Note de l'auteur: Bonjour tout le monde ! Est-ce que j'ai le droit de dire petit OS ? Par rapport à mes autres écrits pour le coup, c'est vraiment un petit OS. En tout cas, c'est juste un petit truc que j'ai écrit à la fois pour me détendre, pour rafraîchir mes perspectives et surtout pour tenter de faire plaisir à quelqu'un que j'aime et qui aime le Rhadanon, donc... Voilà, j'en partage le résultat ici. C'est honnêtement un petit truc sans prétention, d'autant que j'ai vraiment très peu écrit Kanon et Rhadamanthe (avec un peu de Camilo en fond sinon je crois qu'on ne me reconnaîtrait pas). C'est pas le texte sur lequel je me serai le plus acharné, mais enfin, normalement c'est léger, c'est juste pour que vous passiez un petit moment agréable.
Au niveau des pairings, nous avons donc Rhadamanthe/Kanon et Camus/Milo. J'ai mis un rating T par énorme précaution pour éventuellement le langage mais clairement, vraiment rien de bien violent par ici.
Je dédie donc ce texte à mon.a chèr.e Sea Rune, celui-ci est pour toi, j'espère que tu l'aimeras si tu passes par là, et que ça te fera un peu rire !
Je vous souhaite une bonne lecture, et si vous aviez envie de me poster la petite review de l'amour, ça me fera toujours très plaisir !
Une chose en commun
« Evidemment… Il est en retard.
- C'est toi qui es en avance.
- Même. »
Kanon pousse un soupir. Bon, c'était vrai, Milo avait raison, il était en avance. Un peu trop en avance. Mais même. Il n'avait qu'à être AUSSI en avance, l'autre, là.
« T'es nerveux.
- Sans déconner ! S'énerve le Gémeau. T'en as de belles, toi. Première fois que je fais une mission officielle pour le Sanctuaire avec l'armure de mon frangin ! J'ai le droit d'être nerveux, non ?
- Eh, calmos, tente son ami avec un geste de la main. Je ne faisais qu'observer, c'était tout.
- Bah va observer ailleurs, tu me saoules. »
Milo croise les bras sur sa poitrine, vexé.
« Eh. Je te signale que j'ai sacrifié ma matinée avec Camus pour venir te soutenir, là. Tu pourrais montrer un peu de reconnaissance ! Et puis en plus, ce n'est pas l'armure de ton frère, y'a pas son nom marqué dessus.
- Lui donne pas cette suggestion, il serait capable de le faire juste pour m'emmerder. »
Milo lève les yeux au ciel. Le Scorpion se doutait bien que même s'ils étaient tous revenus à la vie, tout n'était pas rose entre les deux Gémeaux. Depuis la résurrection, gérer la personne qui porterait ou non l'armure d'or avait été compliqué. Finalement, comme il avait été difficile de vraiment départager les deux frères, et que Kanon avait officiellement donné son allégeance à Athéna, il avait été décidé que selon les missions et les conflits qui pourraient éventuellement émerger, la déesse déciderait elle-même qui elle voudrait voir porter l'armure. En son absence, le Grand Pope ferait office d'arbitre.
« C'est l'armure des Gémeaux, Kanon, reprend Milo. Et à mes yeux, tu es probablement plus digne de la porter que ton frère.
- C'est parce que tu m'as criblé de coups d'Aiguille Ecarlate que tu dis ça ?
- Entre autres. Et puis, contrairement à lui, tu me l'as pas mis à l'envers pendant treize ans. »
Il y a un silence méditatif. Kanon ne sait pas trop quoi répondre à cette assertion grinçante, aussi, il ne dit rien pendant un moment. Il préfère se contenter d'écouter les sons aux alentours. Les deux chevaliers sont assis sur les marches en contrebas du premier temple, en attendant que le coéquipier du Gémeau, n'arrive, et le soleil et le vent balayent l'atmosphère. Un moment parfait pour juste être et se détendre.
