Hey ! Bonjour tout le monde !
Me revoilà pour la suite de ma précédente fiction. C'est mieux de l'avoir lu avant, si vous décidez de vous lancer dans celle-ci car le premier chapitre y fait directement référence. Les dernières fois, l'action se situait entre deux arcs, cette fois-ci, elle s'insèrera en plein dans l'arc Zo, et un peu dans celui de Dressrosa. L'arc Zo n'est pas mon favori, mais je trouve qu'il marque un tournant dans l'histoire de One Piece, que j'avais envie d'exploiter pour mon histoire. Je suis allée chercher mes livres pour me fondre un peu plus dans l'histoire, c'est pourquoi vous trouverez des passages tirés du manga ainsi que de l'animé, principalement ceux où il y a une interaction entre Nami et Zoro. Cela reste l'entière propriété de Maitre Oda, mais ces petits passages copié-collé m'ont permis de broder mon histoire autour, pour vous faire partager ma version car je trouve qu'il y a un fort potentiel ZoNa dans cet arc.
L'histoire est classée M mais ça sera surtout pour le deuxième chapitre, le premier est abordable pour tout le monde. Tout ce que j'espère, c'est que cela vous plaira.
Je remercie une fois de plus Shinory pour sa correction !
Bonne lecture !
Un léger crépitement lointain, comme des craquements de brindilles, le tira progressivement de son sommeil. Ses sens s'aiguisèrent petit à petit et la douce odeur caractéristique du bois qui se consumait, titilla ses narines. Sa paupière solitaire papillonna lourdement, révélant une image floue du monde qui l'entourait, ce qui le força à lever la main pour venir chasser les dernières traces de sommeil sur son visage. Zoro bâilla à s'en décrocher la mâchoire et cligna de l'œil plusieurs fois avant de poser son regard sur la source du bruit qui l'avait réveillé. L'âtre de la cheminée lui faisait face et offrait le spectacle de ses flammes dansantes sur les braises rougeoyantes. La chaleur venait lui caresser le visage et réchauffait son corps endormi. Son regard parcourut rapidement la pièce afin de se resituer. Apparemment, il venait de faire une sieste sur le sofa qui trônait dans le petit salon et il était seul. Bâillant une nouvelle fois pour se donner du courage, Zoro s'étira rapidement avant de se lever de son point de chute. Le salon, plutôt cosy bien que sobrement décoré, donnait directement sur une cuisine tout aussi simple, avec son plan de travail et son îlot central. Après un rapide tour d'horizon, il était finalement bel et bien seul et son instinct le poussa à aller dehors. Il jeta un coup d'œil à la cheminée par-dessus son épaule, avisant la hotte en briques rouges sur laquelle étaient accrochés trois katanas superposés les uns au-dessus des autres. Il les détailla un instant, une expression neutre sur le visage, puis se détourna pour se diriger d'un pas traînant vers la porte. Ses pieds nus foulèrent le parquet en bois, faisant grincer une ou deux lattes au passage, ce qui lui fit songer qu'il faudrait peut-être les changer. Il mit cette idée dans un coin de sa tête et enfila ses bottes, posées à côté de la porte d'entrée.
Lorsqu'il ouvrit celle-ci, une brise glacée s'engouffra précipitamment dans la pièce avec un sifflement strident et le froid lui mordit la peau. Une lueur blanche, presque aveuglante, l'accueillit à sa sortie et l'obligea à plisser la paupière. Devant lui, un épais manteau neigeux recouvrait la totalité du paysage, lui donnant l'impression d'un monde cotonneux et immaculé. Un léger brouillard se forma devant sa bouche alors qu'il expirait une bouffée d'air chaud et il observa les volutes s'évader dans l'air sec. La neige craqua sous le poids de sa botte lorsqu'il posa pour la première fois son pied dehors puis à nouveau lorsque le deuxième s'avança. Il se dirigea par côté de la maison en direction de l'arrière façade, accompagné par la mélodie duveteuse de la fine poudreuse.
Derrière la maison, s'étalait la forêt en arrière-plan, où la plupart des arbres avaient perdu leurs feuilles, et que seuls quelques sapins persistaient à apporter une touche de verdeur dans cet océan nivéen. Un peu plus proche de lui, il nota une série de petits arbustes, plantés en rangée, dont quelques feuilles vertes dépassaient encore et sous lesquelles apparaissaient des petites notes orangées. Zoro grimaça faiblement, les mandariniers n'allaient pas aimer ce coup de froid, tout comme leur propriétaire. Il était sur le point de l'appeler mais un claquement sec et répétitif, par côté, attira son attention. Il chercha des yeux l'origine quand un flash orangé capta son regard. Celui-ci s'adoucit instantanément et il observa la scène en silence.
Une petite fille d'environ cinq ans tenait entre ses deux petites mains un bokken* avec une expression déterminée sur le visage. Ses longues boucles flamboyantes lui arrivaient dans le milieu du dos et ondulaient sauvagement autour de son petit minois alors qu'un bandeau vert foncé avec un nœud sur le dessus de la tête retenait les mèches rebelles qui menaçaient de venir devant ses grands yeux verts étincelants. Zoro nota avec une certaine admiration, la parfaite posture d'attaque qu'elle adoptait et ce, malgré son jeune âge. Face à elle se tenait un petit garçon, un peu plus jeune, qui tenait lui aussi une arme similaire. Sous la tignasse hirsute d'une couleur vert tendre se dévoilait une petite bouille renfrognée dont le froncement de sourcil très familier témoignait d'une concentration intense. L'enfant leva son bokken et fonça sur sa rivale pour l'attaquer de front avec un cri de bravoure. Toutefois, du fait de son aînesse et d'une agilité un peu supérieure, la gamine esquiva sans mal et frappa le dessus de la tête du jeune garçon. Le coup porté n'était pas fort mais il suffit à marquer sa victoire. Si la petite fille avait eu les cheveux d'un bleu foncé, il aurait facilement pu croire à un flash-back, ce qui était un peu perturbant, avouons-le. Le bambin, déçu, parut bouder le temps d'une seconde avant de se mettre à rire aux éclats, rapidement suivi par sa sœur, puis tous deux se remirent en garde et continuèrent leur affrontement dans un mélange de claquement sec et de rires enfantins.
Soudain, deux mains se faufilèrent sous ses bras et vinrent l'enlacer par-derrière, suivi par un corps chaud qui se colla à son dos. Zoro prit les mains entre les siennes et entremêla ses doigts à ceux plus fins de son homologue.
- C'est comme ça depuis que je suis sortie, annonça une voix familière.
Sans la voir, il pouvait très bien entendre rien qu'au son de sa voix, qu'elle était amusée par le comportement imitatif des enfants mais aussi très fière d'eux.
- Je deviendrais la meilleure épéiste du monde, encore meilleure que papa ! s'écria soudainement la petite fille avec détermination face à son frère.
- Comme si c'était possible, railla le petit garçon. Papa c'est le meilleur ! Personne ne peut le battre !
- Moi j'y arriverai !
