Hé oui, vos yeux ne vous abusent pas : un nouveau chapitre sort dans le même mois. *Sortez le champagne*

Merci aux reviewer et aux lecteurs !


La structure de ton esprit

Mary n'aurait jamais cru dire ça un jour mais Rogue se montrait incroyablement pédagogue, même si elle voyait les signes d'agacement évident dans ses micro expressions ou son regard. Elle se demanda si c'était parce qu'elle était une élève décente ou parce qu'il était bloqué dans son esprit tant qu'elle ne parviendrait pas le remettre d'équerre. Enfin… il pourrait sans doute le faire, mais cela signerait l'effondrement de tout ce qu'elle avait réussi à réparer jusque là. Elle sentait qu'il maintenait sa « chambre » à l'abri pour lui laisser le temps.

Par bien des aspects, elle comprenait mieux avec lui qu'avec sa mère. Peut-être parce qu'il occludait par le vide plutôt que par les souvenirs et qu'elle se reconnaissait plus dans cette méthode.

Il lui avait expliqué que la pièce où ils se trouvaient symbolisait le dernier rempart de son esprit. C'était en le quittant quand elle s'y était retrouvée qu'elle avait tout fait dérailler sans s'en rendre compte : en réalité son esprit était déjà sérieusement endommagé et s'était protégé en « rangeant » son « inconscience» ici. Elle serait donc l'inconscient qui restait de sa conscience de l'extérieur, qui, elle avait disparue.

- Maintenant que vous avez stabilisé cette pièce, Potter, nous allons nous atteler à réparer le reste. Non, ne pensez pas à la raison pour laquelle votre esprit a volé en éclat, nous n'en sommes pas encore là. Commençons par ranger des souvenirs inoffensifs de votre enfance et faisons ça chronologiquement.

- Pourquoi ?

- Parce que les souvenirs se complexifient avec l'âge et l'apprentissage.

- Logique. Et que voulez vous dire par « ranger » ?

- L'occlumancie est utilisée en première intension pour se défendre des agressions mentales extérieures. Elle a aussi une seconde branche moins utilisée qui sert à structurer un esprit. Pour réussir à sauver le vôtre, il faut que nous établissions une toute nouvelle structure puisque celle initialement présente a visiblement été détruite.

- Et je les range comment ? Comme je range ma chambre ? demanda Mary, un brin ironique.

- Ca peut–être un exemple, mais il ne semble pas que cela soit adapté à un esprit presque adulte. Vous risqueriez de manquer d'espace, choisissez quelque chose d'évolutif.

- Quel mécanisme de rangement utilisez-vous ?

Le sombre professeur pinça les lèvres comme s'il se retenait de lui balancer une remarque cinglante et elle grimaça.

- Excusez-moi, c'était peut-être inconvenant ?

On parlait de la structure même de son esprit : difficile de faire plus intime. L'excuse sembla étonner, mais satisfaire le sorcier.

- Je me disais juste que ce serait plus facile à appréhender si j'avais un exemple concret.

- La structure de mon esprit est semblable à la réserve d'une salle de potion, finit-il par lâcher après un long silence. Les souvenirs sont rangés dans des flacons et je les visualise en les déversant dans un chaudron. Choisir quelque chose qui vous est familier est plus simple… Il est difficile d'en changer par la suite alors réfléchissez bien.

- Hum… réfléchit-elle. Comme ça, ça vous permet de rajouter des étagères facilement et d'attraper les fioles qui vous intéressent de visualiser au besoin.

C'était vraiment très intéressant. Mary laissa son regard voguer sur la pièce qui l'entourait tout en imaginant à quoi devait ressembler l'esprit de son professeur de potion. Cela ne lui conviendrait pas car, même si elle aimait les potions et y était douée, elle les voyait plutôt comme un moyen de parvenir à ses fins plutôt que comme une véritable passion.