Et pourtant, Kanon est effectivement nerveux, même s'il n'aime pas donner raison à Milo. Jusqu'ici, et depuis la résurrection, le Gémeau a eu l'impression d'être testé en permanence, et la mission qu'on venait de lui donner lui semblait comme un prétexte de plus à vérifier sa loyauté. Sans parler des conflits qu'il avait encore régulièrement avec son frère, il y avait de quoi angoisser. La seule personne dont il avait vraiment réussi à se faire un véritable ami, et qui, il le savait, ne remettrait jamais en cause sa loyauté, était Milo. Il ne voyait jamais aucune suspicion lorsqu'il croisait le regard de son confrère doré. Le Scorpion devait considérer que subir son attaque sans chercher même à se défendre ou à fuir était une preuve largement suffisante de valeur. Et d'après ce que Kanon avait compris, Milo marchait beaucoup avec ce genre de principes. Le huitième gardien était un chevalier qui respectait ses pairs et qui cherchait en général à les élever aux mêmes principes que les siens. Kanon avait subi son attaque… Alors Milo ne se posait plus de questions.
« T'as rien à leur prouver, tu sais, essaye finalement ce dernier. Je sais que parfois le Sanctuaire c'est compliqué au niveau de l'ambiance, mais…
- T'inquiète. Même si je devais rentrer victorieux et expédier la mission de la manière la plus héroïque qui soit, on me jetterait toujours des regards suspects, répond Kanon d'une voix amère. A force, je la connais, la chanson.
- Alors tu peux le voir comme un avantage : puisque personne n'attend quoi que ce soit de toi, tu n'as rien à perdre. Et la déesse, elle, n'a pas besoin que tu lui prouves ta loyauté. Elle croit déjà en toi.
- Ouais, mais Athéna, je prends pas mon petit dej' dans le même temple qu'elle tous les matins.
- Alors tu peux toujours te réjouir de partir en mission et de quitter un peu ton temple », raisonne Milo avec un demi-sourire.
Kanon finit par tourner la tête vers Milo et lui rendre un sourire amusé.
« Ouais, je quitte un crétin rasoir pour en trouver un autre, tu parles d'une amélioration…
- Je t'avoue que je suis pas vraiment le gars qui va m'enthousiasmer pour ce type… Mais t'es pas moi. Et peut-être que tu t'amuseras.
- J'avoue, tu sors bien avec Camus, toi… Et t'as l'air de t'amuser...
- Laisse mon mec en dehors de ça », grogne le Scorpion en lui mettant une tape sur le bras.
Kanon lève les yeux au ciel. Milo, à protéger éternellement Camus… Là encore, rien de neuf sous le soleil.
« Ça empêche pas qu'il est en retard, l'autre, bougonne le Gémeau pour toute réponse.
- T'es vraiment têtu quand tu t'y mets… On est là que depuis cinq minutes. Dis-le si tu te fais chier avec moi…
- C'est pas toi le problème, c'est lui qui sait pas que quand on est poli on vient en avance.
- T'en as quelque chose à faire de la politesse, toi, maintenant…
- Bah je croyais que lui, il en aurait quelque chose à faire justement, réplique Kanon. On est censés être sur une mission diplomatique. On va pas faire un pique-nique.
- T'as pas ramené de bouffe ?
- Si. Bon, on va peut-être pique-niquer, je sais pas, joue pas sur les mots, toi !
- Désolé. Déformation professionnelle…
- Professionnelle, professionnelle… Amoureuse oui…
- Et c'est moi qui joue sur les mots…
- Rappelle-moi pourquoi t'es là, toi, déjà ?
- Pour te soutenir pour ta mission, ingrat. Et d'ailleurs, regarde, on dirait qu'il arrive, ton coéquipier. On ferait mieux de se lever, on a l'air de rien comme ça. »
Les deux chevaliers d'or se redressent de leur assise et époussètent légèrement leurs armures dorées avant de s'avancer à la rencontre de leur visiteur.
« T'inquiète pas, t'es bien coiffé, ricane Milo en voyant Kanon mettre le casque de l'armure des Gémeaux sous le bras.
- Au cas où tu le saurais pas, c'est pas un rencard, grince le plus âgé des deux.
- Ça, c'est à toi de me le dire. Il te plairait pas un peu, le monsieur aux sourcils collés ?
- T'as de la chance qu'Aldé soit pas dans le coin pour t'entendre.
- C'est ça, fais-moi la morale, toi. En plus, je te signale que j'ai survécu jusqu'ici…
- T'es sûr que t'as envie de critiquer les sourcils des gens, Milo ? Quand on sait avec qui tu sors… »
Kanon ponctue sa phrase d'un sourire en coin moqueur. Sans beaucoup de surprise, il voit le visage de Milo se déformer de colère.
« TOI ! Tu parles encore une seule fois mal de Camus et je te mets Antarès là où je pense !