Ce fut plus fort que lui, un immense sourire étira ses lèvres et il entendit un léger rire dans son dos. C'est fou ce qu'elle lui rappelait Kuina. La petite possédait la même adresse et la même détermination que son amie disparue bien trop tôt. Il fut aussi touché par l'admiration que lui vouait le petit garçon mais il aurait bien voulu lui dire que personne n'était imbattable, son heure viendra à lui aussi et quelqu'un d'autre prendra sa place. Toutefois, les bras qui l'enlaçaient, se desserrèrent et la sensation de chaleur dans son dos disparut. Il se retourna et contempla la merveilleuse femme qui lui souriait chaleureusement. Comme toujours, il la trouva magnifique. Ses longs cheveux roux avaient encore poussé et lui arrivaient désormais dans le bas du dos. Une frange droite tombait au-dessus de ses grands yeux noisette qui pétillaient joyeusement comme deux pierres d'ambres. De fines petites ridules se plissaient au coin de ses mirettes, trace visible des années passées, qu'il ne lui ferait jamais remarquer sous peine de dormir dehors. Nami n'avait pas vraiment changé, si ce n'est qu'elle paraissait plus sereine et surtout heureuse. Zoro resta un moment à la fixer avec admiration, plongeant son regard dans le sien alors qu'il la surplombait d'une tête de plus.
- J'ai du souci à me faire avec ces deux-là, soupira finalement la jolie rousse.
- Déçue ? tu aurais préféré qu'ils s'entraînent à chaparder ? demanda-t-il un brin taquin.
- Oh mais ils n'ont pas besoin de s'entraîner… ils le font déjà, répliqua-t-elle en lui lançant un clin d'œil.
Ses sourcils se soulevèrent et il feignit l'indignation ce qui extorqua un rire cristallin à la jeune femme. Il fallait bien qu'ils aient hérité de quelque chose de leur mère, songea-t-il ironiquement. Le bretteur tendit le bras et sa paume de main vint épouser la courbe de la joue de sa compagne. Elle se laissa aller à son contact alors qu'il la caressa tendrement de son pouce.
- Deux vrais petits démons, en conclut Zoro.
- Ils ont de qui tenir, approuva Nami.
- Espérons que celui-là sera plus sage, déclara-t-il en baissant les yeux.
Nami suivit son regard et tous deux observèrent avec tendresse le ventre bien rond qui poussait l'épais manteau de la jeune femme vers l'avant. Cette dernière vint poser ses mains sur les flancs rebondis et les caressa affectueusement. Un petit bandeau doré à l'éclat bleuté attira son œil sur son annulaire gauche. La pierre aux reflets bleu sombre, verts et orange, qui surmontait la bague, scintillait sous les rayons du soleil, rappel de leur union et de leur amour profond l'un pour l'autre. Zoro joignit les siennes et sentit un petit coup sous sa paume droite. Un sourire attendri apparut sur son visage habituellement fermé. Ils seraient bientôt cinq et quelque chose lui disait que le petit être qui grandissait pour l'instant au chaud au creux des reins de sa maman allait, lui aussi, leur donner du fil à retordre, mais rien ne pourrait le rendre plus heureux. Avec les rires des enfants en fond sonore, le bretteur se pencha pour embrasser sa femme, sur ses lèvres offertes, enveloppé de son parfum aux notes d'agrumes et d'épices. Il les effleurait presque, et même s'il les connaissait par cœur depuis longtemps, l'envie de les goûter restait toujours la même. Son souffle chaud et sucré venait se mélanger au sien et il combla les derniers millimètres…
Un violent coup sur la tête le força à ouvrir l'œil et il se retrouva plongé dans la pénombre, allongé sur quelque chose de mou et bosselé, à fixer un plafond en bois. Le doux parfum si particulier qui rappelait celui des mandarines se dissipa et son esprit mit quelques secondes à resituer où il se trouvait. Zoro et la moitié de son équipage étaient à bord du Bartho-club, en route pour l'île de Zo, et il était actuellement dans la soute du navire. La nuit était tombée rapidement et la plupart des occupants avait fini par s'endormir après une autre journée de festivité. L'équipage de Bartolomeo était fort sympathique, malgré leur manque évident d'expérience concernant la navigation, et voyager avec eux s'avérait amusant. Après leur séjour mouvementé à Dressrosa, ainsi que la concrétisation de leur nouvelle alliance, la moitié des Chapeaux de Paille avait embarqué à bord du Bartho-club et depuis, les fêtes s'enchaînaient à un rythme effréné. Ça ne valait pas leur vie sur le Sunny, mais tant qu'il y avait de l'alcool, Zoro se satisfaisait de peu.
Il regarda autour de lui et aperçut à quelques pas, son capitaine en train de ronfler bruyamment la tête collée au sol et les fesses en l'air, Franky et Ussop également profondément endormis dans un coin, Triffouilli pionçait assis, le dos collé au mur, son sabre calé sur son épaule et encerclé par son bras, non loin des deux samouraïs qui avaient rejoint temporairement leur équipage. Bartholoméo et son équipage n'étaient pas présents, sûrement sur le pont à s'occuper de la navigation qui semblait assez houleuse. Il nota également l'absence de l'archéologue, et supposa qu'elle avait choisi un endroit plus silencieux pour dormir.
Zoro massa son crâne, sentant une petite bosse se former et chercha le ou la responsable du regard. Il trouva au sol, une boîte de conserve et leva les yeux pour constater qu'elle avait dû tomber de l'étagère à côté de lui. La mer devait être agitée car le bateau tanguait fortement, ce qui avait très certainement entraîné la chute de cette boite alors qu'il se retrouvait balloté de droite à gauche. Il s'était endormi sur un sac de pomme de terre et le cadavre d'une bouteille roulait de façon indécise d'un côté puis de l'autre, non loin de lui.
Quel rêve étrange… Tout semblait si réel et cela lui laissa un arrière-goût étrange. Il revit très nettement les deux bambins s'amuser, à quel point la ressemblance entre Nami et la petite était flagrante, tout comme celle du petit avec lui. Son ventre se noua bizarrement lorsqu'il entendit le mot « papa » résonner dans son esprit de leur petite voix d'enfant. Il n'avait jamais envisagé d'avoir de progéniture, car rien ne garantissait qu'il ne devienne assez vieux pour ça et puis tout simplement parce que ce n'était pas dans ses projets. Il avait d'abord une promesse à honorer. Il rejeta de prime abord, l'idée d'avoir des enfants, avec Nami, de surcroît. C'était ridicule d'y penser maintenant, même s'il avait des sentiments pour elle, leur relation était bien trop fraîche pour envisager de telles choses, surtout que pas mal d'épreuves les attendaient encore. Pourtant, plus il se repassait les brides de son rêve en tête, plus l'image de cette petite fille, avec les fossettes de sa maman, ainsi que celle du petit garçon avec sa petite bouille d'enfant terrible, devenait tentante. Il irait même jusqu'à dire qu'elle avait quelque chose d'attrayant. Sans qu'il ne s'en rende compte, le coin de ses lèvres s'était étiré vers le haut alors qu'il s'imaginait leur apprendre le maniement des sabres sous leurs grands yeux admiratifs. Un mélange parfait de Nami et de lui, voilà qui pourrait donner quelque chose d'intéressant, pensa-t-il un brin amusé.
