Le réveil sonna à cinq heures tapantes, comme tous les matins. Joséphine et Mathilde étaient déjà réveillées, et s'apprêtaient à se diriger vers la salle de bain. J'avais l'impression d'être à Strathpeffer avec toute l'équipe depuis des mois, pourtant nous n'étions arrivés que quelques semaines plus tôt. Nous séjournions tous ensemble dans un magnifique cottage victorien, au cœur d'une forêt assez dense derrière laquelle nous avions caché un semblant de terrain de Quidditch.
Chaque jour, l'entraînement débutait à l'aube et se terminait un peu avant le coucher du soleil, mais ce jour-là était spécial ; nous allions jouer notre premier match de la coupe du monde. Nous avions étudié le jeu de chacune des équipes contre lesquelles nous étions susceptibles de jouer, notamment la première, l'équipe du Japon. Nous étions tous fin prêts, avec d'excellentes stratégies sous le coude ; nous avions toutes les chances d'aller en finale. Pour autant, j'étais particulièrement stressée. Je n'allais jouer que le tout premier match, mais si l'équipe perdait par ma faute, elle ne pourrait pas continuer son ascension, et il était tout à fait hors de question que cela arrive.
Cybèle, qui partageait sa chambre avec Ninon et Hildegarde, frappa à la porte de notre chambre. Elle était venue m'apporter une potion d'antistress, qu'elle buvait elle-même avant chaque match.
- Hello, Dora ! Ma pauvre, tu as vraiment une petite mine, me dit-elle en s'asseyant à côté de moi sur le lit. Je t'ai apporté une bouteille entière. Elle devrait te faire la journée, alors je te conseille de n'en boire que des petites gorgées à la fois, si tu ne veux pas avoir une envie pressante pendant le match.
- Merci, Cybèle. La nuit a été un peu courte ; j'ai eu du mal à m'endormir, hier soir. J'ai l'impression qu'un poteau transperce mon crâne, mais ça devrait aller après une bonne douche froide et une énorme tasse de café.
- Si ça peut te rassurer, nous sommes tous dans cet état-là, avant un match important. Les garçons pourront te faire croire le contraire, mais ce sont des vantards. Tu es au point, alors ne t'inquiète pas trop et, surtout, ne te mets pas en danger inutilement. C'est d'accord ?
- C'est promis, je ferai attention.
- En avant ! me lança Joséphine, qui venait de sortir de la salle de bain, avec Mathilde. C'est ton tour Dora, on t'attendra en bas pour le petit déjeuner. Toutes tes affaires sont prêtes ? Il me semble qu'Agathe doit nous rejoindre sur place, pour récupérer tes bagages.
- Tout est prêt, oui. Je crois qu'elle doit passer pour rapporter mes affaires à la maison. Est-ce que tu as eu des nouvelles de Ludo Verpey, concernant les pass que j'avais demandés ?
- Ne t'inquiète pas pour ça, tous tes pass ont été donnés, me répondit Mathilde. Mais je veux vraiment que tu te concentres sur le match. Hormis ta tante, tu ne verras personne avant, donc je t'interdis de chercher qui que ce soit dans les gradins ; seul le match compte.
J'acquiesçai, un peu gênée qu'elle pense que je serais capable de me laisser perturber durant un match si important ; c'était peut-être la chance de ma vie, et je ne comptais pas la manquer. Je pris mes affaires, et me dirigeai vers la salle de bain pour y prendre une bonne douche froide. Mon mal de tête commençait peu à peu à s'atténuer, alors que l'eau glacée recouvrait tout mon corps. Je frissonai en m'habillant, tout en pensant à mes retrouvailles avec Fred, d'ici quelques heures. Nous nous étions écrit presque tous les jours, et il avait fait des photos de chacune de ses activités, comme je le lui avais demandé. En retournant dans la chambre, je vis que tout le monde était déjà descendu ; je pris mes bagages, ainsi que la bouteille que m'avait préparée Cybèle, et je rejoignis les autres dans la salle à manger. Un festin recouvrait la table entière, et tous prenaient un déjeuner copieux.
- Ma pauvre, tu verrais ta tête ! me lança Alain qui croquait dans une saucisse plantée sur le bout de sa fourchette.
- Bonjour à toi aussi, Alain, lui répondis-je avec un sourire forcé.
- Laisse-la tranquille ! Tu veux lui raconter dans quel état tu étais le matin de ton premier match ? le taquina Ninon. Il était tellement mal en point, qu'il n'arrivait pas à s'arrêter de vomir partout !
