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Chapitre 44
Enveloppée dans un épais manteau bleu ciel, ses yeux et son nez ressortant à peine entre son bonnet et son écharpe, Mikan rayonnait.
À sa droite, il y avait Papa, qui tenait sa main d'un côté et son déjeuner de l'autre – il allait le donner à Maître Iruka en arrivant, elle avait refusé de retourner à la cantine parce que c'était vachement mieux d'avoir des repas préparés par Papa, au moins, elle était sûre qu'il n'y avait pas de petits pois pas bons.
À sa gauche, il y avait Itachi qui sentait super bon et qui était super cool et trop beau. Ils discutaient de trucs de grands qu'elle voulait pas comprendre : elle avait bien assez à réfléchir de son côté.
Parce que Mikan avait un plan. Un plan dont la première étape était exactement ce qui était en train de se passer. Ses yeux coulèrent de l'un à l'autre et elle sautilla littéralement de joie en voyant ses mains dans celles des deux adultes.
Il fallait que Papa tombe amoureux d'Itachi. Comme ça, il serait plus amoureux de Maman et Parrain et Papa pourraient reparler et arrêter d'être tristes de plus être copains. Ensuite, si Papa tombait amoureux d'Itachi, comme Itachi était déjà amoureux de Papa, ils pourraient rester vivre ensemble.
Son plan était bien entendu infaillible et il commençait par faire remarquer à Papa combien Itachi il est trop cool et beau. Non, c'était la deuxième étape, ça, la première étape c'était de les faire se tenir la main comme des amoureux. Mais comme elle était là, c'était compliqué, alors elle avait modifié son plan et si elle leur tenait la main aux deux, ils se tenaient la main par son intermédiaire, donc c'était tout pareil.
Alors que Papa lui tenait la main, elle avait attrapé celle d'Itachi qui lui avait lancé un drôle de regard, mais il l'avait laissé faire et elle avait vu leur reflet dans la vitre d'un magasin et ils ressemblaient à une famille où elle aurait deux papas, mais c'était trop cool parce qu'ils étaient trop beaux, comme sur la photo qu'elle ramenait en classe comme l'avait demandé le professeur Iruka.
Lorsqu'ils approchèrent de l'école, l'enseignant se tourna vers eux avec un immense sourire en disant : « Et voilà les trois Uzumaki ! ». Mikan ne cacha rien de son ravissement et elle ajouta cette étape à son plan : si Papa mariait Itachi, c'était sûr qu'ils partiraient plus.
— Excusez-nous, lança Papa en souriant à Maître Iruka, nous sommes en retard.
Il tendit le déjeuner à l'instituteur et Mikan tira sur la main d'Itachi pour pouvoir l'embrasser.
— D'abord je fais un bisou à toi, chuchota-t-elle, et ensuite je fais un bisou à Papa.
— D'accord, approuva Itachi sans vraiment comprendre pourquoi Mikan lui disait ça de cette drôle de façon.
L'enfant finit par partir et les deux adultes restèrent seuls avec l'enseignant.
— Nous ferons prochainement un point, annonça l'instituteur. J'ai cru comprendre que vous étiez très occupé pour la dernière réunion, mais j'aimerais vraiment beaucoup que vous soyez présent, cette fois-ci.
— Souhaitez-vous parler de sa baisse de niveau en mathématiques ?
Iruka hocha gravement la tête. Son regard passa d'Itachi à Nagato.
— Même si j'ai constaté un progrès certain en écriture depuis la rentrée, je pense qu'il va falloir la faire travailler plus en mathématiques, à la maison. Je lui préparerai des exercices spécialement pour elle. J'ai déjà prévenu Madame Uzumaki.
Nagato toussa. Iruka grimaça.
— Madame Onishi, je suis vraiment désolé, Monsieur Uzumaki, c'est que je ne me suis pas encore habitué.
Ce fut une fois de plus complètement dépité par sa bêtise qu'Iruka s'éloigna pour rejoindre ses élèves, se massant les tempes avec colère contre lui-même.
