Chapitre 1

« C'est la dernière fois que tu laisses brûler mon bacon, mon garçon ! Je vais te donner une leçon que tu n'oublieras jamais, espèce de déchet ! ...»

« NE ME REGARDES PAS COMME CA ! »

Severus Snape se sentait toujours dégoûté et indigné. Parfois, il ne pouvait pas comprendre la manière de penser de Dumbledore, ni pourquoi il se retrouvait toujours impliqué dans les escapades du vieil homme. Ou dans son raisonnement. Comme ce qu'il devait faire aujourd'hui : sauver Harry Potter le Balafré. Pourquoi, pourrait-on se demander ? Parce que Sybil avait prédit sa mort imminente.

Comme si Sybil prédisait quoi que ce soit d'autre.

Snape avait manqué se payer un fou rire quand Dumbledore lui avait dit qu'il avait décidé de ramener le Golden Boy à Poudlard un mois avant la fin des vacances. Mais Dumbledore n'avait pas lâché l'affaire, et pire encore : il n'avait pas laissé Snape déverser un peu de ce poison qu'il sentait poindre en lui, comme à chaque fois en de telles occasions, et avait pratiquement jeté dehors le Maître des Potions, plaidant la plus haute importance de cette affaire.

Hah...

C'était d'ailleurs précisément la raison pour laquelle Snape avait pris un long bain relaxant qui avait duré 40 minutes avant d'enfiler précautionneusement ses affaires de Moldu et d'aller à Pré-au-Lard pour transplaner au 4 Privet Drive. Il avait même épousseté son jean et sa chemise noire pour la forme, comme un garçon consciencieux avant un rendez-vous amoureux. Tout, pourvu que ça lui fasse perdre le plus de temps possible.

Mais Snape finit par se retrouver devant la maison. L'après-midi touchait à sa fin, et les gens commençaient à retourner chez eux. Snape jura tout bas. Il aurait préféré arriver de nuit, mais il n'avait rien trouvé pour gagner du temps jusque là. S'armant de sa grimace la plus dégoûtée, il franchit le jardin moldu et frappa à la porte.

Rien.

Grognant tout bas qu'ils avaient intérêt à ne pas être partis faire un petit tour à la mer, il frappa encore, un peu plus fort.

Toujours rien.

Snape se détourna de la maison et rebroussa chemin, livide de fureur. Il avait été envoyé pour rien dans une maison vide. Redescendant l'allée à toute allure, il donna un bon coup de pied dans la première chose apte à apaiser sa colère. Qui était la poubelle des Dursley. Le coup fut si fort que même si elle était pleine, elle se renversa dans un grand bruit, et les détritus s'éparpillèrent. Snape n'en avait rien à faire. Du moins jusqu'à ce que l'un des objets attire son attention.

Les lunettes de Potter. Et plus près de la poubelle, ce qui semblait être les restes les cendres de son livre de Métamorphose. Ou de Potions ? Snape s'attarda un instant, quelque peu perplexe. Il ramassa doucement les lunettes.

Elles étaient broyées.

Les empochant inconsciemment, Snape retourna devant la maison et frappa aussi fort qu'il put à la porte. Comme personne ne répondait, il sortit sa baguette et lança un sort de déverrouillage. La maison semblait avoir été désertée. Snape en voyait assez pour le dire. Il prit un air renfrogné. Quelque chose clochait. Quelque chose, oui, même s'il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus dans l'instant, mais qu'il percevait nettement. Personne n'était à la maison. Les volets étaient fermés, les lits étaient faits, et même le frigo était verrouillé. Mais la maison était vide...

...Pourquoi la maison sentait comme s'ils venaient de faire rôtir de la viande ? Snape n'aimait pas la tournure que prenait la situation. Cette petite anticipation qu'il ressentait et les frissons qui parcouraient sa peau à cet instant étaient des signes clairs : quoi qu'il s'apprête à découvrir, il savait que ça ne lui plairait pas. Et Snape détestait ce qui ne lui plaisait pas.

« Potter. Sortez, maintenant. » ordonna-t-il d'une voix irritée.

Toujours aucune réponse. Mais Snape était un espion. Il savait que même s'il n'y avait presque plus de vie dans ce bâtiment, il y en avait tout de même encore un peu. Il pouvait sentir, juste au-dessus du seuil d'audition humaine, une respiration rauque. Mais où ? Il vérifia et revérifia chaque pièce de la maison. Même celle qui ressemblait à un entrepôt, avec des barreaux aux fenêtres, bien qu'il semble évident que personne ne puisse vivre là-dedans.

Il n'y avait aucun signe du Gryffondor qu'il cherchait. C'est exactement ce qui l'alarma : il semblait que Harry Potter ne vivait pas dans cette maison. Il n'y avait aucun vêtement, aucune de ses affaires qu'il put reconnaître, aucune photo qui puisse prouver l'existence du jeune homme. Il aurait aussi bien pu se trouver dans la mauvaise maison.

Sauf que Snape savait qu'il n'était pas dans la mauvaise maison. Se tenant au milieu du salon, il regarda autour de lui. Puis, comme s'il venait de prendre une décision, il posa sa baguette en équilibre.

« Guide moi »

La baguette frémit et se tourna dans une direction que Snape suivit, perplexe. Il était pourtant sûr de n'avoir rien manqué en haut des escaliers. Il avait même regardé sous les lits. Il réalisa que la baguette avait arrêté de l'attirer, signe qu'il était arrivé à destination. Il cligna des yeux et haussa un sourcil. Il se tenait devant un placard sous l'escalier.

Il grommela et se renfrogna. Parfait. La famille était apparemment partie en voyage, et le jeune homme avait enfermé ses affaires magiques là-dedans pour les protéger du vol, ce qui avait attiré la baguette jusqu'ici.

Néanmoins, c'était le seul endroit que Snape n'avait pas fouillé.

« Bah, pourquoi pas, juste pour être sûr... » Snape marmonna et prononça le sort.

« Alohomora »

La porte s'ouvrit, révélant une petite pièce sombre. L'odeur de chair brûlée le frappa plus fort encore. Snape sentit les cheveux de sa nuque se hérisser. Que se passait-il ? Toutes sortes d'alarmes lui vinrent à l'esprit, et il en oublia son insatisfaction et son mépris tandis qu'il murmurait Lumos pour y voir plus clair.

Ce qu'il vit rendit ses yeux plus froids que l'acier, ses dents se crispèrent de rage, sa main serrant sa baguette si fort que ses phalanges blanchirent. Il avait finalement trouvé Harry Potter. Et il avait eu tort.

Dans le placard était allongé un garçon qu'il eut du mal à reconnaître en l'adolescent effronté qu'il voulait effacer de la liste des élèves de Poudlard. Il était allongé sur une caisse à outils et quelques boites à chaussures, selon un angle improbable, sa tête pendant totalement en arrière. Snape doutait que le jeune homme fut même conscient. Le visage de Potter n'était plus qu'un amas ensanglanté, comme si quelqu'un l'avait beaucoup frappé, ou utilisé sa tête pour faire une fissure dans un mur. A la lumière de la baguette, il voyait aussi de petites choses brillantes. Merlin, est-ce que ce sont des bouts de verre ? Regardant un peu plus bas, il trouva d'où provenait l'odeur de chair brûlée : la main droite et l'avant-bras de Potter n'étaient plus qu'un tas de chairs brûlées, comme si quelqu'un lui avait fait tenir un fer à marquer le bétail pendant beaucoup trop longtemps...

Snape ne voulait pas en voir plus. Il plaça deux longs doigts élégants sur la gorge du garçon, et réalisa avec un certain soulagement que Harry était toujours vivant.

Merci Merlin pour Potter, ou Dumbledore m'en aurait voulu pour de bon. Il renforça la lumière de sa baguette puis la mit dans sa poche, de manière à ce qu'elle continue de diffuser assez de lumière pour qu'il puisse voir ce qu'il faisait. Alors qu'il recueillait la faible forme dans ses bras, il ressentit de la rage. Pour beaucoup de choses. Premièrement, pour avoir eu à contempler cette vision qui faisait voler en éclats tant de ses préjugés quant au fléau de son existence. Maintenant, il ne pourrait plus jamais regarder le garçon sans se rappeler du placard sous l'escalier. Il ne pourrait plus le harceler autant, maintenant, et Snape aimait harceler Harry Potter.