Tout le monde s'esclaffa, pendant que je prenais place juste à côté de Bastien, le gardien de l'équipe. J'étais incapable d'avaler quoi que ce soit, comme si une énorme boule obstruait mon estomac ; aussi je me servis une grande tasse de café bien fumant.
- Essaie de manger quelque chose, me conseilla Bastien, d'une voix calme. Ton corps a besoin d'énergie et tu ne vas pas tenir long feu si tu n'avales rien. Bois un peu de la potion de Cybèle, tu te sentiras déjà un peu mieux.
J'écoutai son conseil, et en avalai quelques gorgées qui me réchauffèrent instantanément. Mon corps se détendit peu à peu, comme si un voile sécurisant l'avait recouvert entièrement ; le nœud que j'avais au ventre avait disparu, laissant place à une certaine euphorie. Après avoir bu un peu de café, je me servis des œufs brouillés, du bacon et des haricots blancs ; rien de tel pour être en forme une bonne partie de la journée. Manger avec toute l'équipe était particulièrement grisant, et me rappela les fois où maman les invitait à la maison. Hildegarde était la seule que je ne connaissais pas avant cet été : c'était elle qui avait pris la place de ma mère dans l'équipe. Elle avait été particulièrement gentille avec moi et m'avait rassurée quant au fait que je la remplace durant le premier match.
Arriva enfin l'heure de partir. N'ayant pas l'âge requis, il avait été décidé que j'utiliserais un portoloin avec Ninon, tandis que toute l'équipe transplanerait jusqu'au stade. Ils emportèrent nos bagages, alors que la batteuse et moi-même nous dirigions vers le lieu de rendez-vous du portoloin. Ils l'avaient placé à l'entrée de la forêt à quelque quinze minutes de marche du cottage.
- Ça va, tu n'es pas trop stressée ? me demanda-t-elle.
- Un peu, si. Je ressens beaucoup de pression, car si l'on rate le match par ma faute, vous ne pourrez pas jouer la suite.
- Tu ne devrais pas t'inquiéter pour ça ; te faire venir était une décision de toute l'équipe, parce que l'on sait à quel point tu es douée ; tu tiens ça de ta mère. Et puis, tu n'es pas seule, nous sommes une équipe ; sache que tu pourras compter sur Alain et moi pour te protéger des cognards.
- Je sais que je peux compter sur vous. Je n'ai jamais assisté à des matchs de cette envergure, mais je sais au moins que votre jeu est excellent. Ce qui m'effraie le plus, c'est d'imaginer manquer une des figures que nous avons apprises avec Mathilde et Joséphine. Si une des trois poursuiveuses échoue, c'est toute l'équipe qui en pâtira.
- Tu devrais avoir un peu plus confiance en toi et en tes coéquipières. Tu es forte Dora, tu t'en sortiras, je n'ai aucun doute là-dessus.
Cela en faisait au moins une d'entre nous qui ne doutait pas de moi. Cette petite marche à travers la forêt m'avait totalement réveillée, l'air froid s'insinuant dans chaque pore de ma peau. Nous arrivâmes enfin à l'orée du bois, où le soleil éclairait les grandes plaines sauvages des Highlands. Le spectacle était tout à fait magnifique. J'avais été un peu déçue de ne pas avoir pu visiter les environs, et je me promis de revenir avec Fred pour en découvrir chaque recoin.
Une petite famille écossaise se tenait debout juste à côté de ce qui ressemblait à un vieux béret décrépi. Les parents étaient accompagnés par deux adorables enfants, des jumeaux me semblait-il, un garçon et une fille, aux cheveux roux flamboyant. Ils nous saluèrent, tout en attrapant le vieux morceau de tissu ; l'heure du départ approchait, et les enfants semblaient aussi surexcités que moi.
- A bheil thu a 'dol gu cupa na cruinne ? nous demanda le père de famille.
- Yeah, mar thusa, tha mi creidsinn, lui répondis-je.
- Tu parles le gaëlique ? me demanda Ninon.
- Je dirais plus que je le baragouine. Monsieur nous demandait si nous nous rendions à la coupe du monde, et je lui ai répondu que oui, comme eux.
- Cò às a tha thu (D'où venez-vous) ? demanda la maman.
- Na Frainge (De France), lui dis-je. Tha mi duilich airson mo stràc (Je suis désolée pour mon accent).
- Gun duilgheadas, tha sin foirfe (Aucun problème, c'est parfait), me répondit-elle en me souriant.
