Notes de l'auteur : J'ai réalisé ce one-shot à l'occasion du concours de St-Valentin 2020 sur l'Amino Ace Attorney FR.


"Suite à la récente tournure des événements...

Le juge de la salle d'audience numéro 6 se racla la gorge avant de se redresser sur son siège.

- Après délibération du jury, la Cour a convenu d'acquitter la prévenue, Mme Valentine Sedaye, accusée de l'homicide involontaire de M. Pascale Vers.

Un soupir de soulagement sonore se fit entendre sur le banc des accusés et des voix s'élevèrent dans la galerie.

- Cependant, reprit le juge pour faire taire les commentaires, vous serez déférée une nouvelle fois devant la Cour pour vol à main armée et association de malfaiteurs. En attendant votre jugement, vous serez placée en détention provisoire. La Cour est ajournée."

Les sièges raclèrent le sol et le jury se retira de la salle d'audience. La salle se désengorgea bientôt des curieux venus assister au procès. Klavier était resté dans la galerie, les coudes appuyés sur ses genoux, le menton reposé sur ses mains jointes. Lui, contrairement à l'audience assidue, avait vaguement suivi cette affaire de femme amoureuse d'un type pas très net qui lui avait demandé de braquer le plus riche bijoutier de la capitale. Il avait cru comprendre que les événements avaient mal tourné, les braqueurs avaient tué l'agent de sécurité dans leur fuite. Il était arrivé les trente dernières minutes du procès, s'octroyant une pause dans son travail qui se résumait à de la paperasse ces derniers temps. Il observait de haut cette arène où se battaient les avocats et procureurs. Plus précisément, il observait la Défense ranger le désordre de papiers et de preuves sur son bureau. Quand Apollo releva enfin la tête pour le voir seul sur les bancs vides, il sourit chaudement et lui offrit un regard complice. L'avocat en rouge attrapa sa veste à la volée et sortit d'un pas pressé par la même porte empruntée par les jurés.

Les deux hommes se retrouvèrent au bas du grand escalier de marbre du palais de justice.

"Enfin une bonne chose de faite, soupira l'avocat en déposant son sac au sol. C'était le meilleur verdict que je pouvais lui obtenir, elle ne s'en sortira pas trop mal je pense.

- Un café pour fêter ça ?

Apollo enfila sa veste puis fixa le blond dans les yeux avec un air étonné.

- Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit encore ? demanda le procureur un peu hébété.

- J'ai obtenu un verdict non-coupable, sur une affaire que tu me disais perdue d'avance, j'ai réussi à convaincre ma cliente de dénoncer son petit-ami... Donc j'ai participé au démantèlement d'un réseau de trafiquants recherchés que Blackquill va pouvoir mettre derrière les barreaux, et cerise sur le gâteau : cela fait que je suis libre ce soir : champagne !

Klavier détourna le regard et ricana face au visage joueur de l'avocat. Il fit claquer sa langue contre son palais en signe de résignation.

- Je plaisante, de toute façon je ne peux pas, ça aurait été avec plaisir mais je n'ai pas le temps. Je dois retourner à l'agence.

- Et moi à mes dossiers.

Apollo posa sa main sur l'épaule de Klavier et se hissa sur la pointe des pieds pour l'embrasser.

- Je passe te prendre à dix-neuf heures ? murmura Klavier

Apollo fronça les sourcils. Fier de l'effet de surprise que sa question avait suscité, le procureur ne put réprimer un sourire satisfait.

- J'ai réservé une table pour ce soir. Juste toi et moi, qu'est-ce que tu en dis ?

Apollo rougit légèrement alors qu'un fin sourire touché illuminait son visage. Il se hissa de nouveau sur la pointe des pieds, déposa un rapide baiser sur les lèvres du blond, ramassa ses affaires et commença à s'éloigner vers la sortie du Palais de justice à reculons, toujours en fixant les yeux du procureur.

- À ce soir alors !" lança-t-il d'une voix enjouée, peut-être un peu plus forte que ce qu'il n'aurait espéré.

Et le jeune homme en rouge disparut bientôt dans les rues de la ville que Klavier distinguait alors, à ce moment-là, comme pétillante de vie.

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"Vous avez des plans pour la soirée, Fräulein ?

La détective Ema Skye haussa un sourcil peu étonné vers son supérieur. Klavier Gavin lui posait souvent ce genre de questions sur sa vie privée, portant parfois sur ses goûts ou ses habitudes et la plupart du temps sans crier gare. La jeune femme rassembla quelques dossiers avant de se racler la gorge.