Secondement, il avait été envoyé pour retrouver et sauver le garçon alors qu'il était dans le nouveau Cercle que Voldemort venait de créer, et toujours surveillé pour savoir à qui allait son allégeance. Si des yeux hostiles le voyaient en ce moment, sa prochaine réunion serait la dernière. Mais à quoi pensait Dumbledore ? Snape, à cet instant, haït le vieil homme.

Et Troisièmement, qui avait pu avoir l'idée cruelle et perverse de faire ça à un enfant ? Et pourquoi ? Même dans ses pires moments, quand Snape souhaitait vraiment la mort de Potter, il n'avait jamais pensé à faire subir une telle torture à ce garçon.

« Où comptez-vous aller avec ça ?! SORTEZ DE MA MAISON ! »

Le terrible regard de Snape était posé sur l'homme qui se tenait dans l'encadrement de la porte, portant un parasol, et une grande femme maigre qui scrutait par-dessus son épaule, derrière lui. Snape sourit à Vernon. Et quand il souriait avec un tel état d'esprit, Snape était très dangereux.

« Avez-vous fait cela ? » demanda-t-il avec une voix douce et calme à refroidir l'Enfer, et raffermissant sa prise sur Harry.

« Le garçon est à moi, avorton ! Rendez-moi ce qui est à moi ! » l'homme vira au violet et entra, tenant le parasol comme une arme de combat, prenant à tort la voix basse de Snape pour un signe de faiblesse.

« Rien ne me ferait plus plaisir » acquiesça Snape, et il sortit sa baguette.

À suivre

Chapitre 2

Voldemort contempla les quelques personnes cagoulées de noires et couvertes d'un masque blanc presque spectral. Il acquiesça vers un Queudver tremblant, qui alla aussitôt fermer la porte et activer toutes les défenses magiques que son maître avait requises avant que l'assemblée ne puisse commencer. Voldemort dévisagea (façon de parler, bien sur) Nagini de ses yeux écarlates et inexpressifs et lorsque le serpent siffla dans sa direction, il commença à parler en la caressant.

« Certains événements... intéressants ont attiré mon attention... » dit-il doucement, en laissant traîner les 's' de son discours, « ... L'un d'entre vous se demande t'il à quoi je fais ici référence ? »

Le silence tomba sur le cercle des Mangemorts présents qui n'osaient se regarder entre eux, un million de possibilités leur traversant l'esprit de quelques secondes. Sauf l'un d'entre eux. L'hésitation de Snape ne dura que quelques fractions de secondes avant de faire un pas en avant, gardant la tête baissée et les mains jointes, attendant la permission de parler du Seigneur des Ténèbres.

« Enlève ton masque. » Toujours le même ordre... En s'agenouillant, Snape obéit, s'assurant de garder les yeux baissés. Voldemort sourit, comme à lui-même.

« Ah, Sssseverusss... » insista t'il volontairement sur le nom, « Informe nous, mon loyal Maître des Possssions. »

Alors que Snape prenait une profonde respiration, il eut la pensée fugitive que Voldemort avait une manière des plus hédonistes de prononcer le mot "Maître". Il balaya cette pensée, son corps se raidissant un peu plus. Il avait besoin de tous ses moyens dans cette situation.

« Harry Potter est revenu à Poudlard, Monseigneur, pour le reste de l'été. Il est à l'article de la mort à l'instant où je vous parle. »

Des murmures se firent entendre avant d'être brusquement interrompus. Sans aucun doute par un des regards froids de Tom Marvolo Riddle, pensa Snape. Il s'était toujours forcé à penser à Voldemort en tant que Tom pendant qu'il était interrogé. C'était comme une ancre qui retenait sa raison. La voix nasillarde ramena son attention à la situation présente.

« Et Pourquoi est-il dans cet état, Severusss ? »

Le dos de Snape se raidit, le rendant rigide dans sa position agenouillée. C'était la question cruciale. Comme quand il était dans la maison des Dursley et que son instinct persistait à lui faire croire que Potter était là... Ce même instinct lui soufflait maintenant que sa vie dépendait de la réponse qu'il s'apprêtait à fournir à cette question apparemment simple sur les évènements. Dans quelle mesure devait-il révéler la vérité et comment ? Que pensait Voldemort qu'il était arrivé, et jusqu'à quel point pourrait-il accepter une version alternative, et la croire ?

Maudit Potter. La haine de Snape monta en lui comme une sombre vague, tant contre l'embarras dans lequel il était fourré que contre ce foutu Potter qui l'y avait précipité. Précautionneusement, doucement, il entreprit de répondre au Seigneur des Ténèbres comme un funambule qui marche sur une corde raide.

« Monseigneur, Dumbledore m'a envoyé chercher Potter à son domicile sur quelques prédictions de Sybille Trelawney selon lesquelles il était en danger de mort. Trelawney, bien sur, n'a jamais fait une vraie prédiction... »

« Je CONNAIS cette espèce de chauve-souris ! C'est de Potter dont je veux entendre parler ! » Voldemort entra en éruption et Snape se courba encore un peu plus, se mordant la langue si fort que du sang coula de sa bouche. Il l'avala et continua, s'abaissant toujours plus devant les pieds de Voldemort.

« Oui, Seigneur. Je suis donc allé à la maison des Moldus de Potter. Bien sûr le garçon n'était pas gravement blessé. Il avait été quelque peu battu par sa famille. Il était déjà inconscient quand je suis arrivé dans la maison. Je vous supplie de me pardonner, Monseigneur, mais la tentation était trop forte : Dumbledore s'attendait à recevoir un garçon dans un état critique. Même si je ne pouvais pas vous l'amener directement à cause des protections, je savais que le directeur ne me soupçonnerait pas si je... jouais un peu avec le garçon. J'ai... été distrait dans mes occupations lorsque la famille est revenue à la maison. » Snape se tut et ferma les yeux, la tête baissée, espérant contre toute attente, priant n'importe quel Dieu existante que Voldemort avale ce conte et l'accepte comme une preuve de la loyauté de Snape envers lui.

Il y eut une longue pause, durant laquelle Snape n'entendait que les battements irréguliers de son propre cœur. Le maudissant intérieurement, il souhaita que son sang resterait sur les mains de Potter éternellement, et que la culpabilité le ronge lentement et le tue. Mais ces pensées furent balayées lorsqu'il entendit Voldemort se lever de son trône, Nagini glissant silencieusement ailleurs. Des doigts anormalement longs et osseux touchèrent ses épaules et l'incitèrent à regarder en face le visage distordu et presque inhumain de Tom Riddle.

« C'était bien joué, mon fidèle ami... tu montres l'exemple à tes petits camarades... » commença t'il de sa voix lente et monotone. Snape allait voir si l'heure de sa mort avait sonné ou pas.

« ...Tu vas être grandement récompensé... tu vas continuer à vivre et à me servir, et en plus je vais t'aider à te rappeler de quelque chose d'important... »

Les mains blanches s'éloignèrent de Snape et celui-ci baissa les yeux à nouveau alors que le Seigneur Noir reculait d'un pas.

« Harry Potter est à moi, que ce soit pour jouer avec ou pour le tuer. Aucun d'entre vous n'a le droit de l'agresser, même dans le zèle que vous mettez à me servir. Tu aurais du te rappeler de ça, Severuss. Crucio. »

§§§§§§

Quand Snape retourna dans ses quartiers, son corps était considérablement plus faible mais sa mauvaise humeur n'en était que plus palpable. Il aspirait juste à dormir un peu pour prendre ses distances, pas a un face-à-face avec Dumbledore, qui l'attendait dans sa chambre.

Snape le regarda prudemment.

« Comment êtes vous entré ? Je pensais que ma chambre était convenablement protégée. » Hésita t'il faiblement. Il était trop fatigué pour grogner, et il avait la détestable impression que c'était précisément pour cette raison que Dumbledore ne voulait pas attendre le lendemain matin. Dumbledore le regarda avec inquiétude, et la lueur dans ses yeux s'atténua quelque peu.