Dans la salle de classe, le silence régnait et c'était suffisamment rare pour qu'Iruka prît un moment entier pour savourer cette absence de bruit parasite. Ses yeux passèrent d'une table à l'autre, contemplant ses gosses qui attendaient patiemment ses instructions. Il observa les photos qui s'étalaient, circulant entre les rangs pour vérifier que les images correspondaient à ce qu'il avait demandé, prenant le chemin le plus long possible avant d'arriver jusqu'à Mikan.
Le divorce récent de ses parents avait dû rendre les contours de la famille plus flous que jamais. Les parents étaient en mauvais terme, la maman avait un nouveau conjoint qui se trouvait être aussi le parrain de Mikan et l'ancien meilleur ami du papa.
Alors quand Kyoshiro l'interpela en scandant « Maître ! Mikan, elle triche avec ses photos ! », Iruka hésita réellement à l'ignorer. Finalement il s'approcha des deux enfants, alors que Mikan récupérait ses précieuses images en gonflant les joues d'indignation.
— Mais non, c'est pas de la triche, pas vrai, Maître ?
Elle lui tendit ses images avec les yeux embués de chagrin.
— C'est pas de la triche, chuchota-t-elle, j'ai deux familles.
Iruka examina la première, sur laquelle il repérait aisément la petite, au milieu de sa mère et de son parrain. Les trois avaient le nez rougi de froid et des sourires rayonnants s'étalaient sur les visages.
La seconde photo était un selfie visiblement pris par l'enfant elle-même. Elle présentait son père, bien sûr, et le colocataire source de tous ses maux. Iruka mordit l'intérieur de ses joues pour ne pas noter combien il était beau : la paire de lunettes, le nez rougi par le froid, un sourire éclairant son visage tout entier, Itachi se mariait très bien avec les deux Uzumaki, leurs cheveux flamboyants tranchant nettement sur l'image.
Mikan s'était tournée vers son camarade – tout à la fois son meilleur ami et son plus grand rival – pour énoncer, alors que le professeur s'était accroupi près de sa table :
— Y a Maman, c'est ma maman, et puis là c'est Parrain, mais Parrain c'est aussi le nouveau amoureux de Maman. Puis ensuite y a Papa, c'est mon papa, et puis y a Itachi, il vit avec nous et c'est le futur amoureux de mon papa. Ça compte.
Iruka haussa les sourcils et reporta ses yeux sur la photo, passant de l'un à l'autre des deux adultes avec étonnement.
— Ah bon ? demanda-t-il. Tu es sûre ?
Elle hocha la tête avec conviction.
— Voui. Itachi il est amoureux de Papa.
— Et ton père, il est aussi amoureux d'Itachi ?
— Pas encore, soupira-t-elle. J'y travaille. Je veux que Papa soit amoureux d'Itachi. Personne pourra dire que Itachi il est pas de ma famille.
Iruka n'avait pas vraiment prévu de faire une leçon sur la famille ce jour-là, mais en levant les yeux, examinant ses gosses, il se rendit compte de la disparité des compositions des foyers où grandissaient ses petits. Kyoshiro ne voulait probablement pas blesser son amie, mais lui-même ne pouvait présenter qu'une photo de son père et lui, il devait être envieux de Mikan qui n'avait pas un parent, mais quatre.
Il entreprit, dès lors, d'expliquer à ses élèves que chaque famille était unique et particulière, qu'aucune n'était mieux que les autres et que ce n'était pas grave de ne pas avoir la même famille que ses copains.
Le bruit de ses semelles sur le béton résonnaient dans l'immense espace du sous-sol. Une odeur tenace d'humidité s'infiltrait partout et l'effluve qui se dégageait des sucreries qu'il amenait avec lui parvenait à grand-peine à contrer le rance qui flottait dans l'air.
Nagato n'avait jamais compris pourquoi l'équipe d'Anko avait été reléguée aux sous-sols, mais c'était là-bas qu'il pouvait trouver la personne dont il avait expressément besoin. Il franchit la porte avec un sourire et salua les agents présents, la responsable levant la tête, les ailettes de son nez se plissant au fur et à mesure qu'elle humait l'odeur de sucre.
— Uzumaki, scanda Anko, toi, t'es venu demander quelque chose.
— Qu'est-ce qui te fait croire ça ? s'indigna-t-il faussement. Moi qui venais faire une visite de courtoisie…
Elle leva les yeux au ciel et s'empara des sucreries qu'il lui tendait, enfournant avec appétit une sucette entre ses dents. Elle avait pris du poids, ces dernières années, des soucis hormonaux se manifestant, mais elle n'en restait pas moins terrifiante.
