Bonsoir ! Je suis un peu en retard, je profite des amis et je prépare mon agreg qui arrive. J'espère que ce chapitre vous plaira, on approche du dénouement de cette enquête !
Rar : Ilona
Merci beaucoup pour ta review ! Je suis ravie que tu sois contente de l'évolution de leur relation, et j'espère que tu apprécieras aussi la suite.
Glass Animals - "Young And Beautiful" (Lana Del Rey cover)
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Clint va chercher Nadia Cardenas en cellule avec un air volontairement furieux et fatigué. Il claque la porte de la salle d'audition derrière lui, et s'assoit en face de la femme épuisée et bouleversée. Il tapote pendant quelques instants son stylo sur la table, puis marmonne :
"Je suis déçu, madame Cardenas. Vous auriez pu tout nous dire depuis le début, on aurait déjà chopé le type qui vous a piégés, vous seriez libre, et lui à votre place. Quant à moi, je serais en train de planifier mon week-end avec mes gamins.
-Je vous ai déjà tout dit, lieutenant Barton, murmure-t-elle faiblement. Mme Evans m'a dit qu'elle avait changé son testament, nous manquions d'argent, et nous avons planifié de la tuer.
-Non, vous ne manquiez pas d'argent, vous, vous ne trempez pas là-dedans, mais votre mari est dans un réseau. Il gagne largement de quoi vous faire vivre. Vous aviez de l'affection pour Evelyn, elle vous a offert un poste au cinéma. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi vous protégez le type qui l'a poignardée avec votre couteau de cuisine."
Nadia se met à pleurer en silence et en gardant les yeux ouverts. Clint laisse la tension peser, se contentant de la regarder. Au bout d'un moment, il ajoute :
"Evelyn était bavarde, d'après son entourage. Elle vous aimait beaucoup, elle vous a sûrement dit des choses. Je sais que vous savez qui c'est. Dites-le-moi. Qui l'a séduite, qui lui a menti, qui l'a épousée pour toucher l'héritage ?"
Les larmes de Nadia continuent de couler, et son menton commence à trembler. Clint sent que ça vient, et il se lève brutalement pour se pencher sur elle et crier :
"Est-ce que je dois vous emmener à la morgue pour la voir ? Est-ce que je dois demander au légiste de soulever le drap, d'énumérer combien d'organes ont été touchés, de vous dire qu'elle a souffert ? Qu'est-ce que je dois faire, bon sang, pour que vous arrêtiez de mentir, et que vous me dites qui a fait ça ? Dites-le moi !
-Arrêtez, murmure-t-elle en commençant à trembler.
-Elle a eu mal, Nadia, ça se voit sur son visage. Atrocement mal.
-Arrêtez !" lui crie-t-elle.
Elle se recroqueville, cache son visage dans ses mains, et commence à sangloter.
Le barrage a cédé, et Clint se rassoit. Il inspire plusieurs fois pour se calmer, et remue des épaules pour ne pas frissonner.
Nadia finit par hoqueter doucement :
"Ils... se sont... mariés à Las Vegas. Pour qu'il y ait moins de traces. Elle ne voulait pas que son fils ne sache, et lui voulait que personne ne sache.
-Quel est son nom ?
-Je ne peux rien dire. Ou il tuera ma mère, et mon mari mourra. Il sait où elle habite, et tous ses rituels.
-Nadia. On parle d'un homme isolé. Si on l'arrête, il ne fera pas de mal à votre maman ou à votre mari, qui est d'ailleurs un homme costaud. Répondez-moi. Est-ce que c'est vous, qui lui avez dit qu'il avait le temps de la tuer à la fin de la séance ?"
Elle étouffe un gémissement, et secoue énergiquement la tête.
"Il l'a donc su tout seul, conclut doucement Clint. Est-ce qu'il travaille au cinéma ?
-J'ai trop peur... Laissez-moi aller en prison. C'est mieux pour tout le monde. Mon mari aussi préfère. S'ils apprennent qu'un type le fait chanter lui et sa femme, ils le tueront.
