J'avais dit qu'un jour "I WILL BE BACK"

C'est avec beaucoup de nostalgie que je suis revenue sur Fanfiction après des années d'abandon (qu'est-ce que vous voulez ? On fini tous par devenir les Adultes qu'on détestait tant…). J'ai relu un peu mes « œuvres » et bordel qu'est-ce que ça pique les yeux ! Le bilan de toussa c'est que je me suis quand même bien fait rire (je suis bon public et encore plus avec mes propres conneries XD)

Du coup ça m'a donné envie de réécrire. Et le confinement (=ennuie mortel) oblige, j'ai fini par m'y remettre.

J'ai fait un one shot un peu plus sérieux que ce que j'avais l'habitude de servir avant (=on devient plus sage avec l'âge).

Nouveauté, j'ai écrit sur Harry Potter (=on change pas sa passion) et RE re nouveauté j'ai fait un yaoi (=on change pas sa passion bis).

Alors que la guerre est terminée depuis des années et que la vie a repris son cours paisiblement, Harry possède tout ce qu'il souhaite. Une femme parfaite, des enfants parfaits, le job de ses rêves…Et pourtant, il ne peut s'empêcher de ressentir cet énorme vide qui le grignote jour après jour. Son existence n'a plus aucun sens et seul son pire ennemi est capable de lui redonner une direction. Après tout, leur haine réciproque fait partie des choses immuables dans son existence. Ou pas.

Enjoy !


Après s'être retourné pour la quinzième fois, tentant vainement de trouver la position idéale pour s'endormir, Harry capitula et se redressa doucement.

Il ne voulait pas réveiller Ginny qui dormait paisiblement à ses côtés, bien que cela faisait des années qu'elle ne se réveillait plus, inquiète lors de ses insomnies.

Cela faisait bien longtemps qu'elle ne l'accompagnait plus pour affronter la nuit, qu'elle luttait vaillamment contre le sommeil pour le soutenir, qu'elle passait des heures à parler, pourfendant de son rire mélodieux la pénombre qui le dévorait.

Il la regarda tendrement, allongée et paisible. Il imaginait sa poitrine se soulever doucement sous le rythme de sa respiration.

Les années l'avaient épargnée, elle n'avait jamais été aussi sublime que maintenant. Son visage était toujours aussi fin, sa peau toujours aussi douce, ses cheveux toujours aussi soyeux. Mais le temps lui avait aussi apporté l'assurance et la confiance. Il adorait son sourire et son air malicieux, son énergie pétillante, sa petite ride du lion qui se creusait au fils du temps et l'entendre répéter avec fierté qu'elle n'était pas une Gryffondor pour rien.

Alors que lui… Le temps n'avait pas eu de pitié. Il avait creusé ses joues, blanchi ses cheveux, grignoté tout doucement de l'intérieur. Il ne s'en était pas rendu compte tout de suite, trop pris dans la spirale de la gloire et de la reconnaissance. Mais petit à petit, la gloire se ternissant, la reconnaissance se banalisant, il prit conscience de ce mal viscéral qui le consumait.

D'aussi loin qu'il se souvienne, la Gloire n'avait jamais été aussi lourde à porter que les 3 premières années suivant la fin de la guerre. Il ne pouvait pas sortir sans être reconnu, chaque déplacement se transformait en cauchemars. Les gens criaient son nom, l'accostaient, le prenaient dans les bras dans le seul but de le remercier chaleureusement pour son combat, pour son sacrifice, pour les avoir tous sauvé, pour avoir réalisé la prophétie.

Cela avait été un cauchemar pour Ginny aussi, bien qu'elle ne se soit jamais plainte. Sa renommée était devenue son fardeau. Elle n'était pas Ginny, la femme forte et courageuse, mais Ginny la femme de l'Elu. Et bien souvent cela lui avait joué des tours.

Il avait voulu rompre à l'époque. Pas parce qu'il ne l'aimait pas, bien au contraire. Il ne supportait pas de la voir subir ça, elle ne le méritait pas.

Il voulait l'épargner et combattre ce fléau seul. Mais elle avait levé les yeux au ciel en soupirant : "Arrête de vouloir te battre seul, Harry, tu ne veux rien imposer aux autres mais un combat ne se gagne jamais seul". Il ne l'avait jamais autant aimé que ce jour-là.

Mais le temps fit son œuvre et petit à petit la vie avait repris son cours. L'Elu appartenait au passé, à un temps lointain où la guerre faisait rage. Le monde avait fini par s'habituer à la Paix.

Il n'était plus que Harry, juste Harry.

Et puis quoi ? Il était heureux, il avait une femme sublime, des enfants sublimes, le job de ses rêves... Il était heureux. Il l'était ?

Harry soupira et sortit doucement du lit pour se passer un peu d'eau sur le visage. Il se dirigea sans difficulté jusque dans la salle de bain, connaissant le chemin par cœur pour l'avoir fait tellement de fois dans le noir. Il regarda son reflet dans le miroir mais il ne voyait qu'elle : il avait toujours sa cicatrice, cette odieuse et terrible balafre qui lui rappelait sans vergogne qu'il avait un jour été quelqu'un d'important, qu'il avait sauvé le monde. Et qui n'était plus rien aujourd'hui.

Lui qui avait aspiré à une vie paisible se faisait aspirer comme un trou noir par celle-ci.