- Je suis sûr qu'il serait ravi de t'entendre me faire ce genre de propositions…
- Chevaliers d'or », résonne une voix sévère au milieu de leur conciliabule.
Milo et Kanon tournent la tête vers leur visiteur. Visiteur qui avait eu le temps de s'approcher d'eux pendant leur micro-dispute.
« Salut, Rhadamanthe, prononce Kanon en tendant une main vers l'homme qui venait d'arriver.
- Juge de la Whyverne », le salue plus froidement Milo.
Kanon jette un regard en coin au huitième gardien. Visiblement, le Scorpion n'avait pas encore très bien digéré de se faire jeter dans le Cocyte par l'homme qui se tenait devant lui. Le Gémeau n'aurait su lui en tenir rigueur.
Et d'ailleurs, son ami était bien généreux avec lui d'être venu à la rencontre du type qui lui avait valu un petit tour aux enfers. L'expérience et les souvenirs qui y étaient très probablement associés devaient être encore douloureuses pour le huitième gardien.
Kanon, lui, n'avait pas la même expérience. Bon, Rhadamanthe s'était battu contre lui, certes, mais le résultat du combat n'avait pas été le même.
Rhadamanthe prend la main tendue par son coéquipier attitré et la serre, sans quitter son air sérieux.
« Kanon des Gémeaux, Milo du Scorpion. Si vous avez fini votre conversation, je proposerai de remplir sur le champ notre mission, Gémeau. »
Milo fronce les sourcils, mais il ne dit rien. Kanon en juge à ce moment-là que le Scorpion a parfaitement enregistré que le ton de la Whyverne n'avait pas été loin du sarcasme, mais qu'il avait choisi de ne pas provoquer un visiteur et ancien ennemi sur le domaine sacré.
« Ouais, on va pas s'éterniser, décrète-t-il donc, avant de se tourner vers Milo. Merci de m'avoir accompagné, mon vieux, c'était sympa de ta part.
- Pas de problème. Bonne chance pour votre mission.
- Merci. A plus tard Milo.
- Chevalier. »
Kanon s'avance auprès de Rhadamanthe, et après un dernier signe de tête de la part du juge des enfers, et un salut de la main en arrière plus amical de la part Gémeau envers le Scorpion en titre, les deux coéquipiers tournent les talons en direction de la sortie du Sanctuaire.
C'était une après-midi à la con, voilà ce que c'était, bougonnait Kanon en son for intérieur.
Des heures qu'il se promenait aux côtés du juge des enfers sur une côte rocailleuse grecque, et que son comparse n'avait pas prononcé un seul mot. Il avait essayé pourtant, mais il devait bien avouer que ce Rhadamanthe était tout de même un drôle d'oiseau.
Et puis que lui dire, au fond ? Ça va ? Non. Trop commun. Tout ça pour que la conversation s'arrête sur un oui. Comment va la vie aux enfers ? Y'a pas de vie aux enfers. C'étaient les enfers, en même temps. Quand même improbable de se promener à côté d'un gars qui voyait des gens morts toute la journée. Qu'est-ce qu'on est censé dire à un juge des enfers ? Est-ce que ça rigole, un juge des enfers ? C'est capable de se prendre une cuite magistrale après avoir bu des bouteilles d'alcool ? C'est capable d'avoir des délires entre potes ?
Difficile de se trouver des points communs avec tout ça. A part peut-être le fait qu'ils étaient deux mecs. C'était vrai que Rhadamanthe avait tout de même bien été un gars vivant avant d'être un spectre. Mais ils se connaissaient à peine. Il n'allait pas lui poser des questions sur son passé de but en blanc. Impossible de l'approcher comme ça, déjà que le gars n'avait pas l'air trop d'humeur à faire la conversation…
« Si ça se trouve tu t'amuseras. » Mais bien sûr, Milo. Tout le monde n'est pas capable d'être pote (voire amant) avec un gars qui n'ouvre jamais la bouche. C'était bien un truc que Milo pouvait dire, ce genre de phrase optimiste à deux balles…
Enfin, il n'allait pas jeter la pierre au Scorpion. Après tout son ami faisait de son mieux pour l'encourager, et il était même venu l'accompagner jusqu'en bas du Sanctuaire pour sa mission. Le pauvre avait fait tout ce qu'il avait pu.
Cela ne réglait pas pour autant le problème de comment entamer la conversation avec son coéquipier pour un temps.
