Stan Gravel n'avait pas envie d'aller à l'école. Voilà quelque chose qui n'était pas habituel pour un garçon de son âge. En effet, il allait avoir onze ans aujourd'hui et cela signifiait qu'il allait enfin pouvoir intégrer la plus prestigieuse des écoles de magie : l'académie de Beauxbâtons.
N'importe quel garçon, n'importe quelle fille de son âge et ceux plus jeunes encore n'attendaient que cela. Oui, mais voilà, Stan Gravel avait peur. Durant les dix premières années de sa vie, il n'avait jamais quitté le domaine familial. Il ne connaissait du monde, pour ainsi dire, rien. Ho, bien sûr il avait lu des livres, il avait été instruit par ses parents, mais jamais, Ô grand jamais, il n'avait franchi les grandes grilles vertes du domaine familial, mis à part pour quelques courses sur la Place Cachée bien entendu. Pas d'amis autres que son père, sa mère et sa grande sœur cependant.
Et voilà que, soudainement, à cause d'une seule et stupide onzième bougie, il allait devoir tout quitter de ce qu'il connaissait pour des lieux inconnus et des personnes qui lui seraient tout aussi étrangères…
Bon, c'était vrai qu'une partie de lui était aussi excitée par l'idée d'échapper à l'autorité parentale, mais l'autre partie de lui, beaucoup plus grosse, avait peur. Peur de l'inconnu, et peur de décevoir ses parents. Il y avait la perspective de rencontrer de nouvelles personnes qui enthousiasmait beaucoup le cœur de Stan, et ce, malgré les mises en garde de ses parents. D'après eux, il fallait se méfier de tout et de tous. Surtout des filles ! Oui, mais voilà… Stan allait avoir onze ans et il n'avait toujours pas d'amis…
Il se leva de son lit avec une pointe d'appréhension. Il était déjà dix heures. S'il ne sortait pas maintenant, c'est sa mère qui viendrait le chercher et ça, il n'en avait pas envie du tout. Il l'imaginait déjà débarquer comme une furie, faisant claquer la porte et le forçant au fou rire à coup de Rictusempras abusif. Non, non, non, plutôt sortir le premier que de subir cela à nouveau.
Tandis qu'il descendait tranquillement les marches de l'escalier, il perçut, de plus en plus fort, le murmure des conversations excitées de son père, sa mère et sa grande sœur. La lettre devait être arrivée. Stan fit une pause devant le seuil de la cuisine, prit une grande inspiration puis pénétra dans la pièce.
« - Coucou papa ! Coucou maman ! Coucou Ô vénérable sœur !
- Mon chéri ! – aussitôt Charlie Gravel se jeta sur son fils – Elle est arrivée ! La lettre ! Ça y est, c'est officiel ! Il va falloir te pré-pa-rer ! Acheter un chaudron, et puis les livres, la robe, la baguette ! Ho ! Et puis aussi un anim… - La femme aux cheveux noirs comme l'ébène parlait pour elle-même plus que pour son fils à présent. -
- Fiston, j'ai tellement hâte que tu fasses la cérémonie des affinités ! – Jack Gravel regardait son fils avec des yeux humides de fierté anticipée – Tu ne sais pas quelle joie cela me fait rien que d'y penser…
- Si, si, papa. Je le sais TRÈS bien… - Stan se dégagea tant bien que mal des bras de sa mère avant de regarder la lettre laisser ouverte sur la table – Alors c'est ça ?
- Tu as l'air déçu, Stany ? – Lise était sans doute la seule qui avait su percevoir le malaise qui habitait son frère depuis le début des grandes vacances. – Tu n'as pas hâte de commencer la magie ? Tu es inquiet de ne pas réussir le test d'affiliation ? À moins que tu n'aies peur de ne pas te faire d'amis ! »
Sur ces mots, la grande sœur de Stan fit rouler sa broche en forme d'Aconit qui tenait sa cape prune brodée de motifs floraux aux épaules, tout en arborant un sourire provocateur.
« - Ce n'est pas du test que j'ai peur ! Ni de ne pas avoir d'amis ! De toute façon, papa et maman ont dit que je n'en avais pas besoin. C'est de votre réaction à vous trois que j'ai peur ! Et si jamais je ne rejoignais pas la maison des Marbouelins comme toi, papa et maman ? Alors, que diriez-vous ! »
Le jeune garçon fit une moue boudeuse. Il y eut un moment de silence qu'il ne sut pas interpréter. Aurait-il dû ne rien dire ? Il savait que c'était un sujet sensible. Dans une famille de Marbouelin depuis plus de vingt générations, il était impensable qu'il puisse être autre chose que cela, et pourtant il était inquiet.
Ce n'était pas qu'il ne voulait pas l'être totalement... Mais il n'était pas sûr non plus de vouloir l'être vraiment. L'idée d'être forcé de marcher dans les pas de ces ancêtres, de devoir consacrer sa vie entière à des activités de botaniques et d'autres études barbantes ne l'enchantait absolument pas. À quoi bon ? Lui, ce dont il avait envie, c'était de rester allonger quelque part dans le jardin de sa maison et de jouer de la guitare. Tout seul. C'est pour cela que la famille des Tirelairs l'attirait beaucoup plus même s'il n'avait jamais osé en parler chez lui.