- Rien de spécial. Un plaid, du chocolat et une bonne série. Le tout accompagné d'une pincée de solitude, ironisa-t-elle. Pourquoi cette question ? Vous avez prévu de sortir, avec Apollo ?

Klavier ne répondit pas immédiatement. Il était appuyé sur le bord de son bureau, jambes croisées, les yeux rivés sur ses doigts avec lesquels il faisait jouer une petite boîte entre ses mains. En réalité, Klavier ne percevait plus le petit objet, son regard était vide, absent, le jeune homme semblait accaparé par ses pensées.

- Un resto…

Le regard d'Ema était lui aussi scotché sur les mains de la Rock-Star. Observant le manège incessant et pressé de la boîte dans les mains de Gavin, elle se hasarda à demander :

- Anxieux ?

- Terriblement, murmura-t-il après quelques secondes de réflexion. J'ai peur de sa réaction, ce n'est peut-être pas le bon moment.

Ema le surprit à se mordre la lèvre.

- Au contraire, je pense que c'est pile le bon moment. Vous avez traversé des périodes difficiles tous les deux, ça a été dur mais vous vous en êtes sortis, ensemble.

La Rock-Star étouffa un rictus moqueur. Ema se renfrogna :

- Oui, roh, ça va eh, j'ai le droit de faire des discours kitchs et niais moi aussi.

- Je ne vous savais pas si romantique Fraülein, dit-il avec un grand sourire amusé.

La détective baragouina une espèce de "c'est bon, oubliez ça, j'ai rien dit" dans sa barbe. Quand le jeune homme s'arrêta de rire, un air doux illuminait son visage.

- Au moins j'aurai eu le mérite de vous détendre, lui lança-t-elle. Pourquoi cette inquiétude ?

- Ça se voit que vous n'avez jamais été confrontée à ce genre de situation. En fait... J'y réfléchis depuis un sacré bout de temps, et je pense… que je n'ai juste jamais trouvé le bon moment pour faire ma demande. Pas que je ne voulais pas, mais comme vous l'avez dit ça a été compliqué ces dernières années pour Apollo. Je ne voulais en rajouter.

- Je comprends.

Klavier regarda une dernière fois la boite, puis se décida à se relever et alla la fourrer dans une poche de son manteau. Il jeta un rapide coup d'oeil à sa montre : dix-huit heure quinze. Le procureur rejoignit Ema près de l'immense étagère où trônaient des classeurs entiers de dossiers. Mais alors qu'il prenait deux ou trois chemises pleines à craquer de papiers procéduriers, la détective les lui arracha des mains.

- Je m'en occupe, il me semble que vous avez mieux à faire ce soir, murmura-t-elle avec un sourire complice.

Klavier, d'abord abasourdi, fut touché par sa générosité et la remercia. La Rock-Star attrapa ses affaires, Ema l'arrêta une dernière fois sur le seuil de la porte :

- Gavin ! Je suis certaine que tout va bien se passer. Profitez bien de votre soirée pour moi !

- Je vous redevrai ça."

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"Attends, c'est là que tu m'emmènes ?"

Apollo observait avec des yeux ébahis la devanture du restaurant vers lequel lui et le blond se dirigeaient. Grand, chic et classe étaient les seuls mots qui lui venaient. Probablement beaucoup trop cher pour lui, aussi, cela allait sans dire. Klavier acquiesça d'un mouvement de tête et tenant l'avocat par l'épaule, l'invita à rentrer.

Il faisait chaud à l'intérieur, ce qui tranchait avec le froid d'une nuit de mi-février. Le visage d'Apollo avait une fâcheuse tendance à rougir dès que la température changeait brutalement. Klavier trouvait ça adorable.

Un réceptionniste en smoking et noeud papillon les guida jusqu'à une table drapée d'une longue nappe blanche. Une rose ainsi que quelques bougies l'égayaient. Les amants s'installèrent.

" Bah dis-donc, j'aurais dû m'habiller un peu plus chic ce soir !

- Je te trouve parfait comme tu es.

- Flatteur, siffla Apollo malicieusement.

Klavier laissa s'échapper un léger gloussement.