Sa gloire s'était ternie et n'était plus qu'un simple chapitre dans le cours de son existence devenue vide de sens.

Il regarda l'heure, il était 4h passé. Harry s'habilla sans faire de bruit puis se dirigea dans la cuisine pour tenter d'échapper à ses démons. Il voulait les laisser derrière son miroir, avec ce reflet, cet autre lui qu'il n'acceptait pas.

N'ayant rien pu avaler, et en sachant pertinemment qu'il ne se rendormirai plus, il fit apparaitre un petit cheval en origami et le posa délicatement au milieu de la table. Puis il transplanna jusqu'au ministère de la Magie, où il était devenu Aurore, comme il l'avait toujours voulu.

Ses pas raisonnaient froidement sur le carrelage jusque son bureau. Si la solitude devait avoir un son, ce serait celui-ci, se surprit-il à penser. Il essaya de chasser cette idée de son esprit d'un coup de tête puis fini par s'installer à son bureau.

Evidemment, tout était vide et silencieux à cette heure, la Vie reprendrait ses droits avec le levé du jour. D'ici quelques heures on entendrait les gens respirer, rires, crier, former une gigantesque vague humaine partant et venant ci et là, les notes voleraient dans tous les sens. Pour l'instant tout n'était que pénombre et solitude.

Ron arriverait dans son bureau aux alentours de 9h, certainement avec un paquet de choco-grenouille, puisque son équipe préférée avait remporté le match de Quidditch hier. C'était devenu une sorte de petit rituel entre eux, et pour être honnête il aimait bien. Ça avait un côté rassurant, réconfortant, de voir que certaines choses ne changeaient pas. Qu'elles pouvaient rester gravées dans le marbre.

Alors qu'il se perdait dans sa nostalgie, il fut surpris d'entendre des bruits de pas. Il regarda l'horrible horloge au-dessus de lui qui affichait paresseusement 4h45 et leva un sourcil. Personne ne vient jamais aussi tôt. A part lui bien sûr. Et alors que le silence enrobait l'espace de sa présence, les pas se firent entendre de nouveau. Plus près cette fois.

Sur le qui-vive, Harry se redressa rapidement, baguette tendue, et s'approcha doucement de la porte, guettant le moindre mouvement.

Les pas se rapprochaient à un rythme régulier, alors que le cœur d'Harry s'accélérait à chaque seconde. Il s'apprêtait combattre, persuadé que cet intru ne venait que pour lui, persuadé que les pas s'arrêteraient devant sa porte. Mais ces derniers continuèrent leur chemin vers une destination inconnue.

Surpris et curieux, Harry sorti de son bureau pour voir qui pouvait bien venir à une heure pareille. Il resta sans voix : Au fond du couloir, un homme, assez grand, habillé élégamment et avec un goût raffiné, les cheveux d'un blond presque blanc plaqué sur son crâne se tenait là, droit et tout aussi surpris.

- Potter. Salua Draco avec hésitation

- Malfoy, répondit vaguement Harry

Un temps passa, court mais lourd, dans un silence de plomb, chacun ne sachant que faire, avant que Draco se remette en mouvement pour rejoindre son bureau sans aucune autre cérémonie.

L'ironie du destin avait voulu que le Serpentard se retrouve dans la même unité, au même étage, dans le même couloir et à seulement deux portes de Harry. Ce dernier avait bien pesté d'ailleurs lorsqu'il vit un jour le blond débarquer. Pensant d'abord à une blague, il comprit finalement avec mauvaise grâce qu'il devrait faire avec.

Bien qu'ils n'étaient plus à l'époque de l'école, il n'avait jamais réussi à se défaire de la haine viscérale qu'il lui vouait. Et bien qu'il ne se jetaient plus des insultes, voire des sorts dès que l'occasion se présentait, leur relation restait électrique. Harry tentait de garder un semblant de professionnalisme mais il savait pertinemment que le mépris débordait par tous ses pores lorsqu'il s'adressait à lui et il lui rendait bien.

Quelque part, leur relation faisait aussi partie des choses immuables dans sa vie. Harry et Draco, ennemie jusqu'à la fin des temps et jusqu'à ce que la mort les sépare.

A l'arrivée de Malfoy, Harry avait été piqué à vif et cela avait été l'objet de toutes ses discussions pendant des jours et des jours. Il n'avait que cesse de répéter à quel point il était inconscient de faire rentrer le fils d'un Mangemort au Ministère, qu'on avait vu aux époques sombres les ravages de la corruption. Jusqu'à ce que Ginny, sa douce et belle Ginny, finisse par s'énerver. Une des rares fois où il la vit en colère et une des plus grandes leçons de sa vie.

Elle n'avait pas crié, non. Elle était même d'un calme ravageant et avait coupé court à toutes les fabulations d'Harry en lui rappelant que la Guerre était finie, que plus personne ne suivrait de si tôt un nouveau despote, fanatique de magie noire et assoiffé de mort. Et alors qu'il se confrontait à cette réalité pleine de bon sens, elle lui rappela que Draco avait largement payé sa dette en n'étant "que" le fils d'un Mangemort et qu'il avait dû prouver et travailler deux fois plus que n'importe qui d'autre pour obtenir son poste. Pour quémander la confiance aux autres qui accordaient trop d'importance à l'étiquette qu'on lui avait collé sur le dos. Pour retrouver la dignité que la réputation de son père avait attachée.

