Bonjour, Bonsoir !
J'ai écrit ce texte suite à un défi émit sur un serveur Discord. La condition étant d'écrire sur la première guerre déclenché par Tom Riddle (Tom Jedusor pour les français ;)). C'est court, mais assez plaisant à écrire, bien que je n'en suis pas totalement satisfait-e. Mais bon, il s'agit de mon travail, je ne le serais jamais complètement.
Il semblerai que j'ai, potentiellement, oublié de vérifier mes sources sur les personnages que j'ai choisis d'animer... Je ne m'en suis rendu compte qu'à la quasi toute fin de ce récit, aussi je n'ai pas eu le courage de faire toutes les modifications requises. Ceci dit, il s'agit d'une fanfiction alors cela n'a pas vraiment d'importance.
Je remercie deedeehasbeen pour la correction de l'histoire, ainsi que plusieurs remarques constructives sur certains passages un peu floue.
Bonne lecture à tous,
argon
--Dernier Jour--
Les lumières clignotaient dans son bureau. Un amas de paperasse paressait ici et là. Des articles, des journaux, des photos, des Post-it s'accrochaient désespérément aux murs. Des punaises les y aidaient. Sur un des pans, une immense bibliothèque séjournait, remplie de vieux dossiers, plus ou moins récents, certains terminés, d'autres en état d'abandon. Il y avait quelques bibelots qui trainaient : portraits de famille, diplômes, prix Nobel, médailles d'honneur. Tout un tas d'objets qui posé ainsi, confirmait le cliché d'un chef des aurors.
Fleamont le savait bien, et cela le faisait doucement sourire. Après tout, chaque élément avait sa place, il ne les y changerait pour rien, mais il ne niait avoir été influencé par son prédécesseur, comme lui l'avait été. Un rituel de passage.
Pourtant, ce soir-là, Fleamont n'était pas d'humeur à rire. Ce fait ne le laissait que plus indifférent. Il était concentré sur le rapport du jour, souhaitant terminer cette fastidieuse tâche au plus vite. Son poignet lui faisait mal à force d'écrire ligne après ligne le déroulement de cette journée. Il avait l'impression d'avoir encore une montagne de détails à transcrire avec minutie. Ses yeux brulaient de somnolence, mais cela ne le dissuada pas de son objectif : rentrer chez lui avant minuit. Et l'aiguille défilait vite.
Il savait que le protocole était le protocole. Mais enfermé ici, à faire glisser sa plume sur un parchemin noirci, dont le script ressemblait à quelques variantes près au précédent, le rendait las. Et la lassitude ne lui seyait guère.
Enfin, après un temps qui lui avait paru infini, il termina son rapport en signant de la date du jour, de l'heure et de son nom.
« 19 juillet 1975, 23h29. Fleamont Henry Potter, chef des Aurors, département du Ministère de la Magie. »
Il s'avachit quelque peu, permit à la fatigue de s'abattre sur lui, et après de longues inspirations relaxantes, frotta ses yeux bordés de rouge. Il se leva et rangea ses affaires d'un coup de baguette. Il mit le dossier dans le tiroir, par-dessus une pile bien trop lourde, et le referma d'un sort de son cru.
En étirant ses bras au-dessus de lui, il remercia sans grande pensée Merlin de lui avoir accordé son souhait. Il partit du département le pas décidé.
Et avec l'espoir qu'un jour, il verrait la fin de ce chaos.
xXx
Sa robe d'auror était ouverte. Lui, avait les mains dans les poches de son pantalon. Nonchalant. Son port habituellement droit était courbé de fatigue. Il avait les traits du visage blafard sous les réverbères de la ville. Il marchait lentement, un peu boiteux, les jambes tremblantes. Il n'arrivait même plus à saisir les zones de son corps douloureuses. Il lui semblait simplement qu'il avait mal partout.
Ces derniers mois étaient rudes. Et le temps loin d'être clément. Fleamont ne croyait ni en un Dieu, ni particulièrement en Mère Magie. Il était un peu trop pragmatique, de son avis. Mais aujourd'hui, il pourrait revoir ces concepts d'une autre manière. Et il dirait que Mère Magie est devenu amère. Triste, et colérique. Plus le temps passait, moins il semblait que le soleil était prompt à se montrer.
Fleamont avait l'air hagard, les yeux vides et coulant de droite à gauche. S'il y avait d'autres personnes dans cette rue, à cet instant, elles diraient que cet homme était perdu. Elles n'auraient pas tout à fait tort. Fleamont était perdu. Seulement, il savait où se trouvait sa maison, et sa famille. Il avait encore toute sa tête, du moins il le pensait. Il tenait toujours fermement à ses valeurs. Et il se battait fièrement, tous les jours, pour elles.