Son regard tomba sur la bibliothèque présente dans sa chambre où étaient soigneusement rangés ses livres d'enfances ainsi que tous les manuels de Poudlard jusqu'à sa 5ème année… Elle aimait lire et c'était un livre qui l'avait perdue…

Quelque chose tapa à nouveau sur l'extérieur de sa chambre d'enfant, et Rogue fronça les sourcils, la fusillant du regard. Contrite, elle grimaça à nouveau avant de dire :

- Une bibliothèque. Ce sera une bibliothèque.

- C'est un choix potable.

C'était un excellent choix, protesta-t-elle intérieurement. Facile d'ajouter des rayonnages, facile à classer, facile de prendre un livre et de l'ouvrir pour revivre un souvenir. Mais sans doute avait-il du mal à lui dire quelque chose de positif alors elle s'en contenta.

- Comment ça marche ? Qu'est ce que je dois faire ?

- Fermez les yeux comme précédemment. Vous savez à présent vider votre esprit de toutes pensées parasites. Commencez à visualiser votre bibliothèque. A quoi ressemble la porte d'entrée, comment sont le sol, les murs, le plafond. L'éclairage. Les rayonnages. Il faut que vous utilisiez vos 5 sens. Ne laissez rien au hasard : tout doit être aussi réel que si vous entriez dans la bibliothèque de Poudlard physiquement. Il s'agit de la future structure de votre esprit, nous ne pouvons nous permettre de laisser des bases instables. Prenez votre temps.

Rogue observa la Potter assise en tailleur en face de lui se concentrer et obéir sans protester. En cela, elle faisait preuve de bon sens. Après un temps infini, il vit une porte commencer à se dessiner sur le mur derrière elle. Il s'agissait d'une grande porte à l'air antique, en bois rougeâtre qui ressemblait à de l'acajou. Des pierres précieuses orangées apparurent, formant dessus un long serpent aux yeux rouges. Personne n'ignorait à Poudlard qu'elle avait un serpent familier, bien que lui-même ne l'ait jamais aperçu : si cela avait été le cas, il ne se serait pas privé de lui donner une retenue et de lui enlever des points parce que son animal de compagnie n'était pas autorisé. Son don pour le Fourchelangue devait toutefois faire du serpent un meilleur compagnon pour elle que tout autre animal.

Il reporta son attention sur elle quand elle rouvrit les yeux. Prudemment, elle se retourna et il ne vit pas le sourire qui s'afficha sur ses lèvres. Le résultat était tout à fait à la hauteur de ce qu'elle espérait. Ladon était l'élément principal qui lui permettait d'occluder, il était juste qu'il soit le gardien de cette porte. Elle se leva, suivit du Maître des Potions. Quand elle posa les doigts sur la porte, elle semblait vibrer sous ses doigts. Le contact du bois était aussi chaud que les pierres précieuses composant le serpent incrusté étaient froides.

- Je ne vois pas de serrure ou de clenche Potter, comment compter-vous entrer ou sécuriser cette porte ?

Le « petite idiote » était sous jacent. Mais elle ne s'en préoccupa pas.

- Ouvre-toi, dit-elle.

Le sifflement du Fourchelangue hérissa bien malgré lui les cheveux dans la nuque du Mangemort. Ces sons lui évoquaient immédiatement le Seigneur des Ténèbres et ce n'était jamais plaisant. Il s'agissait néanmoins d'une excellente réponse à sa question : personne ne pourrait y entrer mis à part elle et...

- Avez-vous songé que le Seigneur des Ténèbres parle Fourchelangue et pourra aisément contourner ce verrouillage ?

- Oui, répondit-elle. Et si il parvient à entrer dans cette chambre, Ladon, mon familier que j'ai incrusté sur la porte ne sera pas si aisé à tromper, il aura une petite surprise.