La soirée se poursuivit avec le dîner, les amants échangeaient joyeusement. Apollo était, comme à son habitude, très détendu, gai, parfois cynique. De son côté, Klavier refoulait à l'arrière de ses pensées l'angoisse grandissante du moment fatidique. La voix du brun en face de lui accaparait son attention, c'est pourquoi les silences lui étaient devenus quasiment insupportables. Mais ces instants relevaient à la fois d'une sorte de magie, douce et enivrante. Quand les cordes vocales d'acier ne résonnaient plus, c'était le corps qui s'exprimait. Un geste, un tic, un soupir, un sourire, un regard… Toutes ces actions, aussi infimes semblaient-elles être, causaient un déferlement de bonheur chez la Rock-Star et réchauffaient son coeur, l'entrainaient dans des courses folles. Ses pupilles se dilataient d'affection, et ce sentiment de douceur, ce sentiment de joie et d'excitation que seul l'amour lui procurait le prenait à la gorge tant il était puissant : c'en était presque trop. Klavier en perdait la notion du temps.

Quand le procureur revint à lui, Apollo, la tête reposée sur son poing, avait les yeux perdus dans le vide, l'index de sa main libre suivait inlassablement le bord de son verre encore à moitié rempli.

"Tout va bien ? demanda doucement Klavier.

L'index d'Apollo interrompit son manège. Sans relever les yeux vers lui, il répondit :

- Je repensais à ma cliente, Valentine Sedaye…

- Elle va finir par me rendre jaloux, murmura narquoisement Klavier en portant son verre à ses lèvres.

L'avocat ne réagit pas et poursuivit le fil de sa pensée.

- Je me demandais… Comment est-ce qu'on peut en arriver à ce point ? Je veux dire… Se faire manipuler, être prêt à faire n'importe quelle concession pour quelqu'un, et même une fois devant les tribunaux couvrir cette personne qui se fiche complètement que tu puisses mettre ta vie en jeu pour elle et qui ne te le rendra jamais ? Ça me dépasse…

Klavier reposa son verre sans un bruit. Après avoir réfléchi quelques instants à la question, il se pencha dans sa direction, fixa ses yeux bruns et tenta de se l'expliquer à mi-voix :

- L'amour rend aveugle… Certains seraient prêts à tout pour la personne qu'ils aiment, y compris ce que leur conscience leur interdirait d'ordinaire. C'est parfois pire quand on cherche à plaire, à regagner un amour qui s'éloigne et qu'on n'arrive pas à rattraper… On devient une tout autre lorsqu'on est touché par l'amour. C'est quelque chose d'intense, d'incontrôlable, qui devient vital et rend complètement dingue. Ce n'est pas seulement un cœur qui bat la chamade, ce ne sont pas que des frissons, c'est la sensation de vie. C'est cette impression que l'autre nous fait sortir la tête de l'eau, c'est l'impression de respirer, d'avoir enfin trouvé la force de soulever des montagnes, d'affronter n'importe quelle épreuve. C'est comme remettre son existence même aux mains de l'autre, aveuglément, car la confiance qu'on lui accorde est absolue. C'est comme une drogue quelque part : plus on y pense, plus on en réclame, ça devient une addiction qui nous fait faire toutes ces choses stupides comme des dîners de St-Valentin, ricana-t-il avant de reprendre plus lentement. Moi ça m'a toujours empêché de dormir, et à mon avis tu es celui qui m'a dérobé le plus d'heures de sommeil de toute ma vie. Il marqua une pause quand les joues d'Apollo s'empourprèrent. Je pense que j'aurais fait les mêmes conneries que ta cliente pour toi, si ce n'est pire.

L'image de la boîte cachée dans une poche de son manteau refit surface dans son esprit. L'expression de Klavier changea, devint plus grave et sérieuse. La Rock-Star se mordit la lèvre nerveusement. Apollo fronça les sourcils : il l'avait remarqué à peine quelques dixièmes de seconde passés.

- Klav', ça va ?

Le blond détourna un instant le regard, rassembla ses esprits et prit une grande inspiration.

- Apollo, il y a quelque chose que je veux te demander depuis longtemps…

- Je t'écoute.

La Rock-Star s'éclaircit la voix une dernière fois. Sa main se glissa discrètement dans la poche de sa veste et prit la petite boite veloutée entre ses doigts.

