Bonjour/Bonsoir, alors on bascule à nouveau sur les jumeaux après l'OS artistique fait sur Aphrodite. J'avoue les adorer et pour cet OS, ce fut du magnifique, mais aussi du drame donc préparez les mouchoirs. Néanmoins, je m'excuse d'avance pour l'aspect brouillon de l'écrit qui est divisé en plusieurs parties, alternant les points de vue, et à aucun moment je ne donne clairement le prénom du narrateur à l'instant T pour ne pas rompre le rythme. En théorie, on le devine assez facilement et attention : certains mots sont en italiques, et ce n'est pas pour la beauté du geste.
Je tiens à préciser d'avance avant que l'on ne m'en fasse la remarque, il y a des répétitions, beaucoup même, mais c'est fait exprès. C'est là pour rythmer la lecture, comme l'écrit que je vous avais proposé sur Milo. Ensuite, je préconise la lecture de Amour Pictural, OS artistique portant uniquement sur Kanon pour avoir une brève idée de quoi je parle à la fin. Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture et vous pouvez vous mettre une petite musique tristounette.
P.S. : On parle d'amour fraternel et non d'amour incestueux dans cet OS. Des sujets sensibles sont également abordés et si vous êtes victimes de violences conjugales, portez plainte.
En outre, ce poste est encore une fois temporaire dans l'attente de la publication définitive de mon projet. Je suis juste satisfaite de cette partie et tenais à vous la partager.
Disclaimer : Les personnages sont tirés de l'oeuvre Saint Seiya, relevant de la propriété de Masami Kurumada.
Ils ne s'entendaient pas. Ils ne s'entendaient plus.
Ils ne s'aimaient pas. Ils ne s'aimaient plus.
Ils se haïssaient.
Ils se haïssaient comme pouvaient se haïr deux étrangers. Ils se haïssaient comme pouvaient se haïr deux connaissances. Ils se haïssaient comme pouvaient se haïr deux parents. Ils se haïssaient comme pouvaient se haïr deux frères. Ils se haïssaient comme pouvaient se haïr deux jumeaux. Ils se haïssaient comme on pouvait se haïr soi-même. Pourquoi ? C'était simple. L'un était l'autre et l'autre était l'un.
Ils ne pouvaient plus se voir. Ils ne pouvaient plus se parler. Ils ne pouvaient plus s'entendre. Ils ne pouvaient plus s'aimer. Oui. Ils ne pouvaient plus, enchaînés dans une relation poisseuse depuis de biens longues années.
Il avait alors saisi sa chance. Simple et efficace. Belle opportunité qui s'était offerte à lui. Belle opportunité tendancieuse. Belle opportunité malicieuse. Belle opportunité mortelle. Avait-il été bête sur ce coup-là ? Terriblement. Plus que bête. Il avait été naïf. Il avait été crédule.
Belle opportunité qu'elle fut...
... ne serait-ce pas bel enfer plutôt ?
On ne lui témoignait de l'intérêt en temps ordinaire. Un caractère franc et arrogant. Une insolence à toute épreuve et un sens de l'humour pouvant vite s'avérer douteux. Il n'avait réellement de proches de son âge. Sa famille ne le regardait pas. Son frère ne le regardait qu'à demi. Alors, quand cette main s'était tendue vers lui, offerte, blanche, dénuée de toute cette souillure hypocrite dans laquelle baignait le monde, comment aurait-il pu la refuser ? Aurait-il dû la refuser ? Impossible pour l'enfant qu'il eut été. Possible pour l'adolescent qu'il eut été.
Avec force. Avec détermination. Avec volonté. Il avait saisi cette main tendue. Il l'avait saisi fermement, déterminé à ne jamais la lâcher. Elle était là. Elle était là sa chance pour enfin briller aux yeux de ce piètre monde. Elle était là. Elle était là et elle allait le sortir de son ombre étouffante.
C'était ce qu'il avait cru...
... jamais il n'aurait cru qu'elle serait son billet pour un aller simple aux Enfers.
