Bonjour tout le monde !
A l'aube de ce 3ème "confinement", voici la suite de cette histoire, qui arrive plus rapidement que les chapitres précédents ! En ce moment, l'inspiration est là et seigneur ce que ça fait du bien !
Comme d'habitude, merci infiniment pour vos retours sur le chapitre 28 !
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Drago prit quelques minutes avant de quitter l'atmosphère macabre et pesante de la prison. Il s'était certes attendu à ce que le fait de revoir son père après tant d'années le chamboule quelque peu, mais certainement pas à ce point là. Il était en colère contre lui-même d'avoir ainsi perdu le contrôle. Même si, au fond de lui, il ressentait un certain soulagement à lui avoir vidé son sac, il savait que son discours était vain, et que son père ne ressentirait jamais de regrets quant aux choix qu'il avait pu faire par le passé.
Une fois qu'il se fut calmé, il s'engouffra dans une des cheminées disponibles et prit la direction du bureau d'Hermione. Heureusement pour lui, elle était là, Potter installé en face d'elle. En l'entendant arriver, ils cessèrent leur discussion et se retournèrent vers lui, étonnés. Le visage d'Hermione transpirait l'inquiétude et elle se leva immédiatement pour l'accueillir tandis que Drago sortit de l'âtre en époussetant ses épaules.
- Drago ! Qu'est-ce que tu fais là ? Est-ce que…
Elle ne finit pas sa phrase, mais Drago devina sans peine ce qu'elle n'osait dire.
- Je dérange ? demanda-t-il.
- Pas du tout, je t'en prie.
Elle s'avança vers lui, et sûrement par pudeur devant son meilleur ami, se leva sur la pointe des pieds et l'embrassa tendrement sur la joue. Drago ressentit une douce chaleur l'envahir à ce simple geste. Il n'était pas vraiment habitué aux démonstrations de tendresse, mais il l'accepta cependant avec plaisir. Il en avait bien besoin, et surtout en ce moment.
- J'ai besoin de toi, annonça-t-il sans préambule.
- Vous voulez que je sorte ? demanda presque timidement Harry, qui était toujours assis devant le bureau d'Hermione.
- Non, ce n'est rien de secret. Tu lui as dit pour ma mère ?
- Oui, j'espère que tu ne m'en veux pas…
- Du tout.
Il s'installa aux côtés de Harry, en face d'Hermione qui, elle aussi, reprit sa place assise.
- Elle ne va pas bien, commença Drago. Pas bien du tout. Elle…
Il fit une pause, pas parce qu'il ne savait pas comment formuler sa pensée, mais parce que les mots le terrifiaient plus que de raison.
- Je ne sais pas combien de temps elle va tenir comme ça. Elle a commencé à délirer, à ne plus savoir ce qui était réel ou non.
- Mon dieu… murmura Hermione en se couvrant la bouche. Comment je peux t'être utile ?
- Elle demande après mon père toute la journée, mais elle est beaucoup trop faible pour aller lui rendre visite. Alors je suis allé à Azkaban ce matin pour demander une dérogation exceptionnelle pour le faire sortir, ne serait-ce qu'une journée, pour qu'il puisse la voir… et je me dis que ça lui fera peut-être du bien, que ça lui donnera assez de force pour…
Il n'arrivait même pas à concrétiser ses pensées tant lui-même croyait peu à ce qu'il disait.
- Enfin… toujours est-il que le directeur de la prison m'a dit qu'il fallait l'approbation du Magenmagot pour prendre une telle décision. Seulement on sait tous comment ça se passe. Je vais faire ma demande d'audience et elle ne sera pas étudiée avant des semaines. Surtout quand ils verront mon nom. Mais je n'ai pas ce temps devant moi, Hermione.
La compréhension passa rapidement sur le visage de la jeune femme. Elle le regardait avec une empathie qui le mettait relativement mal à l'aise. Il n'aimait pas que les gens ressentent de la pitié pour lui, cela lui donnait la désagréable impression d'être faible. Cependant, il savait que ce n'était pas vraiment cela qu'Hermione ressentait à son égard. Elle n'avait pas pitié de lui, elle partageait réellement sa peine, et c'était quelque chose dont il n'était guère coutumier.
