Hello, voici le deuxième tome de la dernière Volonté. Titre alternatif : Délires journalistiques ! Pas de béta pour ce tome ni les suivants. Si vous relevez des fautes atroces, n'hésitez pas à me le faire savoir !

L'effet papillon va enfin commencer, pfiou ! Ce chapitre sert surtout d'exposition, il risque d'être un peu sec, mais j'espère qu'il vous plaira quand même.

Bonne lecture !


Chapitre un : Mise au point et vacances reposantes


Depuis leur arrivée dans un univers parallèle plongé dans la fin du 20e siècle, Envy tant qu'Edward avait beaucoup évolué. Le premier avait très vite débuté un apprentissage en profondeur afin d'un jour pouvoir réaliser son rêve de devenir un véritable humain. Ses progrès restaient mesurés, mais grâce à sa grande volonté, il avançait constamment vers son objectif. De l'autre côté, Edward s'était trouvé un nouveau but dans la vie en aidant l'Homonculus dans ses démarches, en attendant de mener leur mission à bien et de pouvoir peut-être revenir chez lui, à Amestris, près des siens.

Depuis de nombreux mois, Edward avait entièrement laissé de côté ses réflexions sur le moyen de réussir à contrer son destin, c'est-à-dire son exécution. Même si la Vérité lui avait promis une seconde chance en le ramenant au moment exact de son départ, il n'avait aucune idée de la manière de procéder pour éviter de mourir. Comment faire ? Demander grâce au Führer ? Essayer de s'échapper ? Il se souvenait parfaitement bien de son état d'épuisement quand il s'était retrouvé cloué au pilori. Il n'avait aucune chance. Découragé, il préférait laisser ces pensées de côté et se concentrer sur l'essentiel.

Car avant de pouvoir tenter quoi que ce soit pour sauver sa vie, il devait bien évidemment trouver et tuer Voldemort pour protéger la Vérité. Ce qui s'avérerait bien plus compliqué que ce qu'ils avaient prévu à l'origine. En effet, de nombreux adeptes adhéraient à l'idéologie du mage noir. Parmi eux se comptait l'ignoble Peter Pettigrow qui, selon une prédiction de Sybille Trelawney, aiderait Voldemort à revenir au pouvoir plus puissant et dangereux que jamais, et ce, avant la fin de l'année à venir. Malheureusement, les recherches pour retrouver le traitre n'avançaient pas. L'unique attitude à adopter désormais qu'ils s'étaient familiarisés avec ce monde et la magie consistait à l'attente. Alors pour ne pas se sentir impuissants et subir leur scolarité à Poudlard comme une perte de temps, ils s'occupaient autant qu'ils le pouvaient.

Cet été, contrairement au précédent, Envy et Edward se retrouvaient la plupart du temps seuls au château, car les professeurs profitèrent du départ des Détraqueurs et de la fin de la menace de Sirius Black afin de prendre des congés. Les seuls à rester étaient le directeur de l'école, Albus Dumbledore, et le garde-chasse, professeur de Soin aux créatures magiques et ami, Rubeus Hagrid. Cette compagnie, bien que moindre, leur suffisait amplement et ils pouvaient baisser légèrement leur garde (ce qui se serait révélé impossible si une certaine chauve-souris graisseuse était restée elle aussi).

Pendant la première semaine, Envy insista pour commencer une remise en forme dans les règles de l'art. Il fut un entraîneur très persuasif, et Edward se prit même parfois à regretter maître Izumi qui lui paraissait bien agréable à côté. Entre les séances de musculation intensives, « c'est mou tout ça ! Et là, ce seraient pas des poignées d'amour que je vois ? », les courses d'orientation dans le château « les six-cent-vingt-cinq prochaines marches ne vont pas se monter toutes seules ! Du nerf ! » ou encore les séances d'escalade dans les montagnes autour de Pré-au-lard « je m'en fous que tu sentes plus tes membres. Si tu tombes, tu crèves ! » ou de lutte contre les créatures de la Forêt interdite « si tu ne mets pas cette acromentule hors d'état de nuire, elle va te bouffer ! » Il n'en pouvait plus.

Toutefois, le programme intense fonctionnait et remplit rapidement son office. Edward retrouva sa forme d'antan en un temps record et il remarqua avec grande satisfaction qu'il avait grandi d'une dizaine de centimètres durant l'année scolaire. Il n'y avait pas à dire, s'il n'avait pas été lié à Alphonse pendant quatre ans, il aurait sûrement développé une taille respectable. Maintenant, il pouvait se rattraper et il en profitait en fanfaronnant auprès de son ami : « Tu vas voir, bientôt je serai plus grand et baraqué que toi », qui lui répondit du tac au tac : « Je calque ma taille sur la tienne pour toujours te dépasser ». Edward bouda pendant toute une soirée en apprenant cette ignoble tricherie qui lui assurait de toujours garder une taille inférieure à celle de l'Homonculus.

Mais il se consola dans une revanche bienvenue peu de temps après, car après avoir appris la faim, le sommeil et quelques petits détails propres aux êtres vivants, Envy passa une nouvelle étape. La puanteur. Dès la fin des séances d'entraînement, lui aussi maintenant se retrouvait en nage et se déshydratait plus facilement en suant. Ça l'avait fait pester, jurer, taper du pied, et il essayait de s'y habituer, tout en maudissant les humains pour certains de leurs côtés loin de l'image idéale qu'il gardait de cette condition. Pour compenser son déplaisir, il se trouva un goût prononcé pour les bains moussants, au grand dam d'Edward qui devait sans cesse lui rappeler de sortir de l'eau avant de se transformer en Strangulot.