Elle désigna la chaise près d'elle et il s'y laissa tomber, observant le décor. L'endroit ne changeait pas vraiment. Les bruits de claviers couvraient difficilement les sons émanant des ventilateurs et si Anko n'était pas informaticienne de formation, elle avait su s'adapter et enrichir l'équipe à merveille.
— Tu te souviens du petit service que je t'ai rendu y a quelques années ? demanda-t-il.
Gravement, elle hocha la tête. Ce petit service, comme il disait, lui avait évité de perdre son job. Elle avait commis une erreur lamentable sur un des gros dossiers de la brigade financière. Elle y était depuis longtemps, lorsque c'était arrivé, mais c'était une période compliquée pour elle et elle avait fait une boulette. Quand le commissaire avait demandé que le responsable se dénonce, Nagato avait pris la faute sur lui et le chef avait passé l'éponge, la chargeant de corriger et d'expliquer au bleu qu'il était en quoi c'était une erreur et pourquoi ça ne devait plus jamais se reproduire.
— J'ai besoin d'un retour d'ascenseur, exprima-t-il en baissant les yeux. J'ai besoin que tu me laisses accéder au FCI.
Il y eut un épais silence, pendant lequel elle releva vivement la tête, s'étouffant dans sa salive. Le FCI était le fichier central d'identités, où toute personne était recensée, qu'elle ait ou non un casier judiciaire. C'étaient des informations difficilement accessibles, que personne n'avait le droit de consulter, à moins d'être muni d'un mandat.
— Tu demandes beaucoup, là, chuchota-t-elle après s'être assurée qu'il ne plaisantait pas. Tu demandes vraiment beaucoup.
— Je sais.
Il hésita un instant, puis il rapprocha son siège, se pencha en avant et soupira :
— Mais je te jure que c'est une question de vie ou de mort. Je te demanderai pas ça si c'était pas important. C'est à propos de quelqu'un qui m'est cher.
Elle remit sa sucette dans sa bouche, donna un coup de langue pour la faire passer à droite. Jetant un regard par-dessus l'épaule de Nagato, elle secoua la tête.
— Là, de suite, je peux pas. Y a un gros truc en cours, je peux rien faire, ça se verrait beaucoup.
Elle baissa encore la voix, presque impossible à distinguer entre les sons des claviers et des ventilateurs.
— Reviens plus tard dans la semaine. J'aurai moyen de t'accorder disons quinze minutes, mais là, aujourd'hui, c'est impossible, c'est mort.
Nagato grimaça. C'était assez peu, mais il ferait avec. Dignement, il hocha la tête, se relevant pour rejoindre son bureau. Quand il arriva à la porte, Anko le retint.
— Après, par contre, on est quittes !
— C'est même moi qui t'en devrai une, admit-il avec une ébauche de sourire. Merci, Anko.
Il remonta en vitesse pour poser ses congés puis s'enferma dans son bureau.
Comme il n'avait pas la possibilité d'inspecter les fichiers de suite, il pouvait tout aussi bien mettre en place l'option filature et observer un peu les allées et venues de son suspect. Quand ce serait l'heure, il passerait prendre Itachi au travail et ils récupéreraient Mikan ensemble.
Idéalement, il aurait bien besoin de trouver un élément qui permettrait de relier les pratiques du prêtre aux lettres de menace, au moins pour se confirmer que c'était bel et bien un suspect valable.
Même si, au fond de lui, il sentait que c'était la solution, il y avait toujours cette part de doute qui mettait en avant la respectabilité de l'habit et ce qu'il savait de l'homme. C'était difficile de concevoir qu'une personne aussi généreuse et tournée vers les autres pût vouloir commettre un meurtre.
Il se laissa aller dans son fauteuil, hochant la tête en direction du vide. Le mieux serait encore d'effectuer une vérification des activités du vieux prêtre.
— Tu connais le Père Danzô ? demanda finalement Nagato.