-Qui ça, "ils" ?
-Ses patrons. Je ne peux rien vous dire, rien, il sait aussi qui ils sont, il leur dira. Je ne peux pas perdre mon mari, lieutenant, il fait des choses illégales, mais on s'aime.
-Nadia...
-Je ne peux pas vous dire qui c'est. Trouvez-le, mais assurez-vous qu'il croit que vous avez deviné seuls. Je vous en supplie."
Clint tape un instant son crayon sur la table en le regardant. Fais chier, tiens.
Nadia relève faiblement la tête, et murmure :
"C'est vrai, qu'on voit qu'elle a souffert ?
-Ca s'est passé vite, souffle-t-il. Elle n'a pas eu mal longtemps. Merci pour votre aide."
Clint se lève sans rien ajourter, et referme doucement la porte derrière lui. Il entre dans la salle d'enregistrement, et il voit Loki regardant leur suspecte effondrée sur la table.
"Bien joué, murmure-t-il en sortant son paquet de cigarettes de sa poche.
-Je me sens comme une merde, soupire le lieutenant. Allez, on va aider Tony à faire avouer le mari.
-On a le temps pour une pause ?
-D'accord, mais tu m'en donnes une, affirme Clint en pointant la clope qu'il vient de prendre entre ses doigts.
-Tu ne fumes pas.
-Pas depuis l'école de police, non. Mais là, j'en ai besoin, et tu me donnes envie depuis que tu es arrivé."
Loki ne rajoute rien et tend une cigarette à Clint, qui la prend et la fait rouler entre ses doigts. Putain, il aurait aimé ne pas devoir dire ces horreurs, ça ne lui a pas fait du bien.
Ils fument en silence sur le balcon, en regardant les Newyorkais s'activer comme si de rien n'était.
Quand ils pénètrent dans la seconde salle d'enregistrement, ils voient Tony s'énerver tout seul contre le roc silencieux qu'est Monsieur Cardenas. Clint sort, et frappe doucement à la porte pour qu'il les rejoigne et qu'ils s'échangent les informations. Son ancien mentor a l'air frustré au possible, et supplie :
"Dis-moi que contrairement à moi, tu as obtenu quelque chose.
-Nadia a craqué. Quelqu'un les fait bien chanter, mais elle refuse de dire qui. Il menace de tuer sa mère, et de dire aux patrons de son mari qu'il l'a piégé comme un bleu. Selon Nadia, ils n'apprécieraient pas trop ça. Je la crois. D'habitude, sur ce genre de gars, les avocats arrivent comme une nuée d'étourneaux."
Loki se force à garder sa langue et à ne pas confirmer. Il n'est pas censé savoir tout ça, et il a eu tort de mentionner son frère en présence de Tony. Son collègue sait effectivement très bien qu'ils n'ont pas de contact depuis des années.
"D'accord, souffle Stark, je comprends mieux. C'est ce qu'il m'a dit aussi. Il ne lâchait pas un mot, et j'ai fini par lui dire qu'on savait qu'il emballait de l'héroïne ce soir-là. Il m'a simplement demandé de qui on tenait l'info, et comme je n'ai pas voulu dire, il a maintenu qu'il ne dirait rien non plus. Il m'a aussi avoué qu'il valait mieux pour sa vie qu'il soit en prison, et qu'il ne reviendrait pas sur sa déclaration. Il a terminé en disant qu'il ne parlerait qu'en présence de son avocat, mais je ne crois pas qu'il espère encore qu'il va se pointer.
-Donc il va bien se faire tuer par ses patrons s'ils apprennent qu'il s'est fait piéger."
Loki comprend soudain que Viktor ne veut pas qu'il innocente Cardenas pour qu'il puisse recommencer à travailler pour lui. Il veut simplement le faire sortir du département Crim', où ils n'ont pas assez de monde pour l'éliminer discrètement. Qu'il soit libéré ou mis en prison, Julio va mourir.