L'avertissement prenait bien mieux depuis leur rencontre avec les créatures aquatiques en milieu sauvage lors de leur première baignade dans le lac noir. Depuis, ils n'avaient plus eu l'occasion d'aller s'y risquer, car Hagrid leur avait déconseillé de s'y rendre sous peine de déranger les êtres de l'eau y vivant. Alors, ils entreprirent des leçons de vol plus poussées, n'en ayant eu que peu l'an passé.

Au moins s'accordaient-ils sur un point : ce n'était pas du tout une discipline pour eux. Déjà, il était très difficile de trouver un balai capable de supporter le poids conséquent de l'Homonculus, et ensuite, Edward refusait encore catégoriquement l'idée qu'un balai puisse voler. À la limite, on pouvait leur concevoir un usage ménager, pour ceux que ça ne rebutait pas, et c'était tout. Leur dernière expérience sur le terrain fut une partie de Quidditch avec Dumbledore. Malgré le décalage entre son statut, son âge et ses longues robes de sorciers, le mage se révéla un étonnamment bon batteur et les écrasa par un score phénoménal.

En dehors de ce match improvisé, les deux élèves passèrent beaucoup de temps avec le sorcier qui se révélait d'excellente compagnie depuis qu'il les avait en meilleure estime grâce à leur rôle dans les procès de Buck et Black. Lui, que les congés désœuvraient, se fit un plaisir de vérifier lui-même leurs progrès depuis leur brusque plongée dans le monde de la magie presque un an jour pour jour auparavant. Il leur fit part autant de son admiration que de son plaisir de voir leur évolution plus importante qu'il ne l'aurait cru possible. « Qui eut cru que vous viviez comme de simples Moldus il y a un an à peine ? »

Profitant de cette bonne entente et d'un déplacement de Hagrid à Londres, ils demandèrent l'autorisation de l'y accompagner malgré le fait qu'Edward stagne au stade de mineur. Tenant sa promesse, Envy se porta garant pour lui et Dumbledore accepta sans opposer de résistance, ne leur demandant que de revenir à une heure décente. Trop heureux, ils promirent et il fut impossible de les tenir en place la veille de l'excursion. Hagrid s'amusa beaucoup de leur enthousiasme et leur proposa de leur servir de guide, mais ils déclinèrent l'offre généreuse, préférant découvrir la ville de leur propose manière.

Donc ils étaient perdus peu de temps après avoir quitté la gare.

- Tu as parcouru Amestris pendant des années sans jamais avoir appris à te servir d'une carte ? s'exclama Envy.

– Je préfère faire les choses à manière, c'est tout ! J'avais pas toujours des objectifs précis, faut laisser son instinct parler de temps en temps. Ça fait toujours du bien, raisonna Edward en faisant glisser la carte vers lui discrètement dans le but de la replier pour oublier ce malentendu.

– Mon instinct, pour le moment, tout ce qu'il me dit c'est que je devrais te jeter à la flotte, rétorqua Envy en tirant la carte vers lui d'un geste brusque avant de la froisser pour la lui lancer à la figure.

Elle atterrit directement sur son nez dans un choc bien moins indolore que prévu et Edward émit une protestation qui resta ignorée alors qu'Envy reprenait sa route d'une démarche saccadée. Amusé malgré lui par la situation, Edward lui emboîta le pas en haussant les épaules. Il préférait largement déambuler sans but pour leur première approche de la capitale. Tout l'y fascinait, de toute manière ! Les automobiles, les étranges petits trains parcourant les rues, les bus à deux étages remplis de touristes, les bâtiments touchant le ciel ! La différence tenait à la modernité de ce nouvel univers. Les Moldus, quoique puissent en dire les Sang-Pur, étaient tout aussi avancés technologiquement que les sorciers magiquement.

Après être passés plus de deux fois devant des boutiques spécialisées dans l'informatique, Edward ne résista pas plus longtemps et s'y engouffra, des étoiles plein les yeux. Il osait à peine toucher ces bijoux de technologie de peur de les érafler. Ici, Fuery nagerait dans le bonheur, pensa-t-il avec mélancolie alors qu'il étudiait les composants d'une nouvelle machine étrange nommée « ordinateur ». Si seulement il pouvait l'essaie —

– Mais qu'est-ce que c'est que ce machin ? souffla une voix près de son oreille.

Edward sursauta violemment et faillit donner un coup à l'écran bombé lui faisant face.

– Complètement fou ma parole ! bredouilla-t-il avant de se précipiter hors de la boutique, les oreilles rouges de honte alors que tous les clients s'étaient tournés vers eux.

Suite à cet incident, Edward sut définitivement qu'Envy manquait cruellement de savoir-vivre. Il joua donc la sécurité en proposant une pause bien méritée dans un café avant de reprendre leur chemin, cette fois vers le chemin de traverse.

