Le 11ième rat
I come from scientists and atheists and white men who kill God
They make technology high quality complex physiological
Experiments and sacrilege in the name of public good
They taught me everything, just like a daddy should.
La petite fille fixa la cannette en métal devant elle qu'elle avait tout juste à l'instant écrasé au point d'en faire une toute petite boule grise, pas parfaitement uniforme, pas exactement ronde mais presque. Elle avait fait ce qu'on lui avait demandé, et elle était prête à le refaire encore, et encore, et encore, aussi longtemps qu'on le lui demanderait, aussi longtemps que Papa le voudrait. Elle n'avait pas à réfléchir plus que cela, juste à faire ce qu'il voulait. Tant qu'il serait satisfait, elle pourrait être heureuse également.
Mais son Papa, il avait beau dire qu'il l'aimait, et qu'il était fier d'elle, il ne voulait pas seulement qu'elle écrase des cannettes en métal. Il voulait qu'elle sache où étaient des gens et ce qu'ils disaient, rien qu'en voyant leur photo. Il voulait qu'elle fasse pleurer des chats, qu'elle les casse en pleins de petits morceaux. Il voulait qu'elle descende dans des tubes d'eau salée, la plus salée possible, et qu'elle voit d'autres mondes et des êtres, des créatures qui n'avaient rien d'humaines, qu'elle leur parle, qu'elle s'approche d'eux et qu'elle les contrôle. Elle ne savait pas si c'était bien, elle n'avait jamais appris cette notion de ce qui était bien, de ce qui ne l'était pas, mais parfois, faire ces choses lui faisaient du mal.
C'étaient des sacrifices. Elle ne comprenait pas bien ce mot, mais c'était quelque chose d'important. Elle devait « faire des sacrifices » parce que c'était ce qui était bien de faire. Elle n'en savait rien, mais c'était ce que Papa voulait, et tant qu'il le voudrait, elle le ferait. Elle n'avait pas à savoir si les choses étaient bien ou pas, elle n'avait pas à aimer ce qu'elle faisait non plus, elle avait juste à le faire. Même si les gens parlaient de drôles de façons – elle avait appris comment ils parlaient à force, comme une grande. Même si les chats pleuraient et avait mal – elle était comme un chat, ce n'était pas grave non plus si elle pleurait et avait mal. Même si les créatures ouvraient grand leurs gueules pour essayer de la manger – et qu'ils n'étaient pas dans le même endroit qu'elle, dans le monde bizarre, tout noir.
Parfois, elle avait vraiment mal. Sa gorge se serrait fort, elle avait du mal à respirer, les larmes lui montaient aux yeux, son cœur frappait fort et son nez coulait, mais pas rouge comme d'habitude. Elle ne comprenait pas pourquoi elle se sentait comme ça, mais tout son corps était douloureux, et bizarre, et sensible. Quand ça arrivait, Papa était toujours là. Il essuyait ses larmes, et il lui disait d'arrêter de pleurer, d'arrêter d'être sensible. Il lui disait qu'elle devait être forte. Il disait souvent ce mot, forte, mais elle, elle ne le comprenait pas. Il y avait tellement de mots qu'elle ne comprenait pas. Elle ne savait pas si c'était normal. Elle ne savait pas si elle devait connaître ces mots, elle ne savait pas grand-chose, pour être honnête. Elle savait seulement que parfois, elle avait trop mal et que quand c'était le cas, Papa n'était pas assez patient, il n'en avait rien à faire. Quand elle ne pouvait pas s'empêcher d'avoir mal, il l'envoyait dans sa chambre, mais elle détestait ça.
Dans sa chambre, elle était toute seule, face à des murs gris, sombres. Ils étaient fissurés aussi, parce qu'elle avait juste mal parfois et qu'elle ne pouvait rien faire contre, alors elle criait toute sa douleur. Quand elle refusait d'y aller, il demandait aux gens en blanc de l'y emmener de force. Elle avait beau crier, elle avait beau pleurer, elle avait beau l'appeler, rien n'y faisait, Papa s'en fichait et la regardait être emmenée sans rien faire. Une fois, ou plus de fois que ça, elle avait eu peur, en plus d'avoir mal. Elle avait eu si peur, et si mal, qu'elle s'était vengée. Elle savait faire pleurer les chats, et les casser en pleins de petits morceaux. Elle fit pareil avec les gens en blanc. C'était ce qui rendait Papa fier, mais il ne fut pas fier, pas du tout. Il n'était pas fier parce qu'il ne voulait pas qu'elle casse des choses qui ne devaient pas être cassée. Ce n'était pas sa faute. Casser, c'était tout ce qu'elle savait faire.
C'était ce que Papa lui avait appris à faire, avec beaucoup de fierté. Papa était toujours fier quand elle obéissait, et il la récompensait. Il lui offrait du papier, et des crayons de couleur, et il tapotait sa tête. Il restait avec elle, pendant pleins de temps. En plus, quand il était fier d'elle, il l'appelait par son prénom. Onze.
Seulement, elle n'était définitivement douée que pour casser des choses, et une fois, elle cassa un mur qui ouvrit un passage pour les créatures étranges. Elle eut peur de ce qu'elle avait fait, parce qu'elle avait cassé en pleins de petits morceaux des gens en blanc sans le vouloir. Elle avait eu tellement peur, qu'elle était partie. Ce n'était pas bien, elle le savait, Papa avait être fâché, mais il était trop tard. Elle fuit loin, très loin, à toute vitesse. Elle ne voulait pas qu'on la retrouve. Elle ne voulait pas tomber sur les créatures terrifiantes. Elle savait que ces êtres voulaient l'attraper. Elle ne savait pas comment elle le savait. Elle pouvait juste le faire. Elle ne voulait pas non plus qu'on découvre qu'elle avait fait une autre bêtise. Les créatures avaient attrapé d'autres personnes, en essayant de l'attraper elle.
Elle était dans un endroit qu'elle ne connaissait pas du tout. Elle ne connaissait rien en fait, rien du tout, et tout était terrifiant. Il y avait des arbres, de la terre, de la pluie, du vent, et elle ne connaissait rien à tout ça. Elle avait juste peur. Elle avait juste faim. Le vent, qu'elle ne connaissait pas, fit venir à elle une odeur. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentit qu'elle devait la suivre, et elle le fit.
Il y avait de quoi manger, sûrement. Elle n'en était pas sûre, mais elle mit les bâtonnets jaunes dans sa bouche et les avala si site qu'elle en voulait de mâcher, qu'elle s'étouffait presque. On lui cria dessus, et elle eut peur, mais l'homme n'était pas méchant, juste fâché. Il lui donna à manger. Elle ne savait pas ce que c'était, mais elle mangea. Il lui parla, il lui posa des questions, mais elle ne répondit pas. Papa lui avait interdit. Elle n'avait pas le droit de parler à quelqu'un qui n'était pas Papa. Elle aimait bien l'homme quand même. Il était un peu étrange, il avait une drôle d'odeur, comme les bâtonnets jaunes, mais il n'avait pas l'air méchant. Il avait l'air gentil.