Un portail se dessina finalement devant lui. Et quand bien même Fleamont avait décidé aujourd'hui de marcher un peu, il était soulagé de voir son manoir. Intact de surcroit. Son être entier était courbaturé, crispé de vigilance. Il ne se souvenait pas d'un jour depuis des années où il avait pu rouler des épaules, et baisser sa garde. Son manoir était au moins suffisamment protégé pour qu'il s'y sente en sécurité. Et ne prenant jamais rien pour acquis, il renforçait ses défenses tous les quelques mois.
Il ouvrit le portail, passa au travers, et frissonna lorsque les charmes de protection l'évaluèrent. Il ne pouvait pas dire que c'était agréable, il y avait tellement de sorts, de charmes et de runes que la magie saturait par moments. Mais comme le dicton moldu s'affirmait : « Mieux vaut trop, que pas assez. »
En termes magiques, ce dicton faisait souvent défaut. Trop, et ça s'effondrait. Mais Fleamont était confiant. Si sa femme était impressionnante dans l'invention de charmes et sortilèges, lui l'était tout autant pour les exécuter. Et son nom de famille n'était pas uniquement connu pour sa richesse et ses idées visionnaires, mais aussi pour sa faculté à être particulièrement doué dans la magie du sang. Aujourd'hui, ils étaient les seuls à pouvoir la pratiquer.
À quelques pas à peine de la porte de sa maison, Fleamont s'arrêta. Il observa ses gravures, ses contours finement construits, les détails discrets et brillants, et les poignées. En bronze doré, elles étaient joliment fondues, et des runes y étaient délicatement inscrites. Il redoutait de poser les mains dessus. D'y appuyer ses paumes. Et d'entendre le grincement inexistant des gonds qui laisseraient les battants glisser vers l'intérieur, s'ouvrant sur une obscurité oppressante. Il lui fut tout à coup difficile de s'avancer. La poitrine lourde d'angoisse.
Fleamont rêvait, de temps en temps. Quand le monde devenait trop terne. Il rêvait d'une lumière si vive qu'elle lui brulerait ses iris terreux, brumeux. Et d'un feu si intense qu'il pourrait raviver les espoirs bringuebalants qui s'étiolent au fil du temps.
Fleamont permit, un instant, aux souvenirs de devenir de plus en plus clairs. Ils étaient vivaces, remplis de cette étrange lueur dorée qui souvent, lui amenait le soleil au creux du cœur.
La naissance de son fils était peut-être le souvenir le plus limpide qui assaillait sa mémoire. 27 mars 1960. Six jours d'avance, et un froid particulièrement rude pour un printemps. Malheureusement, cela n'avait pas suffi à anesthésier la terreur qui l'engloutissait. Sa femme dut mettre bas, privée de sa présence pour cause de quelques complications.
Et puis, lorsque Fleamont prit son fils, James, dans ses bras pour la première fois, tout était parti. Il ne pouvait pas, encore aujourd'hui, décrire l'émotion qui l'avait fracassé. Ensuite, il n'y eut qu'amour, joie et fierté. Peut-être aussi beaucoup de colère, de peur, mais il aurait été damné si son fils ne faisait aucune bêtise.
Ce temps-là, Fleamont l'enviait. D'un temps où la peur ne peignait pas le regard de sa femme. Ni celui de son fils. Où les matins étaient faciles, les nuits sans douleur. D'un temps où les rires étaient encore nombreux, insouciants, et pas plus précieux dans cette mirabelle de bons moments.
Un coup de tonnerre, et Fleamont craqua. Il souhaitait désespérément qu'il pleuve. Qu'il pleuve si fort pour emporter la cruauté des hommes. Et avec, les morts, le sang, et si possible la terreur qui engloutit les vivants. Ou, au moins suffisamment pour effacer ses larmes.
L'orage grondait, et Fleamont peinait à sortir de son esprit le détraqueur qui avait failli, aujourd'hui, avaler son âme. Et plus la pluie tombait, moins il avait de facilité à prononcer le contre-sort. Le froid se répandait peu à peu dans son être, l'immobilisant aussi surement qu'un petrificus. Il eut du mal à reprendre sa respiration. L'impression d'avoir des mains de glace, incapable de s'accrocher au plus petit souvenir heureux. Il les voyait défiler. Là, juste devant lui. Mais, comme emporté par le torrent, ils semblaient imprécis. Leur écho grotesque disparaissait aussitôt dans le courant.
« Fleamont. »
Comme la brise d'un éclair s'échouant sur le parvis, sa femme, Euphemia, apparut devant lui, la posture saine, la mine inquiète. Sa baguette propageait un parapluie au-dessus d'eux, faisant cesser l'averse un court instant.