Pendant qu'ils attendaient leurs commandes et parce que sa curiosité sur le monde moldu le titillait, Edward saisit l'un des journaux entreposés sur le comptoir. Économie : « … Inauguration du tunnel sous la manche pour la circulation commerciale entre l'Angleterre et la France… », « … Chine annonce la reprise de ses essais nucléaires... », politique : « … suite à l'élection de Nelson Mandela en tant que président d'Afrique du Sud... », « … Jordanie signe un traité de paix avec Israël... », faits divers : « … Un avion d'Air France, transportant 239 personnes, est détourné par des islamistes qui tuent trois passagers. Les otages seront libérés par le GIGN... », sport : « … Victoire du Britannique Damon Hill au volant d'une Williams Renault au Grand Prix automobile de Grande-Bretagne sur le circuit de Silverstone... »

Dans aucune de ces informations, il ne voyait la trace d'une quelconque communauté magique. Peut-être la prise d'otage par des Néo-Mangemorts, il n'en savait rien. En tout cas, le monde semblait aller très vite, mais pas plus mal qu'ailleurs. D'après le point de vue de ce journal. Ce qui l'étonnait, par contre, était le nombre de nouvelles qu'un quotidien britannique contenait sur des pays étrangers. À Amestris, le gouvernement filtrait bien davantage les informations, tout comme ses voisins, qui accepteraient rarement d'être ainsi exposés. Le monde se montrait plus étroit ici. Non pas sur un plan physique, car d'après les cartes, il paraissait bien plus large au contraire, mais paradoxalement plus « connecté ».

– Cette époque est bizarre, commenta Envy en observant les passants par la baie vitrée. Ils ont tous l'air si pressés.

– C'est vrai, je trouve aussi. Ça s'explique sûrement par leur évolution, tout va plus vite ici.

– On dirait qu'ils ont le temps de rien... C'est vraiment différent d'Amestris.

– Mais sûrement tout aussi bien, répondit Edward.

Il sentait la légère déception de son ami et préférait le rassurer avant qu'il déprime en regrettant de devoir rester dans ce monde pour toujours. Mais l'avis d'Envy sur cette époque ne bougerait plus et il ne dit plus rien du reste de leur pause, plongé dans ses pensées. Il n'en sortit brièvement que pour demander l'addition qu'il paya sans une seule remarque moqueuse habituelle sur le fait qu'il l'entretenait financièrement, puis il lui annonça qu'ils se rendaient directement au Chaudron Baveur sans lui demander son avis.

Après être passés dans le bar tenu par le fameux « Tom », ils se retrouvèrent à nouveau en terrain connu sur le chemin de traverse. Sachant qu'il ne rencontrerait aucun de ses amis, Edward ne fit pas ralentir son accompagnateur qui de toute manière ne s'arrêterait sûrement pour aucune raison, même valable.

Bientôt ils se retrouvèrent devant le grand bâtiment immaculé dominant toutes les boutiques alentour et abritant la banque des sorciers. Comme de coutume, debout à côté du portail en bronze, se tenait un gobelin en faction. Lorsqu'ils montèrent les escaliers de pierre blanche, le vigile ne les lâcha pas des yeux, jusqu'à ce qu'ils pénètrent à l'intérieur du bâtiment.

Ils me donnent des frissons dans le dos, commenta Edward lorsqu'ils passèrent la porte d'argent. Je n'arrive pas à croire qu'ils soient cousins avec Flitwick.

Pourtant vous devriez vous entendre, entre nabots.

Edward fut complètement pris de court par la pique à laquelle il ne s'attendait pas étant donné le mutisme de son ami depuis un long moment. Sa réaction bouche bée arracha un sourire à l'Homonculus.


La transaction mit plus de temps que prévu, car avant de procéder à la fusion de leurs deux coffres en un seul, ils furent obligés d'avoir un entretien avec le directeur de la banque qui refusa leur demande. Ils n'étaient ni mariés ni engagés de quelque façon que ce soit en plus qu'Edward n'ait pas atteint sa majorité. La fusion poserait trop de problèmes si jamais ils désiraient l'annuler. Alors, coincé dans une impasse, Envy souhaita abandonner et se prépara à opérer une retraite stratégique, lorsqu'Edward eut une idée. Il sollicita une courte pause afin de discuter du problème entre eux. Cinq minutes leur furent accordées et ils se retrouvèrent seuls dans le bureau.

On peut leur dire qu'on est de la même famille, proposa Edward.

C'est pour cette idée stupide que —

C'est pas stupide, idiot. On est du même sang, techniquement parlant.

- Qu'est-ce que tu me chantes là ? demanda Envy, sceptique.

Hohenheim a crée Père avec son sang, et à son tour il a crée les Homonculus à partir de lui-même, tu me suis ? Donc en gros, on est cousin. Sauf si on considère que Hohenheim est le père de Père, et là ça devient plus compliqué parce que je serais ton oncle et c'est très perturbant.

Désarçonné par la logique implacable de la théorie, Envy dévisagea son vis-à-vis avec perplexité.

Je refuse que tu sois mon oncle.

On est bien d'accord, conclut Edward en acquiesçant.