Une énième dispute avait éclaté. La liste inexistante ne permettait plus un nombre exact. Les voix si semblables, aux intonations si similaires mais aux pensées si différentes s'étaient élevées dans l'appartement. Les paroles avaient fusé. Les non-dits avaient été dits. Les pensées avaient été dépassées. Et pas qu'une fois. Mais ce fut la fois de trop. Cette énième dispute vint équivaloir à la goutte d'eau faisant déborder le vase.
Les regrets et remords avaient peut-être envahi les deux protagonistes tout de suite après, mais il était trop tard. Le mal était fait. Le mal était dit.
Il n'était qu'une erreur à ses yeux.
Il n'était qu'une imperfection à ses yeux.
Il n'était qu'un moins que rien à ses yeux.
Il n'était qu'une vulgaire et pâle copie à ses yeux.
Que suis-je alors... ?
La faiblesse de son esprit eut raison de lui. La cire atténuant durant tout ce temps tant bien que mal les doucereuses paroles des sirènes fondit. Des mots tentant lui furent prononcés. Un réconfort certain lui fut promis. Deux bras aimants lui furent certifiés. Tout ça bien évidemment à l'écart de la source de son mal. Mais, son esprit n'avait su discerner quel était le véritable mal...
L'amour rend aveugle dit-on. Le désir. La passion. L'ardeur. La tendresse. La sécurité. La séduction. On lui connaît bon nombre d'autres termes signifiants mais l'on oublie bien souvent le plus important. Le mot le caractérisant au bout de quelques temps lorsque le pouvoir s'affaiblit...
La désillusion.
La porte de son cœur s'était fermée sur sa raison. Il l'avait ignorée. Il l'avait ignorée tout comme il avait ignoré ses excuses ô que trop tardives. Puis outre la porte de son cœur qui s'était fermée, celle de l'appartement avait également violemment claquée. Et il avait inconsciemment sauté à pieds joints dans les Enfers les plus infâmes qui soient.
Relation toxique qu'il avait connu avec son jumeau ? Probablement. Certainement même. L'ombre n'était pas toujours sécuritaire mais pouvait être la pire des strangulations qui soit permise. L'ombre était étouffante. L'ombre était un lourd fardeau soit disant protecteur. L'ombre était mortelle. Or... Cette ombre dans laquelle il disait avoir détesté baigner aurait été plus que préférable à ce qu'il avait connu par la suite. Ce n'était rien à ce qu'il avait connu par la suite. Ce n'était rien si bien qu'il en était venu à regretter cette ombre.
Brisé. Brisé une fois. Le cœur en lambeaux. L'esprit fendillé de tout part. Brisé. Brisé une seconde fois. Le cœur piétiné. L'esprit éclaté en mille morceaux. Pas une once de grâce. Pas de douceur. Pas de sureté. Des promesses ? Foutaises. Des paroles dans le vent ? Oui.
Relation toxique qu'il avait connu avec son jumeau ? Probablement. Certainement même. Relation toxique qu'il avait connu avec Cet Homme ? Assurément. Le doute n'était pas permis. Le doute n'était plus permis. Le doute n'était plus une fois qu'il fut brisé. Le doute n'était plus une fois qu'il fut abusé. Le doute n'était plus. Le doute. Le doute qu'il aurait dû avoir dès le départ. Le doute qu'il avait ignoré lorsqu'il avait saisi cette main d'albâtre.
Naïf qu'il avait été.
Jamais il ne fut une lumière mais là, il fut plus que naïf.
Peau dorée. Toile vierge. Toile où l'imagination régnait en maître. Toile violemment souillée. Toile souillée revêtant les hideuses couleurs du ciel. Toile souillée pour devenir aussi colorée que les peintures qu'il se plaisait à observer. Et c'était ce qu'il était devenu malgré lui. Une toile. Son corps était une toile. Son corps était un objet. Une toile que l'on admirait. Une toile que l'on convoitait. Une toile souillée. Une toile...
Il était tombé bien bas pour Cet Homme. Il était tombé si bas en Enfer. Il était tombé si profondément qu'il n'avait cru pouvoir se relever. Mutilé. Souillé. Brisé. Il n'était plus.
