Ceci est une traduction de la fanfiction The Drinny Thing écrite par Colubrina (lien pour la VO sur mon profil).
Ginny se tenait sur le bord du chemin tandis que le nouvellement nommé Trio d'or avançait en saluant la foule. Elle n'en avait jamais voulu à Harry auparavant mais, tout à coup, ce fut le cas. Il sourait à la foule, son bras entouré derrière Hermione. Ginny savait qu'il jouait un rôle et qu'il détestait l'attention mais, pour la première fois, elle s'en fichait.
Ses doigts rampèrent vers l'une des cicatrices qu'elle avait eues lors de cette terrible année à Poudlard, quand elle avait compris ce qu'était la torture sous les mains des Carrow. Les gens évoquaient à voix basse ce qu'avait enduré Hermione, un secret connu du monde entier, mais personne ne pensait à ceux et celles que le Trio avait laissés derrière lui. Elle connaissait la douleur d'un Endoloris. Ils la connaissaient tous.
Cela ne dérangeait pas Neville. Il baissait la tête, faisait peu de cas de tout ce qu'il avait fait durant leur absence. Il ne voyait pas de mal à jouer les seconds rôles, l'éternel acolyte. Il était heureux de retourner dans la serre, avec ses plantes.
Ginny se souvenait de ces jours où elle se glissait dans l'abri de jardin pour voler des balais parce qu'elle devait apprendre à voler en secret. Elle se souvenait aussi devoir se ressaisir rapidement après avoir passé une année à être possédée. Les seules aides qu'elle avait reçues de sa famille était des réprimandes, parce qu'elle avait été assez stupide pour faire confiance à un objet ensorcelé, et du chocolat chaud.
Harry avait oublié ce qu'elle avait subi. Lorsqu'elle lui avait rappelé qu'il n'était pas seul, qu'elle aussi connaissait cette sensation d'avoir Voldemort dans sa tête, il avait rougi et marmonné : « J'avais oublié. »
« Quelle chance » avait-elle répondu.
Elle ne pouvait pas oublier. Elle ne pouvait pas oublier la possession ni le fait qu'elle avait dû apprendre dans l'ombre des choses que ses frères pouvaient faire au grand jour. Elle ne pouvait pas oublier la sensation d'un Endoloris ni le rire fou d'Alecto Carrow qui l'accusait d'être une traîtresse à son sang. Elle ne pouvait non plus oublier que Bellatrix Lestrange avait essayé de la tuer. Bellatrix savait qu'elle était dangereuse. Bellatrix savait qu'elle était puissante.
Personne d'autre ne semblait s'en souvenir.
Elle se redressa et applaudit son frère et ses amis qui passaient devant elle en faisant des signes de main. Ron était à la fois gêné et heureux de cette situation.
« Quelle bonne petite amie tu fais. » Malefoy était derrière elle. Depuis la guerre, il savait se montrer aux bons endroits et les Malefoy avaient donné de l'argent aux bonnes causes. Il s'était totalement et absolument repenti. Elle n'y croyait pas. « Tu te tiens sur le côté et tu applaudis les héros.
- Va te faire foutre, Malefoy, répondit-elle sans tourner la tête.
- Ne l'as-tu pas également attendu très patiemment ? » Continua Drago comme si elle n'eut pas parlé. « Tu entretenais le feu de la cheminée* pour que tout soit prêt à son retour, non ?
- Les seuls feux que j'ai allumés étaient pour-
- Oh, je sais, interrompit Drago. Tu as mené une sacrée insurrection avec Londubat et la Serdaigle. Elle n'est pas si cinglée finalement, pas vrai ?
- Il n'y a rien qui cloche chez Luna.
- Et c'est pour cela que je me demande ce que tu fais sur le côté et non parmi le défilé. »
Les mots de Malefoy tombèrent sur ses épaules et elle ouvrit la bouche pour rétorquer mais toutes ses paroles n'auraient été que cendres et rage donc elle se tut. Il s'approcha et déposa une petite boîte dans sa main. Les doigts de Ginny s'enroulèrent autour du cadeau ; c'était l'une de leurs méthodes pour échanger des informations à Poudlard l'an passé. Des messages glissés dans les mains tandis que les élèves gardaient leurs yeux rivés sur leurs professeurs et bourreaux. « Qu'est-ce que c'est ? Lui demanda-t-elle.