Il s'efforce de continuer à suivre la conversation, il digèrera ça plus tard.
"Elle t'a dit quelque chose, quand même ? persiste Tony.
-Rien. Si ce n'est que ce n'est pas elle qui lui a dit pour le détour du projectionniste. Si on reste sur cette théorie, c'est un employé du cinéma.
-Retournons à ton tableau pour voir qui ça nous laisse.
-S'ils ne diront plus rien, glisse Loki, je vais ramener les Cardenas en cellule.
-Merci, Loki", lance Clint sans un regard en se dirigeant vers l'open space.
Loki vérifie qu'il n'y a personne en salle d'enregistrement, éteint les caméras, et ferme la porte à clef en sortant. Il entre ensuite dans la salle d'audition, et referme la porte derrière lui.
Julio lui jette un œil, puis se lève d'un bond et se recule contre le mur, ses mains levées devant lui.
"Non, pas si tôt que ça...
-Je ne suis pas là pour vous tuer, veut le rassurer Loki en levant ses mains pour montrer qu'il n'a pas son arme. Calmez-vous, et ne faites pas autant de bruit. Si vous faites sauter ma couverture, là, oui, je vais devenir menaçant."
Julio le fixe quelques secondes, puis se rassoit silencieusement.
"Je ne comprends pas, souffle Loki. Vous êtes un atout pour Viktor, il vous garde malgré votre peine de sursis. N'importe quel tueur à gage de chez nous pouvait tuer ce type pour vous.
-Disons simplement que le patron n'aime pas garder quelqu'un longtemps. On finit toujours par en apprendre trop."
Le trafiquant lève les yeux, et les plante dans les siens avant de lancer :
"Pour être honnête avec vous, cela m'arrange si vous ne trouvez pas qui a vraiment tué cette vieille dame.
-Vous serez plus en sécurité dehors, souligne Loki.
-Je ne serai en sécurité nulle part.
-Vous êtes sous surveillance au moins jusqu'au procès. Il n'osera pas vous tuer dans ce délai, cela attirera trop d'attention."
Cardenas se passa les mains sur le visage, visiblement épuisé. Voir un type aussi musclé et tatoué soupirer doucement en sentant la mort arriver était absolument effrayant. Il finit par murmurer :
"Vous savez ce que c'est, la protection des témoins ? Surveillance sept jours sur sept vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ça veut dire voir son agent de probation vingt minutes toutes les semaines. Je le sais, celui qui s'est fait buter avant moi était en conditionnelle."
Loki baisse les yeux vers la table. Il sait tout ça parfaitement, c'est lui qui a balancé le corps du prédécesseur du Julio dans le fleuve.
"C'est gentil, numéro cinq, reprend Cardenas, mais vous ne pouvez pas m'aider. Laissez-nous aller en prison, au moins, ma femme survivra. Je sais qu'ils n'ont personne dans les prisons pour femmes, parce qu'à part numéro quatre, on n'en emploie pas."
La taupe se masse les tempes. Il sait que Julio a raison, qu'il est mort quoiqu'il arrive, mais il pense à Evelyn, et refuse que son tueur reste dans la nature. Il finit par souffler :
"Et que dites-vous de me balancer qui est le véritable tueur si j'aide votre femme à quitter le pays ?
-Non. N'y voyez rien de personnel, je sais juste pour qui nous travaillons, et je préfère la solution où je sais de source sûre que ma femme reste en vie. Désolé, mais si vous voulez nous relâcher, ce sera sans mon aide.
-Très bien."
Il se lève, et remet les menottes à monsieur Cardenas. Il le fait sortir d'audition, et déverrouille la porte de la salle d'enregistrement. Il le redescend à sa cellule provisoire, et en refermant la grille sur lui, glisse :
"Désolé. J'aurais voulu vous aider."
