Partie 1 : Les injustices de Tolosa

Dans les rues désertes de Tolosa, un homme avançait seul, emmitouflé dans un manteau d'hermine noir. Son visage encapuchonné masquait son expression de terreur. Il marchait à une allure tellement rapide qu'il atteignit le Capitole en quelques minutes. Il gravit les marches du château et pénétra à l'intérieur. Les torches accrochées au mur guidaient l'homme dans un chemin enflammé. Il traversa un long couloir lugubre et rentra dans une pièce.

« Comment vous portez-vous mon roi ? » demanda Harald, l'un des membres du Grand Seth.

Le roi Lithragir III répondit : « Je suis lassé de la guerre ».

Les deux hommes s'assirent sur une table d'ébène au centre de laquelle trônait un chandelier. Une nappe blanche en broderie fine et aux motifs végétaux recouvrait le bois huileux et brillant de la table. La salle à manger dans laquelle mangeaient le roi et son acolyte jouxtait la chambre de la fille du roi, Elirah. Le roi Lithragir III et sa famille régnaient sur Telahhara depuis 250 ans, depuis la rébellion du prince Ethgart Rovaderer. Depuis, la bannière de la maison Rovaderer recouvrait les murs du Capitole et était devenue la nouvelle famille royale. Cette bannière possédait un ours rouge sur champ blanc, strié de bandes dorées pour emblème. « L'armée de lord Aradir Nitratarion a pris possession de Belador, la cité des crânes. Son vassal, Jesdredhon, organise les troupes pour marcher contre Tolosa », annonça sentencieusement Harald. « Savons-nous dans combien de temps ils seront aux portes de la ville ? », demanda le roi. Le conseiller baissa la tête en signe de chagrin. Il demanda aux serviteurs d'amener les mets préparés pour le repas afin d'adoucir l'atmosphère devenue presque insoutenable. La colère du roi était crainte par tous, et ce geste apaiserait sa colère, du moins Harald l'espérait-il. Des assiettes de viandes et de légumes confits arrivèrent, et le roi commença à manger, en se servant une sauce sirupeuse qui attendrit la chair de la viande.

« Vous allez me répondre ou pas ? » s'énerva le roi. « J'ai le regret de vous annoncer que Lord Aradir et ses alliés seront là dans une semaine. Ils se sont alliés aux Quelionzetal et aux Hilandrag. Une centaine de dragons ont été aperçus par nos éclaireurs. La moitié d'entre eux ont servi de déjeuner aux terribles bêtes. Je suis désolé Sire. » La tirade d'Harald finie, le roi repoussa son assiette et afficha une mine si noire de colère que le conseiller trembla de peur à l'idée de ce que le roi allait faire. « Gardes ! Emparez vous de cet homme ! », dit le roi en désignant Harald. Les gardes s'emparèrent de celui-ci avec brutalité. Ce dernier dit : « Je vous en prie ! Je suis innocent ! ».

Des larmes de terreur coulèrent le long des joues du conseiller. L'innocent fut emmené dans une pièce exiguë, dénuée de fenêtre, dans une atmosphère absolument noire où la vie avait quitté les murs il y a bien longtemps, pour ne laisser de place qu'à la souffrance et la mort. Le roi débarqua dans la pièce accompagné de trois gardes. Il avait, dans la main gauche, un chandelier qui permettait de raviver un tas de bois présent dans une cheminée. Les contours de la pièce se dessinèrent lentement. Harald ouvrit les yeux et remarqua qu'il était au centre de la pièce, sur une chaise, le corps solidement attaché par des cordes rugueuses. Une table trônait en face de lui, sur laquelle on distinguait de nombreux outils de torture. "Tu aurais dû me prévenir plus tôt Harald ! Tu viens de réveiller le dragon qui sommeillait en moi." Le roi prit une pince et la plongea dans le feu. Il la ressortit et avança vers Harald. "Mon bon roi, je vous en prie, je vous donnerai tout ce que vous voulez ! Par pitié, tout mais pas ça !"

Les cris de douleur d'Harald déchirèrent l'air lorsque le roi commença à mettre en application ses menaces. Harald ne cessa ses cris qu'une heure après le départ du roi. Il resta dans la pièce, avec pour seul compagnon un feu mourant. Il avait perdu deux doigts, une oreille et des lambeaux de peau épars jonchaient le sol. Une odeur de chair brûlée imprégnait l'atmosphère. Il s'endormit et se perdit dans les déserts du sommeil.

Pendant ce temps, le Royaume des Nains au Nord était en proie à une terrible agitation. Ce peuple subissait depuis trop longtemps la tyrannie du roi et avait décidé de s'allier secrètement à lord Aradir. L'armée des Nains, forte de quinze mille âmes, avançait sur les Plaines Perfides, à environ deux cents lieues de distances de Tolosa. Le roi ne se doutait pas de cette alliance qui risquait sûrement de renverser le sort de Telahhara. Le roi des Nains s'appelait Fenark Ier, de la maison Wallart, appelée aussi la maison des Terribles Nains. Fenark avait été élu par son peuple pour les diriger et les mener au combat. Le seul chemin pour atteindre Tolosa était de passer par les Plaines Perfides. Le problème, c'est que ces plaines abritaient des créatures craintes depuis la nuit des temps par les Nains, car ils avaient décimé une partie de leur peuple lors de l'Âge d'Acier, un millénaire avant. C'était des géants de sable immenses et qui atteignaient pour la plupart les cents pieds de haut. Leurs yeux avaient l'air de braises incandescentes et leurs bras étaient aussi épais que des troncs d'arbres. Ils marchaient lentement et n'avaient pas de langue, et n'émettaient que des cris incessants. Le sable recouvrait leur corps difficile à abattre. C'est pour cette raison qu'une vingtaine de dragons de glace, montés par des Quelionzetal, accompagnaient les Nains durant leur traversée.