- Pour quelqu'un qui baragouine, je trouve que tu te débrouilles pas mal ! ajouta Ninon.
- Je ne dis que des banalités. J'ai révisé mes bases avant de venir, mais je ne tiendrais pas une conversation de trois heures.
Ninon se pencha vers les deux enfants, et tendit à chacun un petit pin's avec un écusson. En regardant de plus près, je reconnus celui de notre équipe. Les deux petits roux nous regardaient émerveillés, et se tournèrent vers leur maman, comme pour lui demander la permission d'accepter leur présent ; elle acquiesça, ravie pour eux.
- Tu nous fais de la pub ? lui demandai-je.
- J'en ai toujours quelques-uns dans les poches, avant un match. Et puis, quelques supporters en plus, ça ne fait jamais de mal, ajouta-t-elle en me faisant un clin d'œil.
L'heure du voyage arriva enfin. Nous attrapâmes toutes les deux le béret, avec la petite famille, et celui-ci s'envola rapidement, nous faisant atterrir sur un terrain verdoyant, quelques minutes plus tard.
- An dòchas gun urrainn dhut tighinn a choimhead oirnn (j'espère que vous pourrez venir nous voir), leur dis-je alors que nous nous dirigions vers un petit homme vêtu d'un costume trois pièces en poils d'alpaga.
Les enfants sautillèrent de joie à ma question, tandis que les parents acquiescaient en me montrant plusieurs pass. Nous les saluâmes alors qu'un homme vêtu d'un kilt se dirigeait vers eux, leur tendant un plan de ce qui semblait être un immense camping.
- Mesdames, bien le bonjour. Avez-vous vos billets ? nous demanda le premier homme qui prit le portoloin et le jeta dans une boîte où se trouvaient tout un tas d'objets qui ressemblaient tous à des déchets dégoûtants. Avec cela, il était certain qu'aucun moldu ne voudrait y toucher.
- Nous avons un peu mieux que ça, ajouta Ninon, en lui tendant nos pass de joueuses.
- Oh ! Bien, bien, le reste de l'équipe est déjà arrivé, nous expliqua-t-il en nous tendant un plan sur lequel il avait marqué l'emplacement des équipes. Vous n'aurez qu'à contourner le camping par la droite, et après quelques minutes, vous y serez.
Nous le saluâmes, avant de nous diriger vers le lieu qu'il nous avait indiqué sur la carte.
Il y avait bien plus de monde que ne l'aurais cru. Peut-être y avait-il des gens qui assistaient à absolument tous les matchs, même les moins importants. Le camping était rempli de personnes de toutes nationalités, et chacun affichait fièrement ses couleurs. Au loin, j'aperçus le reste de l'équipe, ainsi que Tante Agathe, qui me faisait de grands gestes pour me signaler sa présence. Elle courut vers moi et me prit dans ses bras, avant de se reculer et de me regarder sous tous les angles, de la tête aux pieds.
- Tata, arrête ! Tout le monde nous regarde, lui lançai-je d'un air gêné.
- Oh, arrête un peu. J'ai quand même bien le droit d'être contente de te voir. Tu as beaucoup grandi, je trouve, et tu es plus… musclée, non ?
- Peut-être, je ne sais pas. Je n'ai pas vraiment eu le temps de me regarder. Est-ce que tu restes avec nous ? lui demandai-je.
- Oui, mais quelques heures seulement. Je dois rapporter tes affaires, avant de rejoindre Marie et les autres.
- Alors ils ont tous bien reçu leur pass ? lui demandai-je inquiète.
- Oui, ne t'en fais pas. J'ai tout organisé avec Arthur, donc concentre toi sur le match, et rien d'autre.
J'acquiesçai alors que nous nous dirigions vers une grande tente qui, apparemment, nous était destinée. Tout autour, nous pouvions voir les installations de toutes les autres équipes qui participaient à la coupe du monde. L'organisation de cet évènement avait dû prendre un temps fou. Je passai le seuil de la tente et atterris dans ce qui ressemblait à une maison si confortable que nous n'avions même pas l'impression d'être dans un camping. Mathilde me désigna le coin où elle avait déposé mes affaires : mon sac, mon balai et mon équipement. Elle avait fait faire un uniforme complet à ma taille, aux couleurs de l'équipe et je trépignais d'impatience de le porter.
- Les Weasley s'attendent à ce que tu les rejoignes dans les tribunes durant le match, donc il est prévu que tu dormes chez eux ce soir, si le match ne s'éternise pas.
