Cette fic est écrite dans le cadre de la 136ème nuit écriture du FoF (Forum Francophone) pour le thème "Plénitude". Le FoF est un forum regroupant tous les francophones de ffnet où l'on peut discuter, demander de l'aide ou s'amuser entre nous. Le lien se trouve dans mes favoris. Rejoignez-nous !


Il y avait eu son enfance. Solitaire, silencieuse. Trop seule, trop petite dans une maison trop grande et trop vide. Elle savait pourquoi. Elle comprenait que ses parents devaient travailler et que leur absence était le prix à payer pour le luxe dans lequel ils vivaient et le fait qu'à part de la compagnie, elle n'avait jamais manqué de rien. Elle avait découvert le Duel de Monstres, ses parents lui avaient acheté toutes les cartes qu'elle souhaitait et ses Dame Harpie étaient devenues ses nouvelles amies. Est-ce que pour autant ça lui suffisait, est-ce qu'elle était heureuse ? Non. Mais elle s'en fichait. Ses cartes l'occupaient, c'était tout ce qui comptait.

Il y avait eu son adolescence. Celle de son ascension en tant que duelliste, celle où ses Dame Harpie et elle avaient pris leur envol pour écumer les tournois et se faire une renommée. Elle y arrivait, facilement, ses tours de passe-passe et la puissance de son jeu venaient systématiquement à bout de ses adversaires. Et, quand elle reçut l'invitation au tournoi du Royaume des Duellistes, celui qui réunirait uniquement les meilleurs, elle sut qu'elle y était parvenue. Elle avait atteint cette renommée et cette reconnaissance qu'elle espérait tant. Est-ce qu'elle était heureuse à présent ? Oui. Non. Peut-être. Elle n'en savait rien. Et puis, la question n'avait pas d'importance.

Il y avait eu le tournoi du Royaume des Duellistes. Et sa rencontre avec eux. Sa défaite contre Joey qui lui avait apporté après coup tellement plus. Le repas au coin du feu où elle avait trop rapidement oublié qu'elle ne faisait pas partie de leur groupe, tellement ils l'avaient acceptée et intégrée. Yugi et Joey qui volaient à son secours quand Panik lui était tombé dessus. Yugi qui se mettait en danger pour récupérer ses étoiles, Joey qui la narguait avant de les lui rendre au simple prétexte qu'elles avaient toujours été à elle. Et, quand Yugi s'était effondré face à Kaïba, quand Joey avait perdu toute chance de pouvoir affronter Bandit Ken, elle n'avait pas réfléchi longtemps. Bien sûr qu'elle les avait aidés. Parce qu'elle avait une dette envers eux. Et qu'elle les aimait bien. Est-ce qu'elle était heureuse avec eux ? Probablement. Parfois, oui. Mais elle ne faisait pas partie de leur bande. Elle ne pouvait pas rester.

Il y avait eu le tournoi de Bataille Ville. Leur rencontre au lancement, et ce sentiment de plénitude à l'instant où elle les avait aperçus. Un nouveau tournoi signifiait forcément les retrouver, et cette pensée l'égayait bien plus qu'elle ne l'aurait cru. Elle avait rencontré Sérénity en les sauvant Tristan, Duke et elle des griffes des pilleurs de l'ombre, ils avaient retrouvé les autres au moment où Joey se défaisait de l'emprise de Marek. Et ils étaient restés ensemble. Est-ce qu'elle avait été heureuse, dans ce moment-là, celui où ils se rendaient tous ensemble vers le lieu de la finale de Bataille Ville ? Oui. Mais elle ne le savait pas encore.

Il y avait eu le Royaume des Ombres. Ce moment de désespoir, de ténèbres et d'abandon où tous ses démons étaient plus que jamais revenus la hanter. Sa solitude, sa faiblesse dans un monde trop grand auquel elle ne comprenait rien et dont elle savait qu'elle ne pourrait pas s'échapper seule. Un cauchemar sans fin dont elle ne pouvait pas se réveiller, où elle ne pouvait pas non plus s'endormir pour essayer d'y échapper. Parfois, elle se disait que Joey ne la laisserait pas tomber, qu'il parviendrait à battre Marek et à la ramener. Souvent, elle se disait que si vraiment il l'avait souhaité, alors il l'aurait déjà ramenée et que le fait que ce cauchemar dure encore et encore signifiait juste qu'il l'avait oubliée. Est-ce que c'était de sa faute ? Est-ce que, à force de ne pas avoir su profiter des moments où elle était heureuse avec eux, le destin le lui avait fait payer en coupant court à la seule chance qu'elle aurait jamais ? Probablement.

