Sa sacoche pesant lourd sur son épaule, Hermione ressortit de la bibliothèque quelques instants avant sa fermeture, son devoir de Runes achevé. Elle y avait passé la journée enfermée à travailler. La confession de Sirius de la veille avait été repoussée au fond de sa mémoire. Le jeune femme avait été beaucoup trop paniquée pour réagir rationnellement, et avait tenté d'oublier cet instant de toutes ses forces, se plongeant dans l'étude.
Le même problème se posait encore et toujours. Il l'avait faite céder pour le bal de Noël, puis pour commencer une véritable relation, mais ce qu'il avait avoué hier était toute autre chose.
La stabilité de leur relation n'avait pas pour autant rassuré Hermione quant à leur futur ensemble. La lionne occultait tout simplement ce qui pourrait arriver après Poudlard. Sirius l'avait convaincue de profiter du temps dont elle disposait, de vivre sans penser aux conséquences futures, et elle avait suivi ce modo en acceptant ses avances. Mais les trois mots qu'il avait lâchés hier donnaient une toute nouvelle dimension à ce qu'il se passait entre eux.
Hermione considérait que Sirius, une fois leur mission achevée, se détournerait d'elle. Les six mois qu'elle avait passés dans cette époque ne lui donnaient pas pour autant le sentiment d'être chez elle. Poudlard serait toujours Poudlard, soit. Mais elle n'avait aucune existence légale. Elle était bloquée, ne pouvant pas retourner en 1998, et dans l'incapacité de continuer sa vie après l'obtention de ses ASPICS. Et fabriquer de faux papiers au Ministère était inenvisageable. Ainsi, comment pourrait-elle se voir avec Sirius sur le long terme ?
Les révélations qu'elle avait faites la veille étaient bénignes. Entretenir et faire grandir sa relation avec lui impliqueraient de se confier bien davantage. S'il était patient pour le moment, sa curiosité ne se tairait pas éternellement. Trop de parts d'ombre demeuraient encore à son propos.
Hermione emprunta le chemin vers la salle commune des Gryffondor et monta distraitement les marches, alors que les escaliers bougeaient comme à leur habitude. Cependant, ils avaient apparemment décidé de n'en faire qu'à leur tête et la jeune femme se retrouva en face d'une certaine porte en bois imposante, au 3ème étage.
Posant une main tremblante sur la poignée, elle la tourna et poussa dans un léger grincement, puis s'avança dans une salle obscure. Un pas de plus et un flambeau s'alluma brusquement à sa droite. Elle laissa tomber son sac à terre dans un bruit lourd avant de se diriger vers la flamme. Un deuxième s'incendia, puis un troisième, et un quatrième. Lequel illumina un mur là où la jeune femme attendait une porte. Elle se laissa tomber à genoux, une unique larme roulant sur sa joue. Levant sa main droite, elle caressa du bout des doigts la surface froide, avant de venir appuyer son front contre la pierre grise.
Elle avait espéré revoir cette porte qui avait tout changé lors de sa première année. Celle derrière laquelle se trouvait un montre à trois têtes, une plante mortelle, des clefs, un jeu d'échecs, des potions et un miroir. Celle derrière laquelle se trouveraient Harry et Ron, leurs aventures ensemble et son ancienne vie. Mais devant elle se trouvait un mur, ce mur qui l'empêchait d'avancer, de retourner chez elle.
Plusieurs fois Hermione s'était retrouvée dans cet état léthargique lorsque mise face à cette fatalité. Ses souvenirs l'assaillaient et la paralysaient, déchirant son cœur. Mais elle ne supportait pas ces moments de vulnérabilité, sans pour autant parvenir à les surmonter dans l'instant.
Prise d'une soudaine rage, elle se releva, dressa son poing et frappa violemment le mur, laissant irradier la douleur de l'impact. Un glapissement de douleur lui échappa et elle serra les dents, tremblante, laissant une autre larme couler.
- Mais tu es folle ?
La voix qui l'interrompit dans sa catharsis improvisée lui était familière mais son esprit était trop embrumé pour la reconnaître proprement. Elle sentit des mains l'entourer avec attention, l'écartant du mur maudit avant de la plonger dans une étreinte réconfortante.