Décidément, plus il y réfléchissait, plus il semblait sûr de lui. Peu importe sa filiation finalement, tant qu'il ne devenait pas un Marbouelin. Après tout, il n'avait aucune affection particulière pour la terre et les plantes, et puis cette filière était bien connue pour ses sorciers étranges, voire totalement malveillants, comme Luc Millefeuille, l'empoisonneur de Moldus. Et en plus, s'il devenait un Marbouelin, il était certain de ne jamais échapper à son destin familial. Or, à onze ans, il n'était pas certain de vouloir passer sa vie reclus dans une grande propriété de Normandie à étudier dieu seul sait quelle plante étrange et inconnue !
Et puis sa sœur avait raison… Saurait-il se faire des amis ? Lui qui n'en avait jamais vraiment eu… De toute façon, ce n'était pas nécessaire. Ses parents le lui avaient bien expliqué. Pourtant, une partie de lui se plaisait à s'imaginer un compagnon de jeu, un camarade de chambre. Quelqu'un avec qui discuter de l'école, de sa famille, de musique. Un ami oui… Stan secoua vivement la tête, revenant dans l'instant présent, cherchant dans les yeux de son entourage des réponses à ses questions.
« - Stanyslas Nicolas Jack Gravel, tu rejoindras les Marbouelins, ça me semble évident. – son père posa une main ferme sur son épaule – Tu es un Gravel, tu as ça dans le sang ! Et puis réfléchis ! Personne ne fait de meilleures pousses que toi. Tu vas avoir onze ans aujourd'hui et tu sais déjà comment entretenir des mandragores ! Je t'assure. Et n'écoute pas ta sœur, tu n'as pas besoin d'amis. Si tu le décides, je suis sûr que personne ne viendra te déranger. Tu vas te concentrer sur tes études, je te le promets et à ton retour nous pourrons poursuivre ce petit projet dont je t'ai parlé, tu te souviens ? Allez… Tout va bien se passer, tu verras... »
Stan ne répondit rien, de toute façon il savait qu'on n'écouterait pas son avis alors à quoi bon. Il marmonna quelques mots concernant sa toilette, les préparations à venir et les achats nécessaires avant de s'éclipser au plus vite dans sa chambre, et tant pis pour le petit déjeuner.
Trente minutes plus tard, il était prêt. Lise préférait rester profiter des jardins et Jack devait travailler à la maison. C'est donc accompagné seulement de sa maman que Stan se rendit à coup de poudre de Cheminette à la Place Caché, dissimulée au cœur même de Paris, le seul lieu qu'il n'ait jamais visité en dehors de sa maison. Bien sûr, comme à chaque fois qu'ils y venaient, la mère et le fils débutèrent leur promenade par un arrêt chez Abringer, d'autant plus qu'aujourd'hui était l'anniversaire de Stan.
Ce dernier engouffra donc un opéra sans aucune dignité ni délicatesse sous le regard tendre de sa maman. Au fur et à mesure que la journée avançait, l'impatience de cette vie nouvelle à venir prenait petit à petit le pas sur toutes les appréhensions qui s'étaient accumulées ces deux derniers mois. La première boutique qu'ils firent fut évidemment celle de Cosme Acajor, la boutique de baguette.
Les étalages étaient magnifiques. Entretenus avec soin et ordonnés à la perfection, ils brillaient de plusieurs milliers de triangles dorés. Par un curieux hasard, leur entrée correspondit exactement avec la sortie d'une demi-douzaine de famille si bien qu'ils se retrouvèrent les seuls clients encore présents en moins d'une minute. Immédiatement, le garçon qui tenait la boutique, un grand échalas aussi pâle que la lune, vint à leur rencontre.
« - Vous venez pour une baguette, je présume ?
- Tout à fait, c'est pour mon garçon, il vient d'avoir onze et va donc entrer à l'école cette année.
- Ho je vois. Vous devez être vous-même une Moldue si je ne me trompe ?
- Excusez-moi ?
- Et bien, j'imagine que c'est votre première fois ici. Ho, ne soyez pas étonnée, je le sais, car les enfants de sorciers viennent généralement chercher leur baguette pour leurs dix ans, vous savez ce que c'est les enfants, ils veulent s'amuser, s'exercer avant le grand…
- Je m'appelle Charlie Gravel, petit sorcier d'opérette ! Et sachez que nous sommes sorciers depuis plus de vingt générations. Si mon fils n'a pas de baguette c'est que nous estimons que cette dernière se mérite et que…
- Maman…
- Attends chéri, je termine avec le Monsieur. Je disais, c'est que nous estimons que cette dernière se mérite et qu'il n'y a rien de bon à pratiquer sans être préparé. Ce n'est pas en agitant un bout de bois, aussi magique soit-il, dans tous les sens durant une année entière, au petit bonheur la chance, que les sorciers de demain vont se former ! La pratique se mérite et se prépare par un travail rigoureux !
- Charl… Grav… Ho ! Je… Je, je, je… Je vous prie de m'excuser !