Finalement, un test de parenté confirma la théorie d'Edward sur leur « lien de sang ». Puis un gobelin spécialisé les inspecta par une batterie de tests visant à vérifier si aucun des deux partis ne souffrait de l'emprise d'un quelconque sortilège. Enfin, ils remplirent divers formulaires avant de finalement signer le contrat magique. Aussitôt, une équipe fut dépêchée pour transvaser le contenu du coffre d'Edward dans celui bien plus rempli d'Envy. À eux deux, ils cumulaient à peu près cent-quatre-vingt Gallions. La majorité provenait du procès contre les Malefoy, le reste consistait en quelques mornilles provenant de leurs bourses d'études de l'année précédente. La somme totale s'avérait confortablement rondelette comparé à ce qu'ils possédaient à leur arrivée.

– Quelle idée franchement, dit Envy, une fois qu'ils furent de retour dans le chemin de traverse. Mon oncle... Je sais pas où tu es allé pêcher ça. Si la Protection de l'enfance magique apprend ça... Je vais ravoir la brigade des mœurs au cul et cette fois pour inceste.

– Les Sang-Pur se marient beaucoup entre cousins, je pense que tes fesses sont sauves pour cette fois. Viens, j'ai envie d'une glace, lâcha Edward en le prenant par le coude pour le tirer chez Fortarôme. En plus, il fait beaucoup trop chaud pour marcher plus longtemps.

Levant les yeux au ciel face au prétexte pour cacher qu'il souhaitait simplement se goinfrer, Envy le suivit sans rechigner. Arrivés à bon port, Edward commanda la plus grande coupe glacée au menu, sous le regard médusé de son ami.

– Mais où tu mets tout ça ? T'as déjà mangé une demi-pizza, deux fish and chips, trois hot-dog, quatre beignets et c'est sans compter les bonbons que tu t'es empiffré toute la journée !

– Je suis en pleine croissance, lui rappela Edward alors que ses yeux se mettaient à pétiller en voyant arriver sa coupe.

Ce n'était pas une glace. C'était un monstre. Et au fur et à mesure de la conversation, le récipient se vidait à allure soutenue, sans une seule pause ni pour digérer ni pour reprendre son souffle. Pas étonnant qu'il soit devenu un peu potelé durant l'année, pensa Envy en observant l'animal presque avec fascination. C'était effrayant à regarder. Il n'était apparemment pas le seul à trouver ça impressionnant, car le tenancier de la boutique vint leur annoncer avec fierté que le blond venait de battre un nouveau record de la plus grosse glace mangé en solitaire en moins de quinze minutes. Pour immortaliser l'instant, on le photographia même à côté de son immense coupe vide. Avant qu'il n'y ait le flash, Edward en profita pour attirer Envy à lui afin de le faire figurer sur le portrait. L'heureux gagnant signa l'image animée qui fut aussitôt placardée au mur au-dessus du comptoir, puis on leur donna une copie.

Saluant Fortarôme tandis qu'ils s'éloignaient, Edward tenait le souvenir à la main. Envy lui jeta un coup d'œil curieux et il put s'apercevoir, l'air surpris, le bras d'un Edward souriant de toutes ses dents autour du cou. Plus tard il essaierait de s'en procurer une copie, elle lui plaisait bien.


Deux jours après cette première sortie, avec l'autorisation de Dumbledore, ils revinrent à Londres. Mais avec un objectif bien différent de la fois précédente. Aujourd'hui, ils désiraient se rendre au ministère de la Magie pour des affaires plus sérieuses et autrement plus importantes. Utilisant les souvenirs de leurs deux précédentes visites, ils y pénétrèrent par l'entrée des visiteurs dans une vieille cabine téléphonique au cœur de la ville. Après avoir tapé le même code que Hagrid lors de leur recensement un an auparavant : « 6-2-4-4-2 », et donné leurs noms puis le motif de leur visite : « apprentis avocats », la cabine s'enfonça dans le sol. Edward observa avec la même fascination que la dernière fois le trottoir disparaître sous ses yeux jusqu'à ce que l'obscurité se referme au-dessus de leur tête. Il ne pouvait plus rien voir à présent.

– Bouh !

– Ha !

Le cœur battant, Edward donna un coup de pied à la jambe qu'il sentait près de lui tandis qu'Envy riait à s'en décrocher la mâchoire.

– Tu es vraiment un gamin !

– C'était trop tentant.

Boudeur, Edward croisa les bras et resta tendu, s'attendant à une nouvelle farce puérile. Maintenant, ils n'entendaient plus qu'un grondement sourd pendant que la cabine s'enfonçait dans les profondeurs de la terre. Au bout d'une minute, un rai de lumière dorée tomba sur ses pieds et s'élargit jusqu'à éclairer tout son corps. Lorsque le rayon illumina son visage, Edward dut cligner plusieurs fois des paupières avant de s'habituer à la luminosité.

– Le ministère de la Magie vous souhaite une bonne journée, conclut la voix désincarnée de la cabine.

La porte s'ouvrit automatiquement et ils s'en extirpèrent avant de se diriger vers le bureau d'enregistrement des baguettes magiques. Au milieu de la foule, ils se mêlèrent aux employés se dirigeant vers les grandes portes d'or, à l'autre bout du hall, qui menaient aux ascenseurs. Ils passèrent inaperçus avant de quitter le flot des employés pour se rendre au comptoir de sécurité où un sorcier mal rasé se tenait assis derrière un bureau. Comme lors du procès d'Envy, Edward tendit sa baguette et pour éviter les ennuis, prétexta devant le regard perplexe du sorcier que le cheveu de vélane venait de sa mère. Apparemment, comme le remplaçant de la dernière fois, il le crut lui aussi. Envy quant à lui avait sciemment oublié sa baguette à Poudlard afin de ne pas avoir à expliquer la provenance des ingrédients illicites la composant (heureusement pour lui qu'il ne l'avait pas non plus lors de son procès).