« Les pièces du château de Poudlard s'ouvrent toujours devant le maître des lieux, Severus. Est-ce que ça va ? »

« Bien sur que non ! Je reviens d'un interrogatoire face à Voldemort et ai presque perdu ma VIE parce que vous m'avez envoyé chercher ce sale moutard autour duquel votre monde tourne ! Bien sûr que je ne vais pas bien, et j'aurais voulu qu'il ne naisse jamais ! » s'énerva Snape. Finalement, la tension accumulée pendant la réunion avait trouvé une échappatoire.

Dumbledore ne pipa mot jusqu'à ce que Snape soit entré dans sa chambre et ait bu l'habituelle série de potions dont il avait besoin pour rétablir le taux de sang dans son corps après cette réunion. Il ne parla pas quand Snape le regarda droit dans les yeux d'un regard qui voulait dire « Pourquoi êtes vous toujours là ? » Et même quand il lui lança un regard « Parlez ou allez-vous en. » d'ailleurs.

Snape abandonna finalement.

« Que voulez vous me dire, Albus ? » demanda t'il d'une voix sans hargne ni malice, juste de la fatigue et de la résignation. Il se laissa tomber dans un fauteuil et regarda Dumbledore s'éclaircir la voix avant de prendre la parole. Il connaissait ce regard. Et il le haïssait.

« Pas à propos de Potter, Albus. Pas ce soir. »

« Il est aveugle, Severus. »

Snape cligna des yeux, et ses sourcils atteignirent presque la base de ses cheveux. Le Golden Boy, aveugle ?

« Comment diable est-ce arrivé ? » réussit-il à demander.

Dumbledore détourna le regard, ses doigts jouant distraitement dans sa longue barbe blanche. Snape trembla. Même Voldemort ne lui faisait pas aussi peur que de voir a quel point Dumbledore était vieux et fatigué.

« Pompom dit que c'est le ou les coups qu'il a reçus a la tête. Il y avait des éclats de verre dans son front et ses yeux. »

« Les a t'il toujours ? » demanda Snape, intéressé. Il se sentait cyniquement satisfait d'avoir fait subir à Vernon ce qu'il avait mérité.

« Si vous parlez de ses yeux, oui, mais ils sont beaucoup trop endommagés pour y voir quoi que ce soit. Pompom les a soignés afin qu'il n'y ait pas de cicatrice visible et qu'il n'y ait aucune lésion dessus, mais elle ne peut restaurer la vue. »

Le silence s'installa, le temps que Snape emmagasine les nouvelles informations, et Dumbledore ne continua pas, comme si les mots qu'il prononçait le fatiguaient énormément. Finalement, Snape le brisa en demandant :

« A t'il une chance de la récupérer ? »

Le vieux sorcier secoua lentement la tête. Snape prit une profonde inspiration.

« Voldemort n'a pas besoin de le savoir. Pas tout de suite. Mais obligatoirement avant que le fils Malefoy ne revienne, en septembre. »

Dumbledore opina du chef, puis fixa Snape.

« Soudain le temps nous rattrape tous les deux, Severus. »

Snape n'aimait décidément pas ça. Mais il avait déjà tout plus ou moins anticipé. Dégoûté, il se poussa lui-même hors du fauteuil, entendant presque ses articulations gémir en protestation.

« Allons voir ce foutu Golden Boy, alors. »

Après tous ces moments où il pensait haïr le directeur, il finit par ne plus le haïr lui personnellement, mais l'idée de ne pas pouvoir aider la seule personne qui avait eu confiance en lui après ce qu'il avait fait dans le passé. Après tout, Dumbledore était la raison pour laquelle le Maître des Potions était toujours en vie.

Ils marchèrent ensemble hors des cachots et se dirigèrent vers l'infirmerie. Dumbledore marchait lentement, et Snape avait l'impression qu'il agissait ainsi pour ne pas le fatiguer davantage après la réunion de cet après-midi là. Il ne lui en parla pas, parce que Snape sentait qu'il avait vraiment besoin de marcher lentement.

« Je ne pense pas que les Dursley vous aient posé de soucis ? » demanda Dumbledore avec une voix étrange qui incita Snape à le regarder en face. Il y avait un petit sourire caché sous cette barbe blanche, et Snape se demanda soudain si Dumbledore n'avait pas eu une bonne raison d'envoyer le membre le plus vindicatif de son équipe pour chercher ce gosse pour une bonne raison. Il regarda devant lui et ricana légèrement.

« Non, du tout. Ils étaient... assez divertissants. »

« J'espère qu'ils ne l'étaient tout de même pas trop ? »

« Ils sont vivants, Albus... Ils ne méritent pas la mort... Ils souffriront plus que ça. »

Là-dessus, Severus entra dans l'infirmerie, où seul un lit était occupé. Il s'approcha et regarda le jeune garçon dormir sans un mot. Ses yeux étaient couverts d'un bandage qui entourait sa tête. Sa main était également bandée jusqu'au coude. A son chevet, plusieurs potions de soins, et Snape grinça des dents. Il n'avait pas à demander ce que le jeune homme avait subi : il le savait puisqu'il avait reconnu en un battement de cœur les potions et leurs usages.

Ce garçon avait des hémorragies internes, des contusions graves et une irrégularité cardiaque résultant du choc.

« S'est-il déjà réveillé ? » demanda t'il doucement à Dumbledore.

« Pas encore. Il ne sait pas, Severus. »

Snape claqua sa langue de mécontentement.

« Il est beaucoup trop faible pour lui servir. »

« Severus, ce n'est pas un soldat. C'est un garçon sous-alimenté de 15 ans. »

Snape ne se laissa pas attendrir par ces derniers mots.

« Ne vous y trompez pas, Albus. Il n'est qu'un soldat aux yeux du monde sorcier, et il doit être assez fort pour assurer son rôle quand le temps sera venu, ou tout aura été fait en vain .»

« Que dites vous ? »

Snape fit une pause. Que -disait- il, en effet ? Il regarda le visage de l'adolescent devant lui. Il semblait serein et triste, dormant dans ce lit stérile. Faible. Très faible, même, mais en même temps, Snape ne pouvait nier qu'il émanait quelque chose d'autre que de la faiblesse du corps de ce garçon. Détermination. Obstination. Patience. Loyauté.

Tous les ingrédients pour la Force. Et il dut s'avouer que le gamin avait survécu pendant 15 ans à ses tuteurs, et n'était pas devenu un ersatz corrompu et imbu de lui-même. Il avait démontre sa force, malgré sa faible apparence.

Oui. Il sentait qu'il y avait du potentiel dans ce garçon.

« De quel potentiel parlez-vous, Severus ? »

Snape réalisa alors qu'il avait formulé sa dernière pensée à haute voix. Il répondit franchement, comme à chaque fois qu'il entrevoyait le moindre espoir de résistance à Voldemort.

« Je pense que la cécité de ce garçon pourrait devenir une arme, plus qu'un handicap. »

« Mais qui pourrait lui apprendre à convertir un tel désavantage en arme ? »

Snape le regarda, mais il ne vit l'étincelle dans les yeux du directeur qu'un instant trop tard, il avait déjà commencé à répondre :

« Je le pourrais. » Il regretta aussitôt ces paroles car il savait qu'a la seconde où il avait affirmé cela, il avait accepté la responsabilité et la charge de Potter.

« Je savais que je pourrais compter sur vous ! » dit Dumbledore très vite avant de s'en aller tout aussi vite. La mâchoire de Snape s'affaissa légèrement. Cette vieille bourrique l'avait manipulé pour l'amener à ce qu'il voulait qu'il fasse depuis le début.

Oh, comme il haïssait Harry Potter le Balafré.

À suivre

chapitre 3

Snape ne retourna plus à l'infirmerie durant tout le temps où Harry resta endormit. Il se sentait agité et irritable plus que de mesure et ne pouvait rester en place. Il erra sans fin dans le château, regardant de-ci de-là comme si c'était ce qu'il devait faire, puis marmonnait dans sa barbe en une voix qui impliquait des ruminations peu flatteuses.