"Tout ne peut pas être aussi simple que pour toi Harry" avait-elle achevé. C'était cruel, mais plein de vérité. Et la vérité, parfois, ça fait mal.

Il s'était rendu compte ce jour là qu'elle avait toujours était plus forte que lui. Elle savait voir au delà des choses, elle avait su aller de l'avant, pardonner. Alors que lui restait prisonnier de son passé, incapable d'accepter les choses et d'avancer. L'avenir était quelque chose de flou, le changement lui faisait peur plus que tout.

Qu'à cela ne tienne, il n'avait plus jamais reparlé de Draco depuis. Se satisfaisant simplement d'entretenir une petite gueguerre silencieuse entre eux et de passer quelques après-midi avec Ron à se répéter à quel point la Fouine n'avait pas sa place ici.

Intrigué par la présence de son ennemi juré de si bonne heure, Harry ne pu s'empêcher d'aller voir ce qu'il pouvait bien tramer. Cela restait assez louche et il était presque sûr que sa propre présence avait certainement compromis les plans de Draco, quel qu'ils puissent être.

Alors qu'il était à mi-chemin, il entendit un mouvement, puis la voix du Blond retentir calmement

- Si tu t'imagines que ma présence a un quelconque rapport avec toi, désolé de te décevoir mais ce n'est pas le cas. Tout ne tourne pas autour de toi, Potter.

Harry s'arrêta net, interdit. Puis, porté par une profonde mauvaise foi, repris son chemin et passa la tête par l'entrebâillement de la porte.

- Et si tu pensais que j'en avais réellement quelque chose à faire, Malfoy, désolé de te décevoir, mais ce n'était pas le cas non plus. En fait j'allais au bout du couloir. Euh... faire un truc. Tout ne tourne pas non plus autour de toi !

- Au bout du couloir il n'y a que le bureau de Flinn et un placard à balais...

Harry se tue bêtement. Draco esquissa un sourire. Quelques secondes passèrent puis, contre tout attente, il éclata de rire. Un rire franc, mélodieux, qui raisonna et rebondi entre les murs du bureau, comme s'il était resté trop longtemps enfermé dans ce corps trop petit pour lui et heureux de pouvoir enfin prendre sa liberté.

Harry était stupéfait. C'était la première fois qu'il le voyait rire. D'ailleurs est-ce qu'un Malfoy n'avait jamais ri avant ? C'était un vrai rire sincère, pas son espèce de ricanement sarcastique et supérieur qu'il avait coutume de sortir dès que l'occasion se présentait. Même quand elle ne se présentait pas d'ailleurs.

Il ne reconnaissait pas l'homme assis en face de lui, secoué par ce rire incontrôlable, avec ce visage si lumineux, si fin, et ces yeux, habituellement si triste, animé par la vie.

Cela ne pouvait pas être Draco. Normalement il aurait trouvé une réplique cinglante et ils en seraient restés là, chacun déplorant la stupidité de l'autre dans son coin.

Soudain, comme si Draco réalisait lui-même l'étrangeté de la situation, il s'arrêta net avant de retrouver presque instantanément le flegme dont il avait toujours su faire preuve.

Il se racla la gorge avant de reprendre ce qu'il était en train de faire.

- J'ai beaucoup de travail, alors si tu peux éviter de me faire perdre mon temps, je t'en serai très reconnaissant Potter.

Harry le regarda quelque seconde. Son visage s'était renfermé de nouveau, l'éclat avait disparu, mais ses joues avaient gardé pour témoin une teinte légèrement rosée.

La journée se déroula calmement. Ron, réglé comme une horloge, arriva presque comme prévu autour de 9h avec des Chocogrenouilles. Harry s'abstint de lui raconter l'épisode de ce matin. Bien qu'ils ne s'étaient jamais rien caché, il avait comme le sentiment qu'il fallait le garder pour lui. Il n'était pas non plus certain de ce qu'il avait cru voir.

Ils avaient débriefé du match de long, en large et en travers, Ron revivant les actions les plus mémorables comme s'il y était. Jusqu'à ce qu'une note volante débarque dans le bureau et s'écrase avec violence entre ses deux yeux, les sommant de faire moins de bruit. Harry et lui reconnurent instinctivement l'écriture ronde et fine du mémo.

- Mais quel crétin ce Malfoy. Toujours à faire le malin avec ses airs supérieurs. Je suis sûr qu'il est en train de se bidonner tout seul dans son bureau, trop fière de lui.

Harry sourit mais ne se montra pas aussi virulent envers le blond qu'à l'accoutumée, ce qui eut mérite d'étonner son ami. Alors, pour éviter que la discussion diverge sur un sujet trop étrange, Harry repris leur discussion là où ils l'avaient laissé, s'offusquant du manque de réaction de l'arbitre au moment où le batteur a envoyé le cognard volontairement sur le mollet de l'attrapeur. L'incident fut clos et Ron oublia totalement le manque d'enthousiasme de son ami lors de leur session de médisance quotidienne envers le blond.

Ce soir-là, il n'en parla pas à Ginny non plus mais resta perdu dans ses pensées, écoutant vaguement le fils de la discussion. Il était surpris de cet homme qu'il semblait voir pour la première fois, si différent de ce qu'il connaissait.

Cela devait être son imagination. Il était très tôt et il avait déjà enchainé plusieurs nuits blanches. La situation était certainement normale mais il l'avait perçu différemment. La fatigue et le manque de discernement avaient sournoisement travestie la réalité.