- Mais je n'ai aucune affaire avec moi ! Mes livres de cours et mon uniforme sont à la maison.
- Ne t'inquiète pas, j'ai déjà tout fait envoyer chez les Weasley. Tu n'auras qu'à transvaser les affaires que tu souhaites garder dans ce petit sac que je t'ai apporté.
- Et tu n'aurais pas voulu que je passe quelques jours avec toi ? Ça fait un mois que l'on ne s'est pas vues, lui dis-je d'un air désolé.
- Je ne serai presque jamais à la maison ; nous avons beaucoup de patients en admission, ces derniers temps, et nous sommes trop peu à l'hôpital. Je préfère que tu profites de tes amis. Fais comme Marie ; elle a passé un mois chez les Diggory et vient me rendre visite de temps à autre.
- Je n'aime pas te laisser toute seule, lui avouai-je.
- Ne t'en fais pas pour ça, je ne serai pas seule. Concentre-toi sur ton match, et ne pense à rien d'autre. Je veux que le monde entier sache de quoi tu es capable, me dit-elle en posant sa main sur mon épaule.
- Et ils vont être subjugués ; je pense que c'est un spectacle qu'ils ne sont pas près d'oublier, ajouta Joséphine.
Toute l'équipe était en train de se changer dans la tente. Le match débuterait dans deux heures, et plus l'échéance approchait, plus mon cœur battait la chamade. J'enfilai ma tenue de sport et bus quelques gorgées de ma potion d'antistress. Tante Agathe m'embrassa une dernière fois et sortit rejoindre les autres qui ne devaient plus tarder à arriver.
- En route, mauvaise troupe ! J'ai vu les Japonais commencer à s'entraîner. On va aller courir un peu, histoire de se chauffer, et faire quelques étirements, nous expliqua la capitaine de l'équipe.
Tout le monde acquiesça sans broncher ; Mathilde était une meneuse hors pair, personne ne contredisait jamais ses directives. Nous quittâmes tous la tente, nous dirigeant à l'écart sur un immense coin de verdure totalement désert. L'équipe au complet commençait à courir tandis qu'Hildegarde nous regardait, en prenant des notes. Nous avions mis au point plusieurs stratégies qui comprenaient différentes figures, avec chacune un chiffre pour les différencier. Il ne resterait alors plus à notre capitaine qu'à nous les indiquer sur le terrain, au moment voulu.
- Lancelot, tu commences les étirements. Tu es la seule suffisamment souple pour pouvoir enchaîner certaines figures, et je ne veux pas que tu nous lâches en plein milieu du match, parce que tu te seras déchiré quelque chose, m'ordonna Mathilde.
- Bien, Patron, lui dis-je, motivée plus que jamais.
- Et ne m'appelle pas Patron, ajouta-t-elle exaspérée.
Tout le monde se mit à rire en même temps. Patron, c'était le surnom que toute l'équipe lui avait attribué, pour son côté autoritaire, mais Mathilde détestait ça ou, tout du moins, c'est ce qu'elle voulait nous faire croire. Tandis que les autres continuaient à courir, je me mis à l'écart pour débuter les étirements ; l'échauffement avait toujours fait partie intégrale de notre entraînement, et c'est grâce à eux que j'arrivais à développer mon potentiel à son maximum. J'enchainai salto, pont, et flip flap qui étaient bien plus faciles à pratiquer à même le sol, mais qui me permettaient d'étirer chacune de mes articulations de façon optimale.
Le temps passait, et je commençais à appréhender le début du match. En hommage à ma mère, l'équipe tout entière avait décidé de faire une sorte de cérémonie d'ouverture qui marquerait les esprits. Avec le spectacle que nous avions prévu, personne n'oublierait le premier match de l'équipe de France, c'était certain. J'espérai seulement ne pas me ridiculiser et tout faire rater.
Il était enfin l'heure de se mettre en tenue ; sous la tente, un silence pesant avait gagné toute l'équipe, alors que nous nous habillions. Hildegarde aussi s'était mise en tenue ; elle participerait à l'hommage avec toute la troupe. À quelques minutes de l'entrée sur le terrain, nous nous rassemblâmes en cercle au milieu de la tente, avant de joindre nos poings en son centre. Un psaume en latin fut récité par Cybèle. Nous l'écoutâmes les yeux fermés, buvant chacune de ses paroles. C'était la coutume : une incantation pour nous porter chance, à chaque début de match.