La vie était fragile. La vie était précieuse. La vie était un bel objet à saisir et à embrasser. La vie était une pomme à croquer à pleine dent. La vie était faite de hauts et de bas. La vie était une corde. Une corde terriblement raide. Une corde aux fibres délicates qui brûlaient facilement. Une corde aux fibres délicates qui brûlaient rapidement. Et la sienne s'était tristement embrasée. À cause de Lui. À cause de lui. À cause de lui.
A cause de lui il se redressa. Quand la corde est prête à se rompre, la vie défile devant nos yeux dit-on. Vit-il une dernière fois ses souvenirs méritant d'être vus ? Non. Non, loin de là même. Il ne vit rien. Il ne vit rien comme il n'entendit rien. Au contraire, des sentiments l'envahirent. Des sentiments l'envahirent au point qu'il crut étouffer. Le manque. La détresse. Les regrets. Les remords. La culpabilité. L'abandon. Il le voulait.
Ils ne s'entendaient pas. Ils ne s'entendaient plus.
Ils ne s'aimaient pas. Ils ne s'aimaient plus.
Ils se haïssaient.
Et pourtant, ses dernières pensées allèrent vers lui quand la flamme de sa vie vacilla dangereusement.
Saga...
Pas de nouvelles. Bonnes nouvelles ? Non.
Un silence. Un silence long. Un silence pesant. Un silence interminable. Rien. Pas un message. Pas un appel. Pas une visite. Pas de nouvelles. Rien. Rien du tout.
La porte avait claqué. L'attente s'était prolongée. Les inquiétudes avaient cru.
Cinq jours.
Les jours s'étaient suivis.
Deux semaines.
Les semaines s'étaient succédées.
Sept mois.
Les mois s'étaient additionnés.
Deux ans.
Et les ans...
Deux ans avant un signe. Un signe de vie. Un signe d'agonie. Un signe. Un signe de présence. Une sonnerie. Un appel. Une voix.
Des nouvelles. Bonnes nouvelles ? Non.
Saga...
Une voix. Une voix au ton similaire à la sienne. Une voix un peu grave. Une voix qu'il avait connu moqueuse. Une voix qu'il avait connu colérique. Une voix qu'il découvrit brisée. Une voix tremblante. Une voix murmurante. Une voix où toute la fierté qu'il lui avait connu n'était plus qu'un lointain souvenir. Une voix qui était la sienne. Et ce timbre le saisit au fond de lui.
... viens...
Il le connaissait. Il le connaissait bien. Il le savait fier. Il le savait terriblement fier même. Toujours à assumer ses moindres gestes. Alors… pourquoi ? Pourquoi ?
... s'il te plaît...
Regrets et remords. Culpabilité. Il avait été noyé sous cela. Il avait été noyé et aucun doute n'avait fleuri dans son esprit. Cette voix si similaire à la sienne sonnait comme une supplique. Une supplique qu'il n'aurait cru entendre un jour chez lui.
Son cœur s'était douloureusement serré.
Il s'était exécuté sans l'ombre d'un doute.
Retour au bercail. Retour auprès des siens. Retour auprès de lui. Retour dans ses bras. Réconfort ? Dispute ? Chaleur ? Explication ? Non. Non, rien de tout cela. Un mot. Un mot simple. Un mot tortueux.
Silence.
Un silence à la fois pesant et fragile. Un silence emprunt de sa douleur. Il était muet comme une tombe. Il était muré dans le silence. Mesure défensive instinctive certes. Mais mesure défensive instinctive douloureuse pour lui. Il ne voulait plus parler. Il laissait quelque fois lui échapper des onomatopées mais ça s'arrêtait là. Pas un seul mot. Pas un seul groupe nominal. Pas une seule phrase. Pas une seule véritable conversation. Pas une seule véritable dispute. Rien. Rien du tout. C'en était glaçant. C'en était grisant.
Des heures silencieuses. Des jours muets. Des semaines mortes. Il en venait à regretter leurs chamailleries enfantines à l'époque où ils s'entendaient encore.