Mais il passait la majeure partie de son temps sur le terrain de quidditch. Il marchait le long du terrain, s'asseyait sur les sièges puis redescendait et remarchait le long du terrain et occasionnellement, il montait sur un balais et faisait quelques pirouettes.

Tout dans les mouvements de Severus Snape montrait son appréhension, sa préoccupation et son extrême planification. C'est à dire, si quelqu'un prenait la peine de regarder plus loin, son mécontentement évident et sa forte agressivité qui le caractérisait, chaque fois qu'une personne avait le malheur d'être trop près de lui.

A maintes reprises, Snape avait essayé de convaincre Dumbledore que le garçon serait sûrement plus réceptif avec quelqu'un d'autre (McGonagall, ou Flitwick ou même ce loup-garou de Lupin) que lui.

« Laissons le garçon s'habituer à cette nouvelle situation, ensuite je lui enseignerais, Albus. » aurait il dit, comme toujours et Dumbledore aurait, comme toujours, hoché la tête.

« Je n'ai pas autant confiance en eux, quant à Harry, qu'en vous. »

Cette constatation avait surpris le maître des Potions, à tel point qu'il s'était arrêté net en chemin et avait regardé le directeur comme s'il lui avait soudain poussé une deuxième tête.

« Vous pouvez répéter Albus ? Bien sûr que vous avez confiance en eux, ils idolâtrent pratiquement le garçon. »

« Ce qui est exactement pourquoi ils sont pour le moment dans l'impossibilité d'être ce dont le jeune Harry aura besoin. S'ils en venaient à trop le gâter, cela lui permettrait de se refermer sur lui-même et ne le rendra que plus faible au lieu de l'aider à devenir plus fort. Il sera, pour ainsi dire, corrompu alors qu'il n'en a pas besoin. »

Snape renifla, mais l'image du garçon dans son placard lui fit renoncer à son commentaire acerbe. A la place, il demanda d'une voix lasse.

« Et qu'est ce qui vous fait croire que je ne vais pas le harceler jusqu'à ce qu'il craque ? »

Les yeux de Dumbledore redoublèrent d'intensité, et il donna une tape sur l'épaule de Snape avant de continuer leur promenade.

« Le fait, mon garçon, que vous venez justement de me le demander. »

Snape fronça les sourcils, ne sachant pas vraiment s'il était contrarié ou délivré.

Il se passa sept jours avant que Snape ne remette les pieds à l'infirmerie. Sept longs jours de méticuleuses préparations et de planifications sur ses nerfs d'aciers. Snape ne se faisait pas de fausses idées à propos de ce qu'il était sur le point d'entreprendre et à quel point cela pourrait être déplaisant. Mais il était déterminé. Il avait déjà fait d'autres promesses auparavant. Et Snape les avait à chaque fois tenue.

Harry s'était réveillé la veille au midi. Il avait entendu des gémissements alors qu'il passait devant les portes de l'infirmerie. Des gémissements de colère, de désespoir et d'apitoiements. Le même apitoiement qui avait fait enrager le maître des Potions et le même désespoir qui lui avait fait presser le pas.

Il entra dans la chambre. La fenêtre était ouverte, laissant entrer le soleil qui réchauffait les lits ; on pouvait entendre les oiseaux qui gazouillaient gaiement. Ils étaient bien trop gaies au goût de Snape. Il fit tous les efforts possibles pour être silencieux alors qu'il s'approchait du seul lit qui était occupé. Il s'averra que le garçon dormait toujours.

Il détailla Harry. Son visage avait quelques traces de coups et des écorchures, mais elles auraient bientôt disparus. Le bandage autour de ses yeux n'était plus là. Il était très mince, les joues creuses et la peau sur les os, du moins d'après ce que la robe ouverte lui permettait de voir. Sa main droite qui agrippait la couverture était encore bandée et Snape pensa qu'elle le resterait encore un certain temps – et si la cicatrice était trop voyante – peut être à jamais.

Snape s'assit sur la chaise et claqua la langue, irrité.

« Je sais que vous êtes réveillé, Potter. Autant laissez tomber maintenant. » dit il indifférent.

La main accrochée à la couverture se détendit mais le garçon ne bougea pas. Snape continua.

« M'avez vous entendu approcher ? »

Aucune réponse. Le front de Snape se plissa.

« Êtes vous sourd en plus d'être aveugle ? » cingla-t-il.

La respiration du garçon se fit plus précipiter mais Harry ne répondit toujours pas. Snape se sentait prêt à grogner mais il se retint.

« Très bien, » dit il de sa voix la plus indifférente « vous avez gagné. Je savais que le Survivant n'était rien de plus qu'un assemblement de mirages. Vous me faites perdre mon temps. » Il cracha la dernière phrase et se leva pour partir mais sans véritable hâte.

Il avait presque atteint la sortie lorsque la voix de Harry se fit entendre.

« Mais c'est quoi votre problème ? »

Snape ferma les yeux et s'autorisa un petit sourire victorieux avant de retourner au chevet du garçon. Peut être que ça n'allait pas être aussi difficile que ce qu'il aurait pensé, si Potter était si prompt à réagir aux railleries.

« Vous êtes mon problème, Potter, comme toujours. Je pensais que même avec votre niveau intellectuel vous pourriez arriver à cette conclusion. » dit il alors qu'il reprenait son siège. Il scrutait le garçon pendant qu'il parlait. Celui-ci fixait le plafond, ses yeux verts toujours brillants mais pourtant restant immobiles, morts. Snape eu la mauvaise image de ces yeux morts et immobiles le fixant et l'accusant dans un champs de bataille. Il se débarrassa de cette image. Le garçon était vivant, ses yeux, bien qu'immobiles, reflétaient la vie qui était en lui. Ils n'étaient pas vitreux, rien n'était encore perdu.

« Vous êtes en train de me fixer, n'est-ce pas ? » dit Harry d'une voix que Snape savait dangereuse. Avant que le maître des Potions ait eu une chance de répondre, le garçon continua ; sa voix démontrant sa colère qui devenait de plus en plus forte.

« Êtes-vous finalement satisfait ? Êtes vous heureux de me voir ainsi ? Incapable d'errer sous ma cape d'invisibilité, incapable de vous lancer des regards froids, plus de complots et plus d'aventures ! Vous pouvez enfin dormir sur vos deux oreilles –Professeur- Snape, libéré de la crainte que je ne sois encore et toujours en travers de votre chemin, maintenant que je ne suis plus qu'un estropié qui ne sera peut être même pas capable de finir sa scolarité ! »

Harry hurlait à la fin de sa tirade. Snape se surpris à de nouveau sourire faiblement. Il aimait la colère qu'il venait de voir, même si elle était dirigée vers lui. Une colère qui impliquait l'énergie nécessaire pour l'alimenter, l'esprit de rebellions qui serait vital pour Harry s'il voulait surmonter ça. La situation s'améliorait. Et étant donné que Snape ne pouvait se soucier encore moins du fait que le garçon l'aimait ou non, sa grande colère n'affecta que peu le grand homme sombre.

« En fait, je suis extrêmement reconnaissant à la providence que vous soyez plus maniable ainsi. Mais je ne suis pas satisfait. »

Harry ricana de telle manière que Snape ne s'y attendait pas.

« Pourquoi pas ? Vous avez plus de chances, à présent, de gagner votre Ordre de Merlin, n'est- ce pas ? »

Finalement, l'indignation et la colère jaillirent du maître des Potions pour s'accorder avec celles de Harry. Il se pencha en avant, à quelques centimètres du profile du garçon.

« Je ne m'accaparerais sans doute jamais l'Histoire comme vous pouvez le faire, Potter…mais seulement ce qu'il y a autour. »

Harry se remit à ricaner et détourna son visage du souffle chaud qu'il sentait sur sa joue.