- Maintenant, allez-vous-en ! Nous connaissons la maison et la procédure, nous allons nous débrouiller ! Nous laisserons l'argent sur le comptoir, alors déguerpissez! »
Le jeune vendeur parut hésiter un instant, mais se ravisa rapidement sous le regard vert et furieux de Madame Gravel. Il battit en retraite sans plus un mot.
« - Était-ce vraiment nécessaire, maman… ?
- Non ça ne l'était pas chéri, mais il fallait bien que quelqu'un le remette à sa place. Ce jeune garçon faisait des suppositions complètement absurdes. Et tu sais comme je ne supporte pas les suppositions hasardeuses !
- Ce n'était pas si bête ce qu'il…
- Si ça l'était ! Il peut y avoir mille raisons pour lesquelles des parents n'auraient pas acheté une baguette à leur enfant avant ses onze ans. Par exemple par manque d'argent, ou encore par…
- Ça va, ça va, maman ! J'ai compris, j'ai compris ! Bon… Je peux choisir ma baguette ?
- Tu te souviens de ce que je t'ai dit ?
- Oui maman… Je dois faire en sorte de choisir une baguette épaisse et solide. Elle doit être sombre, mais pas trop et contenir si possible un morceau de troll, ou d'Augurey, ou de noirs des Hébrides, ou de…
- Bien, bien, bien ! Et… ?
- Et surtout, je dois être certain de sa fidélité.
- Bien ! Allez, va ! »
Sur ces mots, Stan s'avança prudemment entre les allées de baguettes. Il regardait ici et là les images imprimées sur les emballages soigneusement alignés. Il y avait tellement de baguettes ici qu'il y avait de quoi en avoir le tournis. Le jeune garçon tourna à droite, puis à gauche, puis encore à droite. Il finit par se perdre dans ce dédale sans fin. Surtout, il ne sentait rien…
Finalement arrivé au plus profond de la boutique, il tomba à sa grande surprise sur une jeune fille qui, s'imagina-t-il, devait être du même âge que lui. Elle ne l'avait ni vu, ni entendu arriver. Il ne comptait pas l'aborder. C'était inutile, il devait se concentrer sur sa tâche, comme lui avait demandé sa maman. De toute façon il était trop timide. Et puis ses parents n'apprécieraient pas qu'il cherche dès le premier jour à se distraire. Cependant… Il regarda la jeune fille de dos. Elle avait l'air elle-même plongée dans ses pensées.
Stan vint doucement se positionner à sa hauteur et, sans plus lui prêter d'attention apparente, tourna son regard dans la même direction que le sien. Là, sur le rebord des étagères, deux baguettes étaient posées devant deux vieux étuis poussiéreux. Les deux étaient faites d'un bois blanc magnifique, du lierre et du chêne d'après leurs boites respectives. Les entrelacs qui couraient sur la moitié des baguettes ne semblaient ne former aucun motif cohérent. Stan concentra son attention davantage. Quelque chose clochait avec ces baguettes, mais ils n'arrivaient à mettre le doigt sur ce qui n'allait pas.
Soudain, il fut interrompu par une petite voix flûtée.
« - Hey, je te préviens, je les ai vus la première ! – c'était la jeune fille à sa droite –
- De toute façon, il y en a deux…
- Et bien quoi qu'il en soit, c'est moi qui choisirais celle que je veux !
- Pff ! Qui a dit que je voulais une de celles-là d'abord ? Les Motifs sont trop bizarres.
- Ils me plaisent à moi !
- Et puis elles n'ont pas l'air très puissantes.
- Quoi ?! »
La jeune fille le regarda avec des yeux grands comme deux lunes argentées, elle allait ajouter quelque chose, mais sembla se raviser
« – Si tu le dis. Moi elles me plaisent, mais je n'arrive pas à me décider…
- Ok…
- En plus, ça m'embête de les séparer… Elles sont si jolies toutes les deux ensemble !
- Hm hm… »
Les parents de Stan lui avaient appris comment encourager une conversation à se terminer tout un conservant un minimum de politesse.
« - Si je pouvais… Je prendrais les deux !
- Oui, oui, bien sûr…
- Hein ? T'es un rigolo toi ! C'est impossible d'avoir deux baguettes ! »
La jeune fille éclata d'un rire léger et cristallin. Stan ne put s'empêcher de la regarder à nouveau. Sa peau caramel contrastait avec la couleur ivoire des baguettes qu'elle convoitait. Cette pensée lui échappa.
« - Ces baguettes ne sont du tout pas assorties à ton teint. »
À peine avait-il prononcé ses mots qu'il se rendit compte de sa bêtise. Non seulement il avait relancé la conversation, mais en plus il l'avait fait en se montrant très offensant ! Il déglutit aussitôt avec difficulté et esquissa un geste de protection tout en fermant les yeux lorsque la jeune fille s'empara prestement de l'une des deux baguettes.
« -Dés…
- Ha ha ha ! Alors toi tu ne mâches pas tes mots ! Mais tu dis n'importe quoi ! Regarde… - Stan entrouvrit les yeux. La jeune fille tenait la baguette collée contre sa propre joue – Tu vois ? Je suis sûr que le contraste est trop joli ! Allez ! Dis ! T'en penses quoi ? Hein ? Honnêtement ?