Elle comprit très vite que Papa n'était pas content du tout. Il était fâché, fâché contre elle. Il envoya une de ses personnes en noir, et la personne tua l'homme. Ça voulait dire quelque chose de très simple. Papa n'était pas fier du tout, et il allait faire la même chose avec elle. Elle l'avait déjà vu faire avant. Quand Papa n'était pas content de quelque chose, il le cassait. Il cassait comme elle le faisait, et là, c'était elle qu'il voulait casser.
Elle décida de s'enfuir à nouveau, d'essayer d'aller encore plus loin, parce qu'elle ne voulait pas être cassée. Elle n'alla cependant pas bien loin, parce qu'elle tomba sur des gens, des gens qui avaient sa taille, et qui était sur des drôles de choses, des vélos, qu'elle ne connaissait pas. Elle ne le savait pas encore, elle n'était pas sûre qu'elle le comprendrait complètement un jour, mais elle avait attiré l'attention de l'un d'entre eux tout particulièrement.
And you were beautiful and vulnerable, and power and success
Goddamn, I fell for you, your flamethrowers, your tunnels, and your tech
I studied code because I wanted to do something great like you
And the real tragedy is half of it was true.
Mike était plein de choses. Il était curieux, intriguant, différent. Il la regardait d'une façon qu'elle ne comprenait pas, comme si elle était fragile. Elle ne l'était pas, mais lui il l'était. Il était fragile, et fort, et il était vraiment bizarre. Il parlait fort, il la faisait marcher partout. Il voulait qu'elle se change, mais pas devant lui. Il voulait qu'elle mange des gaufres, mais pas qu'elle mange comme lui, en famille. Il voulait qu'elle essaie le fauteuil, mais qu'elle ne sorte pas de la cave. Il voulait qu'elle soit dans sa famille, mais il ne voulait pas qu'elle soit sa sœur. Il voulait qu'elle trouve Will.
Trouver Will. Un autre garçon, comme Mike, comme Lucas, comme Dustin. Elle ne pouvait pas le trouver, elle savait où il était. Il voulait qu'elle l'emmène à lui. Elle ne pouvait pas. Elle ne pouvait pas rentrer. Ce n'était pas bien, ce n'était pas ce qu'il fallait, c'était dangereux. Elle avait peur. Si elle rentrait, elle serait cassée. Elle ne voulait pas être cassée, et elle ne voulait pas que les créatures la trouvent. Elle ne voulait pas trouver Will, mais Mike était comme Papa. Il voulait qu'elle fasse comme il disait, et elle ne pouvait pas lui désobéir, mais elle essaya quand même. Les créatures lui faisaient peur. Papa lui faisait peur. Elle avait vu ce qui était arrivé à l'homme. Elle aimait bien Mike, et Lucas, et Dustin. Elle ne voulait pas qu'ils soient cassés eux aussi. Lucas comprit qu'elle mentait. Il cria, et Mike cria aussi. Et Dustin était inquiet, et c'était sa faute. Elle eut peur. Sa gorge se serra, son cœur battit fort dans sa poitrine, ses yeux étaient pleins de larmes, et son corps était douloureux, et bizarre, et sensible. Elle avait mal, et rien ne se passait comme il fallait. Elle voulait juste qu'ils s'arrêtent.
Elle fit pleurer Lucas, et elle évita de justesse de le casser en pleins de petits morceaux. Lucas la détestait, et Dustin était encore plus inquiet, et Mike était stupide. Elle ne savait pas ce que c'était, stupide, mais elle savait qu'elle avait cassé Mike et Lucas. Elle n'avait pas cassé comme d'habitude, Mike et Lucas bougeaient encore, et criaient, et étaient fâchés, mais elle savait qu'ils l'étaient, et elle eut mal.
Elle n'avait jamais rien cassé de cette façon avant, et elle n'avait jamais réparé quoi que ce soit non plus, mais Dustin répara Mike et Lucas. Elle ne savait pas comment il avait fait, mais ça ne dura pas. Elle cassa Mike encore une fois, et ensuite, ce fut Mike qui la cassa. Il lui cria dessus, aussi fort qu'il en était capable, avec autant de méchanceté qu'il le pouvait, et il lui dit de partir, et ne jamais revenir, qu'il la détestait. Elle ne comprenait pas pourquoi, mais ça la cassa, ça la cassa fortement, en pleins de morceaux, mais elle bougeait encore, et elle respirait, et elle était toujours là.
Elle voulut essayer de trouver Will. Peut-être que si elle le faisait, cette fois, Mike serait heureux, peut-être qu'ils seraient une famille, peut-être qu'elle serait réparée. Elle ne voulait que ça, être réparée, et que Mike ne lui en veuille plus. Elle ne le comprenait pas, il était bizarre, et stupide et elle ne put réparer les choses entre eux qu'en cassant autre chose, mais ce ne fut pas vraiment elle qui les répara, ce fut Dustin. Dustin était doué à ça. Il l'aida à faire fuir les garçons qui avaient voulu les casser, Mike et lui, et il les prit dans ses bras tous les deux. Il leur fit un câlin.
Elle savait que ce serait difficile de trouver Will. On lui demandait aussi de trouver Barb. Elle ne savait pas ce que c'était, Barb, mais sans trop savoir pourquoi, elle s'en doutait, elle pouvait deviner. Seulement… Seulement Barb était cassée. Elle était cassée et pour la première fois, Elle se sentit coupable. Elle voulait que Mike l'accepte, qu'il l'apprécie, mais elle n'avait fait que des erreurs, et elle voulait juste lui ressembler, et être comme lui. Elle était prête à faire tout ce qu'il faudrait pour ça. Elle était prête à affronter les gens en noir. Elle était prête à affronter Papa. Elle était prête à affronter la créature du monde tout noir, le monde à l'envers. Elle était prête à l'embrasser, si c'était ça qu'elle devait faire pour qu'ils soient réparés.
Elle s'était sacrifiée, et brisée en pleins de petits morceaux pour lui, et elle n'était pas sûre que qui que ce soit pourrait réparer ça, mais le monstre noir était parti et personne ne ferait du mal à Mike, ou à Lucas, ou à Dustin. Will était trouvé, tout allait enfin mieux pour Mike, mais elle, elle avait compris quelque chose. Elle ne pouvait pas être une famille avec Mike. Elle ne pouvait pas rester. Elle ne savait juste pas quoi faire. Elle ne savait rien faire d'autre après tout.