"Fenark, une cinquantaine de géants ont été vus par nos éclaireurs. Le combat est imminent", annonça Hedral, le fidèle ami du roi. "Alors il est temps que tu m'apportes mon épée, Lugubre, pour qu'on en finisse avec ces saletés." Le roi revêtit son armure d'or, ses plaques de fer et son épée, qui ceignait son flanc, accrochée par une ceinture décorée de rubis aveuglants de lumière. C'était un homme svelte, à la différence de la plupart des Nains, qui étaient trapus. Il atteignait un mètre soixante dix, chose remarquable car les Nains formaient un peuple réputé pour être petit. Une barbe broussailleuse recouvrait le bas de son visage, masquant les cicatrices des guerres qui l'avaient endurci. Les Nains s'arrêtèrent et commencèrent à former un campement. Ils creusèrent profondément la terre pour créer des douves, au fond desquelles ils plantèrent des pieux acérés. Les géants de sable avaient un corps de la même matière certes, mais cela ne les empêchaient pas d'avoir mal. Lorsqu'on plantait une arme dans l'une de ces créatures, cela ne la blessait guère mais elle était affaiblie. Le sable du désert permettait aux géants de rester en vie, une essence même. Si on les attirait en dehors de leur milieu, ils perdaient leur avantage ultime. Les Quelionzetal qui accompagnaient les Nains disposaient d'une vingtaine de dragons de glace. Face à une cinquantaine de géants de sable, la bataille semblait désespérée. Les géants arrivèrent au crépuscule et commencèrent à entamer leur chant de mort. Un son long, lugubre, et qui présageait une nuit sanglante. Les géants avaient des armes terribles : des haches immenses enduites d'un liquide poisseux, du poison mortel. Les créatures commencèrent à courir à une vitesse folle, engloutissant la distance entre eux et le campement des Nains.

"Mes frères, aujourd'hui est un jour de Gloire, embrassez la mort et remerciez les Dieux de nous offrir une telle bataille !", hurla férocement le roi.

Une vague d'acclamation se répandit dans le campement et les dragons de glace s'élevèrent dans le ciel. C'était des créatures blanches, avec des yeux d'un bleu glacial, dans lesquels la pitié n'avait pas de place. Leurs cavaliers les chevauchaient avec dextérité et souplesse. Ces créatures serpentines volèrent vers leurs ennemis. Bientôt, des feux glacés s'abattirent sur les géants et la bataille débuta. Les nains levèrent leurs boucliers pour former un mur d'acier, d'où sortaient de longues lances au bout acéré. Les géants sautèrent au-dessus des tranchées des nains et arrivèrent dans leur campement. La bataille fit rage, les géants levaient leurs masses d'armes et les abattaient avec une telle force sur les nains que nombre d'entre eux volaient dans les airs et atterrissaient sur le sol avec un impact assourdissant qui déformait leur casque de fer. Les dragons crachaient leur souffle glacé qui congelait instantanément plusieurs géants. Ces statues froides comme la mort furent brisées en mille morceaux par les haches des nains, rejoignant le sol aride du désert pour former des flaques de sang bleutées. Les nains résistèrent à l'assaut des géants et parvinrent à en faire tomber une dizaine dans les tranchées. Les pieux traversèrent de part en part les corps des géants. Ces derniers, prisonniers des tranchées, furent découpés par les hardis guerriers qui descendaient dans les trous pour achever leur ennemi. De nombreux nains avaient péri mais il restait encore une trentaine de géants à combattre. « Courage mes amis ! Vous devez tenir, nous finirons par triompher ! » hurla Fenark. Les nains restants se relevèrent et formèrent un cercle de métal autour des trente géants. Ces derniers se trouvaient au centre du campement et semblaient plus belliqueux que jamais. Les dragons de glace se lancèrent à l'assaut des derniers géants et crachèrent leur feu de glace. Celui-ci permit aux dragons de réaliser une barrière de glace aussi haute que les géants pour les enfermer. Ces mastodontes pris au piège de cette terrible glace, imprégnaient l'air de leurs sentences macabres. Ils levèrent leurs armes et s'attaquèrent au mur qui les entourait. Ils creusèrent le mur de toutes leurs forces. Les nains attendaient derrière, leurs haches fermement tenues par leurs mains calleuses. Les géants étaient à bout de souffle et ne tiendraient pas longtemps loin du sable des plaines. Les nains firent pleuvoir des centaines de flèches enflammées sur les géants qui criaient de douleur. Des langues de feu dépassaient du mur de glace qui ne fondait pas malgré tout. Puis, plus un son, le silence remplit le campement des nains. Ces derniers se réjouirent, pensant avoir gagné la bataille et avoir tué les derniers géants. Les Quelionzetal se posèrent avec douceur sur le campement des nains et crièrent : « Mes amis, nous avons réussi ! » Les nains et les Quelionzetal quittèrent leur campement et continuèrent leur traversée du désert, après cette terrible bataille qui leur avait coûté un grand nombre de morts et de blessés, presque cinq mille au total. Alors que les derniers nains sortaient du campement pour rejoindre les autres, un fait extraordinaire se produisit.