Snape fut irrité en se rappelant Black, son manque de distinction, l'indéniable allégresse qu'il avait vu dans les yeux de Harry à cet instant, ainsi que son impossibilité à réagir ou faire quoi que ce soit pour. Mais à présent, les rôles étaient inversés. A présent, c'était Potter qui était délaissé, c'était Potter qui n'avait plus aucun choix – et d'une manière encore plus cruelle que ce que le maître des Potions n'aurait jamais pu souhaiter.

« Aussi invraisemblable que cela puisse être Potter, je ne suis pas venu ici pour perdre mon temps à écouter votre bavardage incessant. » commença-t-il d'une voix malicieuse et dangereuse qui parvenait jusqu'à Harry, bien que le garçon n'eut pas bougé. « Je suis ici pour vous annoncer quelque chose. Aujourd'hui même, Pomfresh

m'a informé que vous alliez être autorisé à sortir. Demain commencera notre cours accéléré pour votre cécité. Je vous attendrais sur le terrain de Quidditch pour 9h. Soyez ponctuel ou je viendrais vous chercher. Plus vous résisterez, plus ce sera dur pour vous. Je vous demande donc de résister autant que possible. » Un petit souffle chaud accentua le dernier mot.

Sur ce, Snape sortit de l'infirmerie telle une harpie qui viendrait de se voir dans un miroir.

Le lendemain, lorsqu'à 9h15 Harry ne se montra toujours pas, Snape se rendit à nouveau à l'infirmerie de vive allure. Poppy se mit sur son chemin.

« Severus, soyez gentil. Le garçon est toujours sous le choc. » lui murmura l'infirmière. Il ricana et la poussa sur le côté, pas trop rudement, mais fermement.

« Vous savez que je ne suis pas gentil, Poppy. Et il à un devoir à faire. » Il renifla et se dirigea vers le lit, attrapa un Harry qui boudait par les épaules et le mit sur pieds. Harry poussait des cris coléreux.

« Vous n'avez pas le droit de me faire ça ! Lâchez moi ! »

Snape ricana.

« Vous m'en avez donné le droit, Potter. Si vous étiez venu à l'heure au lieu d'utiliser votre handicap pour vous relâcher, je n'aurais même pas eu l'idée d'avoir à vous toucher de telle façon. A présent, habillez vous. Vous avez deux minutes ou sinon je vous sors d'ici tel quel, en robe d'hôpital et pieds nus. » dit il de la même manière implacable qu'il utilisait lorsqu'il était en classe de Potions.

Harry libéra ses épaules et s'assit sur le lit, déterminé à ne rien faire. Snape ne sembla pas surpris. S'il y avait quelque chose dont il semblait désireux, c'était que Harry ne s'habille pas comme il le lui avait demandé. Lorsque Poppy s'approcha pour aider le garçon, Snape secoua la tête.

« Il pourra le faire tout seul lorsqu'il aura fini ses caprices. » dit-il nonchalamment. Harry grogna.

« Vous ne pouvez pas m'obliger à faire quoi que ce soit. Où est le directeur ? Il vous le dira ! »

Snape rit. Un rire froid et sans joie.

« Vous pensez bien que si le directeur ne vous avait pas mis sous ma responsabilité, je ne prendrais même pas la peine de perdre mon précieux temps libre avec des personnes de votre genre, Potter. »

Harry pâlit.

« D-Dumbledore m'a mis sous votre responsabilité ? »

« C'est exact Potter. Quel remarquable ouïe vous avez. » Snape ricana, appréciant son nouveau moyen de harceler Harry Potter sans que l'image du placard ne vienne le gêner. Il regarda l'horloge. « Il ne vous reste qu'une minute avant de faire parader votre derrière dans tout le château. » dit-il en en anticipant son amusement qu'il n'essaya pas de cacher.

Harry se raidit, acceptant à nouveau le défi de Snape. Il tâtonna en cherchant ses vêtements et lui lança un regard noir.

« Je ne sais même pas où sont mes vêtements. »

« Eh bien utilisez votre tête pour les retrouver, Potter. Il est temps pour vous de commencer à utiliser ce qui se trouve sur vos épaules. » dit Snape d'une voix extrêmement traitante.

Les joues de Harry rougirent de colère, ce qui contrastait avec sa peau pâle et blafarde. Il avait l'air d'un chaton renfrogné et malade. Snape ne savait pas s'il devait rire ou regarder de loin. Les yeux du garçon étaient toujours fixes et dans le vague mais ils parvenaient encore à brûler de colère pour le maître des Potions. Snape sourit d'un air affecté, non sans satisfaction d'avoir la chance d'humilier le garçon et de lui infliger un 'traitement spécial'. La voix glaciale de Harry attira son attention vers lui.

« Accio pantalon. Accio robe."

En dépit de sa déception, Snape était satisfait de voir que les rouages de la tête du griffondor étaient toujours en état de marche. Il renifla pour montrer son indignation et aussi récompenser le garçon de ses efforts.

« Plus que 40 secondes, Potter. Je vais venir vous chercher. » dit il d'une voix aussi déplaisante qu'il le pouvait.

40 secondes plus tard, il retourna chercher un Harry habillé, la tête légèrement penchée, la main sur le côté du lit, fixant à une distance moyenne. Poppy envoyait des regards meurtriers au maître des Potions et il ne doutait pas que la médicomage avait aidé le garçon à s'habiller en dépit de son interdiction. C'était la raison pour laquelle il était sortit, à la base.

Il toussa pour attirer l'attention du garçon.

« Bien, Potter. Je suis heureux que vous contrôliez vos connaissances de troisième année. Suivez moi. Il est temps de commencer. » dit il d'une voix sarcastique en se tournant pour sortir.

Ça allait commencer.

À suivre

Chapitre 4

Rogue regarda par-dessus son épaule et remarqua, non sans surprise, que Harry ne le suivait pas. Il s'arrêta à la porte de l'infirmerie et se retourna. Pompom tenait la main de Harry et le menait hors de l'infirmerie.

« Non, Pompom. »

« Mais, Séverus… »

« Vous protesterez auprès du directeur. Je vous serais grés de laisser Harry seul, et si vous ne supportez pas de le regarder, partez. » Dit-il sèchement, la matrone se fâcha et se détourna, aucun doute qu'elle allait suivre les conseils de Rogue et aller voir Dumbledore.

Harry s'approcha maladroitement du milieu de l'aile formée par les lits, la tête penchée, les cils humides et les lèvres pincées formant une ligne mince. Ses mains étaient serrées en poings, et ils étaient énergiques. Mais ce que Rogue sentait qui irradiait du garçon était une peur immense, une peur de l'inconnu. Maintenant, Harry Potter était immobile au milieu d'un chaos noir avec aucun moyen de se sentir en sécurité.

« Un pied devant l'autre, Potter. Je suis sûr que vous savez toujours comment marcher. » Dit Rogue mais en même temps sa voix était plus douce, moins intimidante. Harry renifla.

« Je détesterais vous décevoir en trébuchant, Professeur. » La voix d'Harry était mielleuse et sarcastique, égalant Rogue. C'était simplement des paroles : il ne faisait pas confiance au Maître des Potions, et après la dernière semaine il était trop tendu pour retenir ses impulsions en disant son opinion.

« Il n'y a aucun moyen de me décevoir, Potter. J'attends, quoi qu'il en soit, que vous soyez moins performant. Maintenant avancez en suivant le son de ma voix. Il n'y a aucun obstacle devant vous. »

Harry serra les dents, mit une main devant lui légèrement penchée, et l'autre le long de son corps. Rogue apprécia les précautions du garçon. Se mélangeant les pieds, lentement, graduellement, Harry fit quelques pas, puis s'arrêta. Rogue claqua sa langue impatiemment.

« Et bien ? Vous comptez rester là ? »

Harry déglutit, tendu, alors qu'il recommençait à marcher d'une manière encore maladroite, sa main tâtonnant devant lui. Il avait besoin d'entendre la voix de Rogue, comme un phare dans la nuit, même si ce phare n'était pas vraiment accueillant. Mais alors qu'il allait justement évacuer sa frustration, il fut complètement surpris quand ses souhaits se réalisèrent.

Le garçon sursauta quand sa main fut soudainement saisie par une autre, fermement et solidement. Cela l'effraya et le soulagea.