On les laissa partir et ils passèrent à la hâte les portes d'or. Là, une vingtaine d'ascenseurs les attendaient. Ils n'avaient aucune idée duquel prendre. Finalement, ils s'engouffrèrent au hasard avec un membre du Magenmagot qu'ils avaient reconnu grâce à sa robe officielle couleur prune.

Coincés près des portes alors que la minuscule cabine se remplissait à raz-bord, ils prétendirent ne pas exister et n'échangèrent aucune parole, pour qu'on les oublie. Les étages se succédèrent les uns après les autres, puis seul resta le sorcier qu'ils avaient suivi à l'origine. Mais à leur arrivée au niveau trois, une figure bien connue entra dans l'espace restreint. Edward et Envy se figèrent et se tournèrent tous deux précipitamment vers le mur de la cabine en rentrant la tête dans les épaules. Dolorès Ombrage, le batracien, se tenait là, accompagnée d'une autre sorcière. Elle lui donna plusieurs instructions que la secrétaire nota avec application sur un long rouleau de parchemin, essayant de voir ces lignes malgré les nombreuses notes de service obscurcissant la cabine.

Edward croisa les doigts pour qu'elle ne les voie pas. Déjà, elle paraissait détester Envy lors du procès, mais en plus, après sa remarque déplacée sur sa relation avec Envy, elle devait le haïr. Playwiz... Mais qu'est-ce qu'il lui avait pris de sortir une énormité pareille ?

Au bout d'un interminable moment, l'ascenseur continua à monter lentement, avant d'enfin s'arrêter.

– « Niveau deux, Département de la justice magique, Service des usages abusifs de la magie, Quartier général des Aurors, Services administratifs du Magenmagot, Archives de la Cour de justice magique, Département de contrôle de l'équipement magique. »

Ombrage, sa secrétaire et le sorcier du Magenmagot sortirent de la cabine sans attendre pendant qu'Envy et Edward pressaient moins le pas en les suivant. Ils longèrent un couloir dans lequel des portes s'alignaient de chaque côté, chacune portant un écriteau en cuivre indiquant le nom et l'affectation de son occupant ou le service y étant implanté. Après plusieurs tours dans le labyrinthe de couloirs trop semblables, ils arrivèrent dans un cul-de-sac perdu et plongé dans l'obscurité. La plaque de cuivre terni accrochée à la porte indiquait : « Archives de la Cour de justice magique ».

– Nous y voilà.

Edward abaissa la poignée. Lorsque la porte s'entrouvrit, il fut assailli par une armée de notes de service qui volèrent au-dessus de leurs têtes avant de s'engouffrer dans le couloir derrière eux à toute vitesse. Décoiffés et surpris, Envy et Edward se figèrent lorsque la porte s'ouvrit plus largement, les invitant à entrer. Échangeant un regard peu convaincu, ils avancèrent et pénétrèrent dans le service. Personne n'aurait pu deviner la taille de la salle, alors que les rayonnages montaient jusqu'au plafond, remplis de rouleaux de parchemin plus ou moins récents. Une vive lumière éclairait les passages les plus empruntés, délaissant certaines allées dans l'ombre, et il régnait une odeur de vieux parchemins qui plaisait tout particulièrement à Edward.

Suivant le couloir étroit en faisant attention à ne rien faire tomber, ils furent bientôt perdus dans une immensité d'archives riant dès qu'on les frôlait.

– Sûrement les dossiers sensibles, commenta Edward avec amusement.

L'allée devint de plus en plus étroite jusqu'à ce qu'ils soient obligés de marcher de profil. Les sorciers avaient vraiment des problèmes pratiques d'organisation...

– Matthew ! Le Bureau des Aurors a besoin du résumé du procès de Lavoisier ! Où est-il ?

Soulagés d'entendre des voix, ils accélérèrent. Après un dernier virage en tête d'épingle sur la droite, ils débouchèrent sur un espace dégagé décrivant un large cercle autour duquel s'alignait une dizaine d'autres rayonnages pareils à ceux qu'il fallait traverser pour arriver jusqu'à cet ilot isolé. Au centre se tenaient trois tables rondes où s'empilaient des plumes, des encriers et des dossiers en cours. Deux d'entre elles étaient occupées par les sorciers en charge du service. D'un côté, un apprenti débordé griffonnait avec acharnement et un tas de parchemins s'entassait déjà à ses pieds. Il suait à grosses gouttes et la manche gauche de sa robe s'humidifiait progressivement à force de devoir s'éponger fréquemment le front afin de ne pas salir son travail. Matthew, à n'en pas douter.

Installée à l'autre table, une sorcière d'âge mûr en robe grise perlée dictait des indications à sa plume. L'outil écrivait à toute vitesse des notes de service s'en allant au-dessus de la tête des deux visiteurs et des annotations à des dossiers ouverts devant elle.

– Excusez-moi, bonjour, l'interpela Edward en s'avançant. Êtes-vous Mrs Euphegenia Cunningham ?