Le mur de glace qui encerclait les géants se brisa en mille morceaux, volant dans les airs. Les géants, soi-disant morts, se relevèrent tous, même ceux qui étaient tombés dans les tranchées ou qui avaient été morcelés par les nains. Les corps de ces monstres se désintégrèrent dans les airs et tous les géants disparurent. Herald dit au roi : « Mon Dieu, ne me dites pas que c'est le Pragaszka ? », s'interrogea le nain avec peur. «Malheureusement, je crois que si », répondit Fenark. Le Pragaszka était, dans la culture des nains, perçu comme la fin du monde, dans laquelle le royaume des nains devait s'effondrer pour renaître de ses cendres. Les géants disparus dans les airs, les nains s'inquiétèrent. Le sable du désert commença à monter très haut, formant une grande tour de sable. « Vous ne pouvez pas me tuer », dit une voix dans les airs. La tour de sable commença à se transformer en un corps, des bras sortirent des côtés et le bas de la tour se sépara en deux jambes. Le haut de la tour forma un visage dont les yeux semblaient deux braises incandescentes qui jetaient des rayons de lumière aveuglants. Le géant de sable, haut de sept cents pieds, touchait le ciel et noircissait la terre à cause de son ombre. Il portait un grand bouclier et une longue épée, dont la lame était enflammée. «Nous sommes perdus ! », dirent les nains terrifiés. « Pas encore », annonça Fenark. Ce dernier prit un grand cor, le Cor de Fer, et souffla de toutes ses forces à l'intérieur. L'horizon s'agita et le vent souffla fort vers les nains. Les dragons de glace s'agitaient et soufflaient des flammes blanches, dans l'attente du combat. « Nous aussi nous avons des géants », pensa Fenark. Les montagnes de l'horizon s'agitèrent et se mirent à bouger, comme si une force les attiraient vers le ciel et les décrochaient de la terre. Les montagnes s'élevèrent dans les airs et s'assemblèrent elles aussi pour former le géant de pierre, Stonark, le dieu de pierre des nains. Il courait vers le géant de sable. Il avait une hache dans chaque main et hurlait de colère, prêt à en découdre avec son ennemi. Le géant de sable se mit lui aussi à avancer vers Stonark et bientôt, les deux géants sautèrent l'un sur l'autre et le combat des titans débuta. Le géant de sable leva son bouclier pour parer un coup de hache et guida son épée vers le ventre de Stonark qui se protégea grâce à son autre hache. Le bruit des armes s'entrechoquant était assourdissant et les deux géants étaient tellement grands que ce combat faisait trembler la terre. Les yeux de Stonark étaient différents du géant de sable, ils ressemblaient à deux émeraudes incrustées dans de profondes arcades de pierre. Les pieds des géants soulevaient des nuages de sable immenses qui formaient une tempête. Ils émettaient des sons terribles et se frappaient avec une violence sans limite. Tout d'un coup, le géant de sable fit une feinte avec son bouclier pour détourner l'attention de Stonark et lui enfonça profondément son épée enflammée dans le ventre. Celle-ci traversa le corps de pierre de part en part. Stonark s'effondra sur le sol avec une lenteur effrayante, les nains furent secoués d'une peur violente car ils savaient que leur dernier espoir s'envolait. Le géant de sable se tourna vers les nains et un sourire cruel se dessina sur sa face. C'est alors que la tête du géant se détacha de son corps et tomba avec lourdeur sur le sol. Le géant de sable s'effondra à son tour, laissant derrière lui Stonark qui tenait une hache dans sa main. Les nains virent leur sauveur se tenir debout, malgré l'épée coincée dans son corps.

« Merci Stonark, sans toi nous étions perdus ! », affirma Fenark. « Merci à toi, Fenark, fils de Themark, car grâce à toi, j'ai connu une glorieuse fin », reprit son interlocuteur. C'est ainsi que mourut le géant de pierre Stonark. Les nains continuèrent alors leur chemin, avançant dans le chaud désert, encore émerveillés par ce qu'ils venaient de voir. Ils venaient de vivre une épreuve terrifiante et ils prenaient conscience qu'ils avaient eu une chance immense que Stonark répondit à leur appel. Les Plaines Perfides étaient très étendues, les nains et les Quelionzetal mirent une cinquantaine de jours à les traverser. Une fois sortis de ces plaines, Fenark et Herald prirent place près d'un hameau et établirent leur campement. Ils discutèrent du meilleur itinéraire pour se rendre à Belador et retrouver lord Aradir. Le hameau se trouvait à cent lieux environ de Tolosa. « Nous devons marcher vite vers Belador pour améliorer les défenses de la ville. On ne doit pas perdre cette guerre », annonça Fenark à Herald.