« Rentrons. »
Et c'était tout ce qu'il y avait à dire. Tout ce qu'elle pouvait dire sous les vagues tortueuses de sa conscience effritée. Tout ce qu'il pouvait entendre, entre-le boucan d'un ciel amer et le silence assourdissant de la guerre.
Lorsque les portes se fermèrent d'un claquement (battement ?) discret, l'averse se tut, le grondement de l'orage s'atténua. Fleamont put percevoir des rires étouffés s'enfuir de l'étage. Il s'en sentit un instant revigoré. Bien qu'il fût trempé, et certainement exténué, la soudaine envie de rejoindre son fils pour s'amuser jusqu'à n'en plus pouvoir l'assaillit. Sa femme le remarqua, car elle lui annonça tout à coup :
« James a invité Sirius pour le reste de l'été. Il est arrivé ce matin. »
Fleamont acquiesça, un sourire un peu triste au bord des lèvres. Ce gosse n'avait eu que très peu de chance dans sa courte vie. Il commença à enlever son lourd manteau ; ses gestes devenaient lents. À tel point qu'Euphemia finit par l'aider à se déshabiller. Et même ainsi, accroupie devant lui en lui enlevant ses bottes, elle ne perdait aucune grâce.
« Je pense qu'il s'est passé quelque chose. Sirius n'en parlera certainement pas. Ni à James, ni à l'un d'entre nous. J'aimerais, demain, lui proposer de l'aide. Celle qu'il ne pourra refuser. Tu sais combien sa famille lui est nocive.
— Nous en avons déjà discuté, tu connais mon avis sur le sujet.
— Bien entendu, je voulais simplement...
— S'il faut adopter ce gosse, nous le ferons Euphemia. Ce ne sera qu'une formalité. Après tout, nous l'avons déjà fait lorsque James a ramené ce petit à la maison il y a cinq ans. »
Sa femme ricana : « Je doute qu'il apprécie t'entendre parler de lui avec de tels termes.
— Peu importe, je serais bientôt son nouveau père, quelques privilèges doivent bien m'être accordés. »
Avec une tête un peu plus légère, Fleamont accompagna sa femme dans la cuisine. Il la regarda valser tranquillement, l'aida de temps à autre.
S'il devait être honnête, l'auror avouerait que l'odeur qui s'émanait du four, lui mettait tout sauf l'eau à la bouche. Il lui prit une soudaine envie de vomir lorsque son esprit se joua de lui. Il voyait la pièce vide, et pleine de sang.
Pourtant, il sourit à Euphemia. De ce sourire tranquille et détendu. Et il s'assit sur une chaise du comptoir, en face de l'assiette à peine réchauffée. Il fredonna doucement, en omettant son estomac comprimé par l'angoisse.
« Papa ! »
Cette fois-ci, la courbure immense de ses lèvres était bien réelle et authentique.
« Toujours pas couché gamin ?
— Je voulais t'attendre. Et Sirius est là... Difficile de s'endormir sous ses questions philosophiques. »
Bien entendu. Fleamont embrassa son fils. Cacha insidieusement le brouillon de ses yeux émus. Il ébouriffa sans embarra les cheveux châtains de James, puis émit un rire bref mais plein de vie sous son bougonnement.
xXx
Cette nuit-là, sa femme entre ses bras, Fleamont ressentit une appréhension étouffante. Ses poumons, à peine capables de fonctionner correctement, souffraient en crissant, sans air, sans oxygène, d'un manque qu'ils n'arrivaient pas à assouvir. Et son cœur, Merlin son cœur, battait à tout rompre. Ses côtes, ses os, et ces veines qui amènent de temps en temps une sombre morphine.
Il lâcha Euphemia, se tourna, enserra ses genoux contre sa poitrine. Il serra ses lèvres, tua les plaintes désespérées de se faire entendre. En vain. Les sanglots secouèrent son corps affaibli d'une fatigue chronique.
Il sursauta lorsque son amante l'encercla dans un étau. Il ne l'avait pas senti se déplacer. Il retrouva la chaleur de ses bras, la tête sur sa poitrine, une berceuse murmurée près de son oreille. Fleamont était tout proche de laisser s'échapper la peur qui le maintenait réveillé lorsque son monde dormait avec quiétude.
Mais il était trop égoïste pour partager ces sentiments naufrageant qui assaillaient sans cesse son esprit. Même lorsqu'il sait que, bientôt, son âme rejoindra toutes celles qu'il voyait s'élevaient haut dans le ciel à travers la fenêtre. Et que cela le terrifiait bien plus que tout autre chose.
xXx
Le lendemain serait un jour qui aurait peine à s'éveiller. Morne, comme ceux qui le précédèrent. Pas de pluie, ni d'orage. Mais d'aigreur mortuaire.