La sorcière releva la tête vers lui, un sourcil haussé et son pince-nez perché en équilibre instable au bout de celui-ci.

– Edward Elric et son ami, je suppose. Vous êtes en retard.

– Nous avons eu du mal à trouver notre chemin jusqu'ici, avoua Edward en inclinant légèrement la tête en signe d'excuse.

Mrs Cunningham hocha simplement le menton en réponse et pointa un doigt vers un rayonnage sur leur droite.

– Je n'ai pas de temps à vous consacrer, expliqua-t-elle. Vous trouverez tout ce qu'il vous faudra sur les anciens procès dans cette rangée-ci. Ceux qui sont placés sous le secret présentent un sceau rouge du ministère et ne doivent pas être ouverts, je vous fais confiance. Tout le reste est autorisé à la lecture et devrait vous aider pour votre recherche sur le fonctionnement juridique sorcier. C'est bien ce dont vous aviez besoin ?

– C'est parfait madame, merci.

Sans attendre plus longtemps, Edward poussa Envy dans le dos pour le diriger vers l'endroit indiqué. Plusieurs mois auparavant, le Serdaigle avait envoyé une lettre à la sorcière en charge de ce service en se faisant passer avec Envy pour des élèves souhaitant suivre un cursus dans la justice magique. Il prétexta la nécessité scolaire de se familiariser avec d'anciens procès pour comprendre leur fonctionnement. Pleine de bonne volonté, elle lui fournit toutes les informations sur la consultation des archives par le public, et elle lui avait assuré qu'ils pourraient passer pendant les vacances s'ils le souhaitaient. Ils ne pouvaient rien emporter, bien entendu, alors il faudrait prendre toutes les informations qu'ils pourraient aujourd'hui. Prévoyants, ils étaient d'abord passés en ville pour acheter plusieurs appareils photo jetables moldus qui les aideraient énormément.

– Ça a l'air d'être par là, indiqua Edward en s'arrêtant devant un rayonnage dont l'année 1981-82 correspondait à celle des procès de la majorité des Mangemorts peu de temps après la chute de Voldemort. Tiens, tu prends cette partie pendant que je prends l'autre. Essaie de faire des photos nettes.

Envy lui lança un regard irrité avant de laisser tomber plusieurs dossiers sans soin au sol et de s'asseoir devant eux en tailleur, son premier appareil moldu en main. Edward l'imita et ils se mirent rapidement au travail. Pendant près de huit heures, ils restèrent assis à prendre des photographies de toutes les pages les intéressant (souvent dans des dossiers que Cunnigham leur avait interdits). Les pellicules s'enchainèrent à une allure folle et bientôt il ne leur en resta plus. Edward prit le relai en prenant des notes sur les derniers dossiers et il aurait tout donné pour avoir la mémoire photogaphique de Schiezca à cet instant. Finalement, 17 heures sonna et avec, la fermeture de la plupart des services du ministère.

Matthew vint les chercher pour les guider jusqu'à la sortie. Ils remercièrent chaleureusement Mrs Cunningham qui leur proposa de revenir s'ils avaient besoin de quoi que ce soit. Apparemment, peu de sorciers venaient leur rendre visite, sûrement effrayés par l'agencement du service qui noyait ses visiteurs. Edward lui assura qu'ils n'y manqueraient pas, puis ils se séparèrent ici.

Le retour se simplifia grandement grâce à l'heure de pointe. Ils n'avaient cette fois qu'à suivre les employés rentrant chez eux après une dure journée de travail. Pris dans le flot continu, ils se laissèrent porter, passant devant le Bureau des Aurors, jusqu'à arriver avec moins de détours que le matin aux ascenseurs. Le premier débordait de sorciers et ils patientèrent pour le second. Mais alors qu'ils voulaient y monter, Envy tira brusquement Edward en arrière. L'Auror Gurdjieff monta dans la cabine avec des collègues en riant grassement puis disparut dans les étages inférieurs.

- Que faites-vous là tous les deux ? interrogea une voix forte derrière eux.

Ils se tournèrent avec hésitation, repérés. Pas par quelqu'un qu'ils connaissaient, par chance. L'homme face à eux portait des lunettes en écaille, une longue robe verte de sorcier couverte de poussière et usée par les longs voyages et ses derniers cheveux étaient d'un roux flamboyant. Poussée par un sentiment de familiarité, Edward plissa les yeux pour déchiffrer son nom sur son badge puis les écarquilla.

– Vous ne seriez pas le père de Ron Weasley par hasard ?

Surpris, Envy et Mr Weasley — puisque c'était lui — le fixèrent avec curiosité avant que le sorcier hoche la tête en les regardant alternativement.

– Enchanté de faire votre connaissance ! le salua Edward en lui tendant la main qu'Arthur fixa en silence avant de la serrer avec perplexité. Nous sommes des amis de votre fils. Nous allons à Poudlard avec lui. Quel hasard de vous rencontrer ici ! Ron nous avait laissés entendre que vous étiez membre du ministère, c'est vraiment impressionnant.

Envy retint son sourire en observant le manège d'Edward qui embrouillait complètement l'homme avec un naturel désarmant. Mr Weasley semblait déconcerté. Il ne répondait que par bredouillement, quand Edward ne l'interrompait pas en déballant un parfait résumé de la raison de leur venue, le tout enrobé de références à son fils pour attirer sa confiance. Il cherchait surtout à le retenir alors qu'Ombrage passait à côté d'eux pour prendre l'ascenseur.