Draco restait Draco. Il n'était pas cet homme qu'il avait cru apercevoir. Il était son ennemi : hautain, froid et fermé.

Cette nuit-là ne fit pas exception de ses précédentes nuits. Son insomnie ne lui laissa pas de répit une fois de plus. Harry le savait et avait l'habitude. Elle finissait toujours par passer lorsque sa fatigue arrivait à reprendre le dessus sur ses démons. Elle était sa compagne un temps puis repartait, sûrement pour tourmenter quelqu'un d'autre, ailleurs.

Il ne chercha pas à lutter cette nuit là non plus, attendant sagement une heure plus ou moins descente pour sortir du lit et se rentre au Ministère.

Lorsqu'il se leva, il trouva un cerf en origami sur la table à manger qui courrait majestueusement, accompagné d'un petit mot tendre conclu par une citation de Voltaire : "Le temps adoucit tout". Cela arriva à lui arracher un sourire. Elle le savait.

Elle était à la fois son roc et sa plus grande faiblesse. Elle lui rappelait par sa force à quel point il était faible. Elle était le feu de la vie et l'eau qui éteignait l'incendie qui le consumait.

Il regarda le cerf trottiner quelque instant encore, avant de transplanner au Ministère.

Il était 3h30. C'était de pire en pire. Si ça continuait comme ça il aurait bientôt meilleur compte de dormir au bureau. Force est de constater qu'il était moins en proie à ses angoisses nocturnes en étant sur son lieu de travail. En prenant la direction de son bureau, il ne pu s'empêcher de remarquer la lumière qui filtrait sous la porte qui se trouvait à deux portes de la sienne. Cela ne signifiait qu'une chose : Malfoy était là lui aussi.

Harry réfléchi vaguement à un plan pour aller voir ce qui se passait. Il ne pouvait décemment pas rentrer dans le bureau de son pire ennemi sans une raison valable. Pas cette fois. Son regard se posa sur le mémo de la veille, froissé sans ménagement et lancé avec dédain dans sa poubelle. La voilà son excuse.

Gargarisé par ce qui s'emblait être une idée formidable, il se dirigea plein d'assurance dans le bureau du blond, ouvrit la porte avec énergie - Malfoy ne sursauta pas, il avait dû l'entendre arriver depuis le fond de la pièce - puis il balança le mémo de toutes ses forces sur lui.

C'était puéril et ridicule mais ça restait une raison acceptable pour débouler dans un bureau. Mémo qui s'écrasa lamentablement à mi-parcours dans un bruit mou mais raisonnant d'échec.

Ce n'était pas pour rien qu'Harry était attrapeur et pas batteur.

Cela ne décrocha pas la moindre réaction de Draco qui se contenta de déclarer calmement sans lever les yeux de sa paperasse

- Je suis impressionné Potter. Une réaction en moins de 24h sur un mémo, tu t'es surpassé pour une fois.

Chaque syllabe le percuta pile en plein milieu de son égo, chacune plus douloureuse que l'autre, jusqu'à ce que la phrase complète qu'elle formait finisse par le clouer sur place bêtement avec un regard ahuri.

Il sentait cette haine brûlant s'emparer de tous ses muscles, de toute son âme. Il bouillonnait de rage tandis que Draco restait totalement impassible, comme si Harry n'était jamais intervenu.

C'était bien Draco, ce petit con qu'il avait connu à Poudlard, arrogant et hautain. Il avait bien devant lui ce Serpentard fanfaron et méprisant qui n'avait cesse de se donner en spectacle pour montrer sa supériorité à qui voulait bien le voir.

Pris d'une colère folle qui semblait avoir mis une éternité à arriver, Harry ramassa le mémo au sol puis abattit ses deux mains à plat sur le bureau du blond dans un claquement sonore. Cela valu enfin une réaction de son homologue qui daigna enfin lever la tête de ses notes, toujours avec ce flegme qui lui était propre.

- Ne t'avise plus à envoyer des mémo Malfoy, si tu as quelque chose à me dire, viens me le dire en face sinon... siffla-t-il

- Sinon quoi, Potter ?

Harry paru déconcerté un instant, ne s'attendant pas à une réponse. Il pensait avoir le contrôle de la situation et tout lui échappait. Comprenant qu'il reprenait le dessus, Draco s'avança en plantant ses yeux gris et mystérieux dans les yeux émeraudes animés par la flamme de la colère qui lui faisaient face. Il répéta :

- Sinon quoi ? Tu as tellement été mis dans un écrin de velours comme une pierre précieuse, qu'aujourd'hui tu n'es plus capable de supporter la moindre critique ? La moindre remarque te démolie ? Tu pensais que l'Elu resterait intouchable, qu'il resterait au chaud, drapé dans sa gloire, que l'adoration du peuple te servirait de bouclier jusqu'à la fin des temps ? Grandis un peu, Potter.

Il ne détestait pas Draco, il détestait tout ce qu'il représentait. C'était lui les vestiges de sa période dorée. Il avait continué à vivre alors que le passé avait tout englouti dans les méandres de l'oubli. Il était revenu du passé avec arrogance, comme d'habitude, pour venir le narguer chaque jour et lui rappeler que maintenant que le célèbre Harry Potter avait sauvé le monde, il n'était plus qu'un nom dans un livre d'histoire.