- Mais qu'est-ce qui te prend ? Hermione !
La voix la fit doucement reprendre conscience, mais sans pour autant la faire revenir en possession de tous ses moyens. Elle se sentit doucement amenée au sol, adossée à un torse réconfortant alors qu'une main offrait à son visage une caresse consolante.
- Merlin, Hermione, ne refais plus ça… Que s'est-il passé pour que tu te mettes dans cet état ? Tu es totalement inconsciente de te faire mal comme ça… On va à l'infirmerie.
Elle secoua la tête mollement, murmurant des propos incompréhensibles.
- Il est hors de question que je te laisse avec une main dans cet état, Sirius me tuerait.
Sans attendre son accord, il commença à bouger pour la porter mais elle se libéra de son étreinte en protestant. Elle tourna enfin la tête, plus lucide, pour découvrir le visage familier de James. Son front était plissé, lui donnant un air soucieux et il se recoiffa d'une main sans lâcher son regard.
La jeune femme se redressa en titubant, maintenant bien consciente de la douleur de sa main striée de rainures rouges alors que le brouillard de son esprit se dissipait. Les yeux bruns l'examinaient avec inquiétude mais elle balaya vite son souci.
- Je… Je vais y mettre du dictame. Ce n'est rien.
- Je m'inquiète pour ta main, mais aussi pour la raison qui t'a poussée à faire cette chose résolument stupide, indiqua James. J'irai même jusqu'à supposer que c'est la même raison qui a poussé Sirius à tenter de descendre notre réserve de whisky Pur-Feu hier soir. Et j'y tiens à notre réserve, l'anniversaire de Remus arrive bientôt.
Hermione détourna le regard. Elle n'avait absolument aucune envie d'avoir une telle discussion avec James, malgré son évidente préoccupation. Sa proximité avec Sirius biaiserait la conversation et il tenterait de régler la situation au plus sans appréhender l'entièreté de ce qui troublait Hermione. Tout du moins le pensait-elle.
- Je te ramène à la salle commune.
En voyant son regard hésitant, James comprit rapidement l'appréhension de la jeune femme de devoir rentrer faire face à leurs amis, et surtout à Sirius. Hochant la tête, il la rassura avant de l'entraîner vers leur repaire. Une fois arrivés, il la laissa s'installer dans un fauteuil avant de se diriger vers une cachette d'où il ressortit plusieurs chocogrenouilles et deux bièraubeurres. Il alla s'avachir sur un pouf à ses côtés avant de lui tendre en silence la boisson brune et un des emballages bleus et or. Hermione ne perdit pas de temps et débouchonna la bouteille avant de prendre une longue gorgée salvatrice, puis ouvrit la chocogrenouille et mordit dedans avec un plaisir non feint.
Lorsque James fut satisfait de la voir manger et boire, il se releva et se dirigea cette fois vers un petit cabinet dans un coin de la pièce, se penchant pour attraper quelque chose. Hermione reconnut des bandes médicales, devinant qu'elles avaient dû servir plus d'une fois à guérir les blessures récoltées lors de la pleine lune lorsque les Maraudeurs étaient sous leur forme d'animagus, pouvant difficilement se rendre à l'infirmerie le lendemain. Toujours sans piper mot, le capitaine de Quidditch vint se rasseoir à ses côtés avant d'entourer soigneusement sa main blessée des bandes blanches. Lorsqu'il fut satisfait de son ouvrage, il s'enfonça avec un soupir dans son siège, les bras croisés. Après quelques minutes de soupirs irrités, la jeune femme craqua et se retourna avec un regard noir.
- Ne me regarde pas comme ça, j'ai eu la réaction que je voulais. Tu es prête à parler, maintenant ?
- Fais attention, Potter.
Un rictus sarcastique s'afficha sur les lèvres du poursuiveur.
- Je te signale que je vis dans le même dortoir que Sirius. Tu ne m'effraies absolument pas.
- En effet, je devrais changer ma couleur de cheveux pour du roux. J'aurais plus d'impact après, non ?