- C'est… Oui, c'est bien.
- Je le savais ! – Elle reposa aussitôt la baguette à sa place et se remit à marmonner, son pouce au bord de ses lèvres. Stan la regarda à nouveau. Il ressentit le besoin de s'excuser –
- Je… Je suis désolé, je ne voulais pas te vexer.
- Tu ne m'as pas vexée. – elle le regarda du coin de l'œil avant de se raviser – Enfin si, un petit peu quand même… C'était franchement maladroit. Mais tu peux te faire pardonner si tu veux…
- Et comment ? – Stan avait répondu sans réfléchir –
- C'est simple, tu n'as qu'à prendre celle-là !
- Quoi ?!
- Si tu veux te faire pardonner, prends celle-là et moi je prendrais l'autre, comme ça, elles pourront se retrouver à l'école ! Tu vas aller à Beauxbâtons non ?
-Heu… Oui…
- Alors voilà ! Tu voulais te faire pardonner non ?
- Oui…
- Alors vas-y, prend celle-là ! »
La jeune fille lui fourra la baguette en lierre dans les mains tandis qu'elle gardait l'autre dans la sienne. Stan voulut protester, mais pour une raison qui lui échappait il était totalement subjugué par sa camarade. Il resserra donc sans réfléchir son poing autour de la baguette blanche. Il était trop tard pour la lâcher. Mais tout allait bien, songea Stan, ce n'est pas comme s'il pouvait prendre la première baguette venue. Il fallait que celle-ci l'accepte, et il était certain que ça n'arriverait pas avec celle-là. Il ferma les yeux de soulagement à cette idée. Comme la jeune fille le regardait avec impatience, dans l'attente de son essai, il s'exécuta avec mollesse. Priant intérieurement pour que rien n'arrive, il agita sa baguette paresseusement prononça la formule suivante :
« -Nox Expendo ! »
Aussitôt, des vagues d'obscurités immenses jaillirent de sa baguette et allèrent s'écraser, s'infiltrer et se propager à travers les étagères et les allées voisines. En moins de quelques secondes, ils furent plongés dans le noir total ! Il y eut un cri de surprise, puis le bruit d'une baguette qui tombe au sol.
« - Wow ! Mais qu'est-ce que t'as fait ?! C'est dément ! Ça m'a fait trop peur. J'en ai lâché ma baguette ! On n'y voit plus rien ! Dis, tu peux rallumer ? »
Stan était aussi abasourdi que sa camarade qui s'était agrippée à l'une des manches de sa robe de sorcier. Il faisait si noir qu'il n'arrivait même pas à voir sa main devant ses yeux. Il ne se fit donc pas prier pour incanter un nouveau sort.
« - Lumos ! »
Mais rien ne se produisit.
« - Lumos ! Lumos ! Lumos ! »
Toujours rien.
« - Heu…
- Tu n'arrives pas à lancer Lumos après ce que tu as fait ?! T'es vraiment un drôle d'animal toi !
- Hey !
- Désolé. Bon… On ferait mieux de chercher la sortie non ?
- … Ok. Me lâche pas. »
Ils se mirent donc en route à tâtons, Stan devant, la main sur l'une des étagères, avançant aussi prudemment que possible. Parfois ils rencontraient une intersection. Comme ni l'un ni l'autre ne se souvenait du chemin vers la sortie, ils tentaient un peu hasard. Parfois à droite, parfois à gauche. Au bout d'une bonne dizaine de minutes, ils finirent par entendre une voix, c'était celle de Charlie Gravel qui jurait comme un charretier. Immédiatement, les deux enfants appelèrent à l'aide. Finalement, une lueur apparut au détour d'un couloir. Elle arrivait ! Le spectacle était surréel. De la pointe de la baguette de Madame Gravel, des gerbes lumineuses épaisses tentaient tant bien que mal de déchirer l'obscurité environnante sans grand succès. Elles semblaient se faire constamment dévorer par les ténèbres. Elle parvint cependant à rejoindre les deux enfants.
« - Mais enfin que faites-vous tout au fond du magasin ?! Et qui a fait ça ?! Et qui est-ce d'abord ?! »
Les enfants regardèrent autour d'eux. Effectivement, ils étaient très exactement revenus à leur point de départ ! La nouvelle connaissance de Stan poussa un petit cri de satisfaction avant de ramasser la baguette qui lui avait échappé auparavant. Elle se recula cependant rapidement derrière Stan lorsqu'elle croisa le regard furieux de Madame Gravel. Dans un élan de courage qu'il ne se connaissait pas, ce dernier répondit sans hésiter.
« - C'est moi maman. J'ai essayé une baguette en lançant un sort de Nox Expendo. Je suis désolé, je ne pensais pas que ça marcherait… Ha. Et je ne sais pas qui est cette fille. On va aller à la même école, voilà tout. »
Charlie observa son fils un moment d'un air pensif.
« - Et peut-on savoir pourquoi tu n'as pas annulé ton sort ?
- Je… Je n'y suis pas arrivé.