- Oui, bien sûr, répondit-elle. Je vais aller voir Kingsley avant le déjeuner, s'il est disponible. Je vais faire en sorte que ton audience soit la prochaine sur la liste. Et je ferai tout mon possible pour que leur réponse soit positive, je te le promets.
Drago acquiesça, bien conscient qu'Hermione ferait son maximum pour l'aider. Cela le soulagea un peu, même s'il savait que la décision finale revenait aux membres du Magenmagot et qu'Hermione n'avait pas réellement son mot à dire sur la question.
- Tu as dit que tu étais allé à Azkaban, dit Harry d'un ton incertain. Est-ce que tu as vu…
- Oui.
Drago avait répondu d'une voix plus sèche qu'il ne l'aurait voulu, seulement il n'avait pas du tout envie de parler de sa rencontre avec son père. Il ne devait se concentrer que sur Narcissa : le reste n'avait pas d'importance. Et surtout, penser à Lucius était le meilleur moyen de perdre à nouveau son sang-froid, ce qu'il n'avait pas envie de faire maintenant. Les deux anciens Gryffondor parurent comprendre que Drago n'avait pas envie de s'épancher sur le sujet.
- Je dois voir le Ministre en fin de matinée, je lui dirai de t'attendre, Hermione, informa Harry.
Drago sentait le regard du Survivant sur lui, et s'il avait déjà du mal à s'accoutumer à la compassion d'Hermione, il n'était pas sûr de pouvoir supporter celle de Potter. Il détestait ce sentiment d'être celui que l'on devait plaindre. Il ne voulait pas être "celui dont la mère est en train de mourir", il ne tolérerait pas les regards de pitié dans les couloirs. Il préférait encore le mépris.
- Bon, reprit Harry en se levant, visiblement embarrassé. Je vais vous laisser, je dois retourner au Bureau. Si tu as besoin de quoi que ce soit, Malefoy.
Il lui posa une main compatissante sur l'épaule et Drago se contenta de hocher la tête. Une fois Potter sorti, Hermione rejoignit Drago qui se leva à son tour.
- Tu veux en parler ? demanda-t-elle.
- Pas vraiment, répondit-il honnêtement.
- D'accord.
Drago craignit un instant de l'avoir vexée, mais elle l'entoura de ses bras et se releva à nouveau sur la pointe des pieds pour nicher sa tête dans le creux de son cou. Drago se détendit légèrement et l'étreignit à son tour, inspirant profondément son odeur rassurante. Ils restèrent ainsi un moment, au moins jusqu'à ce que les battements de son cœur fussent calmes et réguliers. Il aurait donné n'importe quoi pour demeurer ainsi toute la journée, oublier ses problèmes et rester avec Hermione, mais il ne pouvait pas se permettre de laisser sa mère. Même si elle était avec Astoria, elle avait besoin de lui ; aujourd'hui, Drago ne pouvait pas s'octroyer le luxe d'être égoïste.
Avec regret, il se sépara d'Hermione qui lui prit néanmoins les mains dans les siennes pour le garder près d'elle.
- Comment se passe la cohabitation féline ? demanda-t-il pour détendre l'atmosphère lourde apportée par la gravité de la situation.
- Tu as le droit de demander comment va Mozza, je ne dirai à personne que tu te soucies d'elle, le taquina Hermione.
- Jamais. Alors ?
- Tout va très bien. Étonnement, Pattenrond l'adore. Je crois que Mozza lui fait ressortir son côté protecteur.
Drago sourit en imaginant la petite boule d'énergie qu'était Mozzarella s'agiter autour de la force tranquille qu'était Pattenrond. Sourire qui se fana bien vite quand les pensées de sa mère s'imposèrent de nouveau dans son esprit. Hermione nota sans difficulté le changement d'humeur et lui caressa doucement la joue.
- Je te promets que je vais faire tout ce que je peux, jura-t-elle.
- Je le sais. Mais je sais aussi que, même si elle sera sûrement heureuse de le voir, ce n'est pas une solution pour la guérir. J'ai l'impression d'organiser le dernier rendez-vous de mes parents avant qu'elle ne meure. Je n'arrive même pas à croire ce qui est en train de se passer.