Julio a tressaillé au premier mot, car il a cru que Loki s'excusait de sortir son arme pour le tuer. Il reste un instant perplexe, puis ose dire :
"Je comprends pourquoi ils vous appellent poussière-dans-l 'œil. Vous êtes un type bien. Trop pour ce métier."
Les yeux de la taupe se plissent, et il le foudroie du regard. Si Tony avait été là, sa couverture était foutue. S'ils n'avaient pas été à la Brigade, Loki lui aurait mis une balle entre les deux yeux.
"Quand on vous abattra, saluez votre prédécesseur de ma part."
Il remonte dans l'ascenseur en pensant à Nadia. Cardenas avait raison, ils n'avaient personne dans les prisons pour femmes, son épouse avait une chance de s'en sortir si elle était reconnue complice du meurtre d'Evelyn.
Un tueur pour une victime.
Il imite Clint et marmonne entre les parois de métal :
"Fais chier, tiens."
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Il redescend la femme dans sa cellule sans prononcer un son, et s'efforce d'arrêter de réfléchir. Quand il revient des étages inférieurs, Clint est en train d'enfiler sa veste et Tony installe son holster.
"Tu en as mis du temps, note son coéquipier.
-Nadia avait recommencé à pleurer, j'ai attendu qu'elle soit un peu calmée.
-La recherche du certificat de mariage n'a rien donné, donc on retourne au cinéma, l'informe Clint. C'est forcément l'un d'entre eux. Je ne sais pas encore comment on va trouver qui l'a fait, mais un peu de pression ne fera pas de mal.
-Peut-être qu'en regardant le modèle du projecteur, on pourra voir si le projectionniste avait besoin d'être sur place pour enlever la bobine.
-Le film était déjà fini, non ? Il avait dit qu'il était descendu une fois le générique terminé.
-Oui, tu as raison, reconnaît Tony en arrêtant de se préparer."
Il réfléchit un instant en regardant dans le vide, marmonne "le générique terminé", puis lance :
"Allez-y, vous. Moi, je retourne faire un tour chez Evelyn. On ne savait pas ce qu'on cherchait la dernière fois, mais comme elle garde absolument tout, elle doit forcément avoir des souvenirs, une preuve de son amourette. Peut-être une facture, un mot, une photo.
-Bonne idée, commente son ami. Je te tiens au courant si tu dois toujours venir nous rejoindre, ou si on laisse tomber. Prends ton arme, si jamais il y a des visiteurs. "
Clint s'arrête à son tour, et soupire :
"Si on ne trouve rien ce soir, on n'aura plus que demain matin pour empêcher la prison aux Cardenas."
Loki compte d'abord rester silencieux, mais en voyant les yeux gris douloureux, il souffle :
"Si cela peut te consoler, Clint, Julio a l'air bien content d'aller en prison. Ses patrons n'envoient aucun avocat, ils ont l'air de vouloir se débarrasser de lui.
-S'ils n'envoient aucun avocat, ça veut dire qu'ils veulent qu'il aille en prison pour pouvoir l'éliminer discrètement là-bas, explique sombrement le lieutenant. Au moins, dehors, Nadia et lui auront peut-être une chance de s'en sortir. Ils prendraient la voiture, et iraient voir en Californie si la météo est meilleure."
Clint n'est pas dupe, comprend Loki. Il sait tout comme lui que Julio va mourir si leurs aveux partent demain. Mais Loki ne va pas lui dire qu'il est également fichu s'ils sont libérés. Julio en sait trop pour que Viktor le laisse prendre un aller simple pour San Francisco.
"On avance, Clint, l'encourage-t-il. On va y arriver.
-Allez-y, je vous appelle si je trouve quelque chose, annonce Tony en partant.
-Ah merde, réalise soudain Clint, on n'a qu'une voiture, et on n'a pas l'autorisation pour la camionnette.
-On peut prendre ma moto, propose Loki, c'est l'heure de pointe, on arrivera plus vite.
-Tu as deux casques ?
-Prends le mien, fait-il en le lui tendant.
