YESS bjr quatrième jour! J'arrive pas à croire que je suis arrivée jusque là sachez que c'est un exploit et qu'il m'en reste plus que deux à écrire. J'espère que vous allez bien, aujourd'hui c'est Ennemies to Lovers combiné avec Office AU hihihi. Du coup comme en ce moment je regarde The Office et bah c'est un peu un UA The Office où ils vendent aussi du papier. J'espère que ce sera clair et tout en tout cas enjoy!

as usual merci à ma sœur, à CATHARSIS et vous tous i love yall

Lorde - Green Light


Did it frighten you

How we kissed when we danced on the light up floor ?


Jean tapota nerveusement sur son volant en regardant Eren se glisser sur le siège passager, laissant entrer la brise matinale derrière lui. Son visage sombre indiquait que lui aussi, n'avait pas beaucoup d'heures de sommeil au compteur et que lui non plus n'était pas enchanté d'être là. Une fois qu'il le vit attaché, il démarra, se demandant toujours ce qui avait bien pu se passer dans la tête d'Erwin Smith. Ce dernier avait beau être un excellent patron et prendre en général de très bonnes décisions, le vendeur doutait fortement de son choix d'équipe pour cette prospection.

Il n'avait jamais travaillé avec Eren. Plus il avait évolué à ses côtés dans l'entreprise, plus les raisons le confortant dans cette idée avaient augmentées : Eren était malpoli, manquait de distinction et de discernement, ne finissait jamais ses phrases et ne mâchait pas ses mots. Alors il ne voyait pas en quoi le supporter trois jours d'affilée allait leur être bénéfique – et au vu de l'expression du brun qui n'évoluait pas d'un pouce, ils avaient au moins le mérite de penser la même chose.

Aucun ne prononça mot jusqu'à ce que Jean arrête la voiture sur le parking du supermarché dans lequel ils avaient rendez-vous et qu'il ouvre la bouche :

- Tu me laisses parler.

Eren le fusilla du regard.

- Dans tes rêves.

Ça n'allait jamais fonctionner. Jean soupira et passa une main sur son visage, jetant un coup d'œil aux chiffres digitaux affichés dans la voiture. Huit heures vingt-cinq et sa tension était déjà bien trop haute pour qu'il passe une bonne journée, alors il abandonna l'idée d'avoir une discussion civilisée.

- C'est pas très compliqué : j'ai fait plus de ventes que toi ce mois-ci, alors tu la fermes.

Eren afficha un rictus qui ne lui fit pas plaisir.

- Tu me rappelles qui c'était le mois dernier ?

- Si on fait le compte sur toute l'année, je suis devant toi.

- On est en février.

- L'année scolaire, connard.

- Si tu continues de pleurer, on va être en retard.

Jean eut un grommèlement rageur, surtout parce qu'Eren avait raison, et décida d'être le plus adulte : il quitta l'habitacle en claquant fermement la porte derrière lui avant de se souvenir qu'il s'agissait de sa voiture à lui et qu'elle était à deux doigts de lui mourir entre les mains. Plus frustré encore, il marcha jusqu'au supermarché sans attendre Eren qui le suivait de toute façon.

Ils montèrent dans les bureaux et trouvèrent leur chemin jusqu'à celui du responsable, dans lequel ils arrivèrent presque à l'heure. L'homme ne devait pas avoir plus d'une trentaine d'années, et il les reçut en souriant, ce qui en général était un bon signe quand il était aussi tôt dans la matinée.

Jean ouvrit la bouche pour parler, mais Eren fut plus rapide.

- Bonjour, monsieur Berner, enchanté. Eren Jaeger et voici Jean Kirschtein. Permettez-moi de vous présenter la raison de notre venue. Il me semble que vous avez reçu notre plaquette de présentation ?

L'homme hocha la tête en tirant un prospectus de son tiroir de bureau, et Jean haït Eren tant et si fort qu'il ne desserra pas les dents, essayant de retenir avec peine les répliques qui lui mordaient la langue.

- L'offre est intéressante, en effet, mais les prix de votre compagnie restent plus haut que ceux de mes fournisseurs actuels.

Jean haussa un sourcil et sauta sur l'occasion : c'était un sujet qu'il maîtrisait bien mieux qu'Eren, alors il enterra bien vite toute sa colère qu'il pensait indépassable et prit la parole :

- Bien sûr, nous sommes conscients que c'est le cas. En revanche, il me faut vous dire que non seulement, notre service est plus rapide, mais il est aussi plus humain.

- Fondamentalement, le coupa soudain Eren, nous travaillons avec-

- Nous travaillons avec le client directement, reprit Jean par-dessus son soi-disant partenaire qui ne savait pas se taire pendant plus de dix secondes, puisque-

- Sa satisfaction directe est-

- Sa satisfaction-

- Tu vas arrêter de m'interrompre oui ? s'agaça alors Eren en montant le ton.

