Prologue : Vœu

- Yuei ? Répétai-je en levant un sourcil.

- Ouais, alors tu le mets aussi comme vœu ?

Je fixai mon frère en tirant une grimace semblable à du dégout mélangé à de l'indignation en tournant mon visage vers lui. Me posait-il réellement la question ? Et effectivement, il était entré dans ma chambre où la seule lumière qui éclairait faiblement cet espace était cette petite lampe de bureau, bureau sur lequel j'étais affalée, et bien évidement, affalée sur cette foutu feuille des vœux. Il agitait gaiement la fameuse feuille comme s'il me faisait un coucou avec au pas de ma porte, attendant une réponse à sa question.

- Moi ? A Yuei ? Lui dis-je en levant ma tête de mes bras croisés que j'utilisais comme coussins quelques secondes avant son apparition.

- Ça serait trop cool qu'on y ailles tous les deux ! On fera une team frère/sœur et on serait les meilleurs !

Il avait avancé dans mon espace personnel en rêvant de ses propres paroles, comme s'il y était déjà. C'est vrai que c'était son rêve à lui. Devenir un héros, se mettre en danger pour sauver les autres. Je l'observai dubitative car je me voyais pas du tout faire face au danger.

- La flemme, répondis-je enfin à sa question en rentrant ma tête dans le cocon de mes bras.

- EHH !? Mais ta toujours la flemme ! Et t'avais dit que tu voulais venir avec moi !

Je soupirai plus bruyamment. C'est vrai que j'avais dit ça, et pas qu'une fois. Mais bon, c'était plus pour qu'il soit content et qu'il arrête de me bassiner avec son rêve et comme ça j'étais tranquille. Ça avait toujours fonctionné, j'disais oui, oui, il partait heureux comme un sot et moi j'pouvais somnoler pépouse dans mon coin. Tout le monde étaient contents, sauf que maintenant c'était vraiment le moment de choisir sincèrement notre voie. C'était son rêve, pas le mien, moi ma seule inspiration était de vivre tranquillement, faire ma part dans la société, mourir d'ennui surement vieille fille avec des chats et des chiens. J'ai toujours trouvé la vie dure et compliquée alors je n'avais aucune inspiration à me la rendre plus pénible que cela. J'avais déjà vécu mon petit lot de difficultés que j'avais réussi à surmonter grâce à lui et à nos parents. Je pense que j'avais déjà assez donné de ma participation dans la loterie du malheur humain.

- Ca l'air relou et fatiguant d'être un héros, me contentai-je de donner comme raison à mon refus d'une voix étouffée par le refuge de mes bras.

- Tu rigoles avec ton alter ça serait du gâteux.

Il avait fait les derniers pas qui le séparait de moi et avait posé sa main sur mon épaule. Ouais, ça je l'avais entendu beaucoup trop en 15 ans d'existence. « Waouuh mais trop bien ton alter » ou « C'est trop ouf, il est trop puissant ton alter » ou au contraire « C'est très dangereux comme pouvoir, j'espère qu'il n'est pas tombé dans de mauvaises mains » ou bien « Tu peux blesser avec cet alter, tu en as conscience jeune fille ? »

- J'te le donnes si tu veux, j'préfère le tiens, c'est parfait pour mes ambitions. Dis-je en tournant ma tête vers lui mais en restant posé sur mes membres supérieurs.

Il eut un moment de blanc, on se regardaient dans les yeux. Il n'a jamais émis une parole pouvant montrer qu'il était jaloux de mon alter et je ne pense pas qu'il était animé par ce genre de sentiment négatif envers moi. On s'est toujours bien entendu malgré qu'on ne fût pas de véritable frère et sœur. A la base nous étions cousins, mais les aléas de la vie font que ses parents, mon parrain et ma marraine, m'ont adopté quand j'avais 7 ans.

- T'as mis quoi alors ? Abandonna-t-il dans un soupir qui témoignait du désespoir qu'il avait envers moi

Sans avoir le temps de répondre ou de réagir, il tira sur ma feuille qui dépassait de la forteresse qu'était la moitié supérieure de mon corps, sans la déchirer et tira une tête déconfite quand il découvrit une page blanche.

- Mais t'es au courant qu'on la rend demain !?

- Ouais je sais, à ton avis pourquoi j'ai l'air d'être en dépression ?

Il pencha la tête sur le côté, ses cheveux noirs mi-long venait caresser le haut de son épaule.

- T'as toujours l'air déprimé.

J'aurais dû me sentir vexée, comme si je tirais la gueule tout le temps à faire fuir les enfants. Mais au fond, il n'avait peut-être pas tort, enfin juste un peu, j'suis pas un film d'horreur non plus. Puis, il se tourna vers la sortie de mon antre, ma feuille dans sa main.

- Ehh rends-moi ma feuille, idiot.

- Non j'vais la remplir pour toi.

Pour la seconde fois dans cette conversation que je considérais plus comme une intrusion, je levais ma tête.

- Mets pas Yuei !

- Si

- Eijiro ! Yuei ça veut dire qu'il faut travailler dur et rien que d'y penser ça m'ennuie déjà !

- Je m'en fous, entendis-je au loin dans la maison.

- De toute façon j'réussirai pas l'examen d'entrée ! Criai-je certaine de cette vérité.