Comme la veille, il sentit une boule énorme se former dans sa gorge ; pourtant, ce furent les yeux d'Hermione qui se remplirent de larmes. Elle eut cependant la délicatesse de ne rien dire. Elle était très certainement consciente que Drago n'était pas le genre de personne qui voulait entendre "ne t'inquiète pas, tout va bien se passer", quand la situation était clairement désespérée. Comme elle le lui avait promis, elle se contentait d'être là pour lui, et sa présence était suffisante à apaiser cette angoisse qu'il n'avait ressentie jusqu'alors qu'une seule fois dans sa vie : lorsque Voldemort lui avait donné pour mission d'assassiner Dumbledore, sous peine de tuer ses parents en cas d'échec. Sauf qu'à l'époque, il avait eu un maigre espoir de réussir, il savait que cette sentence ne serait peut-être pas mise à exécution. Aujourd'hui, la mort de sa mère était presque inévitable.
- Merci, murmura-t-il finalement.
- Pour le chat ? plaisanta Hermione avec un faible sourire.
- Pour tout.
Le sourire de la jeune femme s'évanouit lentement pour laisser place à une expression on ne peut plus sérieuse sur son beau visage. Elle le regardait avec une attention toute particulière et Drago se sentit mis à nu. Ses yeux brillaient d'une lueur déterminée qu'il n'avait jamais vue dans le regard de personne, une lueur qu'il osait à peine interpréter. Les battements de son cœur s'accéléraient tandis qu'il prit le visage d'Hermione entre ses mains, caressant ses joues de ses pouces sans jamais lâcher son regard.
- Tu n'as pas besoin de me remercier, répondit-elle Je te l'ai déjà dit.
- Il va falloir me le répéter souvent.
Sans attendre de réponse, il se pencha pour l'embrasser, se laissant se perdre dans le baiser l'espace d'un instant. Pendant le temps qu'il dura, Drago eut la douce impression que plus rien n'existait à part la femme dans ses bras et tous les sentiments qu'il ressentait pour elle et qu'elle semblait ressentir pour lui. Il avait encore du mal à croire que ces derniers pouvaient être réciproques. Il avait presque envie de nier l'évidence, tant il craignait d'être déçu par la suite. Pourtant, il ne pouvait pas se tromper : la façon qu'elle avait de le regarder, de lui parler, de l'embrasser… tout ceci ne pouvait pas être feint.
Hermione brisa leur baiser, visiblement essoufflée, mais noua ses mains autour de son cou. Son regard intense le transperça de nouveau, et elle entrouvrit la bouche, l'air de vouloir dire quelque chose. Drago fronça les sourcils et Hermione balaya ses interrogations en déposant un léger baiser sur ses lèvres.
- Je t'enverrai un hibou dès que j'aurai vu Kingsley.
Drago hocha la tête, et après une dernière étreinte, il quitta ses bras réconfortants pour retourner dans l'atmosphère pesante de Sainte Mangouste.
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De retour dans la chambre d'hôpital, Drago découvrit une Narcissa plus vide que jamais. Elle était toujours allongée dans son lit, le regard dans le vague, sans aucune expression sur le visage. Entre ça et ses délires hallucinogènes, Drago ne savait pas ce qu'il préférait. Astoria se leva dès qu'elle aperçut son époux.
- Comment va-t-elle ? demanda celui-ci.
- Elle est comme ça depuis qu'elle est réveillée. Elle a refusé de manger et elle ne veut parler à personne. Pas même à moi…
Le couple observa le corps immobile de la mère de Drago. Le spectacle était affligeant.
- Et toi, comment ça s'est passé à Azkaban ? interrogea Astoria.
- Mitigé. Il me faut l'approbation du Magenmagot pour faire sortir exceptionnellement Lucius. Et comme je sais que ça peut prendre une éternité, je suis allé voir Granger pour qu'elle m'aide à accélérer le processus.
A la mention d'Hermione, Astoria se tendit imperceptiblement. Trop obnubilé par sa mère, Drago ne s'en rendit pas compte, et son épouse reprit bien vite contenance.
- C'est bien, j'espère qu'elle pourra faire quelque chose.
- Je n'en doute pas un seul instant.