L'heure fut alors aux questions. Des questions qui vinrent progressivement envahir son esprit. Des questions malicieuses. Des questions vicieuses. Des questions évidentes. Des questions véridiques. Qu'avait donc pu lui faire Cette Personne pour qu'il le récupère dans cet état ? Qu'est-ce que Cet Homme lui avait fait ? Pourquoi ? Pourquoi l'avait-il pris ? Pourquoi l'avait-il brisé ? Pourquoi l'avait-il abandonné ? Pourquoi ? Des questions sans réponses. Il pouvait maudire Cet Inconnu. Il pouvait Le traiter de tous les noms d'oiseaux. Mais ce n'était pas cela qui allait le lui ramener. Et il ne savait comment le ramener.
Honteusement effrayé qu'il avait été devant ce puzzle complexe qu'il était.
Inquiétude. Oui. En premier. Angoisse. Oui. En seconde. Puis cette hideuse créature avait sournoisement empoisonné son cœur. Remords. Les remords. De profonds remords. De profonds remords le marquant indélébilement. Oui. Il était facile de rejeter la faute sur Cet Homme qui le lui avait rendu dans un piteux état. C'était bien facile de critiquer une fois les choses faites, mais lui, l'aîné, qu'avait-il fait pour empêcher cela ? Rien. Rien du tout. Il n'avait rien fait. Il n'avait pas agi. Il n'avait guère remué le petit doigt si ce n'était pour ouvrir la porte qui le mena tout droit aux Enfers. Il s'en voulait. Il s'en voulait terriblement. Immensément. Profondément. Pourquoi ? Pourquoi n'avait-il rien fait ? Pourquoi n'avait-il pas cherché à en savoir plus sur ses fréquentations peu recommandables ? Pourquoi n'avait-il pas essayé de le préserver ? Pourquoi n'avait-il pas tenté de calmer le jeu lorsqu'il l'avait vu s'éloigner de lui progressivement ? Pourquoi n'avait-il pas attrapé sa main ce soir-là pour l'empêcher de partir ? Pourquoi ? Pourquoi ? Une multitude de questions sans réponses. Des questions dont le nombre équivalait à la violence de ses remords. Il se tourmentait. Il se torturait. Il se fustigeait. Mais c'était vain. Le mal était fait. Avec des pourquoi et des si on referait le monde, non ? Un monde bien imaginaire et loin de cette réalité grisante. Or, c'était elle qu'il affrontait et il ne pouvait s'en détourner.
Il avait échoué. Il avait échoué en tant qu'aîné. Il avait échoué en tant que frère. Il avait échoué en tant que jumeau. Il avait échoué tout court. Dire que lorsqu'il avait eu ses troubles dissociatifs de l'identité durant son adolescence, il avait été là pour lui. Il avait fait office de pilier. Il avait fait office de bouée de sauvetage. Il l'avait aidé à ne pas perdre le cap. Il l'avait aidé à remonter la pente. Il l'avait aidé à ne pas voir le monde en monochrome mais à en percevoir toute la palette chromatique l'habillant. Les éclats bleus azur, les chaleureux jaunes timides, les doucereux verts chatoyants. Il avait été là pour le soutenir. Il avait toujours été là pour le soutenir. Et sous-entendre que tout cela s'était fait sans la moindre dispute serait un euphémisme. Ils s'étaient pris la tête un nombre incalculable de fois à ce sujet mais il n'avait jamais lâché. Il ne l'avait abandonné à ses démons. Il l'avait tiré des ténèbres, l'amenant à sauter à pieds joints dans ce monde coloré dans lequel ils vivaient. Alors pourquoi ? Pourquoi ne lui avait-il pas rendu la pareille ? Puisqu'il était l'aîné ? Puisqu'il n'avait pas vu le danger imminent qu'il encourait ? Puisqu'il avait inconsciemment détourné la tête pour ne chercher querelle ? Puisque quoi... ? Non. Rien de tout cela. Il se cherchait des excuses. Des excuses vaines. Des excuses inutiles. Des excuses pour combler ses remords.