Cela faisait déjà plusieurs heures qu'ils étaient rentrés ensemble. Nagato avait eu le temps de s'entretenir rapidement avec Maître Iruka qui avait fait quelques prescriptions pour les devoirs de mathématiques en supplément. Ensuite, l'enseignant avait pincé les lèvres avant de lui demander s'il était au courant que Mikan avait orchestré tout un plan pour le mettre en ménage avec son colocataire et, éberlué, Nagato avait regardé sa princesse revenir vers eux après avoir salué Maîtresse Kaguya qui surveillait l'étude.
— Elle m'avait déjà fait part d'une intention similaire, avait-il informé en retenant comme il le pouvait son sourire. Elle est inquiète à l'idée qu'on déménage de nouveau, donc elle cherche des moyens pour éviter ça.
Maître Iruka avait hoché la tête et soupiré :
— Apparemment, d'après ce qu'elle m'a raconté, elle a mis en place la première étape de son plan. Elle n'a pas voulu m'en dire plus, cependant, et ne m'a pas décrit les autres phases. Je préfère vous alerter, au cas où elle commence à aller trop loin…
Bien entendu, Nagato avait de suite rassuré l'instituteur. Les plans de Mikan étaient généralement suffisamment flagrants pour être désamorcés sans risque, il avait l'habitude de gérer ses tentatives de surprise plus ou moins bonne.
Itachi lui porta un regard perplexe, s'arrêtant en plein milieu du couloir où il avait croisé Nagato alors qu'il se mettait en route pour la buanderie. Gêné de laisser Nagato laver ses vêtements, il avait décidé d'apprendre à le faire, plutôt que considérer son colocataire comme son homme à tout faire. Sa corbeille sous le bras, emmitouflé dans un sweatshirt aux couleurs d'Akatsuki Productions, ses pieds glissés dans des chaussons confortables et chauds, Itachi ressemblait vraiment à un étudiant légèrement vieillissant.
— Eh bien… Oui, c'est le prêtre qui officie dans l'église du quartier, répondit Itachi avec une pointe d'incompréhension dans la voix. Mais toi aussi, tu le connais, il m'a dit que tu l'avais aidé à porter ses courses, une fois et qu'il était ravi que j'aie un homme comme toi à mes côtés. Je ne comprends pas cette question.
— Je voulais dire, tu le connaissais avant de t'installer dans ce quartier ? Tu le fréquentes beaucoup ?
Réajustant la corbeille sous son bras, Itachi secoua la tête.
— Non, je sais qu'il venait parfois dans le foyer de jeunes adultes où j'ai vécu une semaine avant de m'installer chez Jiraiya, mais je ne l'avais jamais rencontré. Ce n'est pas vraiment une personne avec qui j'ai envie de nouer des liens.
— Pourquoi ?
La question avait fusé, pleine d'interrogation. C'était curieux, Itachi aimait bien rendre service et aider les gens. Nagato faillit se traiter de crétin quand son colocataire sourit.
— Luxure… Je suis promis au deuxième cercle de l'Enfer, alors, j'aime autant éviter de côtoyer un agent de Dieu sur Terre.
— Comment tu sais ça ? s'étonna Nagato.
La culture et les connaissances accumulées par Itachi le surprenaient sans cesse. C'était comme s'il savait toujours le minimum acceptable pour être intéressant sur absolument tous les sujets. Réfléchissant un instant, il mit ça sur le compte de son éducation haut-bourgeoise et sur ce qu'il lui avait raconté de sa jeunesse.
— L'Étoile du Matin, mon premier film, répondit Itachi en modifiant ses appuis sous le poids de sa corbeille.
La conversation serait semblait-il plus longue que prévue.
— Je jouais le rôle d'un jeune prêtre qui venait seulement d'entrer dans les ordres, alors je m'étais un peu intéressé au christianisme pour essayer de l'interpréter au mieux. Plus sérieusement, les sermons du Père Danzô sur les péchés, les pécheurs et l'homosexualité ne sont pas des discours qui m'inspirent. Je le salue quand je le croise et j'admire beaucoup son abnégation, mais je ne réponds jamais à ses invitations, il veut absolument que j'aille à confesse.
Son sourire s'accentua.
— Ceci dit, un jour, j'irai peut-être. Ce serait drôle, je pense, de le voir réaliser que je suis une cause perdue pour l'église catholique.