Zoro secoua la tête comme pour chasser ses idées saugrenues. Il mollissait pour laisser un banal délire de son esprit le perturber ainsi. Pourquoi son subconscient avait-il décidé de lui montrer ce rêve, peut-être était-ce le fait de voir Nami s'occuper de ces enfants à Punk Hazard, ou du jeune Momonosuke, qui lui avait fait réaliser qu'elle avait ce côté maternelle ? L'image de la navigatrice jouant avec une petite rousse et un petit vert s'imposa à son esprit, et il ressentit une sorte de curiosité, presque envieuse, de découvrir cette scène en vrai. Le bretteur gronda de lassitude, ça ne servait à rien de lorgner sur quelque chose qui n'avait pas lieu d'être pour le moment. Il avait d'autres priorités. Soudain, il se rappela d'une chose. La Nami de son rêve portait une bague à son doigt et il revoyait très bien l'éclat de celle-ci.
Jetant un coup d'œil circulaire à la pièce pour s'assurer que tout le monde dormait, Zoro plongea la main dans la poche de son pantalon et en sortit une petite boîte carrée. Le velours qui la recouvrait était d'une douceur incontestable sous ses doigts grossiers alors qu'il la faisait tourner pour en examiner chaque contour. Il marqua un temps d'hésitation quand le clapet se retrouva face à lui. Il ne l'avait ouverte qu'une seule fois mais il se souvint encore de l'impression que cela lui avait laissé.
Flash-back
Ils avaient débarqué il y a peu dans cette ville étrange, Acacia, où cohabitaient des humains et des jouets bels et bien vivants. Pour plus de sécurité, sachant qu'ils étaient attendus par Doflamingo, l'équipage s'était scindé en trois groupes. Le premier était constitué de Robin, Ussop, Triffouillis et César, et avait pour mission de remettre leur otage à la pointe nord de l'île. Le second, de Nami, Chopper, Brook et Momonosuke, qui eux, étaient restés à bord du Sunny tandis que le troisième, c'est-à-dire Luffy, Sanji, Zoro, Franky ainsi que Kin'emon s'aventuraient sur Dressrosa, vêtus d'un accoutrement censé les faire passer incognito. C'est pourquoi, les hommes de l'équipage portaient une moustache blanche ridicule (voire même doublée d'une barbe grotesque pour d'autres) ainsi qu'une paire de lunettes de soleil pour déambuler tranquillement dans les rues. Passé la surprise de voir un jouet articulé pousser une poussette, tout comme celle d'apprendre que les femmes de ce pays avaient pour habitude de poignarder leurs amants sous le coup de la passion, ils s'étaient enfoncés un peu plus dans les rues de la ville. Ils avançaient en groupe, mais sans savoir comment, au détour d'une rue, Zoro se retrouva seul. Il regarda tout autour de lui, à la recherche de ses nakamas, sans succès. Ils avaient certainement dû se perdre à suivre Luffy qui se laissait guider par son estomac… ou bien par le cuistot qui avait dû repérer une fille. Après un bref haussement d'épaules, le pirate flâna dans les allées commerçantes, les mains dans les poches de son costume noir, entouré de gens heureux et souriants (peut-être un peu trop, pour être franc). Les boutiques défilaient devant ses yeux mais aucune n'était digne de son attention, pour la simple et bonne raison qu'il n'y avait ni taverne ni armurerie dans le lot qu'il avait visité. De toute façon, il ne roulait pas sur l'or non plus, et Nami ne lui avait rien prêté. C'était sûrement mieux comme ça, connaissant ses taux d'intérêts exorbitants.
Au bout d'un certain temps, il finit par tomber dans un cul-de-sac, au bout duquel une enseigne lui accrocha l'œil. Le logo en forme de diamant tout comme l'inscription « bijouterie & joaillerie » lui indiquèrent la nature de l'établissement. Zoro allait faire demi-tour, pas vraiment intéressé par ce genre de boutique superflue, quand ses doigts effleurèrent l'objet froid qu'il gardait secrètement dans sa poche depuis quelques jours. Il marqua un temps d'hésitation et scruta les environs pour repérer un visage connu. Personne. Pas même un badaud. L'allée était déserte. L'ancien chasseur de pirate avisa la devanture d'un air méfiant, comme si faire un pas vers celle-ci allait porter atteinte à sa virilité. Dans son esprit, ce genre de magasin s'adressait particulièrement aux femmes, tout comme les boutiques de lingeries, et c'étaient des endroits dans lesquels il ne se sentait pas à l'aise d'y mettre les pieds. Il songea un instant à s'en aller mais la pierre dans sa poche sembla peser bien plus lourd que précédemment.
Prenant son courage à deux mains, Zoro carra les épaules et s'avança vers la bijouterie, avec une expression déterminée sur le visage. Le tintement cristallin de la clochette accrochée au-dessus de la porte résonna dans toute l'échoppe pour avertir de sa venue. Tout comme à l'extérieur, il n'y avait pas un chat non plus à l'intérieur. La surface de vente n'était pas bien grande et la présence de meubles vitrés n'arrangeait en rien l'effet de petitesse. Cela avait beau être petit, il n'en restait pas moins que l'endroit était plutôt lumineux, ce qui mettait bien en valeur les divers bijoux précieux exposés sous verre. Zoro avança prudemment en tenant ses katanas près de lui pour ne rien accrocher par mégarde, et examina avec curiosité les différentes pierres colorées. Il y avait les traditionnels saphir, rubis, émeraude, diamants et perles, montés sur divers bijoux confectionnés avec des métaux précieux tels que l'or ou l'argent, mais rien ne ressemblait à ce qu'il possédait dans le fond de sa poche. Son œil balaya les différentes étagères, et à chaque fois, la petite étiquette juxtaposée le faisait sourciller. Qui pouvait mettre des sommes astronomiques dans des breloques pareilles ? Mais qu'est-ce qu'il fichait ici ? Il n'était vraiment pas à sa place, il n'avait même pas un dixième de la somme annoncée pour un bijou. Malgré cela, il continua son inspection, allant même jusqu'à se demander s'il y en avait un qui plairait à Nami. A quoi bon ?!
- Je peux peut-être vous aider ? S'enquit une voix d'homme à sa droite.
S'il n'avait pas été aussi maître de ses émotions, le bretteur aurait certainement sursauté. Sa main s'était, toutefois, posée sur la garde de ses sabres et il glissa un regard en biais au nouvel inquisiteur. Zoro ne fit pas l'effort de paraître aimable du fait qu'il se soit fait surprendre aussi facilement par un simple vendeur de cailloux. Un petit homme d'une cinquantaine d'années, à la calvitie bien avancée, le détaillait avec intérêt derrière ses petites lunettes rondes tout en se tenant les mains
- Vous cherchez quelque chose en particulier ? Un cadeau pour l'élue de votre cœur, peut-être ?
A cause des lunettes noires, le bijoutier ne vit pas le regard assassin que lui envoya le bretteur et il se lança dans l'énumération de ses articles.