- Sornette ! Allez, annule-le ! »
Incapable de désobéir à sa mère, Stan leva sa baguette avec concentration et lança un « Lumos Expendo » sonore. Aussitôt, des gerbes de lumières jaillirent de sa baguette partant ronger toutes les ténèbres qu'il avait convoquées plus tôt.
« - Je ne comprends pas… Je suis désolé, maman, pour le noir et tout ça…
- Pourquoi es-tu désolé ? C'était un excellent sortilège ! Très puissant ! Je suis très fière de toi, mon fils ! Montre-moi ta baguette ! »
Stan hésita. La baguette en question ne correspondait en rien aux critères de qualité que sa maman lui avait enseignée. Mais bon. Qu'y pouvait-il ? C'est donc avec une certaine appréhension qu'il tendit la baguette de lierre à sa mère. Cette dernière la saisit rapidement, affichant tout d'abord une mine contrariée. Elle l'étudia sous tous les angles avant de demander :
« - Et qu'y a-t-il dedans ? »
Aussitôt, Stan jeta un regard sur la boite qui se trouvait toujours à sa place, sur le bord de l'étagère, dans son dos.
« - Heu… la corde vocale d'une selkis…
- Bon sang… - Madame Gravel se frotta l'arête du nez tout en soufflant aussi fort qu'elle le put. Elle secoua la tête, regarda son fils, puis la baguette, puis à nouveau son fils. –
- On peut toujours en trouver une autre maman. Moi je ne voulais pas l'essayer, c'est el…
- Hey ! – La jeune fille derrière lui lui enfonça son index dans le flanc –
- Ça suffit. C'est inutile Stanyslas. Même le plus idiot des sorciers sait qu'il faut se fier aux baguettes et qu'on ne peut pas forcer les choses au-delà d'une certaine mesure, surtout lorsque l'on est qu'un petit sorcier débutant. – Elle souffla à nouveau – C'est une bonne baguette j'imagine. Inhabituelle. Et pas celle que l'on aurait souhaité pour toi. Mais c'est une bonne baguette. L'eau vaut toujours mieux que le feu, j'imagine… Allez, allons-y chéri. »
Sans plus attendre, Charlie Gravel tourna les talons en direction de la sortie. Stan allait lui emboiter le pas lorsqu'il se souvint qu'il n'était pas seul. Il se retourna donc vers sa camarade d'infortune. En fait elle était très jolie avec son teint olive, ses grands yeux gris et son petit sourire narquois. Même si ce dernier donnait l'impression à Stanyslas qu'elle se moquait de lui en permanence, il le trouvait très joli.
« - Bon et bah… heu… au revoir ?
- Stanyslas hein ?
- J'aime autant qu'on m'appelle Stan.
- Ok… Stanyslas !
- Hey ! – il voulut naturellement enfoncer à son tour un doigt dans son flanc avant de rapidement se raviser – Heu… Bon, je dois y aller. Désolé pour le bazar et puis, bah… au revoir.
- Ok… »
Stan se sentait soudain mal à l'aise, il esquissa quelques gestes, incertain qu'il était sur la marche à suivre en pareille occasion. Une bise serait peut-être un peu trop, mais la poignée de main semblait trop solennelle également. Finalement, il pencha légèrement son visage et son torse avant de se retourner pour partir.
« - Et mon nom ? »
Stan s'arrêta et pivota légèrement sa tête.
« - Quoi ?
- Tu aurais eu moins pu me demander mon prénom !
- Ha oui, c'est vrai… Désolé. »
Et il reprit sa route sans plus attendre, perplexe et incertain de la marche à suivre après cette première rencontre avec quelqu'un de son âge. Tandis qu'il arrivait au bout de l'allée et qu'il s'apprêtait à disparaitre à l'angle, une voix l'interpella.
« - Je m'appelle Morgane Rougerive, idiot ! »
Stan rejoignit enfin sa mère à l'entrée de la boutique. Il voulut demander s'ils ne feraient pas mieux de prévenir le vendeur de leur départ ainsi que de leur achat, mais la mine préoccupée de cette dernière l'en dissuada. Il jeta un dernier regard au tas de Bézant que sa mère avait laissé s'éparpiller sur le comptoir avant de se diriger une bonne fois pour toutes vers la sortie.
« - Tu n'as pas pris la boite ? – Stan réalisa qu'il avait en effet oublié cette dernière ! –
- J'y retourne tout de suite maman !
- Inutile, tu as ta baguette et c'est l'essentiel. Quittons cette boutique le plus vite possible.
- Oui maman.
- Et s'il te plait… ne t'avise pas de te rapprocher de cette fille.
- Je n'en avais pas l'intention maman.
- Bien. »
Une fois de retour sur la Place Cachée ils firent le tour des boutiques restantes avec plus de rapidité. Les livres d'étude, l'uniforme, les robes de travail, les gants et la cape d'hiver furent choisis par Charlie Gravel sans que son fils n'y attache aucune importance. Depuis qu'il avait quitté Cosme Acajor, Stan ne pensait plus qu'à une chose, son futur animal de compagnie.