- Tu n'as aucune idée de ce que j'ai dû sacrifier ! Le fardeau que j'ai dû porter en étant si jeune. Tout le monde comptait sur moi, tout le monde fondait ses espoirs pour que je les sauve. Des gens sont morts pour moi et...

De nouveau, Draco lui coupa la parole sèchement, effritant encore plus ce semblant de dignité qui formait sa carapace

- Oh je t'en prie Potter ! Encore une fois tu n'y es pas. Tu crois que tout à un rapport avec toi. Tu es d'un égocentrisme sans limites. C'est ce que j'ai toujours détesté chez toi. Tu ne peux pas t'empêcher de tout ramener à toi d'une façon ou d'une autre tous les malheurs de la terre. Les gens ne mourraient pas pour toi, Potter, mais pour l'idée que tu représentais. Tu étais juste le symbole de la Paix que tout le monde souhaitait. Ça aurait pu être toi, ou même moi, ça n'aurait rien changé !

Et alors que Harry s'apprêtait à répliquer, Draco se leva de toute sa hauteur sans quitter son regard et explosa :

- Ta vie a été dure Potter ? La lumière des projecteurs te brûlait trop ? Arrête, tu adorais être le centre de tout, et maintenant que tu n'es plus l'idole, tu te rends compte à quel point tu es creux et vide ! Ce n'est pas de cette époque qui a fait toute ta gloire dont tu souffres, mais tu as le mal du présent ! Qu'est-ce que tu as fait de toutes tes années ? ça a été dur ? Je t'en prie, tu n'as pas été dans la maison la moins respectée de tous, tu étais le petit Prodige de Gryffondor, tu as contribué à lustrer la renommé d'une maison au blason largement doré ! Tu n'as pas vécu dans l'ombre, l'ombre d'un père qui vivait dans la crainte, qui a tracé un chemin de souffrance et de sang que tu as été obligé de suivre. Tu as dû prouver à chaque moment de ton existence que tu n'étais pas cette personne que tout le monde t'accusait d'être ? Tu as dû passer ton temps à démolir des murs de préjugés qui se dressaient devant toi ? Tu as dû affronter le regard et le mépris de tous ? C'était dur Potter ? Vraiment ?

Et sur ses paroles, il sorti de son bureau laissant un Harry médusé. Abasourdi et surpris par les reproches de Draco, il se rendit compte que quelques minutes après que le jeune blond n'était plus dans la pièce depuis un moment. Il ne le revit pas de la journée, ni de la semaine.

Les mots qu'il avait prononcé avaient tourné en rond dans la tête d'Harry et commençaient à s'insinuer dans sa chaire, dans ses muscles, dans son sang. Comme un poison qui se rependait sournoisement dans son corps sans qu'il ne puisse plus rien contrôler.

Le pire dans tout ça, c'est qu'il avait raison. Et le plus dur était de l'admettre. Il allait mettre un temps certain à digérer, il s'était pris une sacrée claque et il n'avait que su répondre.

Parce qu'il n'y avait rien à répondre. Tout était vrai. Du début jusqu'à la fin. Et c'était difficile à admettre que peut-être son pire ennemi avait pu souffrir de tout ça, peut-être même plus que lui, et que c'était absolument, incontestablement et irrémédiablement légitime.

De tous les sorts qu'ils avaient pu se jeter, c'était finalement ses reproches qui lui avaient fait le plus mal. Dans cette époque sombre, il n'y avait pas eu que Son histoire, celle de l'Elu, mais plein d'histoire, plein de souffrance, de personnes abandonnées sur les pavés du chaos et dont Draco faisait lui aussi parti.

Paradoxalement, ses paroles l'avaient totalement soulagé, comme s'il avait pu mettre des mots sur les maux. Il avait toujours la rage, il en voulait toujours à la terre entière, mais d'une façon plus humble, si cela était possible.

Harry ne retrouva pas le sommeil aussi rapidement qu'il avait imaginé. Il ne cessait de revivre encore et encore la même scène dans sa tête. Celle où Draco se dresse de toute sa hauteur pour lui asséner ses vérités une par une. Puis il se rappelait son rire, tellement léger qu'il avait laissé échapper par mégarde. Et irrémédiablement, au-delà des paroles, au-delà du rire, c'était Draco tout entier, dans toute sa complexité qui avait envahi l'esprit d'Harry.

Plusieurs fois il s'était rendu au bureau à l'aube, et il s'était surpris une ou deux fois à être déçu de ne pas voir la lumière filtrer sous la porte du bureau de Draco. Ce stupide Draco, il avait compris que s'il ne voulait pas croiser Harry, il y avait des créneaux à éviter. Et lui aussi, tellement stupide à apporter autant d'importance à ce crétin. Pourtant il n'arrivait pas à se le sortir de la tête.

Ce jour-là, c'était l'effervescence au boulot, cela faisait des années que tout le monde ne s'était pas mis sur le pied de guerre comme ça. Depuis la chute du Seigneur des Ténèbres et la capture de tous ses partisans, il fallait avouer que le travail était devenu assez monotone.