-Pas de regrets, Tony ? taquine Clint en prenant le casque noir.
-Pas du tout ! Je vais être dans les bouchons, mais au moins, je suis sûr d'arriver en vie !"
Loki a un sourire en coin en se remémorant le torrent d'insultes qu'avait déversé Stark la dernière fois qu'il était monté sur sa moto.
"J'ai l'habitude, avec Natasha, affirme Clint en se dirigeant vers l'ascenseur. Allez, attrapons ce salopard."
En bas, au garage, Loki démarre sa moto en tentant en vain de se laisser atteindre par l'adrénaline et le soir qui tombait sur la ville agitée. Il ne pense qu'à Julio Cardenas, et de l'annonce de sa mort qu'il va avoir dans les semaines à venir.
Il se souvient soudain d'une citation d'un bouquin de Stephen King qu'il a lu quand il était ado, et qui a toujours suscité chez lui une fascination morbide. C'était quelque chose comme :
"Tu sais ce qu'on dit sur la mafia, John", ou bien était-ce Georges, songe-t-il en ralentissant devant un feu rouge. "Tu mets le pied dedans, tu n'en sors plus que les pieds devant."
C'est vrai pour le type avant Julio, pour Julio, et très probablement pour lui-même.
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Un mois plus tôt, Evelyn Evans avait profité des propres vacances d'hiver de son fils, dans le nord, près de la frontière canadienne, pour l'appeler et lui dire qu'ils pouvaient partir le soir-même.
Il leur avait pris deux billets d'avions pour Las Vegas. Il alla la chercher en taxi pour qu'ils se rendent tous les deux à l'aéroport, et dans l'avion, lui laissa le hublot. Elle se pencha pour mieux voir le coucher du soleil, qui distillait ses milliers de couleur dans le ciel immense. Elle admira la mer de nuages durant tout le vol, sa main serrée par la sienne sur leur accoudoir.
Le taxi les emmena de l'aéroport jusqu'à leur hôtel dans le centre-ville, et tout était comme dans les films. Les néons éblouissants, rouges, bleus, verts, clignotaient dans la nuit, centaines d'enseignes de restaurants, de magasins de souvenirs, et bien sûr, de casinos. Elle se rappela Rain Man, Casino, Ocean's Eleven, et ses yeux brillèrent.
Ils s'inscrivirent sur internet, payèrent soixante dollars, et se marièrent à la Little White Wedding Chapel. Elle portait des talons hauts blancs, une robe blanche avec un voile, et des fleurs de cerisier dans les cheveux. Il y avait des figurants déguisés en Elvis et Marylin qui la firent énormément rire. Son cœur battait la chamade, et en regardant les beaux yeux verts de son second mari, elle se laissait envahir par un bonheur incrédule.
La nuit était glaciale, mais magnifique. Ils rentrèrent à l'hôtel, et firent l'amour jusqu'au petit matin. Elle eut une pensée pour tous ceux qui la croyaient trop vieille pour ça, pour être amoureuse de nouveau, pour faire l'amour à quelqu'un de nouveau, pour être heureuse de nouveau. Tous ceux qui voulaient l'enfermer dans une maison de retraite comme si cela lui était désormais interdit, comme si elle avait déjà cessé de vivre.
Le lendemain, comme de coutume, ils allèrent au cinéma. La salle était immense, et elle crut qu'elle n'allait jamais pouvoir sortir du fauteuil tant il était profond et moelleux. Ils repassaient Casino Royale, avec Daniel Craig. Son cœur s'emballa à chaque scène de combat ou de course poursuite, comme lors de sa première séance de cinéma.
Ce fut un séjour idyllique, qu'elle revoyait dès qu'elle fermait les yeux. Mais quand son second mari la poignarda à sept reprises dans le cinéma où ils s'étaient rencontrés, elle se haït d'y avoir cru. Ses dernières pensées furent pour son fils, qu'elle laissait sans un adieu, et pour son vrai mari, qu'elle allait revoir.