Nous nous avançâmes tous vers le terrain, sous les cris des supporters installés dans les tribunes. Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait autant de monde pour assister aux matchs du premier tour. Il y avait déjà trois équipes éliminées. L'Angleterre avait perdu contre la Transylvanie, le Pays de Galles face à l'Ouganda et, pour finir, l'Écosse avait essuyé une lourde défaite face au Luxembourg. À présent, nous devions tout faire pour que l'équipe adverse perde face à la France.
Ludo Verpey appela l'équipe du Japon à se présenter sur le terrain. Débuta alors un spectacle époustouflant : des feux d'artifices retentirent de toute part, représentant un immense dragon rouge particulièrement réaliste qui donnait l'impression de traverser toutes les tribunes. Si les jumeaux Weasley assistaient à ce spectacle dans les gradins, j'imaginais sans mal leur réaction ; toutes ces couleurs, et ces sons rendaient tout cela féerique.
L'introduction de l'équipe asiatique terminée, sous les applaudissements furieux du public, le commentateur de la coupe du monde nous appela.
Mon violon à la main, je grimpai sur mon balai, tout comme le reste de l'équipe, juste avant de nous envoler vers le milieu du terrain. Je sentis la pression monter, et mon cœur battre la chamade, tandis que nous nous mettions en place pour le début de notre introduction. Debout sur mon balai, je me mis au centre du cercle formé par le reste de l'équipe ; ils étaient tous debout, droits comme des piquets, le poing droit plaqué contre le cœur et le bras gauche placé derrière le dos. Je commençais à jouer quelques notes de violon, lorsque, par magie, une immense image animée de ma mère dans sa tenue de quidditch bleu clair, blanche et dorée, apparut au milieu des tribunes. Après quelques secondes de mélodie, l'équipe se mit à entonner un chant patriotique, mais pas n'importe lequel ; un chant écrit par notre peuple face à l'oppression des sangs purs.
" Sorciers, Sorcières, venez et entendez-nous !
Écoutez la complainte de notre nation.
Voyez ces noirs corbeaux qui cherchent la domination,
Regardez-les face à nos lois qu'ils bafouent.
Notre Prêtresse guide nos pas vers cet assaillant.
Alors rejoignez-nous, peuple du monde.
Joignez-vous au combat des vaillants,
Pour vaincre cette menace aux idées d'outre-tombe.
Tremblez, ennemis de la France,
Rois ivres de sang pur et d'orgueil.
Le peuple souverain s'avance,
Oppresseurs descendez au cercueil."
Le chant dura encore quelques minutes, et pas un son ne retentit dans les tribunes tandis que je continuais d'accompagner le reste de mon équipe au violon. Les larmes obstruaient mon champ de vision alors que mon regard s'arrêtait sur le portrait de ma mère qui souriait à tous. Elle était comme ça, souriante, peu importe ce qu'elle devait surmonter, et j'espérais au fond de moi qu'elle pouvait me voir en ce jour, debout sur mon balai, en train de jouer pour elle et pour tout notre peuple effrayé et soumis par l'oppression. Le chant s'arrêta enfin, et je retirai mon violon de l'épaule, soulagée que tout se soit passé comme prévu.
Après un silence de quelques secondes, qui me sembla durer une éternité, des sifflements, des cris de soutien et des applaudissements retentirent des tribunes. Je ne m'attendais pas à un tel engouement. Hildegarde s'approcha de moi, et vint me prendre mon violon et mon archet, juste avant de poser son front contre le mien.
- C'est à toi de jouer maintenant, Dora. Et tu vas briller comme ta mère, alors rends-nous fiers de toi ! me dit-elle pour m'encourager.
Elle salua le reste de l'équipe et le public, alors que Ludo Verpey prenait à nouveau la parole.
Pour la toute première fois, nous avons l'honneur d'avoir une jeune recrue dans notre équipe. Il ne s'agit de nulle autre que Miss Pandore Lancelot, fille de la très grande et regrettée Théodora Visconti, que nous avons perdue l'année dernière. Elle remplacera exceptionnellement Miss Hildegarde Lafarge pour ce seul et unique match, alors je compte sur vous pour l'encourager comme il se doit !
Une ovation retentit dans les gradins lorsque les deux équipes se mirent en place sur le terrain. J'attachai mes cheveux en une queue haute, avant d'ajuster mes lunettes de protection. Assise sur mon balai entre Mathilde et Joséphine, j'étais fin prête, attendant le coup de sifflet qui annoncerait le début du match…