Tous les deux avaient été envoyés vérifier un élément suspect qui semblait se balader entre le Sanctuaire et les Enfers de manière régulière. Même si pour le moment personne n'avait été attaqué, les gens qui avaient pu percevoir cette présence en avaient déduit qu'il s'agissait d'un cosmos puissant. Et ce cosmos puissant se déplaçait étrangement beaucoup à proximité des domaines d'Athéna et d'Hadès, ce qui était tout de même inquiétant. Voilà pourquoi les deux divinités s'étaient accordées à envoyer chacun un de leurs hommes pour enquêter sur l'affaire. Puisque ce cosmos avait l'air important, Hadès avait dû juger qu'envoyer un de ses juges était adéquat, et Athéna avait dépêché un membre très puissant de sa garde dorée. Clairement, comme Kanon l'avait dit à Milo avant de partir, ils n'allaient pas faire un pique-nique.
« Et sinon… Euh… Comment ça se passe, aux enfers ? »
Bon, il avait tenté. Advienne que pourra.
« Nous jugeons les morts et nous les envoyons dans les différentes prisons, répond laconiquement Rhadamanthe. Tu as déjà vu comment ça se passe. »
Kanon lève les yeux au ciel. Ce n'était pas gagné.
« Oui, je sais bien comment ça se passe, soupire-t-il.
- Ça ne sert à rien de poser la question, dans ce cas.
- Je pose la question pour savoir comment vous vous reconstruisez, si ça va… J'en sais rien, moi !
- Cela t'intéresse ? Le Seigneur Hadès n'a pas de postes à pourvoir dans ses rangs.
- C'est petit, ça, de m'attaquer sur ma loyauté. Je suis fidèle à Athéna !
- Tu es surtout fidèle à tes propres plans, raisonne Rhadamanthe. Il se trouve que maintenant, tes propres plans sont compatibles avec ceux d'Athéna, c'est tout.
- Et tu trouves que c'est un défaut que d'être fidèle à soi-même ?
- Non. Je ne le trouve pas. »
Kanon tourne la tête vers Rhadamanthe, un peu surpris que la conversation ait pris cette tournure.
« Tu trouves que c'est une qualité maintenant ? Je croyais que tu ne m'aimais pas ?
- Est-ce que j'ai dit ça ?
- Non, mais tu le penses super fort depuis tout à l'heure. Et puis tu n'aimes pas les chevaliers d'Athéna.
- Mon rôle n'est pas de juger les vivants. Seulement les morts. Ton allégeance et tes qualités ne sont pour l'instant pas de mon ressort. »
Kanon fronce les sourcils. Oui, il avait su depuis le début que ce Rhadamanthe était un type étrange, mais il ne s'était pas attendu à ça.
« Donc, tu t'intéresseras à moi quand je serai mort… ? C'est toujours sympa de se faire la conversation.
- Si tu me trouves aussi détestable, je ne comprends pas pourquoi tu as songé à l'entamer.
- Je ne sais pas, je tente de la sociabilisation ! T'en as entendu parler ?
- Les morts ne sont guère sociables.
- Bah t'as un vivant devant toi, profite. »
Rhadamanthe regarde Kanon, songeur.
« Je ne suis pas habitué à parler, sauf pour répondre aux ordres du Seigneur Hadès ou prononcer des sentences, lui révèle-t-il finalement. Même avec la meilleure conversation du monde je crains de ne pas être l'homme qu'il te faut pour bavarder.
- Mais t'étais un gars vivant, avant, non ? T'avais bien une vie ?
- Cette vie n'a plus de sens puisque je ne servais pas encore le Seigneur Hadès.
- T'es pas très arrangeant, quand même. T'as vraiment pas envie de parler à ce point ?
- Je n'ai pas dit que je n'avais pas envie. Cela fait deux fois que tu déformes mes propos.
- Tu n'es pas hyper engageant quand tu t'y mets aussi ! Je suis censé le prendre comment, moi, que tu t'intéresses pas à moi ?
- Tu préfèrerais que je le fasse ? S'attirer l'attention d'un juge des enfers n'est pas forcément le meilleur pari au monde.
- Et si tu me prouvais le contraire ? »
Un air surpris s'affiche sur les traits du serviteur d'Hadès.
« Mon intérêt pour toi compte autant que cela, Gémeau ?
- On s'ennuie ferme depuis des heures, alors oui. Merde. »
Rhadamanthe reporte son regard droit devant lui.