But we've been fucking mean, we're elitist, we're as flawed as any church
And this faux rad' west coast dogma has a higher fucking net worth
I bit the apple ' cause I trusted you, it tastes like Thomas Malthus
Your proposal is immodest and insane
And I hope someday Selmers rides her fucking train.
Mike et elle n'arrivaient pas à se voir, à se parler, sans se casser un peu plus l'un l'autre. Elle voulait le protéger, elle voulait faire en sorte que plus rien ne lui arrive plus jamais, mais il était têtu, stupide, et vraiment inconscient. Il lui disait « les amis ne mentent pas », mais mentir, ça ne voulait rien dire pour elle, et ami était un mot nouveau encore. Puis Mike, il mentait. Il se fâchait, il se disputait, il criait, il s'emportait. Il voulait protéger Will, comme elle voulait le protéger lui, et ça ne fonctionnait pas. Ils ne se voyaient pas mais ça les cassait, ça les brisait tous les deux, et ça elle ne le comprenait pas. Elle croyait que c'était normal. La boite de la télévision montrait des gens tristes qui étaient heureux après, comme si tout allait bien. Ils iraient bien quand ils se verraient, elle se raccrochait à ça. Ils n'allèrent pas bien.
Mike la cassa encore une fois, avec cette fille, cette Mad Max, qui manquait terriblement d'attention. Elle ne comprenait pas, mais elle ne voulait pas de cette fille avec Mike. Elle avait failli la casser, mais elle était plus intelligente depuis l'année précédente, et elle cassa seulement sa planche à roulette. Elle voulait aider Mike, elle voulait être la seule à aider Mike, à le réparer, comme Dustin l'avait fait un automne plus tôt. Elle ne savait pas faire. Elle n'était pas supposée le faire. Elle ne pouvait pas le deviner.
Elle continua de courir après Mike, alors que Mike courait déjà après elle, jusqu'à ce qu'ils croient se réparer en s'embrassant. Jusqu'à ce qu'elle comprenne ce que mentir voulait dire. Mentir, c'était grave. Quand on mentait, Mike se mettait en colère, et il criait, et il voulait faire du mal aux gens. Seulement, Mike avait menti, et pas seulement une fois, et il lui avait menti à elle, et il l'avait cassée. Il ne l'avait pas cassée pour la première fois, mais cette fois, elle comprit que ce n'était pas la dernière non plus.
Mike l'avait cassée et lui avait brisée le cœur, et elle l'aimait, elle en était sûr, mais elle avait beaucoup trop mal et elle refusait de continuer à être comme ça encore longtemps. Tout ça était trop pour elle, et rien ne faisait de sens, elle n'y arrivait juste pas. Il voulait toujours être au top, être le mieux, contrôler ce qu'il se passait et Onze, Elfe, Jane ne pouvait juste pas continuer comme ça, qu'elle le veuille ou non. Elle avait passé du temps avec Mad Max, Max, et ça lui avait fait comprendre qu'il y avait encore beaucoup trop de choses qu'elle ne connaissait pas et elle avait compris que Mike était beaucoup trop proche, qu'ils ne fonctionnaient pas ensemble. Être avec lui l'empêchait définitivement de faire tout ce qu'elle voulait, elle était coincée. Ce n'était pas comme au laboratoire mais elle ne pouvait quand même pas faire tout ce qu'elle voulait malgré tout. Elle devait changer ça.
Elle voulait être réparée et réparer Mike aussi, quoi que ça veuille vraiment dire, mais Mike avait besoin de Will pour être réparé, pas elle. Elle en était sûre, si elle laissait faire, Will pourrait réparer Mike, mieux qu'elle, elle lui faisait confiance pour ça. Elle n'était pas sûre de savoir s'il pouvait le réparer complètement, Dustin était plus doué, mais Mike l'avait réparé alors peut-être que l'inverse pourrait se faire aussi. Elle voulait vraiment sauver ses amis, comme elle l'avait déjà fait avant, mais là il ne s'agissait pas d'être sauvé, ce n'était pas à elle de le faire, pas cette fois. C'était difficile à avouer, elle avait toujours protégé ses amis depuis qu'elle était sortie du laboratoire, contre le Démogorgon, les Dégo-chiens, le Flagelleur mental, mais ceci n'était pas de son ressort.
Mike était un menteur, et il détestait les mensonges mais il mentait tout le temps avec elle. Max lui avait dit que les petits-copains mentaient tout le temps alors peut-être qu'il ne mentirait plus s'ils restaient amis. Après tout, les amis, eux, ne mentent pas.
I loved you, I loved you
I loved you, it's true
I wanted to be you and do what you do
I lived here, I loved here, I thought it was true
I feel so stupid and so used
I feel so used.
Onze était intriguée par Mike, elle ne le comprenait pas. Il était différent, et il était nouveau, et il était gentil. Il lui avait donné des vêtements. Il l'hébergeait dans son sous-sol. Mike avait une famille. Il avait des sœurs. Une maman, et un papa, mais pas comme son Papa à elle, un papa qui l'aimait et qui mangeait avec lui. Un papa qui ne l'enfermait pas. Un papa qui l'appelait tout le temps par son prénom, pas seulement quand il était fier. Il était bizarre, et il cherchait Will.
Elfe tenait vraiment fort à Mike. Elle voulait être comme lui. Mike lui donnait des gaufres. Il l'emmenait au collège. Il lui disait qu'elle était jolie. Lucas, Dustin et lui, ils lui avaient donné un surnom. Elle voulait être son amie, elle voulait le protéger. Elle voulait être sa famille, être avec lui, autant qu'elle en aurait besoin. Elle voulait le protéger, elle voulait les protéger tous les trois. Elle voulait être avec eux pour toujours et qu'ils soient toujours ensemble, mais pour les protéger elle ne pouvait pas rester avec eux, car tout ce qui l'entourait était dangereux.
Jane aimait Mike. Peut-être. Sûrement. Elle ne savait pas comment elle l'aimait exactement, mais c'était le cas, et elle voulait vivre avec lui, être avec lui, le voir tous les jours, voir tous ses amis tous les jours, Mike, Dustin, Lucas, Will, Max, et elle voulait rester avec eux pour toujours. Toute sa vie, elle avait vécu à Hawkins depuis toujours, dans le laboratoire puis pas loin de la ville avec Hopper. Elle avait appris à aimer cet endroit, ses rues, ses gens, tout ça. Elle avait cru qu'elle pourrait toujours être avec les gens qu'elle aimait, qu'elle resterait à Hawkins jusqu'au bout. Elle avait cru à tout ça et maintenant elle se sentait tellement, tellement stupide car les choses avaient changé, elle aussi avait changé, tout avait changé et qu'elle ne savait plus à quoi s'attendre à présent. Elle était épuisée, fatiguée, n'importe quoi pourrait arriver.