- Hum…, non pas vraiment. Pour être honnête, je n'ai pas assez d'argent pour ça.
Le bijoutier se stoppa net puis se retourna vers lui et ses yeux se rétrécirent pour former deux minuscules fentes. Son humeur exagérément enjouée se dissipa instantanément et Zoro sentit qu'il s'apprêtait à se faire chasser du magasin.
- En fait, j'aurai aimé savoir si vous pouviez me donner une estimation de ceci.
Il sortit la petite gemme de sa poche et ouvrit la paume à plat sous le regard suspicieux du vendeur. L'homme se pencha pour l'observer tout en ajustant les lunettes sur son nez. Il resta silencieux un moment avant de tendre sa main.
- Permettez ?
Zoro lui céda et il le vit se diriger derrière son comptoir pour en sortir une loupe monoculaire. Le bijoutier rabattit ses lunettes sur le haut de son front et les remplaça par le petit objectif. Il examina la pierre colorée pendant de longues minutes à la lumière d'une lampe posée sur le plan de travail. Pendant tout ce temps, le bijoutier semblait particulièrement concentré, si bien qu'il était difficile d'en déduire quelque chose, mais le bretteur crut remarquer un haussement de sourcils ainsi qu'un léger tremblement dans la main qui tenait la pierre. Toutefois, cela ne dura qu'une fraction de seconde, ce qui le fit douter de ce qu'il avait vu. Il commençait à s'impatienter lorsqu'enfin, l'homme décolla sa petite loupe de son œil pour revenir vers lui.
- Je suis navré, mais cette pierre n'a guère de valeur.
- Oh, fit le pirate avec une pointe de déception. Et moi qui pensais pouvoir narguer Nami avec…
L'homme haussa un sourcil et parut intrigué par la mention d'une tierce personne.
- Pardonnez mon impudence, mais est-ce elle, l'élue de votre cœur ?
Zoro le jaugea du regard derrière ses lunettes noires. En quoi est-ce que ça le concernait ? Effectivement, c'était un peu indiscret de sa part. Alors pourquoi se sentait-il obligé de répondre ?
- Euh… non… nous euh… nous sommes nakamas..., enfin c'est… euh… un peu plus compliqué...
Non mais qu'est-ce qu'il lui prenait de bredouiller comme ça ? Depuis quand est-ce que ça lui arrivait ? et surtout, pourquoi il sentait le bout de ses oreilles se mettre à chauffer ?! L'homme sembla amusé par sa gêne, ce qui l'agaça et ne fit qu'accentuer son malaise. Bordel ! qu'est-ce qui lui avait pris de mettre les pieds dans pareil endroit ?!
- Ne vous en faites pas, je comprends, éluda-t-il avec un sourire complice. La grande majorité des hommes qui viennent ici, sont un peu dans le même cas que vous, vous savez ? Et vous n'avez pas souhaité lui offrir cette pierre ?
- Ça m'a traversé l'esprit, mais Nami n'a qu'un seul véritable amour, et c'est l'argent… Alors j'espérais que cette chose m'en aurait rapporté. Et si jamais elle apprend que je lui offre un vulgaire caillou sans valeur, elle va à coup sûr augmenter cette maudite dette que je lui dois.
Le bijoutier le fixa, un peu perdu avec cette histoire de dette, puis soupira.
- Les femmes aiment qu'on leur offre des objets de valeur, concéda le vendeur. Mais vous m'êtes sympathique, alors je peux vous proposer 500 berrys pour cette gemme si vous le souhaitez ?
500 berrys ce n'était pas grand-chose mais c'était toujours mieux que rien. A défaut de pouvoir lui acheter un bijou avec cet argent, il pourrait toujours les donner à Nami pour les déduire de sa dette fictive et le geste lui ferait certainement plaisir…
Mais qu'est-ce qu'il racontait ?! Ce n'était pas son genre de se soucier d'offrir quelque chose à quelqu'un ! surtout un bijou pour une femme ! Qu'est-ce qu'il lui prenait tout à coup ? on dirait le pervers au sourcil-en-vrille ! Ses sentiments pour la jeune femme le faisaient vraiment dérailler.
- Va pour 500 ! gronda-t-il en tendant la main.
Furieux contre lui-même et son attitude inhabituelle, Zoro décida qu'il dépenserait cet argent dans un bar, à boire de l'alcool. Voilà qui sonnait plus comme lui. Offrir un bijou à Nami… au mieux elle se serait moquée de lui et au pire cela l'aurait fait flipper. Après tout, il ne savait pas ce qu'elle ressentait exactement pour lui… Déjà qu'il n'était pas à l'aise de dire à voix haute qu'il avait des sentiments pour elle, alors en discuter avec la principale intéressée pour savoir si elle éprouvait la même chose ? Et puis, parler ce n'était pas leur fort.
Le bijoutier fut un peu surpris du changement d'humeur de son client mais ce dernier lui serra tout de même la main pour valider la transaction. Il sortit la somme annoncée de la poche intérieure de son veston et donna les billets au bretteur.
- Si jamais, d'aventure, vous changiez d'avis et décidiez d'offrir un bijou à votre nakama, n'hésitez pas à revenir me voir ! lança joyeusement l'homme moustachu.
- Humph…
C'est avec une sensation étrange que Zoro sortit de l'échoppe, presque comme avec le regret d'avoir laissé la gemme au bijoutier. Quel dommage tout de même que cette pierre n'ait pas eu plus de valeur que cela, il la trouvait pourtant d'un éclat original, il n'en n'avait vu aucune autre comme celle-ci dans les vitrines et il s'aventurerait même à dire qu'elle était jolie. Mais après tout, il n'était pas joaillier, et que valait son opinion sur la beauté des choses ? Tout cela était bien superficiel dans sa quête de perfection de son art. N'empêche, jamais de sa vie, il n'aurait cru mettre les pieds dans une bijouterie, surtout avec l'intention de faire plaisir à quelqu'un d'autre. Le bretteur renifla de dédain et quitta la ruelle d'un pas pressé pour s'éloigner au plus vite de cet endroit.
…
Doflamingo et toute la Don Quijote Family avait été vaincu, laissant la ville de Dressrosa dans un état pitoyable, grouillante de blessés, mais surtout de marines. Les membres de l'équipage au Chapeau de paille étaient disséminés aux quatre coins de la ville, et ils n'avaient eu que peu de temps pour se réunir afin de panser leurs plaies à l'écart de l'agitation ambiante du corps armé du gouvernement mondial. Les dégâts étaient considérables et à n'en pas douter, les habitants allaient avoir du pain sur la planche pour tout reconstruire, mais au moins ils seraient enfin libres. C'était un mal pour un bien, comme on disait. Par chance, la famille royale les avait aidés à s'exfiltrer de la ville et ils avaient pu se reposer dans l'ancienne maison de Kyros et de Rebecca, qui était restée au palais royal.