- Uhm… Voilà, ça va te paraître un peu niais mais j'ai vraiment réalisé à quel point j'avais de la chance d'être à tes côtés. Tu m'as redonné le sourire quand je ne savais même plus ce que cela signifiait. Tu m'as fait oublier mes problèmes et mes peines, j'ai redécouvert ce qu'était la joie avec toi. Tu es la plus belle chose qu'il me soit arrivée, honnêtement, tous les moments que l'on a passés ensembles sont inestimables. Et je ne veux surtout pas que ça change ou que ça s'arrête.

Klavier ramena sur la table la boîte encore dissimulée dans son poing.

- Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, j'aimerais-

- Apollo ! Procureur Gavin, quelle coïncidence !

Le jeune avocat tourna la tête, surpris, en direction de la voix qu'il avait reconnue comme familière. Le procureur, quant à lui, se mordit la joue de frustration et d'agacement. Il rangea à nouveau le petit objet dans sa poche, avant de se tourner dépité vers le fauteur de trouble.

Phoenix Wright se dressait devant eux, dans son habituel costume trois pièces bleu, mains sur les hanches, un grand sourire sur son visage.

- Je suis rassuré, il n'y a pas que les vieux qui fêtent la St-Valentin au restaurant" lança-t-il en désignant du nez le procureur Hunter occupé à récupérer leurs manteaux aux vestiaires.

En effet, les deux amants repérèrent l'imposante carrure du chef de la circonscription leur faisant signe de la main.

Le blond était partagé entre le sentiment de gêne grandissant de rencontrer par hasard son supérieur lors d'un rendez-vous galant et l'amertume d'avoir été coupé dans ce qui devait être la déclaration la plus importante de sa vie.

Apollo de son côté était visiblement très mal-à-l'aise et balbutiait quelques mots inaudibles, dissimulant mal le rouge lui montant jusqu'aux oreilles.

Phoenix échangea quelques banalités avec eux avant que Hunter ne le traîne de force à l'extérieur après avoir eu pitié des deux jeunes.

Une fois les supérieurs respectifs repartis, un silence pesant demeura. Le premier à le rompre fut un rire nerveux incontrôlé du procureur blond. Apollo, lui restait muet de gêne et regardait son rencard d'un air désolé.

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" Je suis vraiment désolé Klav', je ne m'y attendais pas du tout.

- Non ne t'en fais pas ce n'est pas de ta faute.

Les deux hommes marchaient côte à côte sous le ciel étoilé. Le malaise de la rencontre imprévue les avait suivis jusqu'à la sortie du restaurant.

- Non mais si, je m'excuse, ça a plombé l'ambiance. En plus tu étais en train de me dire quelque chose d'important, ça nous a coupé, c'est…

- Ne t'inquiète pas, ce n'est pas grave, arrête de culpabiliser.

Alors que son souffle produisait un brouillard blanchâtre dans l'air, Apollo glissa sa main dans celle de Klavier et se colla à lui. Après quelques minutes sans échanger un mot, l'avocat lui partagea son tracas :

- Qu'est-ce que tu voulais me dire tout à l'heure ?

La prise de Klavier sur sa main se resserra. Son poignet se sentit bientôt oppressé par le bracelet qui se contractait sur sa peau. Encore cette sensation… Le bracelet d'Apollo avait déjà réagi durant le dîner sans que ce dernier ne sache pourquoi. Soudain, le brun sentit ses pupilles se dilater violemment, sa vue se décupla et son esprit était devenu ingérable. Il avait beau essayer, il n'arrivait pas à se sortir de cette sorte de recherche frénétique du moindre tic nerveux. Il lui était devenu impossible de se concentrer sur où il mettait les pieds et la lumière des lampadaires l'éblouissait tant qu'il dût fermer les yeux. Klavier s'arrêta avec lui et demanda tout bas si ça allait. Désormais devant lui, la carrure de son conjoint aidait à masquer la lumière, ce qui permit à Apollo de rouvrir doucement les yeux. C'est à ce moment précis que son regard s'épingla sur la main de Klavier enfouie dans la poche de son manteau. Elle remuait, il n'en avait probablement pas conscience.

La curiosité de l'avocat fut piquée : qu'y avait-il de si important là-dedans pour qu'il soit resté tendu toute la soirée ?

Apollo releva son regard brillant et déterminé vers les yeux du procureur.

"Qu'est-ce que tu voulais me dire ? Tu ne m'as pas répondu.

Klavier souffla, d'abord pris au dépourvu, puis frustré que la rencontre du restaurant l'ait coupé dans son élan. Il ne savait plus où reprendre désormais.