C'était un petit évènement : deux sorciers étrangers, de ressortissant Irlandais d'après la note reçu plus tôt ce matin, avaient trop arrosé un match de Quidditch - malgré une défaite relativement écrasante de leur équipe - et s'étaient amusés à animer toutes les statues qu'ils croisaient sur leur route. Cela avait diverti les moldus, pensant d'abord à un spectacle de rue sophistiqué et particulièrement étonnant, jusqu'à ce qu'une des deux statues de Lion du Trafalgar Square quitte son socle pour courser sur quelques mètres un groupe de jeunes.

Harry eu une petite pensée pour son ancien professeur de Métamorphose, le professeur McGonagall, qui aurait sûrement salué la qualité de cette magie si elle n'avait pas largement transgressé le côté réprimandable des règles de la Sorcellerie.

Le coup allait être difficilement rattrapable et il fallait agir vite. Avec toute la technologie développée par les moldus ces dernières années, les images avaient été largement relayées sur ce qu'ils appelaient la toile. C'était fascinant cette capacité d'adaptation et l'ingéniosité dont faisaient preuve les moldus pour toujours plus améliorer leur quotidien. En à peine une décennie, leur monde avait tellement bougé qu'il était de plus en plus difficile pour leur service de suivre ce genre d'incident. En comparaison, cela faisait des siècles que l'univers des sorciers était resté figé dans un âge ancien. Tout y était facile, il n'y avait pas de raison de changer les choses. On continuait à s'éclairer à la bougie et à s'envoyer des hiboux.

Perdu dans ses réflexions, il fallut qu'il entende la porte de son bureau claquer dans un bruit sec pour comprendre que quelqu'un était entré. La lumière avait subrepticement varié et l'atmosphère était devenu électriques. Pas la peine de lever les yeux pour comprendre qui était là. Son cœur s'accéléra, son souffle se fit court mais hors de question de laisser paraître quoi que ce soit, hors de question de lever les yeux vers lui.

- Tu t'es trompé de bureau, Malfoy ?

- Et si c'était nous, qui nous étions trompés ?

Les mots restèrent suspendu un moment dans l'air. Trop ambiguë. Harry ne comprenait pas où il voulait en venir, ce qu'il entendait par là. Il sentait ce regard gris et froid le transpercer comme s'il cherchait à sonder son âme. Il attendait une réponse, une réaction. Prudemment, Harry leva les yeux vers lui :

- Ce sont des excuses Malfoy ?

Ce dernier lâcha un ricanement. Le fameux ricanement. Même Harry avait compris à quel point sa question était stupide avant même d'avoir fini sa phrase. Mais trop tard, il était lancé. Il aurait pu continuer dans sa mauvaise grâce mais quelque chose avait changé depuis leur dernier échange.

Draco restait immobile à l'entrée du bureau, alors qu'on pouvait entendre le monde battre son plein dans les couloirs. La situation avait quelque chose de profondément malaisant pour Harry qui avait de plus en plus de mal à rester calme. L'air commençait à lui manquer, il n'y en avait pas assez pour deux dans une aussi petite pièce, le silence devenait oppressant. Et ce regard, froid, profond, sans faille... C'était insupportable. Il fallait qu'il sorte de là, qu'il retrouve son oxygène et vite. Harry se leva, prétextant qu'il devait absolument vérifier l'avancement de la situation, les Irlandais étaient en garde à vue et il fallait qu'il aille les voir. Mais Draco ne bougea pas d'un iota. Il continuait à se dresser devant la porte en empêchant l'accès à la poignée.

Harry tenta de s'approcher, intimidant, et tendit la main vers l'endroit où la poignée était censée se trouver, en s'imaginant que le blond finirait par s'écarter.

Sauf qu'il ne le fit pas. Il resta là et ils étaient à présent très près. Trop près. Harry se figea alors que Draco ne semblait pas le moins du monde perturbé par le contexte. En fait, c'était ça le problème. Il ne savait absolument pas ce qu'il pensait.

- Laisse-moi passer Malfoy, siffla-t-il

- Non. Répondit l'intéressé, le défiant du regard

Ils restèrent là à se sonder mutuellement, déterminé l'un comme l'autre à ne pas faire le moindre mouvement. Petit à petit le monde autour d'eux rétrécissait jusqu'à ce que plus aucun bruit, plus aucune lumière ne filtre entre eux.

Il n'existait plus qu'eux et l'infime espace les séparant, qui semblait lui aussi vouloir disparaitre, ne supportant pas l'électricité grandissante entre les deux protagonistes.

Harry pouvait sentir le souffle tiède de Draco, régulier et calme, et se doutait qu'il était de même pour lui. Il s'efforça de maitriser sa propre respiration pour ne rien laisser paraître, mais le fait est qu'il ne savait absolument pas comment réagir.

L'idée de sortir sa baguette et de lui balancer un sort l'avait séduit un moment mais il savait que le moindre geste serait l'élément déclencheur. Toutes leurs vieilles confrontations avaient démontré que statistiquement, Harry était plus vif que son adversaire. Mais aujourd'hui il y avait quelque chose dans son regard de totalement déstabilisant.

Puis il pensa aux bonnes vieilles méthodes traditionnelles et envisagea plutôt de lui en coller une en travers le visage. Plus rapide, plus efficace. Il se surprit alors à analyser plus en détail le visage qui lui faisait face, si près de lui, en premier lieu pour repérer l'endroit qui serait plus satisfaisant de cogner.

C'était comme s'il le voyait pour la première fois. Sa peau semblait douce et lisse, bien que marquée par les épreuves de la vie laissant pour seul témoignage des rides ci et là. Ses traits étaient fins et élégants. Mais c'est lorsqu'il revint à ses yeux que Harry réalisa.