Elle voulait être comme Mike, mais elle ne pourrait jamais être comme lui, malgré tous ses efforts, elle resterait elle et rien d'autre, et elle ne savait pas quoi faire du tout. Elle ne savait pas qui elle devait être, si elle ne pouvait pas être comme Mike. Peut-être qu'elle devait être elle-même ? Elle ne savait pas vraiment ce que ça voulait dire.
I was your baby, your first born, the hot girl in your comp sci' class
And I was Darwin's prep school dream, bred, born, and raised to kick your ass
I fell for circuit boards, rocket ships, pictures of the stars
If you could only be what you pretend you are.
Le temps avait passé après que la jeune fille ait affronté le Démogorgon et fui dans la forêt, dans le froid de l'hiver. Elle avait découvert la neige, mangé des écureuils et elle avait cassé quelqu'un à un moment donné, sans vraiment se souvenir comment. Elle avait aussi mangé des gaufres, mais il lui avait fallu un instant avant de se rendre compte que ce n'était pas Mike qui les lui avait laissés mais le policier, Hopper. Il lui avait fallu encore plus de temps pour se rendre compte qu'elle pouvait lui faire confiance et le suivre. Onze, Elfe passa une année dans une cabane, au fond des bois. C'était différent du laboratoire. Tout n'était plus blanc, ou gris, mais marron, rouge, jaune, bleu ou vert. Tout n'était plus d'une propreté immaculée pour cacher ce qu'il s'y passait, à vrai dire, il y avait de la poussière partout car elle ne savait pas s'en occuper, et Hopper non plus. Ils n'étaient pas doués pour ça, elle se demandait si c'était important. Elle voulait le demander à Mike, ou à Lucas, ou à Dustin, mais Hopper était inquiet au sujet de tout ça. Il disait qu'il fallait qu'elle soit cachée pour être protégée, jusqu'à ce que tout aille mieux. Elle ne savait pas vraiment ce que ça voulait dire tout ça, mais à la différence de Mike, Hopper lui expliquait tout ça. Chaque mot qu'elle ne comprenait pas, il lui expliquait. Un mot par jour. Elle en avait appris pleins des mots, et elle avait appris pleins d'autres choses.
Ce n'était pas facile tous les jours avec Hopper, parce qu'elle ne savait pas qui il était, parce qu'il passait sa main dans ses cheveux qui poussaient en les décoiffant alors qu'elle avait pour mission de les brosser tous les matins, parce qu'elle n'avait pas le droit de manger des gaufres à tous les repas mais en dessert parfois. Ils avaient eu des disputes, et parfois elle avait peur de lui, parce qu'il ressemblait à Papa. Il lui disait qu'elle n'avait plus à avoir peur, qu'il était là pour la protéger, mais il criait fort parfois, et il cassait la télé et ça, elle ne savait pas comment la réparer. Il partait tous les jours, et il lui disait de rester à la maison. Il lui disait qu'elle ne devait pas sortir, qu'elle ne devait pas utiliser ses pouvoirs, qu'elle ne devait pas parler à Mike, à Lucas, à Dustin au travers de la radio. Il parlait surtout de Mike en fait, parce qu'elle parlait de lui aussi, mais c'était pareil pour ses trois amis. Elle avait l'impression d'être enfermée encore, surtout que Hopper mettait pleins, pleins de pièges partout, pour que personne ne l'approche, mais c'était pour la protéger, pour qu'elle soit à l'abri. Elle ne savait pas si c'était vrai, mais ça l'énervait.
Parfois, c'était tout de même plus sympa avec Hopper. Parfois, il lui présentait ses films préférés, et il lui avait appris à lire. Ce n'était pas facile du tout, de lire. Elle confondait les « b », les « d », les « p », les « q », … et elle avait du mal à les prononcer à voix haute aussi, mais il avait pris le temps de lui apprendre. Il l'avait aidée à prononcer des phrases de plus en plus longues, même si elle n'aimait pas ça, et il lui avait appris à écrire, et à compter. À chaque fois qu'elle réussissait quelque chose, il la décoiffait, l'appelait « championne » et l'autorisait à manger pleins de gaufres. Quand elle ne réussissait pas, il ne la punissait pas. À la place, il lui racontait une histoire. Elle ne savait pas pourquoi il faisait ça mais ça lui faisait vraiment plaisir. Elle pouvait vraiment apprendre pleins de choses grâce à lui, et en savoir plus l'aidait tellement beaucoup.
C'était parfois vraiment très compliqué avec Hopper, mais elle était vraiment heureuse de vivre avec lui, et elle l'aimait vraiment beaucoup. Elle ne savait pas quel genre de relation ils avaient mais ils s'entendaient vraiment bien, et ils mangeaient des gaufres, ils regardaient la télévision, et il lui prêtait ses anciens vêtements qui étaient beaucoup trop grands pour elle mais c'étaient les premiers vêtements qui étaient vraiment à elle et qu'elle n'avait pas gâchés, pas comme la robe, et elle les aimait vraiment fort.
Elle voulait être comme lui. Elle voulait être aussi grande, aussi forte, conduire une voiture et aider les gens. Hopper avait vraiment aidé Will, il lui avait sauvé la vie et la jeune fille voulait être aussi forte et courageuse que lui. Hopper connaissait pleins de mots, il savait faire tellement de choses et il n'était presque jamais fatigué pour lui apprendre tout ce dont elle avait besoin. Ce n'était pas comme son Papa, ce n'était pas comme Mike, c'était vraiment bien et elle se sentait en sécurité avec lui, même si tout n'était pas toujours facile.
Il lui fallut vraiment un moment pour comprendre qu'ils étaient une famille, comme il en fallut énormément à Hopper pour le comprendre aussi, mais ce fut vraiment le cas quand il posa devant elle des papiers. Il lui proposa de tout lui lire si c'était trop compliqué pour elle, mais il le lui expliqua quand même. C'étaient des papiers d'adoption. S'ils les signaient tous les deux, ça voudrait dire qu'elle deviendrait sa fille et qu'il serait son père. Elle se demandait si c'était comme Papa, mais elle était sûre que non. Elle lui faisait confiance et elle signa les papiers tout de suite, parce qu'elle voulait une famille, et qu'elle voulait être une famille avec lui. Ça avait l'air vraiment bien d'avoir une famille, même si Hopper parlait fort, et était parfois fâché, et fatigué, et qu'elle ne voyait personne d'autre. Il lui fit une photocopie pour qu'elle puisse continuer à lire la lettre après tout ça, et qu'elle apprenne les mots. Ce n'était pas toujours simple mais elle prit tout le temps nécessaire pour bien tout lire et apprendre tous les mots, même si ce n'était pas simple du tout parfois. Il y avait pleins, pleins de mots qu'elle ne connaissait pas du tout mais Hopper les lui expliqua tous lentement un mot après l'autre.