« Vous l'avez fait Potter. » Dit Rogue d'un ton méprisant, comme s'il pensait que c'était un jeu qu'il venait de gagner. « Maintenant vous allez me suivre dans votre nouvelle chambre. Vous suivrez le son de mes pas ou de ma voix. Il n'y a pas d'obstacles inhabituels, et je vous aiderai dans les escaliers. » Le Maître des Potions distribuait ses instructions alors qu'il commençait déjà à marcher vers la pièce d'à côté. Harry commença à le suivre, la voix de Séverus Rogue s'atténuait, alors que sans elle il se serait échoué dans le désert noir de la cécité sans aucun sens de l'orientation. Il fit un pas un dehors de l'air familier et stérile de l'infirmerie.

Rogue était tellement satisfait que Potter ait bien voulu le suivre comme il le faisait dans l'infirmerie, qu'il fit brusquement quelque pas bruyant hors de la pièce. Il se retourna et attendis le garçon qui le suivait. À sa surprise, Harry était pour le moment arrêté hors de l'infirmerie. Il déglutit, ses mains se balançaient au hasard autour de lui, et il cligna plusieurs fois des yeux.

« Par ici, Potter. Avancez vers moi. » Appela Rogue en fronçant les sourcils. Cette fois le garçon ne réagit pas comme dans l'infirmerie. Harry semblait prêt à se battre, fis un pas en tremblant, mais il ramena ensuite son pied et secoua sa tête rapidement, irrégulièrement.

« Je…Je ne peux pas. Je ne peux pas faire ça. »

« Bien sur que vous pouvez, idiot ! Suivez ma voix. Il n'y a rien à part de l'air dans cet endroit ! »

« Je… Où êtes-vous ? »

« À votre gauche, écoutez ma voix, maintenant un pied…

« Je ne peux pas faire ça ! Approchez de moi ! Je veux vous trouver ! Je ne peux pas marcher seul ! J'ai besoin d'aide ! Aidez-moi ! » Harry recula, ses yeux grands ouverts, la tête penchée vers le haut comme s'il se noyait et tentait de regagner la surface.

Rogue grogna et s'avança, et Harry trembla encore plus. Ses talons claquaient sur le pas de la porte et il trébucha, tomba sur les fesses, où il resta tremblant et continuant à respirer de façon saccadée.

Quand Rogue s'approcha pour relever le garçon, soupirant d'irritation, Harry sourcilla. Le brusque changement de la pression de l'air plongea son corps dans la terreur, ses mains se levèrent pour protéger sa tête. Il avait toujours été battu dans l'obscurité, et c'était toujours impossible de voir d'où le coup allait venir.

Rogue tressaillit. J'ai été trop brusque. L'image du garçon terrifié qui se recroquevillait, ces yeux aveugles mais hantés de récents souvenirs lui rappelèrent le placard, le sang, l'odeur…et il passa à l'action. Fermement mais doucement, il attrapa les poignets du garçon et les leva pour les mettre au niveau de son visage.

« Ne croyez jamais que je frapperais un enfant, Potter ; pas même vous. » Dit-il d'une voix froide. Il n'avait pas voulu parler aussi froidement, pour une fois sa froideur n'était pas dirigée contre Potter. Mais le garçon frissonna et sourcilla quand même. Énervé Rogue claqua sa langue, mais pour le moment, il compatissait. Il ressentait cette même compassion envers les victimes qu'il ne pouvait pas aider, ceux qui avaient été laissés et qu'il ne pouvait pas soutenir.

Mais pour l'instant, ni Voldemort ni aucun de ses laquais n'était là. Il n'y avait aucune raison de ne pas aider le garçon tremblant et brisé qui était devant lui.

Sauf que c'était Harry Potter, le Garçon-Qui-A-Survécu.

Il renifla en relevant Harry, et celui-ci haleta de surprise de se sentir soulevé de terre d'une façon douce et aimante plutôt que seulement comme un sac de patates qu'on laisserait retomber.

« Où est-ce que vous m'amenez ? » Demanda t'il timidement. Rogue rit une nouvelle fois.

« Par Merlin… Comment pourrez-vous faire face à Voldemort avec la peur que vous avez ? Vous refusez de marcher. J'aimerais beaucoup vous laisser trembler sur le sol comme un jouet que l'on jette, mais je pense que c'est hors de question. Donc je vous porte jusque dans votre chambre. » Dit-il calmement.

Harry resta silencieux durant tout le temps où Rogue le porta dans sa chambre. Rogue ne tenta pas de briser ce silence. Il était trop préoccupé par ses pensées. Il avait presque exagéré aujourd'hui. Il aurait dû mieux faire. Il aurait dû être plus méthodique. Il ne fallait pas seulement jeter tous les ingrédients d'une potion en espérant que ça n'exploserait pas. Imbécile, idiot. Méthode. Il avait fait la même chose qu'au début, et traiter Potter à part.

Harry senti le changement de l'air quand ils entrèrent dans la chambre. C'était chaleureux et accueillant, doux, avec une subtile odeur de miel et de sucre. Le léger parfum poussait Harry à se détendre, peut-être qu'il voulait aussi que le Maître des Potions le dépose. Ce qu'il fit promptement. Ses mains l'incitèrent doucement à se mettre à droite et le stabilisèrent.

« Nous sommes maintenant à l'entrée de votre chambre. Il y a une grande fenêtre à votre droite. Le lit est devant vous à droite et à gauche il y a un bureau et une chaise, et la porte de la salle de bain. Vous avez tout noté ou j'ai besoin de répéter ? » La voix du Maître des Potions était plus tolérante qu'auparavant, bien qu'il soit prudent et prêt à devenir immédiatement agressif. Harry acquiesça rapidement. Il y eut un grand silence, et les mains se détachèrent en même temps des épaules d'Harry. Harry commença à sentir la même incertitude qui montait en lui maintenant qu'il sentait que personne ne contrôlait son orientation.

« Vous avez probablement remarqué que vous n'avez pas encore récupéré votre baguette. » Commença la voix de Rogue qui venait de derrière lui. Jusqu'à maintenant Harry ne l'avait même pas cherché. Rogue continua. « Pour le moment je la garderai. Je vous la rendrai quand vous réussirez à vous orienter seul et que vous marcherez sans problème dans cette chambre, et quand vous aurez appris à vous diriger vers la source d'un bruit. Vous devez apprendre à dépendre seulement de vous-même, et pas de quelque chose que l'on peut vous apporter. »

Harry déglutit, un sentiment d'inutilité l'écrasait maintenant qu'il réalisait que l'énorme effort qu'il avait effectué n'était rien. Il devrait tout réapprendre, même les plus petites choses, mais quelqu'un avec la vue, même s'il ne le faisait pas parfaitement lui serait supérieur.

« Et maintenant ? Je ne peux rien faire. Je ne sais pas comment je vais faire maintenant. Je ne pourrais pas pointer ma baguette directement, laissant mon visage seul face à quelque chose ou quelqu'un. »

A cet instant, Rogue se trouvait face à un dilemme. Son instinct lui disait que quoi qu'il réponde au garçon, cela pourrait avoir de terribles conséquences. Quelle partie de ce qu'il avait prévu pour entraîner Harry pouvait-il prudemment lui révéler sans risques de l'accabler, sans le faire réagir comme il l'avait fait quelques minutes plus tôt ?

Il tourna Harry face à lui. Les yeux verts regardaient fixement un endroit vague de sa cage thoracique, puis son front alors que Rogue se baissait face au garçon. Il plaça la main d'Harry sur son épaule pour qu'il sache qu'il était actuellement au même niveau que lui. Harry cligna des yeux, silencieux, pas sur de ce qu'il devait penser.

« Ecoutez-moi, Potter. Je ne le dirai qu'une fois, donc soyez bien attentif. Pour l'instant, vous avez raison ; vous ne pouvez rien faire de ce que vous aviez l'habitude de faire, et vous êtes faible et vulnérable face à quoi que ce soit dans l'état où vous êtes. » Commença t'il d'une voix neutre et contrôlée. En ce qui concernait Rogue, le ton était le plus favorable qu'il ait utilisé face à Harry Potter ou n'importe qui d'autre. Harry baissa les épaules en acceptant stoïquement son état. Rogue pouvait voir que le garçon était prêt à s'effondrer dans un trou insondable. Rogue se mordit les lèvres. Maintenant pour le sauvetage, la bouée à laquelle le garçon se raccrocherait.