Nagato grimaça, retint de justesse sa réplique – « Oui, ben, abstiens-toi d'exciter un tueur, s'il te plaît » – puis il hocha la tête.
— Je ne pense pas qu'il ait ton sens de l'humour. Je me disais que c'était curieux que tu ne sois pas bénévole pour la soupe populaire, vu que tu adores poursuivre tous les animaux abandonnés que tu croises…
Il réalisa ce qu'il révélait en même temps qu'il était en train de le prononcer et, bien heureusement, Itachi ne remarqua pas le problème. Il roula des yeux.
— Arrête de parler de moi avec Sakura, elle sait des choses sur moi que je ne veux pas que tu saches, pour t'épargner, et parfois, sa bouche va plus vite que son cerveau.
La perche tendue était trop belle pour être ignorée.
— C'est pas moi, c'est elle, elle est intarissable à ton sujet.
Grommelant, Itachi finit par se détourner et Nagato resta figé dans le couloir un instant.
C'était déjà pas mal si Itachi ne fréquentait pas vraiment le Père Danzô. Cependant, il n'avait rien remarqué qui pût être relié à une tentative de meurtre, durant l'après-midi. Le prêtre avait seulement organisé sa soupe populaire et Nagato avait observé par la fenêtre pour le voir aller et venir dans ses cuisines. Rien de particulièrement suspect. Un couple était venu le trouver pour préparer une cérémonie de mariage. L'homme avait ensuite pas mal prié – tout du moins, c'était ce qu'avait conclu Nagato. Vraiment pas grand-chose de très excitant.
Il était parti à l'heure où Père Danzô commençait à installer ses tables et ses Bibles en libre-service. Il y retournerait tout le lendemain, en espérant pouvoir avoir n'importe quoi d'un peu suspect.
Le problème était que ce qu'il avait vu l'après-midi le faisait douter. Était-il réellement en train de se concentrer sur le bon suspect ? N'y avait-il pas un risque qu'il passe à côté d'un détail essentiel ? L'homme ne paraissait pas dangereux, il était boiteux et borgne. C'était presque insultant de le considérer comme un suspect, non ?
Mordillant sa lèvre, Nagato finit par se remettre en mouvement, marchant quelques mètres pour taper à la porte de sa fille.
— Ma chérie, le film va commencer, tu viens ? énonça-t-il avec un sourire.
— Non merci, Papa, refusa-t-elle, je vais rester pour jouer avec mes poupées.
C'était surprenant et compte tenu de ce que lui avait appris Maître Iruka – et du regard machiavélique que lui lançait Mikan –, Nagato papillonna des cils, essayant de comprendre en quoi ne pas voir le film du soir était une étape cruciale de son plan de mise en couple. Il finit par accepter le choix de son enfant, en lui disant qu'elle pouvait venir pour les rejoindre quand elle voulait.
Il referma la porte de la chambre et se dirigea vers le salon, où Itachi était déjà revenu s'installer. Il tenait un livre entre ses mains et s'étonna de voir son colocataire seul.
— Elle n'a pas envie de regarder le film, s'exclama Nagato en allumant sa console de jeu.
— Mais c'est son dessin animé préféré…
Nagato haussa les épaules, déjà happé par l'écran.
Au bout de quelques minutes, Itachi bougea, puis bougea encore sur les canapé, à la recherche d'une position confortable, Nagato fit claquer sa langue d'agacement.
— Tu me déconcentres, tu sais.
— D'habitude, je m'allonge pour lire dans le canapé, expliqua Itachi, alors j'ai du mal à trouver ma place.
Enclenchant la pause sur son jeu, Nagato pivota vers lui.
— Ben, allonge-toi. Je ne suis pas si inconfortable que ça, lança-t-il avec un peu de rire dans sa voix.
Hésitant, Itachi finit par obéir, posant sa tête sur la cuisse de son colocataire et levant les yeux.
— Je ne te gêne pas ?
— Pas du tout, pu–rée de jeu ! Pas du tout. Et moi, je ne te gêne pas ?
Itachi secoua la tête et chacun d'eux se laissa happer par son activité, oubliant presque la présence de l'autre. Le silence était seulement ponctués de quelques jurons prononcés par Nagato et le bruit des pages que tournait Itachi.