Pendant ce temps à Belador, Jesdredhon fortifiait la ville pour parer à tout type d'attaque. Cette ville avait des murs de pierre noirs qui lui donnaient un aspect ténébreux. Des montagnes de crânes humains et d'ossements remplissaient les douves, d'où le surnom de la ville « la cité des crânes ». La ville comportait dix tours, réparties le long des murailles. Les créneaux permettaient de cacher de grandes arbalètes, dont les flèches pouvaient percer le cuir d'un mammouth. Jesdredhon marchait le long du chemin de ronde, saluant les soldats. Il organisait les défenses de la ville en prévision d'une bataille. Les forces de lord Aradir ne cessaient d'affluer par les portes de la ville. L'armée, dirigée par Jesdredhon, comportait à ce moment-là sept mille cinq cent soldats répartis en plusieurs catégories : les lanciers, l'avant-garde, l'arrière-garde, les archers, les épéistes et les arbalétriers. De nombreuses meurtrières jonchaient l'extérieur de la ville, par lesquelles pierres et huile bouillante accueillaient les assaillants en cas de bataille. Les murs étaient recouverts de pieux tranchants qui dépassaient de la surface de pierre pour empêcher les tours de sièges d'accrocher les créneaux. Devant les douves, de profonds trous avaient été creusés, dans lesquels on avait mis aussi de grands morceaux de métal pointus et très coupants, qui prenaient la forme de lances, longues de plus de trois mètres. Ils étaient recouverts d'herbe pour tromper les attaquants et pour qu'ils tombent dans les trous. A l'intérieur de la ville, les artisans et les ingénieurs construisaient de grandes tours de sièges et des catapultes gigantesques. Celles-ci étaient faites de bois et de métal, et atteignaient les cinquante pieds de haut pour certaines. Belador était située sur de grandes étendues plates herbacées. Des grandes bandes de métal traversaient lentement le désert orange qui entouraient Belador, pour renforcer l'armée de lord Aradir. Les dragons de glace et de feu des Quelionzetal et des Hilandrag volaient au-dessus de la ville et veillaient à surveiller leurs ennemis. Ils crachaient des langues de flammes terrifiantes pour occire les éclaireurs envoyés par le roi. Lord Aradir avait décidé d'envoyer une troupe réduite de soldats surentraînés pour s'infiltrer dans Tolosa et évaluer les forces de leurs ennemis. Le commandant de cette opération s'appelait Margart, le frère de Jesdredhon. Il était habillé de noir et arborait l'emblème de la maison Nitratarion, le centaure orange sur champ vert. Les soldats qui formaient cette troupe demeuraient les plus grands guerriers du royaume. Ils portaient des plaques de fer et des armures pour se protéger des coups de poignard dans le noir. Ils avançaient à dos de cheval, ils galopaient la nuit et trois jours plus tard, ils arrivèrent devant les portes de la ville. Ils descendirent de cheval et se cachèrent à l'insu des limbes de la nuit. Ils sortirent leurs arcs et encochèrent leurs flèches, dont la pointe était enduite d'un poison très puissant. Ils visèrent à l'aide de leurs yeux perçants, ils tirèrent sur les gardes au-dessus des créneaux. Chaque garde tomba des remparts sur le sol en contrebas, pour ne plus jamais se relever. Ensuite, les soldats d'Aradir prirent des grapins et des cordes dont ils s'étaient munis et commencèrent à gravir les murs de Tolosa. Une fois sur le chemin de ronde, ils laissèrent leur attirail à l'endroit où ils avaient grimpé et descendirent les escaliers des murailles pour se rendre dans les bas quartiers de Tolosa. Ils marchèrent parmi les rues étroites et serrées entre les maisons et avançaient irrémédiablement vers le donjon du roi, avec pour seul but de le tuer. Tout d'un coup, une compagnie de guerriers de la garde royale débarqua en surprise. «Arrêtez-vous, c'est un ordre ! » hurla l'un des gardes. Margart et ses soldats s'enfuirent pour disparaître dans les ruelles de Tolosa. « Retrouvez-les ! Rapportez-moi leur tête ! » cria le chef de la garde royale, Lemmark. Les guerriers du roi se dispersèrent dans la ville et verrouillèrent toutes les portes de Tolosa. Des grandes troupes de guerriers furent déployées sur le chemin de ronde et les remparts. «Monseigneur, les grapins et les cordes de nos ennemis ont été retrouvés à la Porte Nord. Les gardes qui s'y trouvaient ont été tués par des flèches, on les a découverts gisant au bas des murailles. », annonça l'un des gardes royaux. « Ahhhhhh ! Ils vont me le payer ! » dit Lemmark au garde qui venait de l'informer. Pendant ce temps, les soldats de Margart s'étaient cachés dans les caves d'une auberge. Ils avaient tué l'aubergiste et égorgé sa femme et tous les clients qui s'y trouvaient. Ils priaient pour ne pas être découverts. « Comment allons nous sortir de la ville ? Le roi sait sans doute déjà que nous sommes là ! Il a dû augmenter son nombre de gardes. L'espoir de le tuer s'amincit mon prince », dit Kart, l'un des soldats de Margart. « Non mon ami, le but n'était pas de le tuer mais de voir de combien de troupes disposait le roi. Maintenant on sait. » Le son des épées tirées du fourreau emplissait l'air et donnait à Tolosa un aspect encore plus ténébreux. L'aube pointait son museau et éclairait lentement les murs de Tolosa. Le rose de la ville fut décuplé par la lumière du soleil, qui embrasait la cité de rayons or et rouge. Les arcs de pierre et les hautes tours renvoyaient ses rayons de soleil et éclairaient la ville d'une auréole multicolore. Les maisons et les bâtiments formaient une ville organisée en plusieurs quartiers, selon les classes sociales. Les artisans vivaient dans le quartier de pierre, là où les maisons et les bâtiments étaient faits de pierre, et où les forges de fer et de métal réchauffaient l'air et donnaient aux artisans et aux forgerons un air dur, grave et souvent mêlé d'une profonde mélancolie. En effet, cette classe de la société tolosienne était considérée comme asservie au roi. Ce dernier les exploitait pour renforcer son armée et agrandir sa puissance militaire. Dans ce quartier, on retrouvait des rues jonchées de débris de pierre ou de métal, elles étaient souvent délabrées et les maisons de ce quartier se collaient presque. On entendait souvent des cris et des hurlements, car des bagarres éclataient parfois dans les auberges pour des bagatelles. Le quartier des Marchands était l'un des plus riches de la ville car les marchands venaient des quatre coins de Telahhara pour vendre leurs produits et gagner de l'argent. Ils étaient pour la plupart hautains, dénués de compassion pour les pauvres et prêts à tous les sacrifices pour de l'or. Le Bas peuple de Tolosa les appelait les « Démons dorés » et les méprisait. Le dernier grand quartier de Tolosa était le quartier Perdu, là où tout le reste de la population de Tolosa vivait, dans des maisons souvent petites et pauvres. Les habitants de ce quartier faisaient partie du Bas peuple. Ils se nourrissaient des restes de la ville et des dernières maigres richesses qu'elle leur laissait. Certains vivaient de leur métier, tisserands, maîtres d'école, ou encore les « Ecarlates », c'est-à-dire ceux qui sont chargés d'écrire les chroniques de l'Histoire de Tolosa. Leurs textes étaient souvent lus par le roi et si celui-ci les jugeait trop subjectifs et dévalorisant pour la Couronne, il coupait les mains des Ecarlates pour qu'ils ne puissent plus jamais nuire à la Couronne. Les soldats de Margart se trouvaient dans le quartier de Pierre, le plus proche du donjon. «Est-ce qu'on peut sortir à présent ? » demanda Kart. « Oui, mais soyons prudents » répondit Margart. Les soldats partirent en prenant garde de ne pas glisser sur les flaques de sang qui recouvraient le sol de l'auberge. Ils sortirent par la porte de derrière, et marchèrent dans une ruelle étroite, guidés par la lumière du soleil. « Le donjon est à trois rues d'ici. Ceux qui veulent m'aider à tuer Lithragir III n'ont qu'à me suivre. Les autres, vous pouvez retrouver mon frère Jesdredhon pour lui dire ce qui s'est passé », déclara Margart. Tous ses amis le suivirent sans la moindre hésitation. « Merci pour votre fidélité, mais je pense que vous savez que si nous faisons ça, la seule issue de sortie sera la mort », annonça Margart. Ils avancèrent tous vers le donjon, une énorme forteresse de pierre bleue, qui se dressait sur la partie la plus haute de Tolosa. Ils commencèrent à décocher une pluie de flèches sur les gardes. De nombreux d'entre eux tombèrent des créneaux. La réplique fut violente, le ciel fut recouvert par une noire avalanche de flèches qui fusa vers les soldats. Ceux-ci s'abritèrent derrière des boucliers ronds, en métal, léger. Ils formaient un mur d'acier, que nulle flèche ne parvenait à pénétrer. Ils continuèrent de se rapprocher des portes du donjon dans cette formation, ignorant les projectiles balancés depuis les remparts. Certains soldats commencèrent à entailler l'énorme porte de fer qui empêchait l'accès au donjon. Ils avaient pour seule arme le feu grégeois, aussi dévastateur qu'un dragon. Ils trempèrent leurs flèches dans le feu grégeois et tirèrent sur le porte. Au préalable, ils avaient disposé un liquide gluant sur la porte, pour favoriser l'explosion qui allait venir. «Ecartez-vous ! » ordonna Margart. Les gardes dans le donjon ne comprenait pas ce qui se passait. Les soldats de Margart s'écartèrent avec précipitation de la porte, qui explosa en mille morceaux quelques secondes après. D'innombrables morceaux de fer, de bois et de pierre furent projetés très haut dans les airs, laissant un immense trou là où se tenait la porte. Les soldats de Margart coururent vers la porte et rentrèrent dans le donjon. Ils trouvèrent devant une centaine de gardes, solidement armés, qui les attendait de pied ferme. Ils se trouvaient tous dans une grande salle, rectangulaire, au bout de laquelle les attendaient les gardes. Ces derniers bloquaient l'accès aux escaliers qui menaient aux appartements du roi. « Vous pensiez vraiment qu'on ne vous voyait pas venir ! » cria Lemmark. « Au contraire on y comptait !» hurla Kart. Les soldats et les gardes coururent les uns vers les autres, dégainant leurs épées, leur haches et leurs arcs. L'affrontement fut brutal et inégal, une centaine de gardes contre une trentaine de soldats. Ces derniers restaient néanmoins les plus forts guerriers du royaume, et la balance s'inversa bien vite. Les soldats tranchèrent des membres et des têtes, les gardes ripostaient du mieux qu'ils le pouvaient.