Il n'y avait effectivement pas l'ombre d'un doute dans sa voix, et Astoria inspira silencieusement, gardant bonne figure devant son mari. Mais elle n'était pas dupe ; l'attachement de Drago pour Hermione Granger était évident, quand on savait où regarder.
- Tu peux rentrer à la maison, je vais prendre le relais, indiqua-t-il d'une voix tendue.
- Ça ne me dérange pas de rester, tu sais.
- Tu as sûrement mieux à faire que de rester à attendre dans une chambre d'hôpital.
Pas vraiment, aurait-elle voulu répondre, mais elle savait que c'était vain. Ce n'était même pas un mensonge. Cela faisait trop longtemps qu'elle avait délaissé ses amis, préférant s'enfermer dans la solitude et le désespoir que sa situation lui procurait. Il n'y avait guère plus que sa sœur pour supporter son allure toujours égale, au mieux, et ses plaintes, au pire.
- Tu me tiens au courant s'il y a du nouveau ?
- Bien sûr que oui.
Astoria lui offrit un pauvre sourire avant de prendre ses affaires et ouvrir la porte. Avant qu'elle n'ait pu la franchir, Drago l'interpella.
- Merci, Tori. De t'occuper d'elle.
Astoria ferma les yeux un instant, son cœur battant la chamade. Cela faisait des années que Drago ne lui avait pas donné ce surnom. Elle se retourna une fois qu'elle fût sûre d'avoir une expression neutre et lui répondit :
- Inutile de me remercier. Tu sais ce que Narcissa représente pour moi et que je serai toujours là pour elle.
Et pour toi, s'abstint-elle d'ajouter. Parce que même si elle ne se forçait pas à veiller sur Narcissa, même si son affection pour sa belle-mère était sincère, elle espérait secrètement que cela fasse écho chez Drago. Ce dernier acquiesça et Astoria quitta la pièce, le laissant seul avec sa mère.
Il s'assit près d'elle, soupirant longuement. Elle n'avait absolument pas bougé depuis qu'il était entré, même pas le regard. Il lui prit la main, caressant doucement sa peau trop fraîche pour être en bonne santé.
- Père viendra vous voir dès que possible, chuchota-t-il. J'ai fait en sorte que ce soit rapide.
Narcissa n'eut absolument aucune réaction, pas même un battement de cils.
- S'il vous plaît, Mère… accrochez-vous.
Le silence était oppressant, entourant Drago d'un voile qui l'empêchait presque de respirer. Il prit sa tête entre ses mains, reposant ses coudes sur le lit.
- Pourquoi vous infligez-vous ça, Mère ? Vous qui êtes si forte… pourquoi abandonner maintenant ? demanda-t-il plus pour lui-même, comprenant qu'il n'obtiendrait pas de réponse.
Il resta quelques secondes ainsi, avant qu'il ne sentît une caresse légère dans ses cheveux. Il releva subitement la tête et vit sa mère le regarder, la mine épuisée.
- Mère ! s'exclama-t-il.
- Tu ne devrais pas rester là, Drago, réprimanda Narcissa d'une voix basse, mais autoritaire. Tu dois avoir d'autres choses plus intéressantes à faire que de regarder ta mère mourir.
- Ne dites pas ça ! s'insurgea le jeune homme. Vous pouvez vous en sortir, cela ne tient qu'à vous ! Il faut vous battre !
- Me battre ?
Narcissa secoua légèrement la tête avant de se redresser sur son lit, se mettant en position assise.
- Pourquoi faire ? demanda-t-elle finalement, au plus grand désarroi de son fils.
- Pourquoi faire ? répéta-t-il, abasourdi. Enfin, Mère… vous ne pouvez pas demander une chose pareille…
- Je suis fatiguée, Drago. Tu n'imagines pas à quel point je suis fatiguée.
Elle détourna les yeux, et Drago ne put que déplorer l'infinie lassitude qui habitait son regard.
- Je sais que Père vous manque, mais je vais obtenir une dérogation pour qu'il puisse venir vous rendre visite. Et moi je vous promets de venir vous voir plus souvent ! Je peux me réinstaller au Manoir, au moins le temps que vous alliez mieux…
- Drago, coupa Narcissa. Assez.
