Prologue

"Grand-mère, apporte moi un verre de vin!"

Non loin de Versailles et de son château, se trouvait le domaine de Jarjayes. Principale résidence du comte du même nom. Cet aristocrate faisait parti d'une des plus importantes familles de la noblesse de France, occupant un poste de général au sein de l'armée royale. Regardant d'un air distrait par la fenêtre d'un des nombreux salons du château, l'homme d'âge mûr pensait à ce qu'il avait accompli dans sa vie d'adulte.

"Voici votre verre de vin, monsieur"

-Merci, tu peux retourner à tes occupations".

Sa vie était un modèle dans l'aristocratie. Il était l'un des sujet du roi les plus respecté, et avait grimpé les échelons de sa carrière militaire en faisant honneur à la réputation des Jarjayes.

Il avait épousé la magnifique Adélaïde de Gorvennes, qui avait excellé dans son rôle d'épouse. Vraiment? Se demanda il. Parfois, il devenait quelque peu irrité en pensant à cet élément de sa vie qui lui avait d'abord apporté joie, puis impatience et frustration. Tout cela s'était fini en une colère folle il y a onze ans. Le problème? Madame de Jarjayes ne lui avait jamais donné de fils. Non pas qu'elle ai été incapable d'enfanter, loin de la, mais il semble que la famille du comte de Jarjayes ne soit destinée à ne s'agrandir que de par des filles.

Cinq filles étaient nées. De jolies demoiselles dont la plupart étaient maintenant mariées à de très bons partis. Le général, lui, avait commencé à s'impatienter de voir un jour naître son héritier. Madame de Jarjayes tomba une cinquième fois enceinte en 1754, à la grande joie du général. Il espérait cette fois qu'elle enfanterait d'un héritier mâle pour lui succéder. Qu'elle ne fut pas sa déception en ce jour de Noël quand naquit une jolie fille, aux cheveux blonds comme les blés et aux yeux bleus comme un ciel d'été. Le général se souvient du moment où il entra dans la pièce où madame de Jarjayes, épuisée, reposait avec l'enfant dans ses bras.

Ce moment, de pur bonheur pour certain, ne fut vu par le général que comme une énième humiliation. Qu'avait il fait au seigneur pour être autant puni! D'un mouvement brusque, il s'avança en direction de son épouse, et devant son regard terrifié, lui pris l'enfant des mains. Excédé par des années à attendre en vain quelque chose qui finalement n'allait sûrement jamais arriver, le général décida de défier ce seigneur qui se jouait de lui. Aujourd'hui encore, il peut entendre ses propres mots résonner dans sa tête:

"Écoutez moi tous! Et surtout toi!" Cria il en regardant le nouveau né. "À partir d'aujourd'hui, tu es mon fils! Tu t'appelera Oscar et tu seras mon héritier !'"

Ainsi, Oscar de Jarjayes fut élevé en garçon et héritier depuis son plus jeune âge. Il, ou en vérité elle, avait été éloignée de ses sœurs mais également de sa mère dès que cela fut possible. Son père avait chargé un maître d'arme à lui apprendre à manier l'épée dès qu'elle en fut capable. Elle devait constamment s'entraîner. Un jour, le général de Jarjayes eu l'idée qu'il lui faudrait un modèle masculin tout au long de sa vie. C'est le petit fils de grand-mère, André, qui fut choisi pour ce rôle. Oscar avait six ans quand André arriva au château de Jarjayes. Il avait perdu ses deux parents lors d'une épidémie dont il avait miraculeusement échappé.

Regardant par la fenêtre, le général était enfin satisfait. En contrebas, son fils Oscar, ferraillait avec André. A dix ans, il était déjà une fine lame. Oui, il était satisfait de ce choix fait plus d'une décennie plus tôt.

"Que t'arrive il André?! Tu es déjà fatigué! Ressaisis-toi mon pauvre!" Se moquait gentiment Oscar, attaquant un André poussé dans ses derniers retranchements.

-" Attends un peu pour voir Oscar! Yaaah!".

Les deux enfants étaient devenus les meilleurs amis très vite après s'être rencontrés. André n'avait jamais vu Oscar comme un garçon mais gardait ses remarques pour lui. Il savait que cela pourrait lui créer de gros ennuis auprès du général si ce dernier l'entendait dire qu'Oscsr n'était pas un garçon. Seule grand-mère lui tenait tête dans sa décision d'avoir fait d'Oscar un garçon et un héritier.

Déjà plus d'une heure qu'ils ferraillaient. Oscar, au début agile et dominant André dans le combat, s'était petit à petit retrouvée dans une situation périlleuse lorsqu'André, utilisant sa botte secrète, la désarma. Il avait remarqué qu'Oscar semblait de plus en plus troublée durant le combat. Oscar resta figée, et c'est à ce moment qu'André compris que ce qui venait de se dérouler n'était pas dû à sa dextérité. Bien au contraire, il semblait qu'Oscar avait arrêté de se battre petit à petit. En la regardant, André remarqua son visage inquiet, mais surtout, les tremblements qui l'animaient.

"Oscar? Tu vas bien? Que t'arrive il?

-André… j'ai… j'ai…"

Oscar semblait maintenant terriblement inquiète.

"parle moi Oscar, dis moi ce qui ne va pas!" Dit André dont la voix était rendue plus aiguë par l'inquiétude.

"André…. mon ventre. J'ai si mal…"

Oscar était pliée en deux et la douleur pouvait se lire sur le beau visage de la jeune fille. Un dernier regard vers André et elle tomba subitement à terre, pâle comme un linge.

"Oscar!" Cria André alors qu'il tombait à genoux et commençait à la secouer pour lui faire reprendre connaissance. C'est alors qu'il la remarqua. Cette tâche de sang au niveau de l'entrejambe. Cette tâche, qui s'affichait comme une preuve indéniable que l'héritier des Jarjayes, aussi mâle soit il, était officiellement devenu une femme.

À suivre...