Il se mentait. Il se disait que si et il se disait que si… Tout irait mieux, non ? Foutaises. Balivernes. Mensonges. Il s'enfonçait. Il se voilait la face. Il se mentait à lui-même. La vérité, il ne la regardait pas en face. Il l'ignorait. Il l'ignorait même tant et si bien qu'elle lui éclata au visage.
Son cœur s'était douloureusement serré.
Souvenirs lointains qu'il pouvait revoir, il avait toujours abordé un sourire. Même dans les pires moments de leur enfance. Un sourire triste. Un sourire arrogant. Un sourire douloureux. Un sourire goguenard. Un sourire doux. Un sourire taquin. Un sourire amusé. Un sourire. Et il y avait toujours eu dans ses yeux émeraude, si semblables aux siens, cette lueur qui faisait toute la différence entre les pâles copies qu'ils étaient de l'autre. Une lueur déterminée. Une flamme brûlante. Un brasier ardent qui embrassait la vie comme il se devait. Pas d'hésitations. Jamais. Ce terme même ne faisait pas parti de son vocabulaire. Il ne cherchait pas midi à quatorze heures. Il voulait quelque chose, il l'aurait. Il voulait faire quelque chose, il le ferait. Quelqu'un de fort, très fort.
Voilà ce qu'il représentait à ses yeux…
… mais était-ce toujours le cas ?
La réalité terrible éclata. Ses yeux le brûlèrent. Le silence vola en éclat. Son cœur se serra douloureusement. La routine funèbre se brisa. Sa culpabilité lui donna la nausée.
Il y avait cru. Il y avait cru bêtement. Il avait cru que ça lui passerait. Mais non. Non. Non… Sombre idiot qu'il avait été. Sombre idiot qu'il était. Comment avait-il pu croire bêtement que brisé comme il l'avait récupéré il se remettrait sur pieds tout seul ? Ah ! Qu'il s'était lourdement trompé…
Il l'avait vu. Il l'avait vu comme il ne l'avait jamais vu. Il avait vu ce teint doré qui avait pâli. Il avait vu ces émeraude pétillants qui avaient perdus leur éclat. Il l'avait vu. Il l'avait vu brisé. Il l'avait vu blessé. Il l'avait vu abandonné. Il l'avait vu souillé. Il l'avait vu. Il avait vu ces larmes. Il avait vu ses larmes.
Kanon…
Que devait-il faire ? Lui parler ? Lui ouvrir ses bras ? Lui ouvrir son cœur ? Lui partager ses sentiments ? Non. Réfléchir était inutile ici. Réfléchir n'allait les mener nulle part.
L'instinct. L'instinct prit le dessus. L'instinct prit le dessus sur l'un. L'instinct prit le dessus sur l'autre. Pas un mot échangé. Un regard échangé.
Ils ne s'entendaient pas. Ils ne s'entendaient plus.
Ils ne s'aimaient pas. Ils ne s'aimaient plus.
Ils se haïssaient.
Non...
... ils s'entendaient. Ils s'entendaient à nouveau.
Silence. Silence pesant. Silence muet. Silence délicat. Silence agréable. Silence bienfaisant. Les mots n'avaient pas leur place. Les mots n'avaient plus leur place. Seuls les gestes. Seuls les gestes comptaient pour eux. Ils se devaient d'agir. Ils se devaient de se retrouver. Ils se devaient de se compléter. L'éloignement. Le manque. La détresse. Les regrets. Tout cela n'avait été que trop douloureux. Il n'y avait plus d'ombre. Il n'y avait plus de lumière.
Il n'y avait plus qu'eux.
Les mains racées se lièrent aux mains calleuses. Si semblables mais si différentes à la fois. La toile dorée vierge se confondit à la toile dorée honteusement souillée à jamais. Si semblables mais si différentes à la fois. La chevelure d'or éclatant se mêla à la chevelure d'or pâle. Si semblables mais si différentes à la fois. Les orbes smaragdins attristés rencontrèrent les orbes smaragdins troubles et à l'éclat terni. Si semblables mais si différents à la fois. Ils se virent. Ils se virent à travers l'autre. Ils se virent en l'autre. Après tout, ils étaient jumeaux. Ils étaient de parfaits miroirs. Ils étaient de parfaits reflets. Ils étaient l'un. Ils étaient l'autre. Ils étaient deux. Mais ils ne faisaient qu'un.
