Sith obtinrent finalement la victoire en moins d'une semaine, avec des renforts, et la cité jadis si fière fut saccagée et complètement rasée.

- Ce ne sera pas une nouvelle Hsskhor, le rassura Dess alors qu'Adanar se montrait nerveux.

Il était évident que Dess avait de nouveau un étrange pressentiment, mais cette fois-ci, c'était différent. Quelque chose d'important allait se produire, mais Dess ne savait pas vraiment si cet événement s'avérerait bénéfique ou non.

- Allez, Dess, le pressa Adanar. Va parler à Ulabore. Il lui arrive de t'écouter.

- Pour lui dire quoi ?

Exaspéré, Adanar leva les bras au ciel.

- Je n'en sais rien ! Parle-lui de ton pressentiment. Dis-lui de contacter le QG pour leur demander de nous retirer d'ici. Ou pour les convaincre de nous envoyer tout de suite au combat ! Mais de ne pas nous laisser pourrir au soleil comme un groupe de rats womps morts !

Avant que Dess ait pu lui répondre, l'une des jeunes troopers, une femme prénommée Lucia, courut dans sa direction et le salua rapidement.

- Sergent ! Le lieutenant Ulabore désire que vous rassembliez les troupes devant sa tente. Il veut leur parler d'ici trente minutes, lui dit-elle d'une voix sincère et excitée.

- Je pense que nos ordres sont enfin arrivés, déclara Dess en esquissant un sourire en direction de son ami.