– Vous devez être Edward et Envy, réalisa soudain le sorcier. Ron m'a beaucoup parlé de vous.

À partir de là, la conversation devint aussi amicale que possible pendant que Mr Weasley les guidait vers la sortie des visiteurs. Il les invita même à les accompagner — lui-même, ses enfants, Harry et Hermione — à la Coupe du Monde de Quidditch. Les deux garçons acceptèrent avec joie cette invitation généreuse puis ils le saluèrent une fois que leurs chemins se séparaient.

– Tu es un vrai baratineur, remarqua Envy dès que la porte de la cabine téléphonique se ferma sur eux.

– Je sais, répondit Edward d'un air goguenard. C'était vraiment amusant.


Dès que toutes les photographies furent développées quelques jours plus tard (avec une remarque amusée du vendeur moldu sur le contenu loufoque de leurs pellicules), Envy et Edward se mirent au travail. Une semaine plus tard, ils avaient terminé, s'étant montrés particulièrement productifs. Ils réussirent, grâce à de nombreuses plongées dans les archives et les anciens comptes-rendus de procès, à répertorier des anciens Mangemorts, les classant par « en vie » ou « mort », statut de « en liberté » ou « à Azkaban » et d'activité « passif » ou « actif ». Puis ils avaient étayé leur liste en la détaillant par « confirmé », « repenti » et « présumé ».

Au moins, maintenant ils savaient à peu près de qui se méfier si jamais un de ces personnages venait à apparaître dans leur entourage. Ce qui ne tarderait pas, car restant à Poudlard pour les congés, ils ne mirent pas longtemps à apprendre l'existence de l'événement allant prochainement avoir lieu à l'école : le Tournoi des Trois Sorciers. Et avec ce tournoi viendrait Ludovic Verpey, « repenti », « passif » et « en liberté », qui était aujourd'hui membre du ministère et ferait partie du jury. Puis venait Igor Karkaroff, directeur de l'institut Durmstrang, « repenti », « actif » et « en liberté ». Le tout accompagné de Bartemius Croupton, qui était un chasseur de mages noirs célèbre. D'après les archives, Edward avait même pu étudier le procès de son propre fils, Bartemius Croupton junior (« présumé », « actif », « mort ») qu'il avait envoyé à Azkaban.

Autant dire que l'atmosphère risquait d'être chargée cette année entre ces différents protagonistes. Ce tournoi se trouverait au cœur de l'action. Après en avoir étudié le fonctionnement, Edward se demandait s'ils ne devaient pas s'y inscrire pour y participer et se rapprocher de toutes ces cibles potentielles afin de les surveiller. L'un des deux anciens Mangemorts devait bien disposer d'indices sur l'emplacement actuel de Pettigrow, si ce n'était pas de Voldemort lui-même.

– Trois écoles, trois champions, trois épreuves. Cinq juges dont deux anciens Mangemorts et un chasseur de Mangemort. La directrice de Beauxbâtons n'a aucun lien avec Voldemort, à part peut-être le fait qu'elle soit hypothétiquement liée aux géants par le sang, mais c'est à confirmer. Et pour Dumbledore, on sait déjà tout ce qu'i savoir, résuma Edward en gobant une dragée de Bertie Crochue. Le juge impartial —

– Aucun juge n'est impartial.

– C'est une coupe magique. Personne ne peut tricher avec elle.

Envy lui jeta un regard perplexe semblant dire « une coupe ? », et qu'Edward ignora avant de reprendre.

– Elle choisit les champions par rapport à leur talent pour qu'ils puissent réunir les critères qui servent à atteindre les buts du tournoi. Soit tester l'audace —

– Trop facile.

-... Leur aptitude à réagir face au danger —

– Pff, quelle blague.

-... Leur pouvoir de déduction —

– Comparé aux crétins qu'il y a dans certaines maisons...

-... Et leurs capacités magiques.

– Argh.

Edward renifla d'amusement avant de refermer son carnet de notes pour le jeter sur la table basse, au milieu de leurs épais dossiers sur les comptes-rendus des procès. Fatigué et assommé par la chaleur, il s'étira longuement en bâillant avant de s'avachir un peu plus sur le canapé. Il avait ensorcelé plus tôt dans la semaine un morceau de papier plié sommairement et qui le suivait partout en l'éventant, mais c'était bien peu considérant la chaleur écrasante actuelle. Même l'éventail de fortune semblait souffrir des températures et s'arrêtait de temps en temps pour se poser sur l'épaule de son propriétaire et souffler un peu.

– Ça te dit d'aller te baigner ?

Il n'en fallut pas davantage pour qu'ils se précipitent hors de la salle commune des Serdaigles afin de se rendre dans le parc. Ils se déshabillèrent tout en dévalant la colline avant de plonger dans l'eau fraiche du lac noir. À peine dix minutes plus tard, une tête apparaissait dans la cheminée de la salle commune désormais déserte.

Vérifiant à gauche et à droite, Dumbledore sut qu'il pouvait sortir sans être repéré. Il se hissa hors de la cheminée sans présenter la moindre trace de cendre ou de suie et resta un moment debout sans bouger alors qu'il tendait l'oreille. Il entendit Envy et Edward chahuter dans l'eau. Aussitôt, il se défigea et se dirigea vers la table basse face à lui.