Le combat terminé, la salle était entièrement jonchée de cadavres, de têtes et de membres épars qui s'éparpillaient sur le sol. Les gardes avaient réussi à tuer seulement une dizaine de soldats, mais ils avaient fini par tous mourir. Les soldats enjambaient les gardes morts et commencèrent à gravir les escaliers en direction des appartements du roi. « C'est notre seule chance de tuer cette ordure, tâchons de ne pas le rater », dit Margart à ses frères d'arme. Ils arrivèrent devant la porte de la chambre du roi et celle-ci était close. Ils enfoncèrent sa porte et lorsqu'ils rentrèrent dans la chambre, le roi ne s'y trouvait pas. « Bon sang, où est-il ? » demanda Terha, un des soldats. Ils trouvèrent un petit papier sur le lit royal, sur lequel ces mots étaient gravés : « J'ai gagné ». Tout à coup, des cris déchirant assourdirent les soldats. Ces cris ne s'arrêtaient pas. Une voix grave et terrible parcourait l'air, proférant des menaces. Puis, des centaines de serpents sortirent des murs et du plafond pour s'abattre sur les soldats. Ces derniers hurlaient de douleurs suite aux morsures et au venin des animaux qui s'insinuait dans leur corps, les faisant se tordre sous l'effet des morsures et des attaques incessantes des reptiles. Le roi débarqua alors dans la chambre, et les regarda avec un profond dégoût. Il s'avèrait que le roi avait pris des cours de sorcellerie et qu'il s'était servi de ses nouveaux pouvoirs pour briser cette troupe de vaillants soldats. Il se tenait debout sur le seuil de la porte, il portait une cape noire, et la couronne de rubis rouge sang entourait son étroite tête. Il redescendit les escaliers et ordonna à ses gardes de nettoyer sa chambre de fond en comble. Les serpents avaient disparu dès qu'ils avaient tué tout le monde. Ses bêtes féroces et cruelles pouvaient apparaitre à n'importe quel endroit que le roi souhaitait. La seule condition pour pouvoir faire ce sortilège, consistait à se trouver à moins de cent mètres du lieu choisi. « Je veux que vous envoyiez la tête de ces soldats à Jesdredhon pour qu'il comprenne l'ampleur de son échec », dit le roi à l'un de ses gardes. « Bien messire », répondit le garde, qui se mit aussitôt à la tâche. Il prit une épée et commença à découper la chair morte des cadavres. Il remplit plusieurs sacs de têtes ensanglantées et il monta sur un cheval.