« Cependant, cela peut seulement être une situation vraiment, vraiment, temporaire si vous le souhaitez. » Dit-il d'une voix basse, presque un chuchotement qui caressait les oreilles d'Harry et lui montrait des rêves inaccessibles. « Il y a plusieurs moyens pour que redeveniez aussi compétent que vous l'étiez dans tout les aspects de votre vie ; avec du travail et de l'assiduité, vous pourrez surmonter ça. Ne doutez pas de mes mots. » Dit-il en regardant le sentiment d'incrédulité qui apparaissait sur le visage du garçon, « Parce que si moi, Séverus Rogue, Maître des Potions et Némésis personnelle de Harry Potter trouve que cela vaut la peine d'investir mon temps et mon énergie avec Harry Potter nouvellement aveugle, alors je dois avoir vu quelque chose. Ce n'est pas rien. » Il posa une main douce sur l'épaule du garçon pendant une fraction de seconde, puis se releva. Harry avait une expression impassible. Il contenait tellement d'émotion que Rogue était incapable de lire seulement l'une d'entre elles.

Rogue se retira une nouvelle fois vers la porte, puis s'arrêta et dit de son habituelle voix de dictée « Tous les objets de cette pièce ont été ensorcelés pour émettre un bruit, quand vous voudrez vous déplacer dans cette chambre, vous aurez juste à dire clairement Orei et l'objet ou l'endroit où vous désirez aller, et il sonnera jusqu'à ce que vous y soyez. Essayez une fois, pour vous assurer que cela fonctionne. »

Il y eut un nouveau silence, et Rogue s'inquiéta que Harry ne réponde pas et qu'il reste là, immobile. Mais après un moment, le garçon tourna son visage vers la chambre, et dit d'une voix tremblante « Orei lit. »

Le petit carillon sonna gentiment. Rogue regarda Harry qui marchait maladroitement, se mélangeant les pieds et les mains tendus vers le son. Il lui fallut à peu près trois minutes pour atteindre le lit, mais il y arriva. Rogue fit un signe de la tête quand le carillon s'arrêta puis se retourna pour partir.

« Professeur ? » La voix d'Harry était calme, mais débordait toujours d'un trop plein d'émotion.

« Oui ? »

« De quelle couleur est ma chambre ? » Demanda t'il rapidement et plutôt calmement pour éviter que sa voix cassée ne se remarque trop. Rogue sourit.

« Rouge et or, Potter. Rouge et or. »

À suivre

Chapitre 4

Rogue regarda par-dessus son épaule et remarqua, non sans surprise, que Harry ne le suivait pas. Il s'arrêta à la porte de l'infirmerie et se retourna. Pompom tenait la main de Harry et le menait hors de l'infirmerie.

« Non, Pompom. »

« Mais, Séverus… »

« Vous protesterez auprès du directeur. Je vous serais grés de laisser Harry seul, et si vous ne supportez pas de le regarder, partez. » Dit-il sèchement, la matrone se fâcha et se détourna, aucun doute qu'elle allait suivre les conseils de Rogue et aller voir Dumbledore.

Harry s'approcha maladroitement du milieu de l'aile formée par les lits, la tête penchée, les cils humides et les lèvres pincées formant une ligne mince. Ses mains étaient serrées en poings, et ils étaient énergiques. Mais ce que Rogue sentait qui irradiait du garçon était une peur immense, une peur de l'inconnu. Maintenant, Harry Potter était immobile au milieu d'un chaos noir avec aucun moyen de se sentir en sécurité.

« Un pied devant l'autre, Potter. Je suis sûr que vous savez toujours comment marcher. » Dit Rogue mais en même temps sa voix était plus douce, moins intimidante. Harry renifla.

« Je détesterais vous décevoir en trébuchant, Professeur. » La voix d'Harry était mielleuse et sarcastique, égalant Rogue. C'était simplement des paroles : il ne faisait pas confiance au Maître des Potions, et après la dernière semaine il était trop tendu pour retenir ses impulsions en disant son opinion.

« Il n'y a aucun moyen de me décevoir, Potter. J'attends, quoi qu'il en soit, que vous soyez moins performant. Maintenant avancez en suivant le son de ma voix. Il n'y a aucun obstacle devant vous. »

Harry serra les dents, mit une main devant lui légèrement penchée, et l'autre le long de son corps. Rogue apprécia les précautions du garçon. Se mélangeant les pieds, lentement, graduellement, Harry fit quelques pas, puis s'arrêta. Rogue claqua sa langue impatiemment.

« Et bien ? Vous comptez rester là ? »

Harry déglutit, tendu, alors qu'il recommençait à marcher d'une manière encore maladroite, sa main tâtonnant devant lui. Il avait besoin d'entendre la voix de Rogue, comme un phare dans la nuit, même si ce phare n'était pas vraiment accueillant. Mais alors qu'il allait justement évacuer sa frustration, il fut complètement surpris quand ses souhaits se réalisèrent.

Le garçon sursauta quand sa main fut soudainement saisie par une autre, fermement et solidement. Cela l'effraya et le soulagea.

« Vous l'avez fait Potter. » Dit Rogue d'un ton méprisant, comme s'il pensait que c'était un jeu qu'il venait de gagner. « Maintenant vous allez me suivre dans votre nouvelle chambre. Vous suivrez le son de mes pas ou de ma voix. Il n'y a pas d'obstacles inhabituels, et je vous aiderai dans les escaliers. » Le Maître des Potions distribuait ses instructions alors qu'il commençait déjà à marcher vers la pièce d'à côté. Harry commença à le suivre, la voix de Séverus Rogue s'atténuait, alors que sans elle il se serait échoué dans le désert noir de la cécité sans aucun sens de l'orientation. Il fit un pas un dehors de l'air familier et stérile de l'infirmerie.

Rogue était tellement satisfait que Potter ait bien voulu le suivre comme il le faisait dans l'infirmerie, qu'il fit brusquement quelque pas bruyant hors de la pièce. Il se retourna et attendis le garçon qui le suivait. À sa surprise, Harry était pour le moment arrêté hors de l'infirmerie. Il déglutit, ses mains se balançaient au hasard autour de lui, et il cligna plusieurs fois des yeux.

« Par ici, Potter. Avancez vers moi. » Appela Rogue en fronçant les sourcils. Cette fois le garçon ne réagit pas comme dans l'infirmerie. Harry semblait prêt à se battre, fis un pas en tremblant, mais il ramena ensuite son pied et secoua sa tête rapidement, irrégulièrement.

« Je…Je ne peux pas. Je ne peux pas faire ça. »

« Bien sur que vous pouvez, idiot ! Suivez ma voix. Il n'y a rien à part de l'air dans cet endroit ! »

« Je… Où êtes-vous ? »

« À votre gauche, écoutez ma voix, maintenant un pied…

« Je ne peux pas faire ça ! Approchez de moi ! Je veux vous trouver ! Je ne peux pas marcher seul ! J'ai besoin d'aide ! Aidez-moi ! » Harry recula, ses yeux grands ouverts, la tête penchée vers le haut comme s'il se noyait et tentait de regagner la surface.

Rogue grogna et s'avança, et Harry trembla encore plus. Ses talons claquaient sur le pas de la porte et il trébucha, tomba sur les fesses, où il resta tremblant et continuant à respirer de façon saccadée.

Quand Rogue s'approcha pour relever le garçon, soupirant d'irritation, Harry sourcilla. Le brusque changement de la pression de l'air plongea son corps dans la terreur, ses mains se levèrent pour protéger sa tête. Il avait toujours été battu dans l'obscurité, et c'était toujours impossible de voir d'où le coup allait venir.