Elle voulait juste être heureuse, elle était sûre que ce n'était pas si compliqué à demander, et ça avait l'air de fonctionner. Elle était sûre qu'elle pouvait faire avec les marques d'affection, ses mains dans ses cheveux, les gaufres bien cuites, les émissions de télévision un peu bizarres… C'était sûr, il n'y avait rien de mieux que ça, en tout cas, elle n'avait jamais rien connu d'aussi bien et confortable que cette petite vie qu'ils avaient tous les deux, et en plus il lui avait promis que quand tout irait mieux, elle pourrait enfin revoir ses amis.
When I said, "Take me to the moon", I never meant take me alone
I thought if mankind toured the sky, it meant all of us could go
But I don't want to see the stars if they're just one more piece of land for us to colonize
For us to turn to sand.
Hopper avait menti. Il avait menti et il ne l'avait toujours pas laissée sortir pour qu'elle retrouve ses amis. Il lui avait promis, il avait dit qu'elle les reverrait mais c'était faux. Ça faisait un an et elle ne les avait pas vus. Plus le temps passait, encore et toujours, et plus elle restait coincée dans la cabane, incapable de faire quoi que ce soit, piégée. Les jours se répétaient, encore et encore, et il n'y avait rien qu'elle puisse faire contre ça. Elle avait beau se fâcher contre Hopper, Hopper haussait le ton encore plus fort et il refusait qu'elle sorte où que ce soit. Il voulait qu'elle soit en sécurité, qu'elle soit libre, mais tout ça ne faisait absolument aucun sens parce qu'elle était juste toute seule et qu'il n'y avait absolument rien qu'elle ne puisse faire pour y échapper.
Les mensonges, elle détestait tellement ça et Hopper ne s'était pas contenté de mentir en lui promettant qu'elle pourrait sortir, il lui avait menti sur sa famille. Il lui avait menti sur son prénom, sur sa mère, et elle détestait ça. Hopper lui avait complètement caché que sa mère était encore en vie, où elle vivait, et il l'avait fait juste pour l'empêcher de la voir et elle le détesta tellement pour ça. Elle voulait se venger, elle voulait lui faire payer tout ça, elle voulait lui montrer qu'elle serait libre à nouveau, peu importe qui essaierait de l'en empêcher. Elle s'était déjà échappée une fois à ce qui l'empêchait de vivre, elle le ferait encore une fois, prête à tout pour être libre et être elle-même. Il ne pourrait pas l'en empêcher, il n'était pas assez fort pour ça, elle rencontrerait sa mère si elle le voulait.
Malgré ses efforts, Hopper continua à mentir, et à dire des choses qui lui faisaient du mal. Il voulait la protéger mais elle était plus grande et plus forte que lui, elle savait se débrouiller toute seule, elle n'avait pas besoin de protection. En plus, il était encore moins présent et quand il l'était, il critiquait Mike. Mike était stupide, oui, mais ça c'était son problème à elle, pas le sien, il n'avait aucun droit de dire quoi que ce soit et il devrait arrêter plutôt vite parce que ce n'était pas juste du tout. Elle ne comprenait pas non plus pourquoi il était plus à l'aise qu'elle invite Max que Mike. C'était la même chose, les deux étaient ses amis, mais Max l'avait deviné avant alors ça devait être une de ces règles bizarres qu'elle ne comprenait pas bien. Elle s'en fichait, elle en voulait juste à Hopper de jouer et de mentir ainsi, il se moquait d'elle et ça ne le rendait vraiment pas mieux que Mike qu'il critiquait tout le temps.
Il était aussi bête, aussi stupide, aussi nul que les autres, à vouloir être le chef de tout, tout le temps et elle détestait ça plus que tout au monde.
' Cause we're so fucking mean, we're so elitist, we're as fucked as any church
And this bullshit west coast dogma has a higher fucking net worth
I bit the apple ' cause I loved you, and why would you lie?
And then I realized, you're just as naive as I am
Oh, you're so traumatized, it makes me wanna cry.
Elle aimait Hopper, elle l'aimait sincèrement, il était comme un vrai père, il était sa famille mais il voulait la protéger beaucoup plus qu'elle n'en avait besoin, beaucoup plus que ce n'était nécessaire et elle ne voulait pas de ça. Elle voulait juste une famille normale, où tout serait comme les autres familles. Elle voulait fêter Halloween, et Noël et toutes les autres fêtes. Elle voulait faire des photos des familles bizarres et drôles qui seraient ridicules. Elle voulait aller à l'école et qu'il vienne la récupérer le soir où qu'il laisse Steve la ramener avec Dustin. Elle voulait juste s'amuser à être quelqu'un d'un peu normal pour une fois dans sa vie, elle ne pensait pas que c'était trop demander, n'est-ce pas ? Elle voulait juste pouvoir être comme d'autres personnes, être normale.
Elle ne pouvait pas faire comme si elle comprenait parfaitement ce que ressentait Hopper, mais elle savait qu'il avait souffert avant. Il était sensible, et fragile, et parfois quand il tendait les mains vers elle, il s'arrêtait en plein mouvement ou tremblait carrément, comme s'il craignait de lui faire du mal, ce qu'elle n'arrivait juste pas à comprendre. Tout allait bien, tout allait mieux, n'est-ce pas ? Ce n'était pas si grave, les bouteilles de jus qu'elle n'avait pas le droit de boire sur le sol parce qu'elle avait sa propre nourriture préférée. Ce n'était pas si grave qu'il se réveille en hurlant la nuit, parce qu'elle faisait la même chose. Ce n'était pas si grave que parfois il prenne son visage entre ses mains avec ses grandes mains toutes abimées et qu'il essayait de savoir comment elle allait sans vraiment le lui demander parce qu'elle aussi, elle était prête à tout pour lui sauver la vie s'il le fallait, n'est-ce pas ? Tout était parfaitement normal, ils étaient normaux, en tout cas, c'était aussi normal qu'elle pouvait espérer que ça le soit, mais elle n'en était pas complètement sûre et elle n'était pas sûre non plus de pouvoir dire ce qu'elle ferait s'il s'avérait que ce n'était pas le cas.
Elle ne comprenait pas non plus pourquoi Hopper pleurait parfois, et pourquoi elle avait elle aussi envie de pleurer parce qu'elle n'avait pas mal, elle n'avait pas peur non plus, tout allait bien. Ce n'était pas normal, mais elle ne pouvait pas l'expliquer elle faisait juste avec. Elle avait l'habitude, mais elle avait l'impression qu'elle ne devrait pas, et elle voudrait juste tellement en parler mais Hopper ne parlait jamais, alors elle non plus elle ne parlerait pas de ce qu'elle n'arrivait pas à dire. C'était visiblement normal, n'est-ce pas ?