« C'est bien la première fois qu'on me dit cela. »
Les deux hommes continuent de marcher dans un silence bref.
« C'est triste » est tout ce que Kanon trouve à dire au bout de ce temps de pause.
Le silence se prolonge, plus gêné que la dernière fois.
« Je n'ai pas besoin de pitié, finit par annoncer Rhadamanthe d'une voix plus froide.
- C'en est pas. C'est triste, c'est tout. Je te connais pas, mais bon, au fond, t'as pas l'air d'être un mauvais gars. Je vois pas pourquoi on ne s'intéresserait pas à toi.
- Je prononce des sentences pour les morts chaque jour et les envoie dans différents enfers. Personne n'aime son bourreau.
- Et les autres spectres ?
- Ils restent des spectres. Et la plupart sont sous mes ordres.
- Mais les autres juges, ils ne le sont pas, sous tes ordres…
- Nous préférons notre tranquillité. »
Kanon fait une grimace perplexe.
« Je suis le premier gars qui te pose autant de questions ?
- Oui. Les hommes qui sont sous mes ordres n'ont pas à en poser.
- Eh beh. Ça rigole pas.
- Me vois-tu comme quelqu'un qui le ferait souvent ?
- Je ne sais pas. Tu bois de l'alcool ? »
Un temps.
« Du whisky.
- Ah, bah alors t'es pas trop coincé ! On devrait s'entendre !
- C'est un critère ?
- Je nous cherche des trucs en commun ! Et je t'avoue que je galère, donc laisse-moi savourer quand j'en trouve. »
Rhadamanthe se contente d'un hochement de tête pensif.
« Je t'intéresse, donc ?
- Bah, t'es à côté de moi, t'as pas l'air méchant, on fait une mission ensemble, et tu combats bien… Je vois pas pourquoi je m'intéresserais pas. C'est normal, non ?
- Je ne sais pas. Je ne suis pas habitué. »
Kanon se pare d'un sourire en coin. Rhadamanthe avait un air gêné, maintenant. Est-ce qu'il venait d'arriver à embarrasser un juge des enfers ? Il aurait vraiment tout vu.
« Et tu aimes ça ?
- J'aime quoi… ? Fait une voix manifestement troublée.
- Que je m'intéresse à toi ? »
Rhadamanthe garde le silence quelques instants, comme s'il avait besoin de réfléchir à ce qui venait d'être dit.
« Ce n'est pas désagréable. »
Kanon étire un grand sourire satisfait. La situation n'était peut-être pas si inextricable que ça.
Les deux hommes continuent de marcher quelques secondes sur la côte grecque avant qu'un cosmos ne résonne soudainement.
« Tu as senti ça ?
- Oui. Cela correspond en tout point au cosmos que nous avons intercepté à l'entrée des Enfers.
- C'est le même qui se promenait aux abords du Sanctuaire il y a quelques jours. Je crois qu'on le tient.
- Soyons discrets. Il sera plus facile de le prendre par surprise.
- Passe devant, je te suis. »
Sur cet accord, Kanon et Rhadamanthe progressent entre les rochers, veillant le plus possible à limiter le tintement de leurs armures sur le sol rocailleux. Kanon tente de se focaliser sur ce cosmos. C'était bizarre, depuis qu'il était plus près, celui-ci lui semblait étrangement familier. Et apaisant… Comme s'il n'y avait pas vraiment de danger.
Mais qu'est-ce qu'un cosmos familier, mais pas celui d'un chevalier, viendrait faire dans la périphérie du Sanctuaire… ?
« Reste derrière, je vais lui sauter dessus avant qu'il n'ait le temps de faire un geste. Toi, téléporte-toi devant lui pour qu'il comprenne qu'il ne pourra pas se défendre.
- Entendu. »
Rhadamanthe, sur ces paroles, fait un saut furtif et léger vers l'avant en direction du cosmos. Kanon ne réfléchit et utilise son Golden Triangle pour se téléporter pile en direction du cosmos en question.
A peine est-il arrivé devant leur adversaire que la voix de Rhadamanthe avait déjà retenti, forte et froide.
« On ne bouge plus ! Tu vas aller rendre compte de tes actes devant le Seigneur Hadès, intrus ! »
Et c'est à ce moment-là que Kanon pose les yeux le visage plutôt surpris d'un homme qu'ils avaient interrompu… Au beau milieu d'un solo de flute.