Il voyait au fond de ces grands yeux gris et brillants le Draco de sa première année. Le Draco arrogant et maladroit lui tendant la main, lui proposant sur un plateau d'argent son amitié et sa loyauté.

Et si c'était eux, qui s'étaient trompés ?

Et si c'était lui, qui s'était trompé ?

Harry se refit le film en entier. Et s'il l'avait accepté, ce jour là, son amitié ?

Cet homme se tenait devant lui sans flancher. Pourtant il n'était que dévastation, une âme béante, ballotée sans ménagement dans les tourments de l'existence. Il était comme lui, il n'avait jamais réussi à trouver sa place dans ces évènements qui l'avaient totalement dépassés et engloutis.

Puis il se mis à penser à Ginny, la belle et flamboyante Ginny. Celle qui avait toujours été à ses côtés, celle qui l'avait toujours soutenu. Mais aussi celle qui n'a jamais pu comprendre ce qu'il avait traversé, qui n'avait jamais su dompter ses démons intérieurs... Alors que Draco comprenait, il avait été façonné par le même chao que lui.

Plus il réfléchissait, plus il se penchait sur le blond, rapprochant dangereusement ses lèvres aux siennes, sans vraiment s'en rendre compte.

Draco ne bougea pas, il continuait à lui faire face. Quelque chose passa dans son regard mais il ne fuit pas. Et alors que leurs lèvres finirent par se toucher, Harry aperçu le rose monter à ses fossettes.

Ses lèvres étaient douces et pétillantes, contrairement à celle de Ginny, qui avaient un léger goût sucré. Harry sentait à présent un délicat mélange de parfum et de savon. Un mélange poivré, plein de caractère et pourtant subtil et discret. C'était du Malfoy tout craché. Aucun autre parfum n'aurait pu lui convenir autant que celui-là.

Harry remonta doucement ses mains, sans faire de gestes brusques, de peur de briser cet instant si étrange et si rassurant, et vint délicatement encadrer le visage de Draco. Passant sa main dans ses cheveux soyeux, il décoiffa gentiment cette coupe si ordonnée et nette.

Tout cela était totalement délirant, ça n'avait aucun sens, ça ne suivait aucune logique et Harry s'attendait à se prendre une claque d'un moment à l'autre.

Claque qui finalement n'arriva pas. Et à son plus grand étonnement, Draco répondit à son baisé. Il le senti se détendre et à accentuer légèrement la pression entre leurs lèvres.

Harry revint à lui d'un coup et recula brusquement de Draco en prenant conscience de ce qui se passait. Il sentait le rouge monter violement à son visage et le sang battre dans chaque pore de sa peau. Il était mort de honte. Il ne s'était jamais senti aussi ridicule, aussi petit, aussi vulnérable. Devant Malfoy en plus. Il risqua un regard en sa direction.

Ce dernier était toujours dressé au même endroit, mais il avait totalement perdu son assurance. Le rose avait teinté son visage de marbre et ressortait particulièrement sur ses joues. Il avait la main posé sur ses lèvres comme s'il cherchait une explication rationnelle à ce qui venait de se passer, perplexe.

Ils restèrent comme ça un moment. Harry était totalement incapable d'esquisser le moindre geste, ni d'articuler le moindre mot. Il n'avait pas la force ni suffisamment d'air pour ça. Il subissait totalement la situation qu'il avait lui-même créé. C'était un talent inné chez lui, de se mettre dans des situations pareilles.

- Je...

- Il vaut peut-être mieux que tu sortes, Draco

Harry avait répondu instinctivement, coupant net la parole à son homologue sans vraiment réfléchir à ses mots. Il était trop impatient d'en finir avec ce malaise qui prenait maintenant plus de place que nécessaire. Il n'avait même pas fait attention qu'il avait prononcé pour la première fois son prénom.

Mais au lieu de sortir sagement, Draco s'avança d'un pas. D'un grand pas même, pensa Harry qui recula d'un pas équivalent. Puis d'un autre, et encore un autre, jusqu'à ce qu'il bute sur le rebord de son bureau. Dans un autre contexte, ça aurait pu être drôle. Il n'arrivait pas à définir ce qui se tramer dans la tête de son pire ennemi. Était-il en colère ? Ou au contraire satisfait de le voir perdre pied ?

Harry ferma les yeux comme un enfant terrifié. Il était pitoyable.

Il sentit une main se poser timidement sur le bas de sa cicatrice qui resta un instant sans bouger pour jauger sa réaction. Comme il n'y en eu pas, la main retraça doucement la forme de sa cicatrice puis continua à monter pour aller se perdre dans le champ de batail qu'étaient ses cheveux, bientôt rejoint par une seconde main dans sa nuque.

Les yeux toujours fermés, il sentait l'espace se réduire de nouveau autour de lui. Puis il huma d'abord le parfum poivré et familier avant de sentir des lèvres se poser sur les siennes. Des lèvres qui souriaient semblait-il.

Mais cette fois c'était différent, ce n'est pas lui qui avait le contrôle sur les évènements. Les mains glissèrent le long de son dos lui arrachant malgré lui des frissons qui remontèrent jusque dans sa nuque. La pression sur sa bouche s'intensifia, ne se contentant déjà plus ce simple contact. Et alors que Harry baissait les derniers remparts de sa garde, une langue délicate lui caressa l'interstice entre des deux lèvres pour demander poliment l'accès.