Suite à cela, ils avaient rencontré Sabo, l'autre frère de Luffy, que Robin connaissait déjà, après ses deux ans passés avec les révolutionnaires. Il leur raconta pourquoi leur capitaine ne leur avait jamais parlé de lui ainsi que leur émouvante retrouvaille au Colisée. Zoro fit immédiatement le parallèle avec Ace. Sabo avait la même bienveillance envers son petit frère que l'ancien commandant de Barbe Blanche. En tout cas, il avait fait forte impression au bretteur (non pas parce qu'il lui avait amené une bouteille de saké, ce qui était très louable de sa part), mais si Luffy lui avait confiance pour lui laisser le Mera Mera no Mi, c'était qu'il ne pouvait pas être un mauvais bougre. Dommage que le Chapeau de Paille était trop occupé à récupérer en dormant, il n'avait pas eu l'occasion de reparler avec le révolutionnaire, qui avait dû s'éclipser rapidement.
Lorsqu'il se réveilla enfin, le ventre sur patte qu'il était se jeta sur la nourriture. Tous avaient pu refaire le plein d'énergie, et l'heure du départ approchait à grand pas. La marine allait encercler l'île pour les empêcher de partir et ils devaient se dépêcher de reprendre la mer avant que cela n'arrive. Cependant après que Kyros leur ait expliqué qu'il ne reverrait plus sa fille, leur capitaine avait jugé bon de leur faire faux bond afin de régler seul une affaire, alors que la marine allait les prendre en chasse. Voilà pourquoi, Robin, Ussop, Franky, Triffouillis, Kin'emon, Kanjuro et lui-même, se retrouvait à se dépêcher de regagner le port sous la conduite de leur nouvel ami, mais surtout grand fan, Bartholoméo. Zoro fermait la procession et il vit enfin l'océan ainsi que les bateaux amarrés au ponton en bois lorsqu'une voix d'homme s'écria dans son dos :
- Monsieur l'épéiste !
Zoro ralentit l'allure et détourna la tête.
- Oui vous, le jeune homme aux cheveux verts !
Un petit homme à lunettes et avec une grosse moustache courait vers lui en agitant le bras. Il mit quelques secondes avant de le reconnaître comme étant le bijoutier à qui il avait vendu la pierre trouvée sur l'île de Calypso. Les autres devant lui ralentirent aussi mais Zoro leur fit signe de continuer sans lui. Il pesta intérieurement car l'homme prenait des risques en venant lui parler alors que la marine était sur leurs talons. Le bijoutier arriva tout essoufflé et s'arrêta devant le pirate, en nage, plié en deux, les mains sur les genoux. L'épéiste roula des yeux et grogna d'ennui. Il était pressé et cet homme le ralentissait sans qu'il ne sache pourquoi car il était incapable de parler à cause de sa faible endurance physique. Il valait mieux pour lui que ce soit important !
- Pa…pardonnez-moi ! déclara-t-il avec peine. Je… Je..
- Dépêchez-vous ! Ou les marines vous arrêterons pour complicité ! siffla Zoro.
Le bijoutier se redressa et se força à prendre une grande inspiration.
- Tenez !
Il lui tendit un petit écrin en velours d'un bleu sombre. Le bretteur haussa un sourcil mais garda sa main sur ses épées.
- Qu'est-ce que vous me faites ?
- Prenez-la s'il vous plaît ! C'est le moins que je puisse faire pour vous !
Zoro zieuta la petite boite avant de tendre la main avec hésitation. L'homme inclina la tête révérencieusement alors que l'épéiste ouvrait le clapet du petit boîtier. C'est avec une grande surprise et surtout une grande incompréhension qu'il vit la fameuse pierre qu'il lui avait cédée, mais elle avait été retravaillée finement, tel un diamant, et surmontait désormais un anneau doré. Les nuances orangées et vertes semblaient ressortir un peu plus dans le bleu saphir. C'était une bague magnifique, mais il ne comprenait pas pourquoi l'avoir transformée ainsi alors qu'elle n'avait que très peu de valeur.
- Je vous prie de m'excuser ! Je sais que je vous ai dit que cette pierre ne valait rien mais… il s'agissait d'un mensonge odieux de ma part ! Cette gemme est très rare, qui ne peut être extraite d'aucun filon. Avant que vous me la montriez, je pensais qu'il s'agissait d'une légende, d'ailleurs, la plupart des joailliers ne croient même pas qu'elle existe. Cette pierre est unique, et elle a pour nom, Cœur de Calypso…
Zoro tiqua sur le nom de la gemme. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. Alors comme ça, ce petit caillou était très rare ? Voilà qui devenait intéressant. Toutefois, le fait que le bijoutier lui ait menti et abusé de son ignorance, le rendit méfiant.
- Si cette pierre est unique, pourquoi vouloir me la rendre ?
L'homme baissa la tête, honteux.
- Pour deux raisons. Connaissez-vous la légende qui entoure cette pierre ? Celle d'une jeune femme nommée Calypso, qui serait tombée amoureuse d'un marin, bafouant ainsi la volonté des dieux ?
- Oui, on me l'a déjà raconté.
Zoro ne savait pas trop où cela menait. Il se souvenait vaguement de ce que Nami lui avait dit sur cette Calypso, que la fin de l'histoire était un peu tirée par les cheveux.
- La mort de cet homme l'avait tellement affecté qu'elle avait décidé de s'arracher le cœur pour ne plus souffrir, mais celui-ci s'était transformé en pierre…
Ah oui voilà ! C'était bien ce qu'il pensait… N'importe quoi.
- Malheureusement, cela ne la soulagea pas et elle mourut de chagrin quelque temps plus tard. Toutefois, la légende raconte qu'avant de mourir, elle ensorcela son cœur cristallisé pour que celui-ci n'apparaisse qu'aux âmes destinées l'une à l'autre, afin qu'il les unisse et les protège du même sort qu'elle avait subi. Certains ont cherché cette pierre pendant des années, des couples, des chasseurs de trésors, sans jamais rien trouver. C'est pourquoi elle demeura une légende, jusqu'à aujourd'hui.
La fin de son histoire différait quelque peu de ce que lui avait raconté Nami. A aucun moment il ne se rappelait l'avoir entendu parler d'âmes sœurs. Tout ce qu'elle lui avait dit, c'était que cette pierre protégeait les êtres chers. Alors, aurait-elle menti ? Ou bien s'agissait-il d'une version différente de l'histoire ?
- J'ai agi sournoisement, car même après que vous m'aillez parlé de cette jeune femme, j'ai tout de même voulu vous escroquer. C'est impardonnable de ma part. Si cette pierre vous est apparue, c'est que Calypso a jugé que cette dénommé Nami et vous, étiez faits l'un pour l'autre, c'est pourquoi son cœur devrait vous revenir.
Zoro resta sans voix. Tout cela lui paraissait tellement absurde. Comment une pierre pourrait savoir cela ? Il ne croyait absolument pas en ce genre de chose, et pourtant, les paroles de l'homme l'avaient sonné. Cependant, le temps venait à manquer, alors il mit cela de côté, il aurait tout le temps d'y réfléchir plus tard.