- Un Portoloin pour le Manoir, répondit-il. Au cas où tu serais intéressée pour être autre chose qu'une supportrice. »
Elle avait voulu se débarrasser du Portoloin. Pour qui Malefoy la prenait-il ? Elle n'était pas une fille de joie qui accourait lorsqu'un riche lui faisait signe de son doigt probablement manucuré.
Puis il y eut cette énième réception. Sa mère avait insisté pour qu'elle accepte de s'y rendre parce que c'était important pour le travail de son père qu'ils donnent l'image d'une famille unie. Donc elle avait dû écouter un autre discours ministériel, si barbant que même Percy avait eu l'air de s'ennuyer. Elle faillit déchirer la couture de sa robe de seconde-main en sortant sur le balcon pour prendre l'air et elle renversa le contenu de son sac en essayant de trouver des chewing-gums pour s'enlever de la bouche le goût de la piquette qui était servie à table.
La boîte offerte par Malefoy se trouvait là, parmi des bouts de parchemin, une plume cassée et des mouchoirs sales. Elle la regarda jusqu'à ce qu'elle murmure « Et puis merde », alors elle ouvrit la boîte et laissa son contenu l'entraîner vers ce qui semblait être une bibliothèque plongée dans la pénombre.
Drago devait avoir programmé le Portoloin pour être informé de son utilisation parce qu'il arriva dans la pièce, passant par une lourde porte, quelques instants après elle. Il examina du regard sa robe et ses chaussures bon marché et elle lisait dans ce regard tous les Noises qui lui manquaient. Tout ce qu'il dit cependant fut : « Je ne t'attendais plus. »
Elle s'affala sur un fauteuil en cuir sombre et étendit ses jambes. Ses cuisses se dénudèrent dans le mouvement mais il ne regarda pas, ce qu'elle apprécia. « Le vin était dégueulasse à la soirée On-Aime-Nos-Héros du Ministère, dit-elle. J'ai pensé que tu pourrais me proposer mieux.
- Tu n'es pas un peu jeune pour les galas du Ministère et le vin bon marché ?
- Tu n'étais pas un peu jeune pour faire entrer des Mangemorts dans Poudlard ?
- Bien vu. » Il fit venir une bouteille et lui servit un verre. « À ceux qui ont cessé trop tôt d'être des enfants » dit-il en levant le verre qu'il tenait déjà à la main.
Elle leva son propre verre puis but une gorgée. Il y avait autant de ressemblance entre ce vin et celui qu'elle buvait plus tôt dans la soirée - lorsqu'elle jouait à la fille dévouée et à la sœur impressionnée - qu'entre Drago Malefoy et Harry Potter.
Elle n'avait pas dû contrôler sa réaction puisqu'un sourire étira lentement les lèvres de Malefoy. « Tu l'aimes à ce que je vois.
- J'ai bu pire, répondit Ginny. Qu'est-ce que tu veux ? »
Il but une gorgée puis dit : « Gouverner le monde. Quoique secrètement. N'être à la merci de personne. » Il marqua une pause puis ajouta : « Je n'aime pas suivre des ordres, faire ce qu'on me dit de faire, plus maintenant.
- Le monde entier ? »
Il haussa les épaules. « La Grande-Bretagne au moins. » Il but un autre gorgée. « Le monde magique britannique. On ne peut pas dire que les Moldus m'intéressent.
- Gouverner le monde ? Interrogea Ginny. Avec quoi ? Des cartes explosives et des plumes en sucre ? Ou préfères-tu retenter ta chance avec la Magie noire et quelques lunatiques, parce que cela a si bien fonctionné la dernière fois que quelqu'un a essayé. »
Drago ne prit pas la mouche. « Tu es très jolie » dit-il et on aurait dit qu'il énumérait les qualités d'un balai qu'il envisageait d'acheter. « Ronald était un glandeur, heureux de laisser Hermione faire ses devoirs en échange d'un peu de son affection et de son amitié, les jumeaux étaient des électrons libres mais ça a toujours été toi l'arme fatale de la famille. » Il haussa les épaules. « Septième enfant, tout s'explique.
- Jolie ? Demanda-t-elle.
- Je sais que tes parents sont pauvres mais les miroirs ne sont pas si chers que ça » répondit-il. Il la regardait en souriant, d'un air presque moqueur, mais pas tout à fait. Cette expression déridait son visage et lui donnait l'air espiègle d'un petit garçon plutôt que celui d'un chasseur devant une proie. « Tu sais à quoi tu ressembles.
- À une traîtresse à son sang, fit-elle remarquer.