Il quitta Tolosa et se rendit vers Belador, où il arriva quatre jours plus tard. Il déposa les sacs devant les douves de la ville et hurla aux gardes qui l'observaient du haut des remparts : « Voici un message de mon roi ! ». Il repartit aussitôt au galop vers Tolosa. C'est alors que Jesdredhon arriva sur les murailles et l'un des gardes lui expliqua : « Un messager du roi vient de partir. Il a laissé des sacs devant les douves. » Jesdredhon fixa les sacs avec un regard terrifié, il avait peur de ce qu'il allait découvrir à l'intérieur. « Allez me les chercher », demanda le roi sur un ton mélancolique. Le garde s'exécuta et ouvrit les portes de Belador. Il revint quelques minutes plus tard sur les murailles près de Jesdredhon et lui tendit les sacs. Jesdredhon regarda à l'intérieur et lâcha les sacs. Des larmes recouvrèrent ses joues et il se mit à pousser un cri terrible et il pleura pendant de longues heures. Le garde le laissa et alla chercher lord Aradir, qui se trouvait dans ses appartements, dans une grande tour. « Mon roi, il faut que vous veniez, c'est urgent. Jesdredhon a appris la mort de son frère. » Lord Aradir accourut au plus vite accompagné du garde et rencontra Jesdredhon qui se tenait debout devant la porte de Belador. Celui-ci se retourna vers Aradir, le visage ravagé de haine. « Je suis désolé mon ami, sincèrement », dit lord Aradir. « Je veux mener une attaque de dragons sur Tolosa. Maintenant ! », répondit Jesdredhon. « Tu sais que c'est impossible, notre ami nous demande encore de patienter. Le roi va bientôt craquer. Il suffit d'attendre quelques jours et ensuite, tu pourras assouvir ta vengeance. » lui annonça le roi.

« Je n'en peux plus qu'on m'attaque ! Je suis le seul roi de Telahhara et je vais me venger ! » dit le roi Lithragir III lors d'une réunion du conseil du Grand Seth. « Je vous demande d'organiser mes troupes, nous partons en guerre dans trois jours. Appelez les seigneurs de l'Est, je veux que lord Catarak, lord Nitrek et lord Predir me rejoignent à Belador dans moins d'une semaine. » Le conseil se dissolva et tout le monde partit faire son devoir. « Harald, vient me voir. » dit le roi. Le conseiller arriva près du roi, le visage toujours aussi déformé suite aux terribles châtiments qu'il avait subis. « Je veux que tu nettoies la chambre de ma fille et que tu prépares mon cheval. Préviens la garde royale d'ouvrir l'œil cette nuit, je ne veux pas d'autres assaillants. « Bien mon roi » dit Harald. Il partit et s'executa. Le roi s'assit sur son trône d'or massif et s'assoupit. Le lendemain, les troupes royales se rassemblaient en gros blocs le long des remparts et surveillait le moindre mouvement venant de l'extérieur de la ville. L'activité des forgerons s'accrut et de nombreuses armes furent forgées, des grandes lances, des armures, des masses d'arme et encore plein d'autres. Deux jours plus tard, le roi sortit de Tolosa sur son destrier blanc crème et toute son armée le suivit, une grande masse de métal et d'hommes. Les soldats tolosiens s'élevaient au nombre de cinq mille. Cette armée faisait trembler la terre et de nombreux étendards volaient dans les airs, colorant l'armée de mille nuances chromatiques. Le soleil était à son zénith et les armures des soldats brillaient de manière aveuglante. L'armée se mit en marche, guidée par le roi qui se trouvait devant, avec sa garde royale près de lui. Tous les membres du Grand Seth étaient restés à Tolosa pour veiller à l'organisation de la ville. Le premier jour de marche arriva à son terme et les soldats construisirent leur campement. Un froid saisissant surprit le roi et son armée, des rafales de vents cinglants qui venaient du Nord. «L'automne prendra bientôt fin » dit sentencieusement Thomardak, le nouveau chef de la garde royale, qui venait de remplacer Lemmark, mort en combattant les soldats de Margart. La nuit fut longue et totalement noire, pas une étoile en vue. Le lendemain, l'armée repartit, se reposant seulement deux fois dans la journée. Il restait encore une journée avant qu'ils atteignent Belador. « Les lord de l'Est arriveront quand ? » demanda Lithragir III à l'un de ses serviteurs. « Dans quatre jours, vos renforts seront à Belador. » Le roi rumina ses pensées et se dit que quatre jours seraient peut être trop longs.