- L'autre raison qui m'a poussé à vous donner ceci, c'est que je vous suis redevable et reconnaissant, tout comme ce pays, de ce que vous et votre équipage avez fait pour nous. Ma femme avait été transformé en jouet et je ne m'en souvenais plus…
Des larmes commencèrent à se former au coin de ses yeux, derrière ses petites lunettes rondes.
- Je l'aime tellement, et sans vous, j'aurai continué à l'ignorer alors qu'elle m'attendait toujours ! C'est grâce à vous que j'ai pu retrouver l'amour de ma vie ! Je vous en serais éternellement reconnaissant ! pleura le bijoutier.
De son côté, Zoro se sentait mal à l'aise avec l'élan de reconnaissance de l'homme.
- C'est pourquoi, après que vous ayez battu la Don Quijote Family, j'ai travaillé jour et nuit pour faire cette bague, afin que vous puissiez l'offrir à l'élue de votre cœur ! J'y ai mis tout mon savoir-faire et je me suis aussi permis de la personnaliser pour cette jeune femme. Regardez à l'intérieur de l'anneau.
Le bretteur hésita un instant, il voulait lui dire que leur relation n'était pas celle qu'il croyait, que cette bague était un peu exagérée, mais la curiosité l'emporta. Il sortit le bijou de son écrin et l'inclina pour observer l'intérieur de l'anneau. Au début, il ne vit rien et s'apprêta à le faire remarquer à l'homme, mais soudain son œil capta quelque chose. Sur tout le pourtour étaient gravées de petites ondulations. Zoro ne comprit pas immédiatement, puis cela lui apparut comme un flash.
- Des vagues ?
- Oui, c'est bien là le prénom de votre nakama ?
Il ne répondit pas mais hocha la tête, gardant l'œil rivé sur la bague. Il ne pouvait pas le nier, le travail était remarquable. C'était la bague parfaite pour une demande en mariage… sauf qu'il n'avait absolument pas prévu de l'épouser !
- Je ne peux pas accepter, fit-il sombrement en fermant le clapet de l'écrin pour le tendre à l'homme.
Ce dernier rejeta son offre en plaçant ses mains devant lui.
- Bien sûr que si, elle vous revient de droit. Gardez-la pour le moment venu, où vous serez sûr de ce que vous éprouvez, assura le bijoutier.
Le pirate le détailla de son air sérieux. Est-ce qu'il devait vraiment la garder ?
- ZORO ! s'écria Usopp au loin. Dépêche-toi !
Il releva la tête en voyant une horde de marines se diriger vers eux. Son regard se posa à nouveau sur l'homme.
- Allez-y ! lui dicta le bijoutier avec un grand sourire.
Après un hochement de tête, Zoro plaça la petite boîte dans sa poche et rejoignit le reste de ses compagnons qui l'attendaient pour regagner le pont d'embarquement. Il espéra que Luffy ne tarderait pas trop. Dès qu'ils auraient un moment de répit, il pourrait réfléchir à ce qu'il ferait de cette bague, mais pour l'heure, ils devaient réussir à s'échapper de ce pays en un seul morceau.
Fin du Flash-back
La pierre brillait malgré l'obscurité ambiante. Le manque de luminosité faisait paraitre le bleu sombre comme du noir de jais mais les volutes bicolores à l'intérieur semblaient s'illuminer par elles-mêmes. Ses doigts retracèrent les contours de l'anneau en or, on aurait dit qu'il avait été tressé et non sculpté, et venaient envelopper la base de la pierre avec un cintrage très fin. C'était d'un travail impeccable. Il passa le bout de son doigt sur l'intérieur et sentit les vaguelettes se dessiner. Une bague faite pour Nami… Qu'est-ce qu'il lui avait pris d'accepter de la garder ?! Une chose était sûre, il ne pouvait pas lui offrir comme cela. La symbolique de l'objet était un peu trop forte pour le moment et il n'envisageait sûrement pas de l'épouser dans l'immédiat. Cependant son rêve lui avait donné matière à réflexion, et c'était une possibilité d'avenir qui ne lui déplaisait pas. Peut-être qu'un jour, cette bague s'avérerait utile.
Les planches grincèrent un peu plus bruyamment alors que le navire était balloté dans tous les sens, le sortant momentanément de ses pensées. Il devait vraiment faire un temps exécrable dehors, il pouvait même entendre le martèlement de la pluie sur le pont. Pourvu que l'équipage du Bartho-club s'en sorte… de toute façon, si ce n'était pas le cas, ils seraient venus leur demander de l'aide, songea Zoro. Il referma le boîtier et le rangea dans sa poche avant de croiser les bras derrière sa tête. Il ne savait pas pour combien de temps encore ils en avaient avant de rejoindre l'île de Zo, mais cela le tardait. C'était une étape de plus dans leur long voyage, une étape qui le rapprochait un peu plus de son objectif premier. L'excitation de la nouveauté et de l'inconnue commençait à le titiller. Qui sait ce qu'ils allaient affronter sur cette île et quel nouveau défi ils allaient devoir relever. Une partie de l'équipage avait déjà cette réponse, pensa-t-il un peu amèrement. Zoro refusait de s'inquiéter pour eux, car après tout, le pervers était présent, et il lui faisait assez confiance pour les protéger. Toutefois, dans un coin de son esprit, bien tapis dans l'ombre, une part plus sombre de lui n'appréciait pas le fait de savoir Nami avec cet idiot libidineux. Il n'était pas jaloux ! Il n'avait jamais douté de ses capacités, et même si elle lui avait déjà répété qu'il était celui qu'elle désirait, le fait de les voir toujours aussi proches avait tendance à l'agacer. Vivement qu'ils les rejoignent, afin qu'ils reprennent leurs aventures tous ensembles, mais aussi pour qu'il retrouve ses petits apartés avec sa navigatrice. Cela faisait un bon moment qu'ils n'en n'avaient pas eu, surtout avec la présence de Law, ainsi que celle de Kin'emon et de son fils sur le navire. Les possibilités d'avoir un moment d'intimité s'étaient drastiquement diminuées, pour ne pas dire qu'elles étaient devenues quasi-inexistantes. La chaleur de leurs ébats commençait à lui manquer. Zoro soupira. Cette sorcière avait réellement réussi à l'ensorceler.
…
Qu'est-ce que ce crétin au sourcil-en-vrille avait foutu ?!
Ils avaient à peine débarqué sur cette île (qui n'en était pas vraiment une vu qu'il s'agissait d'un éléphant géant), pour découvrir qu'aucun des membres de l'équipage n'était présent, mais qu'en plus des traces d'affrontement étaient visibles un peu partout. Et leur capitaine qui avait encore fichu le camp sans les attendre… Il avait un mauvais pressentiment. Mieux valait qu'ils restent sur leur garde et qu'ils progressent dans l'exploration de l'île, ils finiraient sûrement par trouver ce qui était arriver à leurs nakamas.