- Encore mieux, dit-il, c'est bon pour la politique. »
Elle attendit qu'il continua. « Je ne vais pas utiliser des jeux de cartes ou des bonbons, dit-il. Et personne, vers la fin, n'aimait le Seigneur des Ténèbres.
- Les Carrow, dit-elle.
- Il se peut qu'un accident arrive à Azkaban, rétoqua-t-il. Les gens n'aimaient pas l'Ordre non plus » continua-t-il sur sa lancée. « Dumbledore a été épinglé par Rita Skeeter, et une organisation secrète composée de loup-garous, de criminels et d'écoliers ne peut pas aller bien loin.
- Et ton plan c'est de… ? »
Il prit une autre gorgée et lui sourit. « Gagner, répondit-il. Je compte gagner. » Son sourire de garçon espiègle revint sur ses lèvres. « Et je compte te courtiser. Toi, une Sang Pur, la dernière née de deux anciennes familles de sorciers. Si tu acceptes.
- Je me fiche de ces conneries, dit Ginny.
Drago haussa les épaules. « Pas moi. C'est rédhibitoire pour toi ?
- Me courtiser ? » Ginny prit une nouvelle gorgée de ce vin ridiculement bon et dévisagea Drago comme s'il avait perdu l'esprit. « Je savais que ta famille était vieux jeu mais faire la cour, vraiment ? C'est quoi 1732 ?
- Est-ce que cela veut dire que tu n'es pas intéressée ?
- Je suis même pas majeure, dit-elle. On n'est pas un peu jeunes pour se courtiser et tout ce qui s'ensuit ? »
Le regard de Drago se fit morne pendant un instant. « Je n'ai plus été jeune depuis qu'une Marque a été brûlée sur mon bras, dit-il. Je n'ai plus été jeune depuis qu'on m'a demandé de commettre un meurtre sans quoi je verrais mes parents découpés en morceaux sous mes yeux. Je doute que tu sois restée jeune après que Tom Jedusor a pris résidence dans ton âme.
- Comment tu-
- Je suis bon pour deviner les choses » dit-il. Elle pensa à tout ce à quoi il avait survécu et se dit qu'il devait être bon à beaucoup de choses. « Depuis que la guerre est terminée, j'ai un peu réfléchi. J'ai pris ce que je savais sur les Horcruxes, ce qui t'était arrivé pendant ta première année et la personnalité du Seigneur des Ténèbres, j'en ai tiré des conclusions.
- Toi et moi… C'est une mauvaise idée » dit Ginny, même si elle devait s'avouer que l'idée était tentante. « Et je ne parle jamais de Tom.
- Comment es-tu restée saine d'esprit ? Lui demanda Drago.
- Je n'en parle pas » répondit-elle. Son ton était tranchant et il n'insista pas, de peur de d'être taillé par les couteaux et les débris de verre qu'il y avait dans sa voix. Le regard qu'il posa sur elle, cependant, brûlait d'une rage qu'elle ne savait pas déchiffrer. Ce n'était pas dirigé vers elle et l'étincelle de haine disparut avant qu'elle puisse le questionner.
« Très bien, dit-il.
- Une très mauvaise idée, murmura-t-elle.
- Le but de cette cour, Ginevra, sera de te convaincre que ce n'est pas le cas, dit-il. Le but sera de te convaincre que, au contraire, tu pourrais nous considérer comme une très bonne idée.
- Ça serait… Ron pèterait un câble, dit-elle. Et je suis… J'étais en quelque sorte avec-
- Pas tant que ça, interrompit-il. Après tout, tu es venue ici pour savoir ce que je voulais. » Il baissa les yeux et eut l'air, un instant, vulnérable. « Laisse-moi une chance ?
- Un resto, dit-elle. Un seul resto ensemble.
- Ce vendredi ? Suggéra-t-il. Je passe te prendre à 18 heures ? »
Sa mère la fusilla du regard et Ron semblait prêt à exploser tant son visage rougit de rage mais Ginny se contenta de sourire, d'attraper son sac à main et de rejoindre Drago devant la porte d'entrée. « Ce n'est qu'un immense lâche » cria Ron vers la porte.
« Mais il a de beaux yeux » répondit Ginny en saisissant le bras que lui offrait Drago. Il était arrivé vêtu d'une longue robe noire, drapée autour de ses hanches fines et qui s'arrêtait au-dessus de ses chaussures vernies. Elle se sentait comme une paysanne face à un prince jusqu'à ce qu'elle croise ces yeux qu'elle avait complimentés. La lueur d'appréciation masculine qu'elle y vit ne lui était pas étrangère. Généralement, elle l'apercevait avant que des mains moites se glissent sous son tee-shirt ou que des élèves fourrent leurs langues dans sa bouche.
