Trois fois le tour

Perplexe, l'enfant loucha, pencha la tête et tendit la main avant de se rétracter. Il fronça les sourcils, sa frange dansant au rythme de ses mouvements alors qu'il examinait avec attention les contours rebondis du ventre de sa mère.

— Il y a un bébé, là-dedans.

Mikoto sourit en hochant la tête alors que son fils unique – bientôt aîné – pinçait les lèvres, incertain. Ce n'était pas qu'il n'avait aucune confiance en sa mère, loin de là. Il ne comprenait simplement pas.

— Et c'est toi qui l'as fait ?

— Papa et moi, oui.

Itachi hocha la tête, reprenant le fil de son examen du ventre de sa mère. Bien sûr, il avait vu qu'elle avait grossi depuis quelques mois et elle lui avait dit qu'il allait avoir un petit frère ou une petite sœur. Cependant, jusqu'à présent, il n'avait pas fait le lien, il n'avait pas établi le moindre rapport entre le tour de taille de Mikoto et l'arrivée prochaine du bébé.

Il tendit la main, un peu inquiet, mais impatient de sentir de nouveau le coup qui l'avait heurté et qui l'avait conduit à se poser tant de questions.

— Moi aussi, j'étais là ? demanda-t-il en levant les yeux vers sa mère.

Elle sourit avec tendresse, émue malgré elle de ce qu'elle voyait passer sur le visage de son fils.

— Oui, toi aussi, tu étais là. Mais tu étais tout petit.

Il prit une inspiration sans pour autant poser la question qui lui venait à l'esprit et il fait une nouvelle fois le tour de sa mère.

Il se mit en quête du regard de son père, assis en tailleur près d'une table basse, sirotant lentement un thé noir. Fugaku ne put retenir un sourire encourageant alors qu'Itachi terminait son troisième tour du ventre de sa mère.

Sa petite main s'attarda près du nombril de sa mère et l'émerveillement qu'il ressentit transforma son visage.

Il y avait la vie dans le ventre de sa maman. Soudain, la question qui fronçait ses sourcils le fit relever la tête pour croiser les yeux bienveillants de Mikoto.

— Mais comment il est arrivé là ?

Elle hésita alors que Fugaku s'étouffait dans sa gorgée de thé. Le crachotement du père de famille n'attira pas l'attention de son fils qui cherchait à comprendre, relevant le tee-shirt de sa mère à la recherche d'une ouverture par où elle aurait pu mettre le bébé dans son ventre. Elle retira les petits doigts qui chatouillaient sa peau et s'accroupit finalement près de son aîné, effleurant sa frange et elle lui sourit.

Elle trouva un moyen d'esquiver la question quand l'enfant qu'elle portait donna un nouveau coup.

— Oh, il a bougé, murmura-t-elle. Tu veux lui parler ?

Avec beaucoup d'entrain, il hocha la tête, oubliant sa réflexion le temps que sa mère s'installe, lui laissant la possibilité de coller son oreille contre le ventre rebondi, toute sa concentration s'orientant pour essayer d'entendre le bébé.

Attendri, Fugaku contempla le spectacle, l'émotion qui lui serrait le cœur le bouleversant.

Si, au moment de sa mort, il devait choisir une seule image à convoquer, alors, ce serait celle-ci.

Et au moins, il en était sûr, son bonheur, il n'en ferait jamais le tour !