Il en avait rêvé des années entières sans jamais parvenir à se décider. Hors de question d'avoir une chouette blanche. C'est ce que tout le monde prenait depuis des années. Un rat n'était pas envisageable non plus. Peut-être un chat alors ? Mais Stan les trouvait trop solitaires, trop indépendants. Il voulait un véritable compagnon, quelqu'un à qui il pourrait se confier et qui resterait toujours prêt de lui. Mais que pourrait-il bien trouver ?
Les règles de Beauxbâtons étaient très claires. L'animal ne devait pas être plus grand qu'un grand-duc d'Europe et ne pas peser plus de 8 kg. Il ne devait pas également cracher de feu, ni aucune autre substance nocive. Cela laissait un peu de marge. Mais tout de même…
Stan en était là dans ses pensées lorsqu'ils pénétrèrent enfin dans le Corbeau Mystique.
La boutique était déjà occupée par un couple et leur fils. Cependant, dès leur arrivée, une femme aussi vieille que couverte d'écorchures vint à leur rencontre. C'était la propriétaire de la boutique, Madame Tournecourt. Cette dernière les salua obséquieusement :
« - Madame Gravel, quel plaisir de vous revoir ! Que puis-je pour vous aujourd'hui ? Un peu de bave de Hiboux ? Ou peut-être êtes-vous là pour les fien… Ho…. – Madame Tournecourt s'arrêta après avoir remarqué la présence de Stan. – Ne me dites pas que…
- Si c'est mon fils et nous sommes là pour préparer son entrée
à l'académie de Beauxbâtons. Si vous pouviez nous éviter de perdre du temps.
- Ho, mais bien sûr, mais quelle joie de voir que le petit va bien. Alors, petit, que voudrais-tu comme animal de compagnie ? Une chouette blanche peut-être ?
- Non ! - Les mots étaient sortis plus vite qu'il ne l'aurait voulu. – Non merci. Je… Je ne sais pas ce que je voudrais.
- Je peux peut-être vous aider à choisir alors…
- Merci, mais non merci. Mons fils va trouver seul l'animal qui lui conviendra, n'ayez aucun souci. Si vous voulez bien nous laisser à présent.
- Ho, mais bien sûr Madame Gravel, toutes mes excuses !
- Excuses acceptées, merci. »
Madame Tournecourt s'en alla donc, toujours courbée, et sans quitter Stan du regard. Mais elle n'était pas la seule à montrer un intérêt flagrant pour le jeune garçon. La famille qui se trouvait là depuis le début de leurs échanges n'avait cessé de le dévisager. Le garçon, que Stan soupçonnait d'être de son âge, semblait particulièrement contrarié de le voir. Stan ne put s'empêcher d'interroger sa mère :
« - Maman ? Ces gens nous connaissent-ils ?
- Eux ? Ce sont les Dresstones, Guy, Tina et leur fils Lothar. Ne t'approche surtout pas d'eux ! Tu te souviens ce que l'on t'a appris ? Leur famille a fait partie des Cor….
- Des Correctifs oui je sais maman…
- Et que t'a-t-on appris concernant les Correctifs ?
- Qu'ils avaient formé une milice de sorciers d'élite durant les années 1790 pour essayer de prendre le pouvoir dans le monde des Moldus afin de protéger le monde des sorciers.
- Et… ?
- Que malgré leur défaite en 1796 et les actes atroces qu'ils ont commis, ils furent pardonnés par le Ministère des Affaires Magiques.
- Et… ?
- …Et certains sorciers les considèrent depuis comme des héros ?
- Et… ?
- …Et ils sont prêts à tout pour défendre les sorciers des autres sorciers comme des Moldus ?
- C'est bien ! N'oublie surtout pas tout ce que tu viens de me dire, et ne t'approche pas d'eux. Ils sont dangereux. Ce sont les pires. Maintenant, tu te souviens de ce que nous nous sommes dit avec papa ? Tu peux choisir l'animal que tu veux. Tu l'as bien mérité, nous sommes très fiers de toi. Allez va ! »
Stan embrassa sa mère avant de filer dans les allées encombrées de cages diverses et variées, bien trop content d'échapper aux regards perçants des Dresstones pour accorder la moindre attention aux animaux les plus proches.
Ce n'est qu'une fois suffisamment éloigné de la devanture que Stan commença à s'intéresser aux occupants des lieux. Il y avait un joyeux bazar et il semblait au jeune garçon que plus l'on s'éloignait de l'entrée, plus les lieux devenaient semblables à leur propriétaire. Ici et là, des plumes, des poils, des traces de griffures, de morsures. Après s'être enfoncé dans le magasin encore une bonne dizaine de minutes, Stan se demandait s'il se trouvait encore en ville. Les lianes avaient pris la place des colonnes de soutènement, une mousse légère recouvrait à présent le parquet usé, et d'étranges antres boisés semblaient avoir remplacé les cages métalliques habituelles.
Stan réalisa qu'il était allé trop loin lorsqu'il remarqua qu'il n'y avait plus un seul animal en vue. Il pouvait pourtant sentir leur présence, leur regard… Parfois un mouvement diffus à la périphérie de sa vision, des feuilles qui bruissaient à portée de ses oreilles... Stan commençait à sentir une certaine tension l'envahir.