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Tony a quelques jurons colorés en garant sa voiture. Il a presque mis une heure à parvenir à l'immeuble de leur victime, en empruntant pourtant tous les raccourcis et petites rues qu'il connaît.
Arrivé devant l'interphone, il réalise qu'ils ont oublié de demander le badge à monsieur Evans. Il a également oublié la tireuse à scellés, dont il aurait eu besoin après avoir enlevé ces derniers.
En soupirant doucement, il rappuie sur tous les boutons de l'interphone, et répète qu'il a oublié ses clefs. Un grand-père lui rétorque un "encore ?"" assez énervé, mais lui ouvre tout de même, et Tony secoue la tête en trouvant les gens dangereusement naïfs.
Les scellés sont toujours en place quand il se poste devant l'appartement, et il en retire le moins qu'il peut pour entrer.
"Qui va là ?! crie tout à coup quelqu'un derrière lui.
Il se retourne, et la voisine d'en face le menace d'une arme à feu. Il lève les mains en l'air, et lance :
"Lieutenant Stark, brigade criminelle de New York. On s'est vus, l'autre jour.
-Oh ! Pardon ! Souffle la dame en relevant son arme. Désolée, je suis un peu tendue, je n'ai pas envie que quelqu'un vole les affaires d'Evelyn. Elle va bien ?
-Merci pour votre vigilance, madame. Vous faites du bon travail. Mais évitez de pointer ce pétard sur tout le monde, s'il vous plaît. Vous avez un permis, au moins ?"
La voisine referme doucement la porte sans répondre, et il soupire. Il n'a pas le temps de dresser une amende de port d'arme non réglementé, et n'a de toute façon pas le formulaire sur lui. Il entre dans l'appartement démodé et vide en marmonnant :
"Bon. Si j'étais une vieille dame de presque quatre-vingts ans, où est-ce que je mettrais les souvenirs de mon amant et moi."
Il balaie la pièce du regard, et se dirige vers la chambre. C'est personnel, intime, et il ne faut pas que son fils puisse tomber dessus par accident. Il faudrait un endroit secret, mais pas secret comme une boîte mystérieuse, où on se demanderait ce qu'il y a dedans.
Il se plante devant la commode, et en ouvrant les tiroirs des sous-vêtements, murmure un :
"Pardon, Evelyn, mais j'ai vraiment besoin de cette preuve."
Il fouille un instant, puis en retire un string rouge avec un sourire amusé et admiratif. Il n'a aucun souvenir de ses grand-mères, mais il aurait aimé qu'elles vivent la vie trépidante d'Evelyn, sa mort douloureuse en moins.
Sous les culottes, il trouve une enveloppe, et murmure :
"Bingo."
Il la sort avec un geste impatient, et l'ouvre. Il s'agit d'une photo en couleur. Evelyn, habillée en robe de mariée meringuée, y pose avec un homme et un sourire immense. Ils sont entourés d'une femme en robe blanche avec des cheveux blonds ondulés, et d'un homme avec une banane noire et des lunettes de soleil.
"Un vrai mariage à Las Vegas.", songe-t-il avec un sourire amusé et réprobateur.
Ils n'avaient rien trouvé dans les fichiers de la mairie, ils se torchaient avec l'administration là-bas. Les deux seuls à avoir le certificat de mariage devait être la victime et son meurtrier.
Il scrute la photo en examinant le visage de l'homme en costume aux bras d'Evelyn. Le type lui semble familier. Il semble avoir des yeux clairs, et des pattes d'oie au coin des yeux qui lui donnent un air aimable.
"Putain.", s'exclame-t-il en sortant son téléphone pour appeler Clint.
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"The crazy days, the city lights
The way you'd play with me like a child"
Lana Del Rey - "Young and Beautiful"
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Suite et fin de l'enquête au prochain chapitre ! Prenez bien soin de vous, et bonnes vacances si vous en avez.