Il y avait eu son départ, le premier. Celui où Yugi l'avait ramenée après avoir vaincu Marek, celui où ils s'étaient séparés sur les quais de Domino en se jurant que ce n'était qu'un au revoir. Elle y croyait, dur comme fer. Le Royaume des Ombres lui avait servi de leçon, elle savait que c'était auprès d'eux qu'elle était heureuse et qu'elle ne voulait plus les quitter. Elle y était bien obligée, pourtant, elle n'habitait pas ici, et puis sa ville et son quotidien lui manquaient également. Elle partirait, elle écumerait les tournois, des tournois dans lesquels il n'y aurait ni Royaume des Ombres ni Dieux Egyptiens, des tournois dans lesquels elle pourrait combattre à la loyale et qu'elle remporterait à coup sûr en affirmant sa réputation. Oui, elle y croyait. Elle était heureuse avec eux, elle ne faisait que s'éloigner pour mieux revenir.

Il y avait eu Dartz. Dartz et Valon, qui l'avaient retrouvée alors qu'elle était plus perdue et seule que jamais. Elle avait un temps songé à revenir à Domino, retrouver Joey et les autres, tellement sa solitude la dévorait. Mais elle n'aurait pas souffert de cette solitude si elle avait eu la puissance et la reconnaissance en tant que duelliste, et tant que Joey et Yugi seraient là et meilleurs qu'elle, elle n'obtiendrait rien de tout ça. Valon lui avait offert une alternative, de l'amitié et de la puissance réunies, et à cet instant, cela lui avait paru comme l'offre la plus attirante de tous les temps. Il lui manquait toujours quelque chose pour être heureuse, mais elle se persuadait que c'était de vaincre Joey. Bientôt. Bientôt, elle le battrait enfin en duel et alors, plus rien ne lui manquera jamais.

Il y avait eu son deuxième départ. Celui où la honte et le ressentiment l'avaient forcée à fuir à nouveau, parce qu'elle savait que sans moyen de se faire pardonner pour le mal qu'elle leur avait fait, elle n'oserait plus jamais les regarder dans les yeux. Eux-mêmes l'avaient probablement pardonnée, peu importe. C'était elle que cela gênerait beaucoup trop de faire comme si rien ne s'était passé, elle qui tenait cette fois à partir et ne revenir que lorsqu'elle sera en mesure de laisser cette histoire derrière elle. Cela prendra des mois, des années certainement. Tant pis. Elle attendait depuis plus de vingt ans d'être heureuse, elle n'était plus à ça près.

Il y a eu leurs retrouvailles. Un tournoi, trop bas de gamme pour qu'elle s'attende à les croiser. Mais Yugi n'était plus le même après son voyage en Egypte et il avait semblé tenir à refaire des tournois de moindre envergure pour reprendre confiance en lui. Joey l'avait accompagné. Et ils s'étaient retrouvés, autour d'un duel. D'une série de duels, d'abord elle-même contre Joey, puis contre Yugi après qu'elle l'ait vaincu. Yugi avait gardé son titre, mais cela avait peu d'importance au final. Elle les avait retrouvés, après suffisamment de temps pour être capable de faire table rase du passé. Elle était restée avec eux et avait retrouvé ce sentiment de plénitude qui l'envahissait à chaque fois en leur présence. Et, à cet instant, elle s'était demandé comment elle avait pu être suffisamment idiote pour ne pas comprendre plus tôt à quel point elle ne voulait plus jamais être séparée d'eux. Plus jamais être séparée de lui.

Il y a eu leur mariage. Pour le meilleur et pour le pire. Ils ont déjà connu le pire ensemble, leur rivalité, leurs séparations, le Royaume des Ombres et le cercle d'Orichalque. Elle suppose qu'ils peuvent maintenant se concentrer sur le meilleur. Les tournois qu'ils écument ensemble, la maison dans laquelle ils ont emménagé, leur rivalité toujours présente dès qu'ils enfilent leurs disques de duel mais qui ne change rien à leur complicité et leur entente. Et leur bonheur. Elle s'était trop longtemps persuadée que ce sentiment de plénitude quand elle était à ses côtés n'était que passager, qu'elle n'était heureuse de le voir qu'uniquement parce que ça n'arrivait pas souvent et qu'elle s'en lasserait à force. Joey lui prouvait le contraire chaque jour, à chaque seconde qui passait, et aujourd'hui, une part d'elle s'en veut de ne pas avoir compris plus tôt qu'elle pouvait être véritablement heureuse tant qu'elle restait à ses côtés.


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