C'est alors qu'il reconnut au sol les éclats d'une coquille d'œuf. Il s'agissait d'éclats magnifiques entièrement composés d'argent de gros morceaux éparpillés ici et là. Il devait y avoir eu plusieurs œufs, et donc plusieurs petits. Le jeune garçon avait reconnu là le nid d'un Occamy. Il était bien tenté de ramasser des morceaux de ces coquilles au prix inestimable, mais même lui savait que les magasins, aussi étranges qu'ils soient, disposaient de systèmes de sécurité sérieux. Il chercha à droite et à gauche quels éléments du décor pouvaient bien espionner ses actions à l'instant… Peut-être qu'il s'imaginait des choses finalement.
La tentation était trop grande. S'il n'en prenait qu'un tout petit morceau Madame Tournecourt ne remarquerait rien. Et il aurait ainsi l'occasion de ravir ses parents. C'était décidé, il allait le faire. Doucement, prudemment, Stan s'approcha, puis s'accroupit devant les éclats d'œufs d'Occamy. Il allait tendre la main pour s'emparer de petits éclats pas plus gros qu'une petite pièce de monnaie lorsqu'un mouvement le fit sursauter. Là, juste à quelques centimètres de sa main, un gros éclat d'œuf argenté, une véritable demi-sphère retournée et à moitié enfoncée dans le feuillage était secouée de soubresauts. Stan se pencha encore davantage. C'était comme si quelque chose se trouvait sous la coquille…
« - Occamy ? Petit zozio ? »
Pour seule réponse, la demi-coquille se mit à vibrer en tout sens avec fureur.
« - Du calme, du calme… Je vais t'aider à sortir de là… »
Tout doucement, Stan tendit la main jusqu'à toucher la surface lisse du demi-œuf. Dès lors, il n'y eut plus aucun mouvement sous cette dernière. Avec toute la délicatesse dont il était capable, le jeune garçon souleva la coquille. Ce qu'il découvrit dessous dépassait de loin ce que les illustrations des livres pouvaient laisser imaginer.
Là, juste sous ses yeux, un petit bébé Occamy l'observait. Recroquevillé sur lui-même, d'une magnifique couleur changeante allant du bleu profond au turquoise irisé de teinte rosée, le petit Occamy observait Stan à l'ombre de ses ailes repliées.
Ce dernier tendit à nouveau sa main, paume ouverte vers le ciel, vers l'étrange petit animal. Mais alors qu'il pensait pouvoir le toucher, ce dernier rua, piailla et doubla soudain de volume ! Il était passé de la taille d'une souris blanche à celle d'un gros rat noir ! Stan se releva de peur tandis que le petit Occamy déployait son long corps serpentin et ses petites ailes duveteuses tout en continuant de piailler.
« - Du calme, du calme ! Je voulais juste t'aider ! Tu étais coincé non ? Tu n'avais pas assez de force pour soulever ta coquille et tu ne pouvais pas non plus grandir à cause d'elle, c'est bien ça ? Je l'ai lu quelque part. Tu peux grandir et rapetisser en fonction de l'espace où tu te trouves… Ha ha, tu es vraiment un drôle d'oiseau, tu sais. »
L'Occamy s'était calmé. Toujours en position menaçante, il avait cependant arrêté de faire le moindre bruit. Sa tête et tout son corps dodelinaient maintenant sans quitter des yeux le jeune garçon.
Soudain, l'Occamy redressa la tête avant de rapetisser à nouveau et disparaitre dans les fourrés alentour.
Stan repéra à son tour le bruit de feuilles qu'on écrase, un bruit qui se rapprochait de plus en plus. Il n'osa pas se retourner, encore sous l'émotion de sa rencontre avec la petite créature. Lorsqu'il lui sembla que la chose qui s'approchait devait se trouver juste derrière lui, il se retourna d'un coup en lançant l'un des seuls sorts qu'il connaissait : « Nox Expendo ! ».
Sa baguette cracha une langue ténébreuse aussi chétive que ridicule. Elle gigota quelques secondes avant de se dissiper dans les airs. Devant lui, Lothar Dresstones, après un mouvement de recul et de surprise, rit de tout son cœur tandis que Stan rougissait de honte.
« - Ha ha ha ! Alors c'est ça ta magie ?! Je ne m'attendais vraiment pas à quelque chose d'aussi… pitoyable. Je ne sais pas vraiment pourquoi les gens vous craignent ! – Stan se ressaisit rapidement –
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Je m'appelle Lothar Dresstones, de la famille Dresstones. Tu as forcément entendu parler de nous. Alors, fais attention à toi…
- Ce n'est pas ce que j'ai demandé. Je voulais savoir ce que tu voulais dire par « je ne sais pas pourquoi les gens vous craignent. » ?
- Ne fais pas l'innocent… Tout le monde a entendu la rumeur sur l'enfant des Gravels. L'enfant que personne n'a vu. Ce n'est pas ta pitoyable coloration qui me trompera moi ! Lothar Dresstones !
- Écoute, je ne sais pas de quoi tu parles, si je suis res… »
Avant qu'il ne puisse finir sa phrase, Lothar poussa Stan en arrière, si fort que ce dernier en tomba à la renverse. Incrédule, il voulut protester, mais le jeune garçon ne l'écoutait pas. Au lieu de cela, il avait dégainé sa baguette et s'apprêtait à jeter un sort sur Stan.