« Restaurant espagnol, ça te convient ? » Les yeux de Drago brillaient et ses mains luttaient contre une envie de la toucher. « J'ai une réservation. Mais si tu n'aimes pas, nous pouvons essayer ailleurs.
- Je n'ai jamais goûté, dit Ginny. Je suis sûre que ça sera bien. »
Ça l'était. Le restaurant était calme, décoré de bois sombre contre des couleurs intenses et elle se sentit vraiment... pas à sa place. Mais son prince héritier tout de noir vêtu recula sa chaise en suggérant qu'elle le laisse commander puisqu'elle n'était pas familière avec cette cuisine, mais il lui posa des questions intelligentes sur le Quidditch, mais il fit quelques remarques acerbes sur un élève qu'ils connaissaient tous les deux ; et elle se surprit à rire. « T'es un idiot, dit-elle en riant.
- Et un immense lâche » ajouta-t-il. Elle allait objecter mais il saisit sa main et dit : « Sur la fin, j'aurais dit ou fait n'importe quoi pour survivre. Je ne suis pas un héros, Ginevra. Je suis un survivant. » Il retourna la main de Ginny et, de son pouce, se mit à tracer des cercles dans sa paume. Elle avait des frissons dans le dos. « Ton frère n'a pas tout à fait tort.
- Je ne laisse pas Ron choisir mes petits amis » dit-elle. Elle retira sa main au moment où le serveur arrivait avec les salades et se concentra sur sa laitue. « Elle est bonne.
- J'ai d'excellents goûts, répondit Drago.
- En terme de restaurants, oui » consentit Ginny. Elle répondit à son sourire provocateur par un sourire également, mais doux. « T'étais pas avec Pansy Parkinson pendant quelques années ? »
Le sourire de Drago se fana un peu. « Non, dit-il. On n'est seulement amis. Pansy est comme une sœur, je suppose. Nous ne sommes jamais sortis ensemble. » Un pointe d'amertume tintait sa voix. « J'étais assez préoccupé pendant mes deux dernières années à Poudlard. Je n'avais pas vraiment d'énergie à accorder aux filles. »
Cette vulnérabilité soudaine incita Ginny à être elle aussi honnête : « J'ai essayé de réfréner mes souvenirs. » La main de Drago s'immobilisa un instant puis sa fourchette repris son chemin vers sa bouche. « Il avait une belle écriture » continua-t-elle. Elle pouvait encore la voir. Elle la voyait dans ses rêves. Elle voyait les boucles, les lettres gracieuses qui apparaissaient sur son livre. Son si précieux journal ensorcelé.
« Les années 40, dit-il. Les élèves qui écrivaient mal étaient sûrement battus à cette époque. Ils n'avaient pas d'autre choix que d'avoir une belle écriture. » Sa voix était douce mais l'inquiétude crispait les doigts de Ginny autour de sa fourchette.
« J'aime bien cette idée, dit-elle.
- Moi aussi » dit Drago. Il dirigea la conversation vers des sujets plus légers et elle lui fut reconnaissance de cette attention. Alors qu'ils dégustaient leurs desserts, elle commença à regretter ses plans pour la rentrée.
- J'y retourne, dit-elle. À l'école. »
Drago ne parut pas surpris. « Bien sûr, dit-il, il te reste une année. » Leurs pieds entrèrent en contact. « Je vais te manquer ? »
La bouche de Ginny se souleva légèrement. « Pourquoi ? Tu comptes arrêter de me faire la cour ? »
Drago sourit lui aussi et répondit doucement : « Non. »
À suivre...
* Dans la VO, Drago dit "Keeping the home fire burning", (littéralement "garder le feu du foyer allumé") c'est le titre d'une chanson britannique de 1914 qui parle des épouses qui attendent le retour de leur mari de la guerre.
Je ne pensais pas revenir avec une traduction un jour... C'était du passé pour moi ! C'est l'annonce du 3e confinement qui est responsable de ce retour. J'ai besoin de m'occuper l'esprit, les doigts, les pensées.
C'est une histoire sans prétention, simple et efficace, de 10 chapitres au total. J'espère qu'elle vous plaira. Je trouve que Ginny est sous-côtée donc je me suis dit : pourquoi pas proposer cette traduction ?
Je posterai tous les dimanches. Merci à celles et ceux qui liront !