You dumb bitch, I loved you, I loved you
I loved you, it's true
I wanted to be you and do what you do
I lived here, I loved here
I bought it, it's true
I'm so embarrassed, I feel abused.
Seulement, elle le trouvait tellement stupide parfois parce qu'elle réussissait à comprendre que certaines choses étaient bizarres mais elle ne pouvait pas le pousser à parler. Il y avait des choses que Hopper ne lui apprenait jamais, des gens dont il ne lui parlait jamais et des secrets qu'il ne devrait pas lui cachait et Onze, Elfe, Jane savait que ce n'étaient pas des bonnes choses. Il ne l'appelait pas toujours par son prénom non plus. Parfois il ne l'appelait pas Jane, ou Onze, mais il l'appelait Sarah, les soirs où il avait bu beaucoup de jus. Elle ne savait pas qui était Sarah, elle n'était pas sûre qu'elle devrait le savoir mais ce prénom restait dans sa tête, s'était fait une petite place tout au fond de son cerveau, juste là, à un endroit qui lui faisait mal et elle ne savait pas pourquoi parce qu'il n'y avait aucune raison qu'elle ait mal. Elle était heureuse après tout, n'est-ce pas ?
Elle était heureuse, et chez elle, et elle avait une famille mais elle avait l'impression que quelque chose n'était pas exactement parfait et que ça ne le serait jamais, peu importe les efforts qu'ils feraient tous les deux. Elle n'était pas sûre de savoir ce que ça voulait dire. Elle voulait être à sa place mais ce n'était pas à elle de le décider et elle le savait très bien. Ça n'empêchait pas que ça lui faisait vraiment du mal et qu'elle ne savait pas du tout quoi en penser. Elle n'arrivait pas à comprendre ce qui lui faisait du mal parce qu'elle faisait tout ce dont elle était capable pour être digne d'être de la famille de Hopper et il lui répétait qu'elle en faisait vraiment partie mais elle n'arrivait pas à s'en convaincre entièrement et ça lui faisait tellement mal.
Elle voulait être elle-même, en harmonie, heureuse, c'était tout ce qu'elle voulait. Parfois, elle avait l'impression que c'était trop demander, et ce n'était vraiment pas drôle de penser ça, mais elle ne pouvait pas le dire à qui que ce soit, même si elle en avait vraiment besoin et envie. Elle voulait juste ne pas se sentir triste quand Hopper oubliait de la prévenir qu'il rentrait tard, quand il buvait le drôle de jus, quand ils se disputaient à cause de Mike, de sa maman, de ses pouvoirs, de tout ce qui faisait qu'elle était justement. Parfois, elle avait l'impression que Hopper avait peur de ses pouvoirs et ça lui faisait vraiment mal dans son petit cœur d'enfant sensible et fragile. Elle était forte et puissante et invaincue mais elle n'était pas invincible non plus et elle voulait être aimée pour tout ce qu'elle était, dans son entièreté, mais elle avait l'impression qu'il n'y avait pas beaucoup de personnes qui pouvaient comprendre pourquoi elle avait tant besoin d'utiliser ses pouvoirs, pourquoi c'était important pour elle, pourquoi elle continuait à le faire malgré les règles, malgré les interdictions.
Well, I don't wanna eat the rich, I'd have to eat my heroes first
And my tuition's paid by blood, I might deserve your fate or worse
But I don't need your goddamn money, I don't need jack shit from you
So when I speak, you bet your life, my words are true.
Kali était tellement, tellement différente. Elle n'avait pas peur d'utiliser ses pouvoirs, elle était puissante, elle était courageuse, elle était puissante, elle était libre. Onze¸ Elfe, Jane voulait ça. Elle voulait être libre elle aussi et elle voulait être comme Kali, qui était comme une sœur pour elle.
Ce n'était pas le sang qui les liait l'une à l'autre mais une promesse qu'elle n'avait pas faite, qui était plus vieille qu'elle, et qui avait été brisée mais ça elle ne pouvait pas le savoir. Kali était sa sœur, elles venaient du même endroit, elles étaient faites du même bois. Elles étaient toutes les deux fortes, et puissantes, et elles avaient toutes les deux des amis qu'elles feraient tout pour protéger mais Kali était encore mieux. Elle n'était pas limitée par ses peurs, par son entourage, par tout ce qui l'entourait. Elle se fichait bien des regards, des jugements, et rien ne l'arrêtait, et la jeune fille, du haut de sa petite taille, enfoncée dans sa chemise à carreaux trop grande et cachée sous sa touffe de cheveux énorme l'admirait. Elle l'admirait plus qu'elle avait admiré Mike, plus qu'elle avait admiré Hopper, elle l'admirait comme on admirait un super-héros, une star de cinéma, Kali était un modèle, un exemple, et elle voulait l'aider à devenir aussi puissante qu'elle. Sa grande sœur voulait vivre des aventures avec elle, la garder à ses côtés et la protéger de tout ce qui pourrait lui faire du mal, mais elle voulait aussi la laisser faire ses preuves. Kali croyait qu'elle pouvait faire ses preuves toute seule, par elle-même. Elle croyait en elle.
Kali n'était pas parfaite non plus. Elle avait fait des bêtises, elle le savait, et elle s'en fichait parce que pour elle, ces bêtises n'en étaient pas, elles n'étaient que des preuves de sa force. Kali et elle étaient tellement semblables, elles avaient toutes les deux fuient le laboratoire seules, sans l'aide de personne, pour leur propre survie, et ça les rendait encore plus proches toutes les deux. Elles avaient toutes les deux brisé leurs chaines et s'étaient échappées à ce qui les retenait et elles s'étaient retrouvées. Onze ne se souvenait pas de ses premières années aux côtés de Kali mais sa grande sœur l'avait rassurée, elles restaient sœurs malgré tout, elle n'avait pas à s'en faire.
Onze, Elfe, Jane l'admirait tellement et elle voulait être comme elle plus tard, être aussi géniale, aussi cool, aussi forte, elle voulait pouvoir protéger ses amis comme Kali protégeait les siens. En plus, les amis de Kali étaient géniaux, et ils la prenaient au sérieux, ils ne la considéraient pas comme fragile, et ils respectaient Jane tout autant. C'était tellement différent de chez elle, à Hawkins, où elle ne pouvait voir personne et où Hopper la surprotégeait comme si elle n'était pas super forte. Elle se sentait reconnue pour ses pouvoirs, respectée, écoutée. C'était tout ce qu'elle voulait, ça ne pouvait pas être si compliqué à demander, elle en était presque sûre, même si elle ne pouvait pas totalement l'affirmer. Elle était contente, c'était tout. En plus, Kali l'avait habillée comme elle pour que tout le monde puisse savoir qu'elles étaient sœurs, elle lui avait prêté un masque et elle lui avait promis de l'entraîner à développer ses pouvoirs pour ne plus être limitée par quoi que ce soit. Elle lui avait aussi promis vengeance. Onze n'était pas bien sûre de savoir ce que c'était mais elle comprenait à quel point c'était important pour Kali et pour tous ses amis et elle comptait bien les aider autant que ça lui serait possible. Tout le petit groupe de Kali en était persuadé, elle pourrait leur être d'une grande aide avec ses pouvoirs, il fallait juste qu'elle puisse s'en servir sans que ça ne l'épuise trop, et Kali avait promis qu'elle réussirait à lui montrer comment faire.