Lothar était un garçon déjà grand pour son âge, on lui aurait donné quatorze ans de dos. Les boucles rousses de ses cheveux étaient pleines de gel ce qui ne les empêchait pas pour autant de tomber en désordre sur ses oreilles fines. Ses yeux verts étaient perçants et pleins de fierté. Il tendit sa baguette que tenait une main aussi fine que son visage et prononça sa formule : « Descendo ! ».
Mais rien ne se produisit…
« - Descendo ! Descendo ! Descendo !
- Mais enfin, tu es complètement malade !
- Je n'ai pas dit mon dernier mot ! »
Stan allait se remettre debout, mais le grand échalas qui lui faisait face ne lui en laissa pas le temps. Rangeant sa baguette, il envoya un coup de pied en direction du jeune sorcier qui dû reculer pour éviter le geste terrible. Il recula encore, deux ou trois fois avant de se retrouver dos à un vieux tronc d'arbre abattu. L'un comme l'autre s'arrêta alors pour reprendre leur souffle.
« - Mais enfin, c'est quoi ton problème Lothar !
- Moi ? Je n'en ai aucun ! Je me contente de m'occuper de la vermine avant qu'elle ne grandisse.
- Tu es complètement malade…
- Et toi tu es maudit ! »
Lothar se préparait à envoyer un grand coup de pied dans le flanc de Stan lorsque jaillit, de derrière son épaule, le petit Occamy qu'il avait précédemment sauvé de sa coquille.
Ce dernier jaillit, doublant de volume, piaillant et sifflant tout en se jetant à la figure de Lothar. Sous la surprise, ce dernier se protégea les yeux de ses mains en lançant de petits cris aigus. La panique l'envahit, et sans même bien regarder ce qui l'attaquait, il prit la fuite en direction de l'entrée du magasin.
L'Occamy atterrit enfin au sol, visiblement épuisé par l'effort qu'il venait de fournir. Il haleta donc quelques minutes sous le regard médusé de Stan. Finalement, il tourna sa tête d'oiseau vers ce dernier, visiblement dans l'attente d'une réaction.
Lentement, Stan joignit ces mains l'une à l'autre, puis doucement se mit à applaudir. Cela plut énormément au petit animal qui se mit à pailler et sautiller à son tour. Sentant que c'était le bon moment, Stan joignit ses deux mains en coupe et les avança en direction de l'Occamy. L'oiseau fantastique s'approcha avec curiosité, renifla le bout des doigts de Stan avant de se jeter sans manière dans ses paumes chaudes. Il laissa échapper un ronronnement de satisfaction tout en fermant les yeux tandis que le jeune garçon l'amenait à la hauteur des siens.
« - Tu sais que tu viens de me sauver toi ? … C'est décidé. C'est toi que je choisis ! Ça te va ? – Le petit Occamy se contenta de mordiller l'une de ses phalanges puis d'y frotter son crâne tout doux – Je vais prendre ça pour un oui. Maintenant, il te faut un nom… Comment vais-je t'appeler ? Je sais ! Je vais t'appeler Salvador. Ça veut dire sauveur en latin j'ai lu ça dans un livre. C'est mignon. Ça te va ? Salvador ? »
Lorsqu'il revint enfin à l'entrée de la boutique, une violente dispute avait lieu entre Charlie Gravel et les Dresstones.
« - Vous pouvez peut-être tromper votre monde, Charlie Gravel, mais nous ne sommes pas comme tous ses ânes bâtés ! Votre fils est une plaie qui a agressé notre enfant et vous payerez pour cela !
- De quelle agression parlez-vous ? Je ne vois nulle plaie ! Rien d'autre qu'une grande asperge humide de larmes !
- Comment osez-vous !
- Et vous donc ! Déguerpissez avant que mon mari n'arrive ! »
Les Dresstones échangèrent un regard avant de prendre le chemin de la porte.
« - Nous partons. Mais ce n'est pas terminé je vous le dis. Nous vous aurons à l'œil vous et votre fils, ici… comme à Beauxbâtons. Et nous finirons bien par découvrir la vérité !
- Quelle vérité ? »
Stan était intervenu sans y réfléchir, et il regretta aussitôt ses paroles. Guy Dresstones le regarda avec un mépris et un dégout flagrant. Il se tenait dans l'entrebâillement de la porte. Il laissa passer un temps avant de marmonner pour lui-même dans un claquement de porte.
« - Maudite génération pourpre ! »
Stan se tourna vers sa mère, complètement perdu.
« - Maman ?
- Oui, qu'y a-t-il Stanyslas ?
- Je crois que j'ai trouvé mon animal de compagnie.
- Mais ? C'est un Occamy ? C'est hors de prix !
- …
- Ah... Peu importe. Tu l'as bien mérité. Ne serait-ce que pour avoir fait pleurer ce grand dadais prétentieux.
- Merci maman !
- De rien mon chéri. Je t'aime.
- Maman… ?
- Oui mon chéri ?
- De quoi parlait-il Monsieur Dresstones ?
- …Rentrons Stanyslas. Nous parlerons à la maison. »