Immédiatement, Drago se figea. Il regardait sa mère, attendant qu'elle continue de parler. Il pensait pourtant chaque mot qu'il venait de prononcer. Si cela pouvait l'aider, il était prêt à retourner vivre au Manoir pour prendre soin d'elle chaque jour. Il était prêt à tout, en réalité, pour revoir sa mère sourire et en bonne santé.
- Tu as toute ta vie devant toi. Il est hors de question que tu reviennes vivre à la maison dans le simple but de t'occuper de moi. En ce qui me concerne, j'ai déjà…
- Ne me dites pas que votre vie à vous est derrière vous, je ne l'accepterai pas ! Vous n'avez même pas encore fêté vos cinquante ans.
Narcissa soupira devant la véhémence dont son fils faisait preuve.
- Ce n'est pas une question d'âge, Drago.
- Alors qu'est-ce que c'est ?
Elle resta silencieuse un moment, tant et si bien que Drago se demanda si elle lui répondrait tout court. Il voyait l'épuisement transpirer de tous ses pores et s'en voulait presque de l'interroger ainsi. Mais il avait besoin de savoir pourquoi sa mère était en train de s'enfermer dans cette prison mentale qui ne pouvait aboutir que sur une funeste destinée.
- J'ai toujours eu tout ce que je désirais. Ma famille était l'une des familles de Sang-Pur les plus respectées, les rois parmi les princes. Tout ce que je voulais, mes parents me l'ont offert. Tout ce que je demandais m'était accordé. On m'a présentée à ton père quand j'avais huit ans. Il était tout ce dont la petite fille que j'étais rêvait chaque soir. J'imaginais déjà la vie parfaite que nous mènerions ensemble. Et parfaite, notre vie l'a été, pendant un moment. Il m'a fait oublier le départ d'Andromeda de la maison. Il a éclipsé tous les problèmes qui auraient pu se poser sur mon chemin. Et un beau jour, tu es arrivé… c'était le plus beau jour de nos vies.
Ses lèvres s'étirèrent en un sourire triste et la nostalgie dansait dans ses yeux plein de regrets.
- Après la première guerre, j'ai fait promettre à Lucius que toute cette histoire serait derrière nous. Je ne voulais que ton bonheur et ta sécurité, et pendant un temps, nous avons réussi à te l'offrir. Nous étions respectés, admirés, craints, sans doute aussi. Mais nous étions heureux, c'était la vie que j'avais toujours voulue.
Narcissa fit une pause dans son récit, manifestement éreintée. Drago se trouva dépité devant toute l'énergie que lui coûtait visiblement le simple fait de parler.
- Je sais que votre ancienne vie vous manque, Mère, et je sais aussi que vous ne pourrez pas la récupérer, mais il y a tellement de choses à vivre…
- Je t'ai donné la vie que je pensais que tu méritais. Mais je n'ai pas été capable de te protéger de tout ça.
Elle n'avait pas besoin de préciser à quoi "tout ça" faisait référence.
- En épousant ton père, je savais dans quoi je m'embarquais. Je savais que, même si je lui avais fait promettre de ne plus jamais nous lier à de telles histoires, si le Seigneur des Ténèbres venait à revenir, il retournerait à ses côtés. Mais ce n'était pas ce que je voulais pour toi. Je voulais que tu restes loin de tout ça, que tu vives une vie saine et sauve.
Dans un geste lent, elle posa sa main sur le bras de son fils, là où reposait la Marque, en dessous de son pull. Drago tressaillit mais ne se déroba pas.
- J'ai échoué. Lucius a échoué aussi, bien sûr. Et il s'est passé des choses sous notre propre toit que je ne pourrai jamais oublier.
Drago se redressa, fixant sa mère qui évitait pourtant son regard. Il se sentit stupide, tout à coup, de ne jamais avoir pensé au fait que la guerre avait pu la traumatiser, elle aussi ; stupide de penser qu'il était le seul à en rêver la nuit, à entendre les cris de tous ceux qui avaient été torturés au sein de leur foyer ; stupide de croire que la seule absence de Lucius la mettait dans cet état.