Ce ne fut qu'au bout de vingt minutes qu'un gloussement ravi provint des escaliers, suivi par le claquement d'une porte.
— Pourquoi Mikan se comporte-t-elle étrangement ?
Itachi avait énoncé cette phrase d'un air perplexe, interrompant sa lecture, levant les yeux vers Nagato qui était concentré sur l'écran. Il y eut plusieurs minutes d'un silence seulement brisé par les bruitages du jeu. Itachi finit par se réinstaller confortablement sur la cuisse de son colocataire et, lorsqu'il tourna la page, il sentit des doigts saisir une de ses mèches, le dialogue d'une cinématique résonnant dans le salon. Nagato joua longuement avec la mèche, avant de chuchoter d'un air pris sur le fait quand il croisa les yeux d'Itachi :
— J'adore tes cheveux, ils sont doux et brillants, ça donne envie de les toucher.
— Je te remercie, j'avais déjà remarqué que tu aimais mes cheveux. Alors ? Mikan ?
Nagato relâcha la mèche, récupérant sa manette de console.
— Elle a élaboré toute une théorie pour résoudre mes problèmes avec mes deux ex. Elle a même une solution.
Un sourire taquin fit frémir la commissure de ses lèvres alors qu'Itachi l'interrogeait du regard pour en apprendre plus.
— Elle pense que si je tombe amoureux de toi, tous mes problèmes avec Yahiko et Konan seront réglés, lâcha-t-il d'un air amusé.
Itachi laissa un rire léger franchir ses lèvres.
— Pourquoi moi ?
— Parce que tu diras pas non pour être mon amoureux si je te demande gentiment et que si on est amoureux, il n'y a aucun risque pour que tu nous demandes de partir.
Itachi déglutit et un malaise envahit la pièce face à la peur de l'enfant. Nagato baissa les yeux sur lui, le sondant rapidement, puis il revint à son récit des projets de Mikan, ses rétines sur l'écran. Ses mains bougèrent sur la manette, conduisant son pirate jusqu'à un minijeu.
— Elle a tout un plan pour parvenir à ses fins, apparemment. Je pense que cette soudaine envie de jouer toute seule à la poupée en fait partie, d'ailleurs. Ça doit être parce que les amoureux restent entre eux, parfois, ou quelque chose dans le genre.
L'amusement s'entendait tellement dans sa voix qu'Itachi ne put pas se sentir blessé des propos de son colocataire. Il était de toute façon trop bien installé pour s'offusquer.
— Et connaissant ses intentions, tu l'as laissée faire ?
— J'aime vivre dangereusement, s'amusa Nagato.
— Vous pourriez me demander mon avis, tout de même, bougonna Itachi.
Mais les dessins qu'il traçait de son majeur sur le bras qui l'enlaçait en disait déjà long sur ce qu'il pensait de ce plan. Nagato lui jeta une œillade taquine.
— Ni toi ni moi n'avons voix au chapitre. Je déteste ce minijeu, grommela-t-il, changeant totalement de sujet. Je ne sais pas pourquoi je m'entête.
Itachi tourna une page de son livre.
— Parce qu'il y a un succès à la clé et que tu détestes encore plus laisser un succès verrouillé sur un de tes jeux, quand bien même ce serait le passage le plus pénible au monde.
Nagato soupira dramatiquement.
— Tu commences à trop bien me connaître. Rappelle-moi de frapper Kiba.
Il était celui qui, en dépit des avertissements répétés de Zetsu – « Non, vraiment, pas de jeux vidéo pour Nagato, il a un problème d'addiction » – lui avait tout de même offert cette console.
— Promis, affirma Itachi d'une voix lointaine en tournant la page de son livre. T'as encore trente minutes de jeu, après, j'éteins.
C'était un système qu'ils avaient mis en place. Quand Nagato jouait, Itachi surveillait le temps qu'il passait devant l'écran, pour éviter qu'il s'y perdît.
Nagato grogna, replaça un peu puis il soupira, reportant son attention sur son jeu, se demandant s'il voulait vraiment dépenser le reste de son heure de jeu quotidienne à batailler sur un minijeu nul. Son appétence pour les défis prit le dessus et il décréta que ça valait le coup.
Le lendemain serait une journée chargée.
À bientôt !