« SORRENTO ?! S'écrie Kanon en le reconnaissant.
- Tiens, une tête connue, répond celui-ci sans grand enthousiasme. Tu voudrais pas dire à ton pote de me laisser tranquille ?
- Mais qu'est-ce que tu fous ici, abruti ? T'es au courant que t'es sur les terres d'Athéna ?! »
Sorrento le regarde, visiblement pas très ému de la surprise et de la colère de son interlocuteur.
« Je suis au courant, merci. Et je voudrais bien qu'on me lâche maintenant, je vous promets que si vous brisez ma flute avec vos bêtises je vais devenir vraiment méchant.
- Tu vas d'abord m'expliquer ce que tu fais sur un Sanctuaire étranger ! Tu n'as rien à faire ici !
- Et lui ? D'après son cosmos, il m'a l'air d'être un spectre d'Hadès. Tu veux le verbaliser aussi ?
- Me prends pas pour un con !
- Ce serait que justice remarque, tu nous as bien pris pour des cons pendant des années.
- C'EST PAS LE MOMENT DE DISCUTER DE CA ! JE SUIS UN CHEVALIER D'ATHENA !
- Cause toujours, Dragon des Mers.
- Et quand vous aurez fini votre dispute, tous les deux, intervient Rhadamanthe, vous pourriez peut-être m'expliquer ce qu'un Marina vient faire sur les terres d'Athéna et d'Hadès ? Parce que si ça t'intéresse encore, l'intrus, c'est pour cela que je suis là.
- Et ton motif a intérêt à être valable ! Je te signale que t'es soupçonné d'espionnage à l'heure actuelle ! T'es au courant que ta présence ici pourrait déclencher une guerre ?!
- Tout de suite les grands mots, minore Sorrento.
- Explique-toi avant que Rhadamanthe te brise en deux ! »
Le marina pousse un soupir.
« Je suis juste venu ici pour jouer de la flute, j'ai attaqué personne !
- Ta flute mortelle ! Tu crois que je connais pas tes techniques ? S'énerve Kanon.
- Mais quoi, c'était juste un concerto cette fois ! Je faisais rien de mal !
- Ça rentre pas dans ta tête, que c'est pas chez ta mère, ici ?! Tu es sur le domaine d'Athéna ! »
Kanon s'interrompt un instant, et se calme un peu.
« Sincèrement, si tu n'as pas d'intentions hostiles, explique-toi, parce que tu risques de gros ennuis, là.
- Je confirme », appuie posément Rhadamanthe sans lâcher le général de la Sirène.
Sorrento se pare d'une moue boudeuse.
« Quand je pense que je venais juste ici pour être tranquille… Bougonne-t-il. Tout le monde me saoule au Sanctuaire Marin en ce moment, j'avais juste envie de m'éloigner pour pouvoir jouer, c'est tout !
- Tout le monde te saoule ou tu saoules tout le monde ? Lui fait remarquer Kanon avec un sourire en coin.
- Oui bon, ils me crient dessus parce que je fais trop de boucan, d'après eux ! Alors je n'ai pas le choix, je dois aller faire de la musique ailleurs !
- Et tu t'es dit, et si j'allais casser les oreilles des chevaliers du Sanctuaire d'Athéna ? Charitable de ta part.
- Retire ça tout de suite ou je te les casse vraiment, tes oreilles.
- Il faudrait déjà que tu puisses bouger », lui fait remarquer le juge des enfers en resserrant son étreinte.
Sorrento tente de se débattre, sans beaucoup d'effet. Rhadamanthe avait une poigne de fer.
« J'ai aucune mauvaise intention envers vos domaines, je le jure ! Je bouge simplement d'endroit parce que je préfère me trouver proches de lieux émanant de cosmos pour pouvoir jouer. C'est tout. Et je n'ai attaqué personne !
- Convaincs-moi mieux, grince Rhadamanthe.
- Je ne suis pas là en espion ! Tente une nouvelle fois la Sirène. D'ailleurs, si je voulais espionner le Sanctuaire, ce serait pas le meilleur spot. On ne voit même pas vos foutues maisons zodiacales, d'ici ! Et puis, il a bon dos, l'espion ! Le général du Kraken est même venu jusqu'au Sanctuaire il y a quelques semaines pour aller saluer son ancien maître. Il aurait largement eu le temps de récolter les informations qu'il aurait voulu ! Maintenant, lâchez-moi. »
Personne ne bouge. Kanon et Rhadamanthe s'entreregardent.