« Prévenez les nains de Fenark Ier que le plan fonctionne comme prévu » dit Aradir à Jesdredhon, « Qu'ils se mettent en route ». « Bien mon roi », répondit le vassal d'Aradir. Ce dernier envoya quérir un groupe d'éclaireurs et leur donna les instructions. Les éclaireurs partirent de nuit pour retrouver l'armée des nains, qui avançait chaque jour de plus en plus près de Belador. Deux jours plus tard, les éclaireurs arrivèrent au-devant des nains et leur expliquèrent la situation. « Vous devez vous rendre vers Tolosa pour assiéger la ville. Celle-ci est peu défendue, le roi et son armée sont partis il y a maintenant quatre jours » dit Hurat, le chef des éclaireurs. « Parfait, nous nous mettons en route. Dites au roi Aradir que nous avons essuyé quelques pertes lors de la traversée des Plaines Perfides. Nous serons à Tolosa dans deux jours » répondit Fenark Ier. Les éclaireurs repartirent le lendemain et l'armée des nains se mit en mouvement. Les dragons de glace marchaient pour ne pas épuiser leurs forces lorsqu'ils auraient à brûler la capitale. Les nains étaient petits mais marchaient vite. Leur avancée progressait rapidement et bientôt Tolosa devra affronter l'une des armées les plus féroces de Telahhara.

L'armée de Lithragir III continuait son chemin, elle se situait à vingt lieux encore de Belador. « Nous allons camper ici et attendre les renforts de l'Est avant de raser Belador une fois pour toute » dit le roi à l'un de ses serviteurs. Le roi redemanda dans combien de temps les troupes arriveraient et le serviteur dit : « Trois jours ». Le roi craignait que lord Aradir quitte Belador pour l'attaquer. Il voulait coincer le rebelle dans la ville et briser toutes ses chances de survie. « Nous n'avons pas de dragons mais nous avons l'arme la plus puissante qui soit », pensa le roi. Ce dernier détenait le bâton de pouvoir, appelé Mjolinia. Cette arme terrible se transmettait de roi en roi depuis plusieurs siècles. Elle avait été fabriquée depuis plusieurs millénaires et il avait le pouvoir de créer des créatures terribles, aussi fortes que des dragons. Le roi utilisa le bâton et commença à modeler des lions, longs de plusieurs mètres. Les fauves dépassaient la taille habituelle des animaux, ils devenaient de plus en plus féroces en fonction du désir du roi. Des griffes aussi tranchantes que des épées sortaient de leurs pattes et soulevaient des mottes de terre. Leur gueule renfermait des rangées de crocs terribles qui pouvaient déchiqueter aisément la peau d'un dragon. Pour l'instant, le nombre de ses lions s'élevaient à vingt. Ils entouraient le campement des soldats du roi et les protégeaient contre tout type d'attaque. Le lendemain, le roi parcourut le campement pour voir si chaque troupe de soldats étaient prêtes à se battre. Encore deux jours et les renforts viendraient. L'attente était dure mais le roi espérait qu'une fois son armée au complet, il pourrait détruire les habitants de Belador une bonne fois. La nuit tombait et le roi se coucha dans sa tente, attendant le prochain jour avec impatience. Il avait discuté une heure plus tôt avec les généraux de son armée pour mettre en place l'attaque de Belador. Il s'endormit dans un sommeil lourd et rêva qu'il tenait la tête de lord Aradir sur ses genoux. Il souriait à cette idée quand tout à coup, les lions poussèrent un rugissement affreux qui réveilla tous les soldats et les êtres vivants sur des lieux à la ronde. « Des Xelars arrivent ! Protégez le roi ! » hurla Thomardak aux gardes royaux. Les Xelars étaient les créatures les plus craintes de Telahhara, ils se nourrissaient de chair humaine, et quand ils avaient faim, c'était là qu'il fallait vraiment avoir peur. On entendit des cris aigus, qui répondirent à ceux des lions. Le combat était imminent et les premiers Xelars sautèrent sur les lions et se battirent avec une fureur surréaliste. Ces créatures étaient difformes, ils avaient des yeux rouges et une tête allongée, une gueule large et grande qui laissait apparaître plusieurs rangées de dents aiguisées et pointues, et une longue langue violette qui crachait du venin mortel. Les lions donnaient des grands coups de griffes qui déchirèrent la peau noire des Xelars. Seulement, la taille et le poids des lions les ralentissaient et bientôt le premier lion fut recouvert d'une vingtaine de Xelars qui se repurent de la chair. Les soldats tenaient des lances dans leurs mains et formaient un mur de bouclier. Ils avaient entouré leur camp d'un liquide inflammable. Les archers au centre du camp tirèrent des flèches enflammées et bientôt, une muraille de feu entoura le campement et les Xelars qui se trouvaient près des limites du campement furent brûlés et coururent hurler dans la nuit. Les lions furent piégés car ils étaient à l'extérieur du campement. Ils furent dévorés et mis en charpie par les Xelars qui affluaient toujours plus nombreux. Les lions réussirent à mordre certains Xelars mais ces derniers, trop nombreux, les tuèrent malgré tout. Cette nuit là, les Xelars durent se contenter de lions immenses pour repas. Les créatures, repues, quittèrent les lieux, laissant derrière eux des montagnes de cadavres déchiquetés. Les charognards avaient à peine de quoi manger. Le reste de la nuit, les soldats se tinrent sur leurs gardes, terrifiés suite aux attaques des Xelars. Le feu qui encerclait le camp disparut lentement dans la nuit, et céda la place au jour. Quelques heures après le début de l'aube, les renforts arrivèrent et leur venue fut acclamée. Maintenant, l'armée du roi était forte de vingt mille guerriers, déterminés à renverser la rébellion de lord Aradir. Les lords Catarak, Nitrek et Predir se rendirent dans la tente du roi pour prendre connaissance du plan d'attaque. « Nous marcherons sur Belador demain à l'aube et raserons leur ville. J'ai créé des lions pour défendre notre armée des dragons mais ils ont été tués par des Xelars hier. Il faut que je me mette au travail. Laissez-moi à présent que vous savez tout » leur dit le roi. La nuit revint une nouvelle fois et le camp s'endormit plus sûr cette fois. Toute la nuit, Lithragir III créa de nouvelles créatures, cette fois il se surpassa dans l'horreur et inventa des créatures hybrides : des grands éléphants, de trente pieds de haut avec une tête énorme de sanglier. Ces créatures pouvaient être montées par des hommes, aussi il mit au point des édifices de bois sur le dos des éléphants pour permettre aux soldats de monter plus facilement sur leur dos. Une centaine d'éléphants naquit lors de cette lugubre nuit. L'aube du grand jour arriva. Les soldats s'organisèrent de façon méthodique en plusieurs contingents répartis en plusieurs catégories. Le camp fut levé et l'armée se remit en marche. Les éléphants du roi entouraient les flancs de l'armée, sur lesquels une trentaine d'hommes à chaque fois avait pris place sur les tourelles sur leur dos. L'armée avança pendant une heure environ et Belador se dressa bientôt devant eux. Le roi fut alors estomaqué par ceux qu'il vit. L'armée de lord Aradir et de son vassal Jesdredhon se tenait devant eux, sur les plaines qui entouraient Belador. « C'est du suicide » pensa la roi. C'est alors qu'il se rappela que les rebelles avaient des dragons. Ces derniers volaient très haut dans le ciel, tellement haut qu'on les prenait pour des taches difformes colorant l'immensité azurée du ciel. Lord Aradir et Jesdredhon avancèrent et se placèrent devant leur armée. Celle-ci était maintenant plus forte suite au soutien des Elephatirs. Ces derniers formait un peuple nomade, persécuté depuis l'accession au pouvoir de Lithragir III. Quinze mille soldats servaient Aradir. Cet importante force militaire était malheureusement inférieure en nombre face aux soldats de Lithragir III. Mais le feu des dragons pouvait faire office d'armée. Un son long et grave sortit d'un grand cor, le cor d'Os de Belador. Un soldat venait de souffler dedans. Tout d'un coup, les taches noires qui coloraient le ciel se rapprochèrent dangereusement de l'armée du roi et les dragons énormes commencèrent à descendre de plus en plus vite. Leur ventre se gonfla et rougit jusqu'à ce que des langues de feu sortent de leur béantes gueules. La bataille débuta.