Tout à coup, il sentit une présence et une fraction de seconde plus tard, quelque chose lui fonçait dessus pour l'attaquer. Zoro para le coup sans difficulté mais ressentit une vive décharge électrique. Cela n'avait rien à voir avec ce que la navigatrice pouvait produire avec son bâton de sorcière, les éclairs qu'elle envoyait étaient bien plus ravageurs. Mais la sensation restait tout aussi désagréable. Il leva le regard vers la silhouette qui l'avait attaquée. Un lapin ? Et il ne fut pas au bout de ses surprises lorsqu'un chien chevauchant un crocodile surgit devant eux. Elle rappela l'attaquante qui lui obéit immédiatement. Il n'y avait pas prêté attention avant qu'Usopp ne le fasse remarquer mais, ce chien sur deux pattes portait le haut de Nami. Qu'est-ce que cela signifiait ? Les questions fusèrent dans son esprit lorsqu'elle parla des corps de leurs amis. Bien sûr, il s'en était fallu de peu pour que Robin imagine le pire et qu'Usopp se mette à paniquer. Il devait bien avouer que cela ne le rassurait pas, surtout après avoir vu les traces de batailles, mais Zoro temporisait ses ardeurs et refusait de tirer des conclusions hâtives, sans avoir vu les corps en question. Cela semblait inconcevable qu'un de ses nakamas soit mort, tous luttaient bien trop vaillamment pour ne pas perdre leur rêve de vue.
- Du calme, je vous rappelle que sourcil-en-vrille est avec eux et qu'il ne laisserait jamais rien leur arriver, les raisonna Zoro d'une voix impérieuse.
Tout ce qu'il espérait, c'était de ne pas s'être trompé en ayant fait confiance au cuistot, et en sa capacité à prendre les bonnes décisions pour le groupe. En tout cas, les deux étranges créatures étaient parties à la poursuite de Luffy… enfin, rien que ce dernier ne puisse gérer, et ils avaient assez de soucis de leur côté.
…
Heureusement, Nami était toujours vivante, du moins d'après les dires de la dénommée Wanda. Les habitants de cette île étaient tout aussi étranges que celle-ci. Tous étaient des animaux dotés de parole et se tenaient sur deux pattes, comme des humains. On aurait dit des utilisateurs de fruit du démon de type zoan, tout comme Chopper, à la différence que chez eux, leurs aptitudes humaines étaient naturelles. Les Minks étaient plutôt du genre méfiant et semblaient en état d'alerte, mais quoi de plus normal après avoir été attaqué. Il s'était passé quelque chose de grave, cela se voyait dans leur regard ainsi que dans leur posture, et cela concernait un membre de leur équipage. Zoro attendait patiemment d'avoir le fin mot de l'histoire, mais aussi de constater par lui-même que Nami et les autres allaient bien.
Le village abrité dans la forêt était tout aussi étonnant que le reste, avec ses maisons en forme d'ananas perchés dans les arbres, reliés les uns aux autres par des pontons en cordes. Mais le plus surprenant, ce fut l'accueil enjoué des locaux lorsqu'ils les virent arriver. Ils n'avaient encore rien fait de spécial mais ils étaient acclamés comme des héros… bien étrange en effet. Soudain, ses tergiversations furent écourtées quand il vit un flash orange et violet du coin de l'œil. Nami était bel et bien vivante, et elle se précipitait vers eux en agitant le bras, toute extatique de les revoir. D'un seul coup, un poids dont il n'avait pas conscience, s'envola de ses épaules. Il eut un bref sentiment de culpabilité à l'idée d'être soulagé de la voir en pleine forme alors qu'il n'avait même pas encore vu tous les autres. Il fut aussi heureux de voir que Chopper allait bien. En tant que deuxième membre de l'équipage, il devait se soucier du sort de ses compagnons de la même manière pour chacun d'entre eux, et les traiter à égalité, mais ça restait tendancieux quand on savait qu'il s'envoyait en l'air avec la navigatrice. Zoro observa cette dernière avec une attention dissimulée sous un masque d'impassibilité, mais il la détailla, cherchant une quelconque trace de blessure. Par chance, il n'en vit aucune et en fut soulagé. Il nota aussi son changement vestimentaire. Nami portait une nouvelle robe violette qui la cintrait parfaitement et mettait ses formes généreuses en valeur de manière incontestable. Et le laçage de perles dorées sur ses flancs, qui dévoilait l'absence de tout sous-vêtement, la rendait encore plus sexy et affriolante. Il n'était pas du genre à s'attarder sur les détails physiques et encore moins sur les tenues de sa compagne, mais il devait bien reconnaître qu'elle était attirante dans cette nouvelle robe. Peut-être était-ce dû à cette semaine d'absence, ou l'abstinence depuis plus longtemps, qui avait éveillé son intérêt pour les charmes féminins de sa nakama ?
Ce fut avec un certain soulagement qu'il la vit se jeter dans les bras de leur capitaine. Certes, il était très content de la revoir, mais les effusions en public, ce n'était pas son genre, ça le rendait mal à l'aise, et aux vues de leur relation, elle aurait très bien pu faire la même chose avec lui (Nami avait toujours été quelqu'un de très tactile). Mais heureusement, ce ne fut pas le cas. En revanche, quelque chose attira très vite son attention. L'attitude de la jeune femme avait brusquement changé alors qu'elle serrait Luffy dans ses bras. Zoro n'était pas le plus fin des observateurs, mais il connaissait suffisamment la rouquine pour voir que quelque chose n'allait pas et cela semblait assez grave pour l'avoir bouleversé de la sorte. Son inquiétude s'accentua lorsqu'il l'entendit s'excuser :
- Pardon ! C'est Sanji, il…
…
Ces Minks étaient de bien étranges créatures, mais ils savaient recevoir ! Mis à part le fait qu'ils avaient des coutumes plutôt dérangeantes dans le sens littéral du terme (non mais quelle idée de se frotter ou de vouloir le mordiller pendant qu'il buvait !), leur alcool de fruits n'était vraiment pas mauvais !
Finalement, il s'était avéré que leurs compagnons allaient bien, le seul problème, c'était que cet idiot de pervers avait choisi de se tirer pour régler une affaire de son côté, mais sinon, ils étaient tous vivants. Enfin presque…
- On t'a retrouvé, le Baron défunt ! s'exclamèrent des Minks en voyant Brook.
Hein ? De quoi est-ce qu'ils parlaient ? Wanda finit par leur expliquer que c'était le petit surnom qu'ils avaient donné au musicien, et cela fit tilt dans son esprit. Un peu plus tôt, elle leur avait foutu la trouille alors qu'elle parlait simplement de leur ami squelettique. Vraiment bizarres ces gens… Enfin, là n'était pas le plus important. Ce qui l'agaçait en revanche, c'était de constater à quel point Nami était préoccupée par l'absence de leur cuisinier. Tout comme Luffy et les autres, Zoro avait lu le mot qu'il avait laissé, et il n'y voyait rien d'inquiétant. Après tout, cela lui ressemblait bien, et puis il avait bien précisé qu'il reviendrait, alors où était le problème ? Toutefois, quelque chose en son for intérieur lui disait qu'il s'était passé autre chose. C'était peut-être qu'une idée de lui, mais il avait la sensation que Nami gardait ses distances. Il avait essayé, à plusieurs reprises, d'initier un contact visuel mais à chaque fois, elle l'ignorait ou elle lui renvoyait un regard froid. Le bretteur refusa de se prendre la tête avec ce genre de pensées négatives et préféra mettre ça sur le compte de l'inquiétude de la jeune femme.