- Lily-jolie est devenue douce depuis qu'elle a reconnu mes qualités de petit-ami, déclara James. Elle ne m'impressionne absolument pas.
- Tâche de t'en souvenir lorsque je lui dévoilerai votre prochaine blague. On verra si tu fais toujours le fier.
Un éclair de panique passa dans les yeux de James avant qu'il ne puisse se reprendre, ce qu'Hermione ne manqua pas.
- Je ne me défilerai pas pour autant. Merlin, arrête d'être aussi butée et dis-moi pourquoi je te retrouve à cogner un mur innocent un dimanche soir.
La brune soupira lassement, triturant ses mains. Elle n'avait toujours pas digéré l'aveu de Sirius malgré l'épisode du couloir du troisième étage. Elle mordilla inconsciemment sa lèvre jusqu'à ce que James la stoppe en posant une main réconfortante sur les siennes.
- Il me l'a dit.
- Je suis loin d'être fort en légilimencie, Hermione, il va falloir être plus précise que ça.
- Il m'a dit qu'il m'aimait.
Sa déclaration fit se figer l'animagus et il prit plusieurs secondes pour se remettre du choc de l'annonce, clignant des yeux fébrilement. Avant qu'un grand sourire n'étire ses lèvres.
- Mais c'est génial ! Où est le problème ? se reprit-il en fronçant les sourcils, dans l'incompréhension.
- Je ne suis pas censée… Je ne pensais pas que « ça » irait si loin. Je suis heureuse avec lui, mais il y un pas entre sortir avec quelqu'un et s'entendre dire ces mots.
- Ce n'est pas réciproque ?
- Non, je… Enfin , si… Je… Ce n'est pas le problème. Ce n'était pas censé arriver.
- Parce qu'une relation qui évolue, c'est complètement inédit ?
Le sourcil haussé ironique de James l'exaspéra au plus haut point.
- Non, ce n'était pas censé arriver ! Ce n'était pas prévu, je ne pensais pas qu'il allait s'attacher autant, je ne peux pas me le permettre ! Je ne suis pas censée être là avec vous, Poudlard n'est qu'une étape. Je ne peux pas le laisser penser que cette relation pourra continuer après, je n'en ai pas le droit. C'est égoïste de ma part. Il mérite tellement plus.
- Je vais être d'accord avec toi, Hermione, il mérite plus. Il mérite bien plus qu'une personne incapable de voir à quel point elle le rend heureux et qui se flagelle et se complait dans cette soi-disant vérité qu'elle n'est pas assez bien pour lui. Avec Sirius, c'est tout ou rien. Il ne t'aurait jamais avoué ses sentiments s'il n'en était pas certain. Et le voir rentrer hier soir abattu et en connaître maintenant la raison me brise le cœur. Je le connais par cœur, Hermione, j'ose même avancer que je le connais maintenant mieux que son frère de sang. Il n'a jamais été aussi passionné à propos de qui que ce soit. Alors que tu le rejettes parce que tu as peur de tes propres sentiments alors qu'il se met à nu devant toi, je ne peux pas l'accepter. Donc tu vas te reprendre.
Il pausa un instant, reprenant son souffle mais ne quittant pas la jeune femme du regard. Ce regard, qui même s'il était chocolat et non vert émeraude, possédait la même intensité, le même feu que celui d'Harry.
- Si tes sentiments ne sont pas réciproques, dis-lui. Il encaissera et s'en remettra avec le temps et beaucoup de whisky Pur Feu. Mais si tu ressens la même chose pour lui, tu vas aller le lui avouer et vivre votre relation entièrement. Il est hors de question que tu joues avec lui pour des prétextes idiots.
Elle déglutit face à ces propos mais en réalisa la justesse. Restait à trouver un moyen de concilier ses angoisses et sa relation avec Sirius. Car il ne servait à rien d'ignorer ses propres sentiments. James voyait bien qu'elle devrait suivre la deuxième option. La brune se pencha et récupéra sa bièraubeurre avec de la finir d'un trait, le cœur battant.
