Disclaimer : Riviera est l'oeuvre de Neil Jordan.
Résumé : Christos pleure en cachette. Adam et Adriana ont alors un léger aperçu de sa solitude et de son mal-être.
Liste du Discord « Les défis galactiques » : Horoscope du 26/11/2020: Cancer: -Elle/il pleure, qu'est-ce que je dois faire? -Va la/le réconforter.-Comment je fais ça? Commence par des câlins.-Avec quoi ? + Prompt 30 : "Un peu de sympathie, ce serait bien." + Situation 299 : Un personnage A pleure sans raison précise, inquiétant un personnage B qui ne sait pas quoi faire + Personnage secondaire : Christos Clios + Prompt du 02/04/2021 : Je ne compte pas + Qui est-ce : Ecrire sur un perso qui a une sœur + Combinaison 3 : Riche / Chat / Bleu / Oublier / Cadeau / Empoisonné / Solitude / Drogue
Plaie d'amour est dangereuse
La vision est si rare qu'elle stoppe Adriana et Adam, elle les fige sur place. Seul dans son coin, se pensant isolé et, pour sa défense, il est vrai qu'il est bien caché, Christos pleure. C'est une chose rare. Leur frère pleure rarement. Non, rectification, il ne s'autorise pas à pleurer devant les gens, pas même devant sa propre famille. Elle était encore petite à l'époque mais Ada se souvient bien des fois où leur père le rabrouait parce qu'il était en larmes. A croire que les garçons n'ont pas le droit de montrer leurs sentiments. A croire que Christos n'en a pas le droit, lui à qui on a offert le cadeau empoisonné qu'est le fait d'hériter de l'empire financier des Clios et de sa banque, de ses charités. Des trois enfants de Constantine, c'est lui qui a le plus besoin de soutien. Pourtant, l'oublier est fréquent. Il est l'enfant du milieu avec tout ce que cela comprend. Contrairement à sa sœur, il n'a pas le luxe d'être le seul de son genre dans leur triumvirat, le bébé de la famille à qui on passe les caprices, dont on sourit des bêtises. Et on le compare sans cesse à son aîné, plus flamboyant, plus charismatique, qui a l'air plus sûr de lui, celui qui aurait dû hériter mais qui s'est retiré. Celui a qui on a laissé le choix. Alors tout est retombé sur lui et on le laisse se noyer peu à peu dans le stress, dans une solitude qui n'aurait pas lieu d'être mais qui existe. C'est dans sa propre famille qu'il se sent le plus à part, le plus rejeté. Et après, leur mère s'étonne qu'il préfère se reposer dans les bras de la drogue plutôt que dans ceux qui partagent pourtant son sang. Les substances ne mentent pas : elles le font se sentir mieux pour un temps et il sait que c'est temporaire. L'existence de leur cadet est remplie de drames et personne ne le voit, personne ne l'entend, personne n'en parle tout comme il ne peut s'en ouvrir à personne. Qui irait plaindre le pauvre fils de riche face aux problèmes des gens plus démunis que lui ?
- Il pleure, qu'est-ce que je dois faire ? Glisse Adam à l'oreille de la benjamine
- Va le réconforter. Lui répond aussitôt Adriana
- Comment je fais ça ? S'enquiert-il, incertain.
- Commence par des câlins.
- Avec quoi ?
Adriana le regarde, les yeux noirs d'une colère sourde.
- Un peu de sympathie, ce serait bien. Assène-t-elle
Adam aime Christos, elle le sait. Tout comme elle sait combien leur frère les aime en retour. Elle n'ose pas imaginer ce que serait sa vie s'ils n'étaient pas là. Ils sont peut-être les seuls à voir le vrai lui par-delà le costume bleu qui flatte sa carnation. Adam tuerait pour Christos. Et malgré tout ça, alors que son cadet pleure seul dans son coin, se cachant comme un petit chat de gouttière pour se protéger de la pluie, comme si ses larmes étaient une vision honteuse, il est là, incapable de réagir ou de savoir quoi dire, quoi faire, comment lui tendre la main face à sa détresse. Adriana ne peut pas lui en vouloir. Si quelqu'un est à blâmer, ce serait un duo : leurs parents. Oui, leurs parents, pour se montrer si dur envers leur fils qui n'a pas à rougir de qui il est, un homme qui a les capacités requises pour réussir mais qui ne reflète pas qui ils auraient voulu qu'il soit. Ils ne voulaient pas d'un enfant à part entière, ils voulaient un Pygmalion. Tout dans l'enfance de Christos a des relents d'abus psychologiques pernicieux mais invisibles, légaux même. La jeune fille s'approche sans un bruit, s'assoit à ses côtés et aussitôt, sans réfléchir, elle enlace le corps parcouru de soubresauts de son aîné. Elle pose sa tête sur le creux de son épaule.
- Ne pleure pas... Lui dit-elle doucement. Je n'aime pas te voir pleurer.
- Ne t'en fais pas pour moi. Tu peux t'en aller, ça ira. Déclare Christos d'une petite voix alors qu'il tente de retrouver une contenance.
- Non, ça n'ira pas. Pas pour moi.
- Je ne compte pas. Décrète-t-il. Ca ira.
Le ton sans appel leur brise le cœur. Ce «Je ne compte pas » résonne en eux comme un coup de feu au beau milieu de la nuit. Christos dit ne pas compter. Sans doute pense-t-il qu'il n'a jamais compté. Qu'il ne comptera jamais sauf quand on a besoin de lui et qu'il sera ensuite remisé une fois ses talents utilisés. Il ne pourra jamais être qui il est car qui il est fait honte à leurs parents. Il y a bien Georgina, leur belle-mère, qui essaye. C'est maladroit mais elle a le mérite d'essayer. C'est juste que les dommages sont faits, les blessures sont profondes et de fait, Christos n'a confiance en presque personne, pas même en lui-même.
- Tu comptes pour moi. Contre Adriana. Et tu comptes pour Adam.
L'aîné n'a pas bougé de sa place et a un sourire un peu gauche mais ses yeux ne démentent pas les propos. Il finit par s'asseoir à ses côtés et lui tapote maladroitement son épaule libre.
- Tu comptes pour nous. Reprend la plus jeune. Et je m'en fous si je dois te le répéter tous les jours si ça te permet de le comprendre et de le croire. Tu comptes pour nous. Ton vrai toi compte pour nous. Le reste du monde peut aller se faire foutre.
Un léger sourire naît enfin sur les lèvres de leur frère. Tout ce dont Christos a besoin, c'est d'un peu d'affection, d'amour sincère et de reconnaissance. Et Adriana le jure, elle vivante, elle se fait garante de cette mission sacrée :
Christos aura toujours un frère et une sœur qui l'aimeront pour lui aussi longtemps qu'ils vivront.
FIN