« En même temps, il a un point, il a attaqué personne, est obligé de reconnaître le Gémeau.
- Pas comme certains, bougonne Sorrento.
- Je doute que le Seigneur Hadès se contente d'une explication comme celle-ci, répond seulement Rhadamanthe.
- Ben il va devoir s'en contenter, réplique le marina. J'ai pas mieux à vous fournir.
- Je peux toujours te faire subir ma Greatest Caution, le menace le juge des enfers.
- Ça ne changera pas mes informations, j'en ai peur », fait l'intéressé sans se démonter.
Kanon pousse un profond soupir.
« Bon, ben tu sais quoi, hein… Puisque tu confirmes ce que je me suis dit pendant des années, que t'étais vraiment juste un crétin de base, t'auras qu'à aller t'expliquer devant Poséidon. Du moment que tu dégages d'ici ce sera déjà une victoire. »
Sorrento n'a même pas le temps de faire un geste que Kanon lui lance son Golden Triangle dessus. Celui-ci s'évapore à la fois des lieux et des bras de Rhadamanthe.
« Eh ! Crie le juge des enfers. Où tu l'as envoyé ? Je n'en avais pas fini avec lui !
- A part te parler de son goût pour les crevettes marinées, il ne t'aurait pas servi à grand-chose, raisonne Kanon. Honnêtement, pour une fois, j'ai bien envie de croire que c'est juste un abruti. Je l'ai envoyé dans la salle du trône de Poséidon, comme ça, il aura au moins son supérieur auquel rendre des comptes.
- C'est devant le Seigneur Hadès qu'il devait en rendre ! Cet homme s'est introduit sur notre territoire !
- De toute manière, Poséidon va être mis au courant qu'un de ses hommes s'est fait choper à faire ça. Il va devoir donner des explications à mon avis ridicules devant Athéna et Hadès. Et nous, on n'aura pas commis d'incident diplomatique et on lui aura rendu un de ses généraux en un seul morceau. Clairement, je propose qu'on en reste là. »
Rhadamanthe croise simplement les bras, mécontent, mais ne trouve rien à ajouter.
« Allez, fais pas la gueule. Au moins, on l'aura trouvé rapidement, lui fait remarquer Kanon avec un sourire en coin. Et on aura expédié cette mission comme il faut.
- Le Seigneur Hadès ne sera pas heureux de me voir revenir avec ces explications.
- Les explications avec lesquelles tu vas revenir ne seront pas de ta responsabilité. Si Sorrento se comporte comme un abruti, c'est pas vraiment toi qui es en cause.
- Je suis un juge des enfers, que je sois responsable ou non, c'est moi qui vais passer pour un imbécile. »
Kanon prend un instant pour réfléchir.
« Tu veux que je vienne avec toi ?
- Pardon ?
- Aux Enfers. Je viens avec toi et j'appuie tes dires devant le Seigneur Hadès. Ça ne me gêne pas, si ça peut t'éviter d'être pris pour un abruti. Parce que ce serait dommage qu'on pense ça de toi. »
Rhadamanthe considère Kanon un moment. Il a plus l'air embarrassé de la proposition qu'autre chose. Le Gémeau se demande sincèrement si la Whyverne est toujours comme ça ou si c'était vraiment sa présence qui y faisait quelque chose.
« Non. Je vais assumer la responsabilité de mes actes devant le Seigneur Hadès » décrète fermement le juge des enfers.
Kanon pousse un soupir.
« Dans ce cas, je suppose que nos chemins vont se séparer ici, déclare-t-il. Je vais aussi rentrer faire mon rapport à Athéna…
- Tu pourras venir aux Enfers si tu veux tout de même », propose une voix un peu plus timide.
Kanon arrête son mouvement. Il avait tendu une main à Rhadamanthe pour qu'il la serre, mais la réplique l'avait pris de court.
« Venir aux enfers ? Mais je croyais que-
- Pas pour la mission. Vendredi. 19h. Dans mes appartements. »
Kanon hausse un sourcil. Qu'est-ce que c'était que cette proposition ?
« Tu veux que je vienne te voir chez toi ? Mais pour quoi faire ?
- Tu aimes le whisky ?
- Euh… Oui.
- Tu cherchais quelque chose que nous avions en commun, tout à l'heure. Puisque nous avons déjà ça, nous pourrions prendre un verre et nous en trouver d'autres. »
Kanon reste immobile, sonné.