- Tu étais en train de me faire un de tes grands discours mièvres sur l'amour, l'aida Apollo.

- Déjà, d'un, c'était un discours sur toi. De deux, c'était peut-être mièvre, mais c'était sincère.

Malgré la pénombre, la Rock-Star pouvait distinguer les pommettes du jeune homme en face de lui se colorer légèrement et entendre un petit ricanement discret. Ses yeux pétillants luisaient dans son ombre, ses cheveux, un peu décoiffés, flottaient au vent et le blond fut pris d'une envie irrépressible d'y emmêler ses doigts. Et il crevait du désir de réchauffer ses lèvres, frissonnantes dans le froid, en leur offrant la chaleur des siennes. Il suffirait de lui répondre ça.

- Je disais juste que tu me rendais plus heureux que je ne l'ai jamais été, simplement en étant qui tu es. Si je devais dresser une liste de tout ce qui est source de bonheur chez toi, on risque de ne jamais en voir la fin, ricana-t-il. Rien que maintenant, j'ai envie de te prendre dans mes bras, de contempler tes yeux ou me perdre dans tes cheveux. Il y a tant de choses que j'aimerais faire avec toi, tant de chose à explorer et réexplorer. J'ai besoin d'être à tes côtés. Je veux que rien ne change. Je veux qu'on continue de sortir, je veux qu'on continue toutes ces bétises de St-Valentin, je veux qu'on continue de rire comme de pleurer, je veux qu'on se froisse, qu'on résolve des enquêtes ensemble, je veux que tu restes ma source d'inspiration, je veux continuer de voir ton air mal-à-l'aise quand je te chante une chanson écrite pour toi, je veux pouvoir te serrer dans mes bras et t'embrasser jusqu'à la fin de ma vie, je veux regarder le ciel avec toi tous les soirs, je veux me faire réveiller par tes vocalises tous les matins…

Et cette fois, Klavier put ressortir la boîte de sa poche sans que personne ne l'interrompe, et l'ouvrit. À l'intérieur se présentait une fine chevalière d'argent, ornée de deux liserés rouges et d'un petit rubis solitaire.

Le bracelet d'Apollo se desserra.

- J'aimerais tenter de nouvelles expériences avec toi, alors…Je me suis dit, pourquoi ne pas commencer par là… ?"

Klavier releva les yeux vers Apollo, qu'il trouva naturellement consterné. Ses yeux bruns observaient avec considération l'anneau. Les deux restèrent muets. L'attente d'une réponse de la part de l'avocat était de plus en plus angoissante. Quelques secondes d'un silence religieux s'écoulèrent encore, puis le jeune avocat releva la tête vers son amant.

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L'appel du devoir avait conduit Ema dans un vieil hôtel miteux et douteux avant le lever du soleil. Un crime passionnel l'avait fait tomber de son lit : un homme, criblé de pas moins de six coups de couteau, assassiné cette nuit du quatorze au quinze février selon le légiste, retrouvé dans une chambre. Les empreintes analysées sur l'arme du crime et des cheveux sur la scène avaient mené à l'arrestation d'une suspecte qui pourtant clamait son innocence.

Ema se tenait chancelante de fatigue à l'extérieur de la zone protégée par les rubalises jaunes. D'un geste mécanique, elle enfournait un à un les snackoos du paquet qu'elle tenait sous le bras dans sa bouche. Le soleil émettait ses premiers rayons lorsque la porte de l'ascenseur s'ouvrit. La détective reconnut immédiatement le jeune homme habillé de rouge qui en sortit ainsi que sa jeune sœur qui l'accompagnait. Cette dernière semblait excitée comme une puce et pressait son frère de mille et une questions auxquelles il ne semblait pas vouloir répondre dans l'immédiat. Les deux acolytes arrivèrent devant Ema et la saluèrent. Ils étaient venus enquêter eux aussi, après avoir accepté de prendre l'affaire du côté de l'accusée. Ema les autorisa à examiner la scène de crime.

Vérité passa devant, pendant que son frère remerciait la détective d'un geste de la main. À cet instant, un rayon de soleil fit étinceler la main d'Apollo.

Et Ema la vit, cette bague d'argent portée sur son annulaire gauche. Et elle comprit que tout s'était finalement bien passé pour Gavin. Et cette image encore collée dans sa rétine réussit, malgré un début de journée agité, à lui arracher un large sourire attendri.