Les parchemins, plumes, bonbons et enveloppes épaisses s'y entassaient dans un parfait désordre dans lequel il aurait sûrement le plus grand mal à trouver quoi que ce soit facilement. Un carnet jeté sur le dessus en équilibre précaire attira son attention et il le prit avant de le feuilleter, ressentant tout de même une pointe de culpabilité à l'idée d'espionner ses protégés. L'intérêt laissa vite place à la déception alors qu'il comprenait son incapacité à déchiffrer le moindre mot sur les pages noircies.

Prudent, il replaça le carnet de notes où il l'avait pris et attrapa une des lourdes enveloppes sur l'un des coins de la table. Quand il l'ouvrit, ses yeux s'illuminèrent. Des photographies par dizaines se trouvaient apparemment dans chacune des enveloppes. D'après leur aspect figé, elles provenaient de toute évidence d'origine moldue, au contraire de leur contenu, comprit-il lorsqu'il lut cette fois en parfait anglais ce qui ressemblait à s'y méprendre à un compte-rendu de procès.

Ce n'était pas qu'une impression. Il réalisa très vite de quel genre de procès il s'agissait. Comment avaient-ils pu se procurer de tels documents ? Et surtout, pourquoi s'intéresser aux Mangemorts avec autant d'application ?

Tentant sa chance, il reposa l'enveloppe fermée à sa place initiale avant de prendre un petit tas de feuilles volantes. L'écriture était peu soigneuse comparée à celle du carnet qui devait être rédigé en leur langue natale, et ces notes-ci paraissaient prises à la va-vite. En anglais cette fois. Dans la précipitation, l'un des deux — Edward, il présumait — avait noté les informations manquantes.

« A. Rookwood — LdP. Dép des Myst. Espion pr VdM. Azkb. Mgmrt confirmé, viv. Danger. Qual polit. Connaissance du MdlM. Ennemi à avoir ss surveillance. »

À grand-peine il réussit à déchiffrer l'écriture et les abréviations avant d'écarquiller les yeux. Il parcourut rapidement les autres dernières feuilles volantes et elles étaient toutes du même genre. Tout s'y inventoriait en détail. Les noms, états et degré de dangerosité de chaque Mangemort. Tout s'y consignait de manière parfaitement ordonnée et complète, en plus d'apporter de nouveaux détails pour certains qui ne devaient pas se trouver dans les archives. Edward avait deviné de lui-même. Ses intéressantes déductions dénotaient, à son plus grand soulagement, non pas d'un possible lien amical avec les Mangemorts, mais de recherches visant à les vaincre.

À sa grande surprise, on aurait dit le travail que menait l'Ordre du Phénix pendant la guerre pour se préparer à l'attaque contre leurs ennemis. La ressemblance le frappa. Le doute l'assaillit sur le but de leur venue à Poudlard. Tout ce qu'il voyait conduisait toujours à l'idée qu'ils préparaient quelque chose. Aujourd'hui il se demandait si ce n'était pas une nouvelle guerre contre Voldemort et ses partisans. Leur arrivée dans le monde de la magie n'était pas un hasard. Ils cherchaient quelque chose et pensaient que la guerre sorcière recommencerait bientôt. Pourtant, peu étaient ceux qui, comme lui, pensaient que Voldemort pourrait revenir un jour et ces deux-là, à peine entrés dans le monde sorcier, y pensaient aussi et s'y préparaient déjà. C'était aussi étrange qu'inquiétant. Que savaient-ils qu'il ignorait ?

Plus il y pensait, et plus il se demandait si tout n'était pas lié depuis le départ. Leur rencontre mystérieuse avec Sirius Black, alors reconnu comme un Mangemort notoire, puis leur recherche presque désespérée de Peter Pettigrow, dès qu'ils avaient appris qu'il était un Mangemort, pour de vrai lui cette fois. Tout ça l'amenait à penser qu'ils avaient eu l'intention de les interroger, l'un après l'autre, sur leur activité au sein du groupe du Seigneur des Ténèbres. Qui étaient-ils, par la barbe de Merlin ! Qui les avait envoyés ici ? Pour quelle raison ? D'où venaient-ils ? Étaient-ils réellement membres d'une quelconque organisation militaire comme Rogue le pensait ? Et si oui, penchaient-ils vraiment du côté du Bien ou un troisième camp venait-il de se former dans ce combat déjà difficile ?

D'après ce qui était écrit, ils semblaient du bon côté. Mais il y avait une autre possibilité. Deux, en fait. Soit ces notes déchiffrables consistaient en leurres destinés à faire croire qu'ils étaient les ennemis du Mal... Soit les Mangemorts représentaient un obstacle à l'ascension des deux garçons dans la nouvelle hiérarchie de l'Ordre noir. Des Néo-Mangemorts peut-être ?

Tout cela ne présageait rien d'agréable dans les temps à venir. Car une guerre se préparait clairement en coulisse. Après, le rôle qu'y joueraient Envy Alighieri et Edward Elric demeurait flou.

Bénéficier de l'intelligence de ce dernier dans les camps ennemis serait très embêtant pour l'Ordre du Phénix, s'il venait à devoir se reformer.