Rogue tressaillit. J'ai été trop brusque. L'image du garçon terrifié qui se recroquevillait, ces yeux aveugles mais hantés de récents souvenirs lui rappelèrent le placard, le sang, l'odeur…et il passa à l'action. Fermement mais doucement, il attrapa les poignets du garçon et les leva pour les mettre au niveau de son visage.

« Ne croyez jamais que je frapperais un enfant, Potter ; pas même vous. » Dit-il d'une voix froide. Il n'avait pas voulu parler aussi froidement, pour une fois sa froideur n'était pas dirigée contre Potter. Mais le garçon frissonna et sourcilla quand même. Énervé Rogue claqua sa langue, mais pour le moment, il compatissait. Il ressentait cette même compassion envers les victimes qu'il ne pouvait pas aider, ceux qui avaient été laissés et qu'il ne pouvait pas soutenir.

Mais pour l'instant, ni Voldemort ni aucun de ses laquais n'était là. Il n'y avait aucune raison de ne pas aider le garçon tremblant et brisé qui était devant lui.

Sauf que c'était Harry Potter, le Garçon-Qui-A-Survécu.

Il renifla en relevant Harry, et celui-ci haleta de surprise de se sentir soulevé de terre d'une façon douce et aimante plutôt que seulement comme un sac de patates qu'on laisserait retomber.

« Où est-ce que vous m'amenez ? » Demanda t'il timidement. Rogue rit une nouvelle fois.

« Par Merlin… Comment pourrez-vous faire face à Voldemort avec la peur que vous avez ? Vous refusez de marcher. J'aimerais beaucoup vous laisser trembler sur le sol comme un jouet que l'on jette, mais je pense que c'est hors de question. Donc je vous porte jusque dans votre chambre. » Dit-il calmement.

Harry resta silencieux durant tout le temps où Rogue le porta dans sa chambre. Rogue ne tenta pas de briser ce silence. Il était trop préoccupé par ses pensées. Il avait presque exagéré aujourd'hui. Il aurait dû mieux faire. Il aurait dû être plus méthodique. Il ne fallait pas seulement jeter tous les ingrédients d'une potion en espérant que ça n'exploserait pas. Imbécile, idiot. Méthode. Il avait fait la même chose qu'au début, et traiter Potter à part.

Harry senti le changement de l'air quand ils entrèrent dans la chambre. C'était chaleureux et accueillant, doux, avec une subtile odeur de miel et de sucre. Le léger parfum poussait Harry à se détendre, peut-être qu'il voulait aussi que le Maître des Potions le dépose. Ce qu'il fit promptement. Ses mains l'incitèrent doucement à se mettre à droite et le stabilisèrent.

« Nous sommes maintenant à l'entrée de votre chambre. Il y a une grande fenêtre à votre droite. Le lit est devant vous à droite et à gauche il y a un bureau et une chaise, et la porte de la salle de bain. Vous avez tout noté ou j'ai besoin de répéter ? » La voix du Maître des Potions était plus tolérante qu'auparavant, bien qu'il soit prudent et prêt à devenir immédiatement agressif. Harry acquiesça rapidement. Il y eut un grand silence, et les mains se détachèrent en même temps des épaules d'Harry. Harry commença à sentir la même incertitude qui montait en lui maintenant qu'il sentait que personne ne contrôlait son orientation.

« Vous avez probablement remarqué que vous n'avez pas encore récupéré votre baguette. » Commença la voix de Rogue qui venait de derrière lui. Jusqu'à maintenant Harry ne l'avait même pas cherché. Rogue continua. « Pour le moment je la garderai. Je vous la rendrai quand vous réussirez à vous orienter seul et que vous marcherez sans problème dans cette chambre, et quand vous aurez appris à vous diriger vers la source d'un bruit. Vous devez apprendre à dépendre seulement de vous-même, et pas de quelque chose que l'on peut vous apporter. »

Harry déglutit, un sentiment d'inutilité l'écrasait maintenant qu'il réalisait que l'énorme effort qu'il avait effectué n'était rien. Il devrait tout réapprendre, même les plus petites choses, mais quelqu'un avec la vue, même s'il ne le faisait pas parfaitement lui serait supérieur.

« Et maintenant ? Je ne peux rien faire. Je ne sais pas comment je vais faire maintenant. Je ne pourrais pas pointer ma baguette directement, laissant mon visage seul face à quelque chose ou quelqu'un. »

A cet instant, Rogue se trouvait face à un dilemme. Son instinct lui disait que quoi qu'il réponde au garçon, cela pourrait avoir de terribles conséquences. Quelle partie de ce qu'il avait prévu pour entraîner Harry pouvait-il prudemment lui révéler sans risques de l'accabler, sans le faire réagir comme il l'avait fait quelques minutes plus tôt ?

Il tourna Harry face à lui. Les yeux verts regardaient fixement un endroit vague de sa cage thoracique, puis son front alors que Rogue se baissait face au garçon. Il plaça la main d'Harry sur son épaule pour qu'il sache qu'il était actuellement au même niveau que lui. Harry cligna des yeux, silencieux, pas sur de ce qu'il devait penser.

« Ecoutez-moi, Potter. Je ne le dirai qu'une fois, donc soyez bien attentif. Pour l'instant, vous avez raison ; vous ne pouvez rien faire de ce que vous aviez l'habitude de faire, et vous êtes faible et vulnérable face à quoi que ce soit dans l'état où vous êtes. » Commença t'il d'une voix neutre et contrôlée. En ce qui concernait Rogue, le ton était le plus favorable qu'il ait utilisé face à Harry Potter ou n'importe qui d'autre. Harry baissa les épaules en acceptant stoïquement son état. Rogue pouvait voir que le garçon était prêt à s'effondrer dans un trou insondable. Rogue se mordit les lèvres. Maintenant pour le sauvetage, la bouée à laquelle le garçon se raccrocherait.

« Cependant, cela peut seulement être une situation vraiment, vraiment, temporaire si vous le souhaitez. » Dit-il d'une voix basse, presque un chuchotement qui caressait les oreilles d'Harry et lui montrait des rêves inaccessibles. « Il y a plusieurs moyens pour que redeveniez aussi compétent que vous l'étiez dans tout les aspects de votre vie ; avec du travail et de l'assiduité, vous pourrez surmonter ça. Ne doutez pas de mes mots. » Dit-il en regardant le sentiment d'incrédulité qui apparaissait sur le visage du garçon, « Parce que si moi, Séverus Rogue, Maître des Potions et Némésis personnelle de Harry Potter trouve que cela vaut la peine d'investir mon temps et mon énergie avec Harry Potter nouvellement aveugle, alors je dois avoir vu quelque chose. Ce n'est pas rien. » Il posa une main douce sur l'épaule du garçon pendant une fraction de seconde, puis se releva. Harry avait une expression impassible. Il contenait tellement d'émotion que Rogue était incapable de lire seulement l'une d'entre elles.

Rogue se retira une nouvelle fois vers la porte, puis s'arrêta et dit de son habituelle voix de dictée « Tous les objets de cette pièce ont été ensorcelés pour émettre un bruit, quand vous voudrez vous déplacer dans cette chambre, vous aurez juste à dire clairement Orei et l'objet ou l'endroit où vous désirez aller, et il sonnera jusqu'à ce que vous y soyez. Essayez une fois, pour vous assurer que cela fonctionne. »

Il y eut un nouveau silence, et Rogue s'inquiéta que Harry ne réponde pas et qu'il reste là, immobile. Mais après un moment, le garçon tourna son visage vers la chambre, et dit d'une voix tremblante « Orei lit. »

Le petit carillon sonna gentiment. Rogue regarda Harry qui marchait maladroitement, se mélangeant les pieds et les mains tendus vers le son. Il lui fallut à peu près trois minutes pour atteindre le lit, mais il y arriva. Rogue fit un signe de la tête quand le carillon s'arrêta puis se retourna pour partir.

« Professeur ? » La voix d'Harry était calme, mais débordait toujours d'un trop plein d'émotion.

« Oui ? »

« De quelle couleur est ma chambre ? » Demanda t'il rapidement et plutôt calmement pour éviter que sa voix cassée ne se remarque trop. Rogue sourit.

« Rouge et or, Potter. Rouge et or. »

À suivre