C'était tout nouveau pour elle, de voir comment elle était considérée normalement. Ses pouvoirs étaient normaux, sa personne était normale, elle était entourée de personnes aussi excentriques et bizarres qu'elle et elle se sentait bien. Elle avait quand même l'impression d'être un peu à l'écart, mais elle était plus jeune aussi, il lui faudrait encore quelques temps pour être parfaitement à leur niveau.
Kali et elle étaient semblables, il n'y avait aucune raison pour qu'elles ne puissent pas s'entendre, c'était évident. Elles allaient accomplir de super choses toutes les deux, c'était ce que Kali disait et même si Jane ne comprenait pas exactement ce qu'elle voulait dire par là mais elle lui faisait confiance. Kali était sa sœur, Kali était Huit, et elle était plus vieille aussi et plus entraînée au monde entier, elle savait forcément comment vivre dans tout ce monde inconnu.
Let me level with you, man, as someone guilty of the game
I took the help, I took the cash, I would've taken your last name
So if any girl on Earth should get to make a call about this
It should be me and as I see it, you're a dick.
Kali avait menti. Elle faisait des choses qui étaient vraiment horribles, des choses que Jane se refusait à faire, ne voulait plus jamais faire de toute sa vie.
Elle savait qu'elle avait fait des choses horribles avant, elle avait cassé des gens, plusieurs fois, et elle avait été punie pour ça, et elle ne voulait plus faire ça à qui que ce soit, plus jamais. Chaque fois qu'elle l'avait fait, ça lui avait fait tellement de mal et elle s'en était sincèrement voulu et elle ne voulait plus faire ça parce que c'était mal mais Kali ne le comprenait pas. Pour elle se venger revenait à rendre la pareille aux gens qui lui avaient fait du mal aussi. Elle savait ce que ça faisait quad on voulait nous casser, elle ne voulait pas faire la même chose, mais Kali et ses amis ne voyaient pas la chose de la même façon du tout et ils ne comprenaient pas ce qu'elle ressentait.
Elle comprenait leur colère, bien évidemment, elle savait très bien pourquoi ils faisaient ce qu'ils faisaient mais elle ne pouvait pas non plus s'empêcher de détester ça aussi. Ils étaient en colère mais ils faisaient du mal à des gens quand même. Elle comprenait leur colère, elle souffrait aussi, elle avait vu à quel point sa mère avait souffert, au point de ne plus pouvoir communiquer avec qui que ce soit, elle ne pourrait jamais être avec sa mère, ça lui faisait tellement de mal de se rendre compte de tout ça, de comprendre que peu importe ses efforts, elle ne pourrait jamais réparer sa mère. Sa mère serait brisée pour toujours, et elle ne pourrait pas vivre avec elle, même si la sœur de sa mère le lui avait proposé, elle savait que ce n'était juste pas possible et ça lui faisait vraiment du mal.
Kali lui avait proposé de se venger, de faire regretter à ceux qui leur avaient fait du mal, de faire payer à l'homme qui était responsable de l'état de sa mère, qui avait appuyé sur la détente, qui l'avait réduite à l'état de légume mais elle n'avait pas pu faire ça. C'était quelque chose d'horrible, cet homme était horrible, il lui avait fait du mal, vraiment, et il avait fait tellement de mal à sa mère qu'elle ne serait plus jamais sa mère mais elle ne pouvait pas faire la même chose. Cet homme avait une famille, des enfants, elle ne pouvait pas détruire la vie de toutes ces personnes juste pour venger ce qui lui était arrivé. Elle ne comprenait pas exactement pourquoi elle pensait ça, elle n'arrivait pas vraiment à l'expliquer, mais elle le ressentait, elle avait juste cette impression qu'elle ne pouvait pas lui faire autant de mal, même si Kali ne pensait pas la même chose.
Elle essaya de lui expliquer mais Kali ne voulait juste pas comprendre, et elle essaya de casser l'homme elle-même, mais elle n'en eut pas le temps et Onze ne pouvait déjà pas lui pardonner ça mais en plus elle essaya de se venger sur elle. Elle n'essaya pas de la briser, non bien sûr, mais elle essaya quand même de lui faire du mal malgré tout, en lui faisant croire que Papa était encore là, qu'il allait être horrible avec elle et ça lui fit tellement de mal. Elle en voulut à Kali d'avoir agi de la sorte, sans aucune pitié en plus, elle ne comprenait pas pourquoi elle avait fait ça. Elles étaient supposées être sœurs, elles étaient supposées se soutenir, s'entre-aider, ce n'était pas logique que Kali se venge comme l'avait fait Mike, comme l'avait fait Hopper, ça lui avait fait beaucoup trop de mal pour qu'elle puisse ne pas y penser, cette pensée restait gravée au fond de sa tête : Kali était prête à tout pour réussir ce dont elle avait besoin et elle n'hésiterait pas une seule seconde à se venger de ceux qui l'en empêcherait. Sa propre sœur était prête à s'en prendre à elle s'il le fallait et elle n'hésiterait pas une seule seconde pour arriver à son but, même à lui faire du mal, et ça, ça lui brisa le cœur.
So, fuck your tunnels, fuck your cars
Fuck your rockets, fuck your cars again
You promised you'd be Tesla, but you're just another Edison
' Cause Tesla broke a patent, all you ever broke were hearts
I can't believe you tore humanity apart
With the very same machines that could've been our brand-new start.
Onze avait admiré Kali, elle avait voulu être comme elle, aussi forte, aussi importante, aussi courageuse mais Kali ne respectait pas qui elle était. Elle n'était pas comme sa sœur, elle n'était pas aussi grande, aussi douée, aussi stable dans tout ce qu'elle faisait, bien évidemment, mais elle était différente et Kali ne le comprenait juste pas. Elles ne pouvaient pas s'entendre comme Onze l'aurait voulu alors elle la quitta. Elle aurait aimé rester avec sa sœur mais ça n'aurait jamais fonctionné, elle le savait. Kali pensait pouvoir la protéger, et être la seule à pouvoir le faire, mais ce n'était pas le cas. Elle n'en avait pas besoin, elle était déjà forte, juste pas comme sa sœur. Ce n'était pas à elle d'être protégée, c'était à elle de protéger ses amis, Mike, Lucas, Dustin, Will, Joyce, Hopper, même Mad Max s'il le fallait, pour qu'ils soient toujours tous en sécurité. C'était à elle de le faire, comme Kali protégeait les siens.