- Le dîner est passé depuis longtemps, Sirius doit être remonté dans la salle commune. On va y retourner et je vais vous libérer le dortoir pour que vous ayez une discussion tous les deux. Et inutile de fuir, je ferai appel à Lily si tu décides de te rebeller, menaça-t-il.
Elle acquiesça sans attendre, presque intimidée face au ton paternel de James. Il la laissa ouvrir la marche et la suivit sans un mot jusqu'à la salle commune, donnant l'impression à Hermione de se rendre à l'échafaud. Lorsqu'ils eurent passé le portrait, il l'avertit du regard avant de se diriger vers Remus et Peter, qui comprirent rapidement la situation. Sirius était apparemment déjà remonté dans le dortoir la jeune femme aurait le champ libre.
Montant les marches, elle se prit à égoïstement implorer Morgane de ne pas se faire rejeter comme elle l'avait pourtant fait la veille avec lui. Elle poussa la porte en bois sans frapper et entra dans le dortoir désordonné avec appréhension.
- James ? Je t'ai dit de lâcher l'affaire, sauf si c'est pour me donner une autre bouteille…
Il s'arrêta net en voyant la jeune femme se balancer d'un pied sur l'autre et son regard s'assombrit en un instant.
- Ecoute, Hermione, j'ai compris. Tu ne me retournes pas mes sentiments, je n'aurais jamais parler. Maintenant excuse-moi, mais mon ami Ogden m'attend.
- Pose cette bouteille, idiot.
Il eut un ricanement triste. Hermione s'avança prudemment vers lui et glissa une main sur la sienne, rattrapant la bouteille quasi vide avant de la poser au sol. Se relevant, elle entrelaça cette fois ses doigts aux siens et le força à se retourner.
- Je suis désolée.
Il la regarda intensément, la faisant frémir, mais ne pipa mot.
- Je n'aurais jamais dû m'enfuir comme je l'ai fait hier. C'était stupide de ma part. J'ai pris peur, non à cause de tes sentiments, mais à cause des miens. Je ne voulais pas imaginer que nous puissions avoir autant. Je suis terrifiée à l'idée de construire quelque chose. J'ai peur de ne pas être ce que tu désires, de te décevoir dans le futur. Alors j'ai fui pour ne pas avoir à affronter cela alors que j'aurais dû avoir le courage de te répondre.
Lui n'avait toujours pas bougé. Elle inspira profondément avant de redresser la tête et de lui rendre son regard, cette fois avec conviction.
- Je t'aime, Sirius.
Une flamme brilla dans ses yeux gris et il approcha sa main de sa joue. Elle se laissa caresser tendrement, cherchant son contact.
- Je suis toute à toi, si tu veux de moi.
- Toujours, lâcha-t-il avec fièvre.
Il se pencha et captura ses lèvres dans l'instant. Son baiser d'ordinaire fougueux était cette fois plus tendre mais tout aussi intense. Hermione le rompit d'elle-même au bout de plusieurs secondes, se gardant toutefois de briser leur étreinte.
- Je suis pardonnée ?
Un baiser lui répondit, apaisant ses inquiétudes. Elle y répondit avec d'autant plus de vigueur, entourant son cou de ses bras alors qu'il la saisissait par la taille. Son dos heurta l'une des colonnes du baldaquin d'un des lits et elle rit avant de sentir un élan d'affection l'envahir. Sirius n'avait pas hésité un instant avant de lui prouver qu'elle était sienne.
- Dors avec moi ce soir. Les autres ne diront rien.
Elle hocha vivement la tête et ils allèrent s'allonger sans attendre sur le baldaquin de Sirius. Le brun l'entoura immédiatement de ses bras et elle se détendit à son contact, fermant les yeux.
Lorsque les Maraudeurs rentrèrent une heure plus tard, ils découvrirent le couple tendrement enlacé, plongé dans les bras de Morphée.
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Bonsoir !
Un chapitre plus court que d'habitude, chargé de sentiments lyriques... Votre avis ?
Que devrait-il arriver après cet épisode selon vous ?
A dimanche prochain,
Cassiopeia Von Black
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