Les larmes de l'un firent pleurer le cœur de l'autre. Le doux sourire de l'autre fit battre le cœur de l'un. Ils s'opposaient. Ils se répondaient. Ils se complétaient. Ils étaient deux. Ils étaient un.
Seul le temps effacerait définitivement les plaies béantes de Cet Inconnu. Le temps ferait son œuvre en temps et heure voulus. Quitte à ce que cela prenne des jours. Quitte à ce que cela prenne des semaines. Quitte à ce que cela prenne des mois. Quitte à ce que cela prenne des ans... En attendant il serait là. Il serait là et apaiserait sa souffrance. Il apaiserait sa souffrance en lui offrant ses bras. Il lui offrirait ses bras pour lui seul, comme lui le lui avait offert ses bras des années plus tôt. Si la toile avait été flagellée, alors il la caresserait avec une plume. Si la toile avait été heurtée, alors il l'embrasserait tendrement. Si la toile avait été griffée, alors il la frôlerait imperceptiblement de la plante de ses doigts. Si la toile avait été déchirée, alors il la manipulerait comme s'il s'agissait de la plus belle des merveilles.
Il était l'aîné et il allait lui rendre la pareille. Il allait assumer son rôle. Il allait accepter de regarder la vérité en face. Il allait accepter de le voir brisé comme il était. Il allait accepter de recoller les morceaux de cet ardu puzzle. Il allait tout accepter. Pour lui. Pour lui et pour lui seul.
Ils ne s'entendaient pas. Ils ne s'entendaient plus.
Ils ne s'aimaient pas. Ils ne s'aimaient plus.
Ils se haïssaient.
Non...
... ils s'aimaient. Ils s'aimaient à nouveau.
Monochrome. Couleurs. Paysage. Brume. Romantique. Indescriptible. Flou. Détresse. Incompréhension. Déséquilibre. Silhouette.
Étourdissement. Son cœur battait la chamade.
Brûlure. Ses joues le chauffaient agréablement.
Fermeté. Des mains semblables aux siennes étaient fermement posées sur ses épaules.
Beauté. Amour. Coup de foudre. Rencontre ? Non. Non, ce terme n'était plus d'actualité. Retrouvaille lui correspondrait mieux. Et sa gorge se noua une fois encore. Tristesse ? Non. Non, loin de là même. L'émotion. L'émotion le prit à la gorge. L'éclat perdu fut retrouvé. L'éclat perdu fut réhabilité. L'éclat perdu fut... L'éclat perdu était là. Il était là. Sa vision se troubla. Ses émeraudes larmoyèrent. Ses larmes coulèrent. Ses lèvres s'incurvèrent discrètement.
Son grand amour était là. Son amour de jeunesse était là. Son amour perdu était là. Son amour était là et un flux intense de sentiments le saisit brutalement. Il aurait voulu gémir. Il aurait voulu crier. Il aurait voulu rire. Il aurait voulu geindre. Il aurait voulu quoi... ? Il ne voulait rien. Il ne voulait rien puisque ce dont il avait besoin était déjà là. Devant lui. Derrière lui.
Le temps était imprécis. Le temps était une affreuse créature. Le temps était monstrueux. Le temps était un amour. Le temps était propre à chacun. Le temps s'adaptait. Le temps s'écoulait. Le temps s'effilochait. Le temps annonçait l'aube d'un début. Le temps signait le crépuscule d'une fin. Le temps blessait. Le temps guérissait.
Mais toutes ces expressions étaient fausses. Le temps ne l'avait pas guéri. Le temps n'avait su refermer ses plaies béantes.
Merci...
Son frère l'avait guéri.
... Saga.
Notes de fin : J'espère que cet OS vous aura plus malgré sa construction plus que maladroite. En tout cas, félicitations à celles et ceux qui ont découvert l'identité du fameux "inconnu" et je vous souhaite de rester poli si vous souhaitez converser à son sujet.
Sur ce, à la prochaine.