Fenark Ier et son armée arrivèrent aux portes de Tolosa et commencèrent à percer les portes de fer et de métal. Bientôt, dix mille nains rentrèrent dans Tolosa et commencèrent à saccager la ville, éventrant les femmes et les jeunes filles, égorgeant les hommes. Tous les quartiers furent envahis par la fureur des nains, qui terrifia la population et l'extermina jusqu'à la dernière âme, ne laissant aucun survivant. Tolosa n'avait plus de population hormis une armée de nains. Ces derniers, fatigués de leur traversée, prirent place dans les diverses maisons qu'ils trouvèrent et se repurent des richesses tolosiennes. Ils firent de grands banquets et repas, dégustant des choses délicieuses qu'ils n'avaient pas eu la chance de manger depuis plusieurs semaines. Des canards rôtis, des topinambours confits dans le miel, des ragoûts de lapin ou encore des cochons de lait. Les nains passèrent une nuit délicieuse, revigorés par cette victoire et cette nourriture tant attendue. Fenark Ier prit place dans les appartements du roi. Ils avaient pris soin de n'épargner personne hormis les membres du Grand Seth. En effet, ils voulaient entamer des négociations avec Lithragir III et pensaient que ces hommes pourraient se révéler utiles. En attendant, les conseillers furent placés dans les cellules de la prison de Tolosa, derrière le Capitole. Le roi des nains envoya en secret des messagers vers Belador pour prévenir au lord Aradir que le plan fonctionnait. Tolosa était tombée et maintenant la suite des évènements allait considérablement changer. Le Sud de Telahhara ne se préoccupait pas des guerres intestines qui rongeaient le royaume. Le Sud était surtout une vaste terre aride, recouverte de volcans en constante activité. La lave recouvrait une bonne partie de cette région et presque personne n'y habitait. Les contrées de l'Est avaient envoyé leurs principales forces militaires vers Belador. Le Nord ne comportait à présent qu'une faible partie du peuple nain. Les messagers envoyés par Fenark Ier étaient en fait les Quelionzetal, montés sur leurs dragons de glace, pour arriver plus vite à Belador. « Lord Aradir sera content de notre victoire » pensa le roi nain. Ce dernier alla se coucher dans la chambre de Lithragir III, et s'endormit un sourire aux lèvres.