- Je n'oublierai jamais non plus, mais…
- Mais tu n'es pas seul.
- Mais vous non plus ! Je suis là, je serai toujours là… Et Astoria aussi. Elle vous aime beaucoup.
- Je sais, je l'aime beaucoup moi aussi. Contrairement à toi, ajouta-t-elle après une seconde.
Drago détourna le regard.
- Ce n'est pas le moment pour avoir cette conversation, Mère.
- Je trouve au contraire que c'est le moment pour avoir toutes sortes de conversations.
- Il faut que vous vous concentriez sur vous, et sur votre santé, et…
- Je suis désolée, mon fils.
Drago se tut instantanément. Ce n'était pas souvent qu'il avait entendu sa mère prononcer ses simples mots. Ils avaient toujours été difficiles à dire, dans sa famille. De ce qu'il savait, son père ne les avait jamais énoncés. Quant à lui… c'était toujours quelque chose de pénible que d'avouer ce qu'il considérait être comme une faiblesse.
- De quoi êtes-vous désolée ?
- Nous pensions qu'elle était parfaite pour toi. Elle est parfaite pour toi, en réalité. Je ne comprends toujours pas pourquoi ce mariage ne fonctionne pas. Pourquoi il ne s'est pas produit la même magie qu'entre ton père et moi.
- Mère…
- Drago, regarde-moi.
Réticent, le blond consentit tout de même à s'exécuter. Sa mère le regardait avec un air grave.
- Tu as essayé de m'en parler à plusieurs reprises, et j'ai préféré faire l'autruche plutôt que d'avouer que, là aussi, j'avais échoué. Mais j'aimerais que tu m'expliques pourquoi.
- Vous voulez que je vous explique pourquoi je n'aime pas Astoria ?
Narcissa hocha la tête et Drago se sentit soudainement très mal à l'aise. Parce que ce n'était pas le moment de parler de son mariage alors que sa mère était en train de se laisser dépérir. Parce que parler de son union infructueuse avec Astoria le faisait forcément penser à Hermione, et que, bien qu'il sût qu'il ne pouvait décemment pas avouer à sa mère sa relation avec elle à cet instant, il n'aimait pas l'idée de lui mentir.
- Mère… vous vous rendez bien compte que l'amour ne fonctionne pas sur demande. Vous avez eu une chance inouïe avec Père… vous le savez tout comme moi. Combien de couples arrangés comme nous ont réellement été heureux en ménage ? Regardez… regardez votre sœur, ajouta-t-il d'une petite voix.
S'il y avait un sujet que les Malefoy n'abordaient jamais depuis longtemps, c'était celui-ci. Drago savait que, de tous les regrets que sa mère pouvait avoir, celui-là était certainement l'un des plus grands. Le nom de Bellatrix n'avait pas été mentionné depuis sa mort. Quant à Andromeda, si Drago était sûr que sa mère aurait voulu la revoir, il savait aussi que sa fierté l'empêchait de faire le premier pas.
- Ne parle pas d'elle, murmura Narcissa.
- Pourtant elle est un parfait exemple de ce que j'essaye de vous faire comprendre. Bellatrix…
- Drago !
- Pardonnez-moi, Mère.
Il y eut un moment de silence durant lequel Drago essayait de trouver un moyen de détourner la conversation de son mariage, mais sa mère ne semblait pas décidée.
- Astoria est une femme formidable.
Drago soupira.
- Oui, elle a beaucoup de qualités. Alors ne pensez-vous pas qu'elle a le droit de vivre avec un homme dont elle serait réellement amoureuse ?
Narcissa ne répondit pas, mais elle sonda son fils d'un regard pénétrant qui bouleversa ce dernier, comme si elle tentait de lui faire passer un message sans aucun mot.
- Quoi ? demanda-t-il, n'y tenant plus.
- Tu penses qu'elle ressent la même chose que toi ?
- Évidemment. Comment pourrait-il en être autrement ?
- Drago… je pense que tu sous-estimes l'affection qu'Astoria a pour toi. La manière dont elle te regarde…
- Et moi je pense que vous êtes très fatiguée, coupa-t-il en se levant subitement de sa chaise.
Narcissa le suivait du regard.
- Je ne suis pas ici pour parler de ça, Mère.