Harry hésita, sûrement pour la forme, mais il n'arrivait plus à réfléchir. Tout était surréaliste et confus. Il n'avait plus le contrôle et se surpris à accepter sa requête, un peu trop facilement.

Il s'attendait à quelque chose de brusque, de violent, porté par des années de haine réciproque, et c'était l'exacte contraire. C'était extraordinairement hésitant, doux et sensuel. La langue de Draco explorait timidement l'intérieur de sa bouche et cherchait à jouer avec la sienne.

L'homme s'approcha encore plus contre lui, réduisant à zéro le peu d'espace qu'il subsistait entre eux. Ce geste le fit légèrement basculer en arrière mais Harry refusa catégoriquement de se montrer plus vulnérable qu'il ne l'était certainement déjà. Il prit un peu plus appui sur ses pieds pour ne pas se retrouver totalement affalé sur le bureau et à sa merci, puis passa ses mains dans le dos du blond pour retrouver un peu plus d'équilibre. De nouveau, il sentit les lèvres de Malfoy esquisser un sourire contre les siennes.

- Mal installé Potter ? Souffla-t-il

Était-ce de la provocation ? De l'arrogance ? Pourtant son ton avait changé. Sa remarque sonnait plus comme quelque chose de complice, avec une forme d'amusement sincère dissimulée entre les mots. Il n'avait plus aucun repaire. Il ne reconnaissait en rien Draco dans cet homme qui l'embrassait avec une tendresse inexplicable.

Il lui ressemblait physiquement, mais aucun de ses gestes, aucune de ses intentions, ne ressemblait à celui qu'il croyait pourtant connaitre par cœur. Une à une, toutes ses convictions tombaient comme un château de cartes.

Harry tenta de se redresser mais Draco fut plus rapide. Il le poussa contre le bureau pour le plaquer, une main de chaque côté de lui. On y était. Il avait clairement imposé sa dominance, sa supériorité. Draco se trouvait au-dessus de lui et le regardait intensément. Le sang battait dans les oreilles d'Harry mais il ne savait pas si c'était la peur, la rage ou même, il avait honte de se l'avouer, l'excitation.

Les yeux de Draco étaient étincelants, ses joues étaient flamboyantes, et lui aussi, semblait manquer d'air. Force est de constater que finalement, il ne maitrisait pas plus les évènements que lui.

Puis Draco plongea sa tête dans son cou, cherchant à embrasser la moindre parcelle de sa peau, toujours avec une tendresse insoupçonnée et une lenteur qui était aussi sensuelle que cruelle. Cet élan surprit Harry qui lâcha malgré lui un soupir qui lui semblait si étrange, si lointain qu'il n'avait même pas le sentiment que cela venait de lui. Il perdit totalement prise lorsque Draco entreprit de lécher, toujours avec lenteur, la fine peau de son cou. Il voulut avancer une main contre le torse de Draco qui l'intercepta sans même la voir et la replaqua contre le bois sec du bureau. Mais bien décidé à ne pas se laisser faire, il passa son autre main, celle qui réussit à échapper à sa vigilance, sous la chemise du blond.

Il avait besoin de ce contact pour se raccrocher à la réalité et à ne pas totalement sombrer dans la folie. Il le sentit soupirer sous sa paume. Sa peau était bouillonnante. Il remonta sa main sous sa chemise jusqu'à atteindre la joue de Draco et accompagna son visage vers lui pour se saisir de nouveau de ses lèvres, et de sa langue, un peu trop joueuse à son goût. Et pendant cette diversion, Harry parvint à libérer sa deuxième main et entreprit de déboutonner la chemise de Draco qui ne montra plus aucune résistance à ses initiatives. Les baisés se faisaient plus intenses, plus profonds. Tous les deux avaient succombé aux derniers vestiges de leur principes et avaient totalement perdu la notion du temps.

Mais cette énergie envoutante pris fin lorsqu'on frappa à la porte et que quelqu'un tenta d'entrer. Instinctivement, Harry saisit sa baguette qu'il dirigea en direction de la porte pour l'empêcher de s'ouvrir, en reprenant ses esprits. Il reprenait plus ou moins conscience d'où il était, avec qui il était et surtout, jusqu'où il avait été prêt à aller il y a quelques secondes à peine.

- Tout va bien Harry ? Demanda une voix étouffée dans le brouhaha du couloir.

Harry regarda Draco. Il était de dos et s'appliquait à reboutonner sa chemise et à plaquer de nouveau ses cheveux sur sa tête, dans une sublime démonstration de maîtrise de soit. Il se sentait ridicule, assis là, la chemise à moitié ouverte, les lunettes de travers et le souffle totalement coupé.

- Oui ! Oui... Je... J'arrive !

Draco se retourna pour faire face à Harry, son teint était de nouveau normal, sa respiration posée. Et rien ne laissait transparaitre cet épisode qui semblait à présent aussi lointain qu'un rêve. Il était redevenu le Draco qu'il avait toujours connu. Croisant son regard, il s'approcha de nouveau d'Harry avec un sourire en coin avant de lui chuchoter à l'oreille :

- On a peur, Potter ?

Puis il transplanna. Harry resta là quelque seconde encore.

- Tu aimerais bien…