Mary fit pivoter la porte de la bibliothèque et entra, suivit de son professeur. La bibliothèque était immense, mais simple : elle n'avait pas voulu ajouter trop de fioriture de peur d'endommager quelque chose si elle ne se montrait pas assez précise. La lumière provenait de lustres moldus, plus stables que les torches et lampes à huiles sorcières, et le sol fait d'un parquet du même bois que la porte et les étagères. Ces dernières étaient solides et montaient jusqu'au plafond. Des échelles, également en acajou, étaient fixées aux étagères et permettaient d'accéder même aux plus hauts rayonnages. Elle avait créé une seconde porte, tout au fond qu'elle avait baptisé « La Section Interdite » : elle avait visiblement pas mal de souvenir qu'il vaudrait mieux qu'elle évite de remuer, alors elle les mettrait là, derrière une porte blindée.

Ce n'était cependant pas les étagères qui l'intéressaient le plus… lorsqu'elle avait commencé à structurer son esprit, quelque chose était immédiatement apparut. Au départ, elle avait craint d'avoir faire une boulette, mais elle s'était vite tranquillisée.

- Potter, qu'est ce que ceci ?

Rogue fixait d'un air qu'elle pu juger vaguement inquiet, le puma qui venait droit vers eux de sa démarche souple. Jusque là, elle n'avait pas pu savoir en quel félin exactement elle se transformait, mais à présent qu'elle voyait sa forme d'animagus approcher, elle se dit que même si elle avait voulu un oiseau, elle était très satisfaite.

- C'est moi Monsieur, répondit-elle.

L'animal s'approcha et le sorcier sembla cloué sur place par ses yeux verts qu'il aurait reconnu entre mille. Les mêmes que Lily et que ceux de sa fille.

- Vous êtes animagus ?

- Depuis peu. Je sais que la forme d'animagus peut vivre dans l'esprit du sorcier sans problème : c'est le cas chez ma mère même si elle n'a jamais réussi à se transformer. Elle est apparue dès que j'ai fini de créer cet endroit.

Le puma se frotta à ses jambes, elle lui arrivait presque à la taille, tel un gros chat. Fascinée, Mary passa sa main dans la fourrure brun-roux de son alter-égo et la trouva extraordinairement douce. Le geste était rassurant. Il faudrait qu'elle lui trouve un nom quand elle aurait réussi à réparer son esprit.

- Si Voldemort parvient à entrer ici… Elle le réduira en charpie. Il ne s'attendra pas à cela.

Certes pas, acquiesça mentalement le sorcier.

- Bien, il est à présent temps de remplir cette bibliothèque de vos souvenirs Potter. Prenons les un par un pour commencer. Quand vous aurez saisie la technique nous pourrons nous permettre d'accélérer.

- Je vais devoir revivre tous mes souvenirs ? s'horrifia-t-elle.

Et avec lui en plus ? Question violation d'intimité, elle ne voyait pas ce qui pourrait être pire.

- Si Merlin nous aide, non, répondit l'homme qui semblait éprouver la même répugnance qu'elle à l'idée. Alors concentrez-vous. Appelez à vous vos premiers souvenirs.

Normalement, ça aurait dû bien se passer. C'est vrai, les souvenirs des petits enfants sont peu sujets à des horreurs. Mais ce que Rogue avait oublié c'était qu'il y avait bel et bien des traumatismes dans la petite enfance de Mary Potter. Et son premier souvenir… C'était celui où elle voyait Voldemort assassiner l'être au centre de son univers : sa mère.

Le choc fut le même pour les deux protagonistes. Rogue qui assista à l'assassinat de la femme qu'il avait aimé et aimait toujours. Mary à l'évènement qui avait définitivement bouleversé sa vie. Etant donné la situation, ils faillirent, bêtement, se laisser tous les deux dépasser. Heureusement, il y avait une troisième personne présente. Le puma feula et frappa le souvenir à coup de pattes furieux jusqu'à réussir à le plaquer au sol, permettant aux deux humains de pouvoir le modeler et le transformer en livre. Ledit livre était fin mais avait une couleur vert vif malfaisante qui rappelait le sortilège de mort.