- Pourtant je préfère parler de toi. Tu es mon fils, et je ne veux que ton bonheur.
Cette phrase rappela à Drago ce qu'Hermione lui avait dit quand ils avaient parlé sérieusement de leur situation. Tu crois vraiment qu'elle t'en voudrait ? Tu es son fils. Ce qu'elle veut pour toi, c'est ton bonheur. Se pourrait-il que ce soit réellement le cas ? Oh bien sûr, il était certain qu'elle était sincère en disant cela, pourtant, il avait beau imaginer tous les scénarios possibles, il n'y en avait aucun dans lequel Narcissa approuverait sa relation avec Hermione.
- Et ton bonheur n'est pas avec elle.
Ce n'était pas une question. Drago se retourna pour voir que sa mère le fixait avec autant d'intensité que son faible état le lui permettait. Doucement, il secoua la tête, lui donnant ainsi raison.
- Tu as rencontré quelqu'un.
Encore une fois, son intonation faisait comprendre que ce n'était pas une interrogation. Le souffle de Drago se coupa légèrement, et il regarda sa mère sans comprendre. Il refusa de laisser la panique l'envahir. L'utilisation du mot "rencontré" prouvait à lui seul qu'elle ne pouvait pas être au courant pour Hermione. Devant le silence de son enfant, Narcissa eut un sourire tendre.
- Tu es mon fils, dit-elle simplement. Tu penses vraiment que je n'ai pas remarqué le changement de ton comportement, depuis quelques semaines ?
Drago ne savait pas quoi dire. Si changement de comportement il y avait effectivement eu, il n'en avait pas été conscient. Il ne pouvait pas mentir : il se sentait indubitablement plus heureux depuis qu'Hermione était réellement entrée dans sa vie, et encore plus depuis qu'ils avaient commencé leur relation. Mais lui qui s'était toujours vanté de tout cacher de ses émotions, il ne s'était même pas rendu compte qu'il laissait ce bonheur visible aux yeux des autres.
- Et tu ne veux pas en parler, interpréta Narcissa, toujours face au silence de Drago.
Son premier instinct lui criait de tout nier en bloc. De lui dire que, malgré le fait qu'il ne soit pas amoureux de son épouse, il n'y avait personne d'autre dans sa vie. Mais à quoi bon lui cacher la vérité ? Elle avait l'air sûre de ce qu'elle avançait, et Drago ne se sentait pas du tout de lui mentir droit dans les yeux. En revanche, il ne se sentait pas non plus prêt à lui révéler qui exactement était la raison de sa toute nouvelle félicité.
- Je vous en parlerai quand vous rentrerez à la maison, Mère, promit-il en s'approchant à nouveau d'elle, s'asseyant sur le côté du lit. Quand vous rentrerez au Manoir, que vous aurez repris des forces, je vous dirai tout ce que vous voulez savoir, je vous le promets.
Narcissa eut un léger sourire, mais un sourire infiniment triste, qui donna des frissons à Drago.
- Promettez-moi que vous allez vous battre, supplia-t-il. Pour moi. J'ai besoin de vous.
- Drago…
- Promettez-moi, pressa-t-il d'une voix encore plus implorante. Je vous en prie, dites-moi que vous allez essayer de vous en sortir.
Elle leva doucement le bras pour lui caresser tendrement les cheveux, lui transmettant par ce simple geste tout l'amour qu'elle avait pour lui.
- Je te le promets, scella-t-elle dans un souffle.
Le petit garçon en lui crut dur comme fer à cette promesse. L'adulte résigné qu'il était dut admettre qu'elle n'avait été prononcée que pour le rassurer.
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Bien, voilà un chapitre qui n'est pas des plus joyeux, je vous l'accorde ! Mais j'ai quand même hâte d'avoir vos avis, en espérant qu'il vous aura tout de même plu !
Il est un peu court, et le prochain, qui est déjà terminé, sera plus long. J'attends de finir d'écrire encore celui d'après avant de publier le chapitre 30, je pense que d'ici deux semaines grand maximum ça devrait être bon ! Le malheur de Drago m'inspire beaucoup !
D'ici là, merci encore à vous tous et prenez soin de vous !