Elles n'étaient pas fortes de la même façon mais elles étaient animées par quelque chose de semblable, même si Kali ne le voyait pas, même si elle, elle ne le comprenait pas. Elles venaient du même endroit, elles ne le comprenaient pas mais elles étaient tellement semblables et c'était pour ça qu'elles ne pouvaient pas, ou en tout cas pas encore, rester ensemble complètement. Elles n'étaient pas prêtes à se rendre compte qu'elles ne pouvaient pas protéger tout le monde en risquant leur vie encore et toujours.
Onze, Elfe, Jane n'était juste pas encore prête à pardonner complètement à Kali, parce que ce n'était juste pas une bonne idée. Kali voulait avoir raison sur tout et protéger les autres à sa façon en faisant tout ce qui lui plaisait, ce qui n'était juste pas possible pour la vie qu'Elfe menait.
Kali avait promis de la protéger et qu'elles seraient une famille, qu'elle lui apprendrait à contrôler ses pouvoirs mais ses promesses ne valaient pas grand-chose si elle ne respectait pas ses besoins. Elfe avait besoin de ses amis, de Hopper, de rester à Hawkins qu'elle connaissait un peu et qui n'était pas trop animé, juste comme il fallait pour elle, et ça Kali ne pouvait pas le comprendre alors ça lui faisait juste du mal. Kali ne pouvait et ne voulait pas non plus faire cet effort pour elle, ce n'était pas possible pour elle.
Elle aimait sa sœur mais elle était attendue ailleurs et elle ne pouvait juste pas rester avec elle. Sa famille comptait sur elle et elle se devait de les aider, peu importe quoi. En plus, c'était à cause d'elle qu'ils étaient en danger alors elle comptait bien tout rattraper pour mettre fin aux problèmes qu'elle avait créés.
And the worst part is, I loved you
I loved you, I loved you, it's true
And sometimes I feel like I still fucking do
I lived here, I loved here
I brought it, it's true
I'm so embarrassed, I feel abused.
Onze, Elfe, Jane en voulait à tellement de monde pour lui avoir menti, et elle savait qu'elle avait tous les droits de leur en vouloir pour tout ce qu'ils lui avaient fait. Que ce soit Mike, ou Hopper, ou encore Kali, ils avaient passé leur temps à mentir, encore et toujours, se fichant des conséquences de leurs actions, et elle ne savait pas quoi faire. Elle leur en voulait, elle voulait leur en vouloir pour tout ce qu'ils avaient fait, tout ce qu'ils lui avaient fait à elle, mais elle se sentait coupable malgré tout. Elle avait l'impression que tout ce qu'ils lui avaient fait était sa faute. C'était elle qui avait ouvert le portail vers le monde à l'envers. Si elle n'avait jamais fait ça, Will n'aurait pas disparu et elle n'aurait jamais fait autant de mal à Mike, Hopper n'aurait jamais accepté de l'adopter et il n'aurait jamais eu à la protéger à s'en faire autant de mal, elle n'aurait jamais rappelé à Kali ses souvenirs les plus sombres sûrement. Elle n'était sûre de rien mais elle ne pouvait pas l'ignorer, loin de là. Elle ne pouvait pas oublier ce ressentiment en elle qui lui disait ça. Elle ne pouvait pas l'ignorer. Elle ne pouvait pas nier ce que Billy avait dit. Ce n'était pas vraiment Billy, c'était le Flagelleur Mental, mais c'était vrai. La douleur de ses amis, la mise en danger de leur vie était complètement sa faute.
Elle avait fait du mal à beaucoup trop de monde, à sa mère, à Kali, à Will, Barbara, Mike, Lucas, Max, Hopper, Billy… Billy était mort et Hopper aussi. Il était mort et c'était absolument sa faute, tout était sa faute. Il s'était sacrifié pour elle, tout le monde avait souffert à cause d'elle. Elle se sentait trahie par pleins de personnes, de gens qu'elle aimait, mais elle leur avait fait encore plus de mal et à présent, elle ne pouvait plus protéger ses amis non plus, ses pouvoirs étaient complètement inaccessibles, elle ne savait plus utiliser ses pouvoirs. Elle avait mis ses amis en danger et à présent elle ne savait plus quoi faire. Elle était complètement inutile, et horrible, et elle ne servait plus à rien du tout. Elle se sentait tellement coupable à présent.
Elle s'accrocha à la lettre de Hopper, de son père. Elle n'avait plus que ça, c'était tout ce qui lui restait parce qu'elle ne pourrait jamais réparer tout ce qu'elle avait fait.
Elle pouvait bien en vouloir à tous ceux qu'elle voulait, ça ne changerait rien à tout ce qui était arrivé, et ça ne changeait rien au fait que tout était arrivé par sa faute et elle ne pourrait jamais se le pardonner, alors elle pouvait bien pardonner à ceux qui lui avaient menti. Un mensonge n'était rien en conséquence à ce qu'elle avait pu faire de son côté. Elle allait bientôt partir, et abandonner tout le monde derrière elle, elle serait encore plus inutile. C'était tellement difficile à accepter mais elle n'avait juste pas le choix, elle ne pouvait rien fait d'autre que d'accepter les conséquences à ses actions. C'était tout ce qui lui restait à faire, pas qu'elle ait le moindre autre choix de toute façon, mais elle ne savait juste pas comment réagir. Elle ne savait pas ce qu'elle devait faire. Elle ne savait pas non plus ce qui allait lui arriver et ça la terrifiait. Elle avait essayé de s'éloigner des gens qu'elle aimait, tellement de fois, et ça n'avait jamais fonctionné avant, mais elle allait encore s'en aller et elle ne pouvait que s'inquiéter du faire que les choses aillent encore plus mal pour ceux qu'elle aimait et pour elle. Elle ne pouvait pas y échapper et elle ne pouvait pas prouver que rester à Hawkins aiderait en quoi que ce soit non plus. Tout était terrifiant, et douloureux, et épuisant. Elle détestait complètement ça, elle ne pouvait rien y faire.
Elle ne pouvait juste pas savoir si elle méritait d'aller mieux, et elle en venait à douter qu'elle ait le droit d'être seulement heureuse. Ça n'avait rien apporté de bon jusqu'à présent.
Elle se sentait tellement seule.
I feel so used, I feel so used
Take me to the moon
' Cause I feel so used
I feel so used.
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