Les mains tremblantes, Mary se saisit de l'ouvrage et sans y réfléchir deux fois se dirigea vers la section interdite tout au fond de la bibliothèque où elle le rangea soigneusement avant de refermer la porte qui ce scella dans un bruit retentissant.

Les souvenirs suivants furent plus faciles. Mary revécu sa petite enfance au phare entourée de ses parents d'adoption avec une douce nostalgie et l'amertume de comprendre ce que l'arrivée de Voldemort et sa mort de son père lui avaient ôté. Elle aurait tout abandonné si cela avait permis de conserver sa famille ainsi pour toujours. Combien d'autres enfants avaient perdu tout cela ces derniers mois ?

Au fur et à mesure des souvenirs, il devenait de plus en plus aisé de les façonner. Elle n'avait même plus besoin de les revivre pour qu'ils se rangent touts seuls dans la bibliothèque. Malgré le nombre conséquent de livre qu'elle créa, les étagères étaient encore loin d'être remplies.

Puis, soudainement, elle le sentit venir.

Le Journal de Tom Jedusort, ce petit carnet noir à l'aspect banal.

Il arriva directement sous la forme d'un livre et le bruit qu'il fit quand il se posa au sol résonna dans la bibliothèque comme si un rocher d'une tonne venait de tomber du plafond. Les étagères en tremblèrent et le puma montra les dents près à attaquer.

Elle ne voulait pas le toucher. Surtout ne pas l'ouvrir. Cette chose l'avait accompagnée depuis ses 12 ans. Il s'était créé entre eux un lien qu'elle ne saurait qualifier. Mais ce qu'elle ressentait quand elle pensait qu'il l'avait trahie… cette douleur insoutenable comme si on venait de lui arracher une partie de son âme.

- Potter !

Rogue attrapa la rousse par les deux bras et la secoua vivement. Il ne savait pas ce qu'il y avait dans ce livre là, mais dès qu'elle l'avait vue, elle avait cessé de l'écouter et tout avait commencé à trembler. Il sentait ses barrières d'occlumancie, qu'il avait maintenues par précaution autours de la bibliothèque et de la chambre d'enfant attenante pour éviter qu'elle ne ruine tout, étaient à présent à nouveau assaillies comme avant qu'elle n'apprenne à vider son esprit.

Quand elle leva les yeux sur lui, il y vit de l'horreur et de la douleur.

- Videz votre esprit ! ordonna-t-il sèchement en serrant de toutes ses forces les maigres bras de l'enfant dans ses mains.

Il ne savait pas ce qu'était ce livre, mais visiblement tous les problèmes venaient de là… Pourtant ils n'avaient atteint que les souvenirs datant des 12ans de la rousse. Comment les problèmes pouvaient-ils remonter si loin ? D'un autre côté, cela pourrait expliquer pourquoi le tout avait pris de telles proportions.

Mary eut du mal à obéir, du mal à visualiser Ladon et la bibliothèque. Du mal à revenir avec Rogue et le puma. Son cœur battait à cent à l'heure et des gouttes de sueur coulaient dans son dos.

- Bien, dit fermement le professeur quand la pièce eut cessé de trembler, mais sans la lâcher. Nous avons donc déniché le cœur du problème Potter. Et si vous me disiez ce qu'il y a dans ce livre ?

Horrifiée, Mary leva les yeux vers lui. Qu'allait-il dire quand il saurait ? Pourrait-il seulement l'aider ?

- Je ne peux rien pour vous si vous me cachez ce qu'il se passe. Et je n'ai pas plus envie que vous de passer le restant de mes jours dans votre esprit. Alors racontez et nous verrons ce que nous pouvons faire pour arranger cela.

Le puma vînt à nouveau se frotter contre les jambes de Mary et elle s'agrippa à sa fourrure. Le cœur au bord des lèvres, elle ouvrit la bouche. Les premiers mots furent les plus difficiles à sortir, mais ils se mirent à couler de plus en plus vite et elle raconta comment elle était devenue accro à un souvenir de Voldemort.


A suivre...