« Si cela te tente, bien sûr. »
Le Gémeau dévisage encore une fois le visage de Rhadamanthe. Rien n'avait changé. Il avait juste l'air aussi sérieux que d'habitude. Pourtant, jamais il ne se serait attendu à ça.
« Ben… Oui, ça me tente… Vendredi 19h ?
- Vendredi 19h », confirme la Whyverne d'un signe de tête.
Le juge des enfers s'approche du chevalier d'Athéna et prend la main qui était restée en suspens dans le vide.
« Je rentre faire mon rapport, Kanon des Gémeaux. A vendredi.
- A vendredi… Hésite celui-ci en serrant la main de Rhadamanthe. Et… Merci pour l'invitation. »
Rhadamanthe se recule un peu maladroitement, et ils se regardent en silence une dernière fois. Le juge des enfers décide finalement de lui tourner le dos et de partir, laissant un Gémeau hagard sur son bout de crête rocailleuse.
« Bah ? Déjà rentré ? » Retentit une fois familière alors que Kanon traversait le huitième temple.
Kanon se retourne pour voir Milo, en tenue civile et définitivement remise à la hâte, le toiser d'un air surpris au beau milieu de son temple.
« Ouais. »
Le Scorpion fait quelques pas vers lui, un air curieux au visage.
« Ben alors ? Raconte ! Il s'est passé quoi ? Tu as réussi la mission ?
- Hein… ? Oui, oui.
- T'as l'air complètement à l'ouest. Il t'a assommé sans faire exprès ou quoi ?
- Non, c'est pas ça…
- C'est quoi ?
- Bah… Je sais pas trop comment ça se fait… Mais j'ai un rencard. »
Milo se fige.
« Répète ça ? Fait-il, ahuri.
- J'ai un rencard. Avec Rhadamanthe. Vendredi.
- Sans déconner ?
- Oui. Il m'a proposé. »
Kanon voit Milo s'empêcher d'éclater de rire.
« A la première moquerie tu te prends mon attaque dans la tronche.
- Je me moquais pas, répond Milo avec un sourire en coin. Je suis juste satisfait d'avoir eu raison.
- Sur quoi ?
- Depuis le début il te plaît, ce Rhadamanthe. Heureusement que c'est en train de se concrétiser, même si ce type est un abruti. »
Kanon fronce les sourcils.
« Ne parle pas comme ça de lui.
- Oh, tu vas le protéger ? C'est mignon.
- Va protéger ton mec, toi, et laisse-moi tranquille.
- C'est ça. Et toi, va donc faire ton rapport au Grand Pope, au lieu de discuter avec moi de comment tu vas roucouler vendredi. »
Kanon se contente de hausser les épaules et de tourner les talons, non sans avoir donné une tape sur la tête du Scorpion, et commence à gravir les marches qui mènent plus haut. Milo le regarde faire, interdit, un sourire à la fois pensif et espiègle sur les lèvres.
Deux bras coupent finalement le gardien des lieux au milieu de ses réflexions. Milo ne sursaute absolument pas. Il a l'habitude.
« C'est une bonne chose, ça vous fera des beuveries en moins » grince une voix froide.
Milo se contente d'un petit rire.
« Tu crois que Kanon est capable de se ranger à ce point ?
- Qu'il se range ou non, cela lui fera moins d'occasions de passer des soirées à s'enfiler des verres en ta compagnie. Et donc, plus de soirées que je pourrai passer avec toi. Je pense que j'y gagne. »
Milo tourne la tête vers la beauté froide qui était en train de l'étreindre par derrière.
« Tu sais que je ne bois plus.
- Mais lui oui. Et vous passez des soirées entre abrutis. Ravi d'avoir l'espoir que ça se termine.
- Tu serais pas jaloux, par hasard ?
- Je ne suis pas jaloux.
- Jamais. C'est pas ton genre.
- Absolument pas. »
Milo se contente d'un ricanement malicieux.
« Allez, viens, Camus. Qu'on termine ce qu'on avait commencé…
- C'est toi qui nous as interrompus.
- Justement, je compte bien me faire pardonner. »
Un éclat très intéressé passe dans les yeux marins du onzième gardien. Eclat que Milo décèle immédiatement. Il lui répond avec un simple sourire ravi.
Finalement, les amours de Kanon avaient du bon.