Cette dernière, ainsi que Brook et Chopper, commencèrent à leur raconter ce qu'il leur était arrivé depuis qu'ils s'étaient séparés à Dressrosa lorsqu'un Minks les interrompit pour annoncer que le Duc était réveillé. Zoro n'avait pas la moindre idée de qui il s'agissait, mais cela sembla soulager et ravir toutes personnes présentes dans la pièce. Wanda se proposa de leur expliquer ce qu'ils avaient vécu avant la venue de leurs amis, tout en se rendant au chevet de ce-dit Duc. Pour la première fois depuis qu'ils avaient fait une alliance avec Trafalgar Law, il entendit parler de Jack, un des membres de l'équipage de Kaido aux cents bêtes, et apparemment ce n'était pas un rigolo. Et cela ne fit que se confirmer lorsqu'ils rencontrèrent enfin le Duc Inuarashi, couvert de bandage et avec une jambe en moins. Cependant, leur rencontre fut de courte durée car il s'endormit d'un seul coup, tout comme le lion, Sicilion, et Wanda leur apprit le fonctionnement de leur communauté, partagée entre le jour et la nuit, avec la présence d'un autre Duc, Maître Nekomamushi, qui régnait du crépuscule jusqu'à l'aube. Au fur et à mesure de leur récit, la monstruosité de l'équipage aux cents bêtes lui apparaissait clairement, et annonçait la gravité de leur prochain défi à relever. Les Minks avaient vraiment vécu un enfer, de la part d'un monstre perfide qui avait lâchement utilisé du gaz pour les exterminer. Heureusement que leur équipage était intervenu au bon moment. Zoro commençait à comprendre un peu mieux l'ambiance chez les habitants de cette île, mais il ne saisissait toujours pas le rapport avec le départ du sourcil-en-vrille.
Sur le chemin, en direction du territoire de Maître Nekomamushi, Brook narra les raisons de la disparition de Sanji. Le bretteur écouta silencieusement, scrutant du coin de l'œil le langage corporel de la navigatrice. Lorsque Luffy parla de l'éventuelle futur femme, Nami sembla accuser le coup et il ne put s'empêcher d'être un tantinet agacé. Est-ce que ça la dérangeait que Sanji se trouve une femme ? était-elle jalouse ? Zoro chassa violemment ces pensées intempestives dans un coin de son esprit. Il n'était pas jaloux ! Toute cette situation commençait à lui courir sur le haricot. Ils étaient tous en train de larmoyer sur le sort du cuistot et Chopper en rajouta une couche en pleurnichant sur le fait qu'ils ne le verraient peut-être jamais. S'en fut trop pour Zoro, qui ne put retenir plus longtemps le fond de sa pensée.
- Ce ne serait pas plus mal, conclut-il froidement.
- Hein ?!
- Même si j'aurai préféré qu'il s'en aille en nous disant « merci pour tout » et « pardon pour la suite ».
- On s'en fiche de ça ! s'écria le petit renne en colère.
- Vous ne comprenez pas ?! C'est comme si on était dans un train dont il serait impossible de descendre…
Zoro retraça les évènements depuis Punk Hazard, en passant par Dressrosa… Ils devaient leur faire comprendre l'importance de l'enjeu qui allait se jouer.
- L'empereur Kaido ! Comme l'a montré la destruction de ce pays par « Jack » la menace est désormais réelle. Ce n'est plus qu'une question de temps avant qu'il nous tombe dessus ! N'oubliez pas non plus que la bataille pour laquelle nous avons conclu une alliance avec Law n'a pas encore eu lieu. En outre, et pour une raison que j'ignore, il semblerait que Kin'emon et ses camarades soient eux aussi dans le viseur de kaido. Vous voyez, tout nous conduit vers un conflit avec l'un des quatre empereurs !
Il marqua une pause théâtrale pour que la gravité de l'information rentre dans leurs petites têtes.
- Et c'est le moment que choisit « sourcil en vrille » pour nous mêler aux affaires d'un autre empereur, Big Mom ?! Si c'est pas de l'inconscience, je sais pas ce que c'est ! s'énerva le bretteur.
Pourquoi est-ce qu'aucun d'eux ne voyait la merde dans laquelle le cuistot venait de les mettre ?! Tout ça pour une banale histoire de famille !
- COMMENT TU PEUX DIRE CA ! TU CROIS QU'IL L'A FAIT EXPRÈS ?! s'emporta la navigatrice.
La véhémence avec laquelle Nami le rabroua, le sidéra momentanément. Il cacha sa surprise derrière un éclat de colère ainsi que sa posture décontractée.
- Il n'était pas obligé de se laisser embarquer dans cette ridicule histoire de famille !
- RIDICULE ?! Je te signale qu'il en souffre ! hurla la jeune femme.
Zoro grinça des dents et il allait répliquer lorsque Luffy les interrompit :
- Bon ce n'est pas en papotant qu'on avancera… allons directement interroger Sanji !
- Reste en dehors de ça Luffy ! s'agaça Zoro.
C'est pas vrai ! Pourquoi son capitaine s'y mettait lui aussi ?! Après cela, la jeune femme lui tourna le dos et l'ignora froidement. Il n'avait pas fait l'unanimité au sein de son propre équipage, mais que la navigatrice s'oppose à lui afin de défendre cet abruti, lui fit l'effet d'une claque.
C'est pourquoi, il garda le silence jusqu'à la fin du trajet et lorsqu'ils atteignirent leur destination, il préféra rester à l'extérieur de la pièce, sur ce petit banc, alors que les autres s'entretenaient avec un membre de l'équipage de Big Mom. Les écouter s'apitoyer sur ce pervers l'écœurait, surtout de la part d'une certaine personne à la chevelure rousse, mais il capitula de force lorsque son capitaine prit la décision d'aller le secourir. C'était une décision à laquelle il ne pouvait aller à l'encontre, mais cela ne signifiait pas qu'il approuvait. Le Chapeau de Paille sortit de la chambre et s'arrêta brusquement lorsqu'il remarqua Zoro pour revenir vers lui, tout sourire.
- J'imagine que tu dois te faire du souci pour Sanji ! déclara Luffy tout sourire. Hihihihi
Sa naïveté l'impressionnait autant qu'elle le désespérait. Si seulement il savait le fond de sa pensée…
- Tu veux un coup de latte ? Je t'ai dit qu'il fallait l'oublier, cet abruti, maugréa Zoro.
Luffy était bien trop gentil… ou était-ce lui qui était trop dur ?
à suivre...
*Le bokken est un sabre japonais en bois imitant la forme du katana
Je vous avais dit qu'on reverrait la petite pierre précieuse et qu'elle aurait son utilité 😉 Comme toujours, je suis curieuse de savoir ce que vous en avez pensé, alors n'hésitez pas à commenter.
La suite ne devrait pas trop tarder.
Je vous dit à bientôt!