Jean le fusilla du regard.

- On s'était mis d'accord.

- Si encore tu disais quelque chose d'intéressant !

- On dit exactement la même chose !

- Messieurs… ?

Les deux s'interrompirent pour se tourner vers leur client qui les regardait avec des yeux ronds, sûrement incapable de savoir s'il assistait à un manque flagrant de professionnalisme ou à une caméra cachée.

Jean se sentit rougir en se souvenant qu'il n'était pas assis à son bureau, et se racla la gorge. Il n'y avait vraiment qu'Eren Jaeger pour lui faire perdre son sang-froid comme ça. Il le fusilla du regard une dernière fois pour la forme, constata qu'il était tout aussi gêné que lui, et il ouvrit la bouche :

- Veuillez-

- Veuillez nous excuser, annonça alors la voix d'Eren par-dessus la sienne.

- Non mais sérieusement ? explosa alors Jean.

- Excusez-le, fit le brun qui tentait visiblement de réparer les pots cassés, il s'est levé du mauvais pied ce matin.

Jean jura avoir vu un sourire moqueur lancé dans sa direction. Il ouvrit la bouche, rageur, mais la voix douce du client qui ne savait sûrement plus ou se mettre les interrompit :

- Ecoutez messieurs… J'apprécie que vous ayez fait la route jusqu'ici pour me rencontrer mais… Je pense que je vais en rester à mon fournisseur actuel ?

- Mais-, commença Eren avant que le client ne secoue la tête.

- Non. Non, franchement, mon choix est plutôt définitif.

Jean ravala sa salive en constatant le fiasco qu'ils avaient devant eux : il y avait une résignation ferme dans la voix de l'homme qu'un vendeur expérimenté de sa trempe savait reconnaître. Eren aussi, visiblement, puisqu'il n'insista pas et se contenta de saluer leur client de quelques millisecondes à peine. Jean l'imita et très vite, ils furent tous les deux sur le parking.

Eren se tourna vers lui, rageur, mais Jean le devança :

- Si tu m'avais laissé parler-

- Si toi tu m'avais putain de laissé parler ! Franchement je savais que ça allait être un désastre, mais à ce point quand même !

Jean plissa les yeux et fit un pas vers lui.

- T'as autant ta part de responsabilité que moi, d'accord ? Grandis un peu.

- Dixit le type qui conduit encore la voiture de sa daronne.

Si Jean avait eu dix-sept ans, il serait devenu violent. Mais Jean n'avait pas dix-sept ans, Jean en avait huit de plus et savait qu'à son âge, c'était plutôt mal vu de se battre avec un collègue de bureau.

Il se contenta de le fusiller du regard et puis sortit son téléphone de sa poche, appuya sur un des numéros en raccourci et le porta à son oreille.

- Erwin ? C'est Jean.

Il vit Eren lever les yeux au ciel mais ne s'en formalisa pas, et s'éloigna de quelques pas.

- Non, je suis avec lui, et non, ça s'est très mal passé.

Il tapa du pied sur le sol, attendant qu'Erwin veuille bien lui dire les mots qu'il attendait depuis qu'il avait appris avec qui il allait travailler. Et pourtant, son patron n'eut pas la subtilité de comprendre sa demande, alors il la formula à voix haute :

- Je ne veux plus travailler avec lui, tu peux faire venir quelqu'un d'autre s'il te plaît ?

Quand Jean raccrocha une poignée de minutes plus tard, il retourna vers Eren en traînant des pieds.

- Qu'est-ce qu'il a dit ? demanda le brun avec un intérêt non feint.

Jean haussa les épaules.

- On continue, marmonna-t-il en montant dans sa voiture pour ne pas entendre Eren râler derrière lui.

Une fois que ce dernier l'eut rejoint, il avait pris sa décision. Il se tourna vers lui, plantant son regard dans le sien, avec une assurance dont il ne faisait preuve que lorsqu'il s'agissait de boulot.

- Je compte pas reproduire ce qu'il s'est passé tout à l'heure, alors on n'a pas le choix. Il va falloir qu'on travaille ensemble, d'accord ? Et j'en sais rien, vois ça comme une pièce de théâtre ou quelque chose du genre, fais semblant de m'apprécier ou de me supporter j'en n'ai rien à faire, mais fais un truc.

- Je suis pas le seul-

- Ouais, je ferai un effort aussi. Maintenant fous moi la paix.

- Quel début incroyable.

- On n'est pas en face d'un client là, si ?

- T'es sûr que t'as pas besoin d'un entraînement ?

Jean démarra pour ne pas avoir à le fusiller du regard – encore.

- Parle pour toi, marmonna-t-il, couvert par le bruit du moteur.

Le trajet se déroula en silence, mais Jean ne pouvait s'empêcher de penser à ce qu'Eren avait dit, parce qu'il avait beau détester l'admettre, il n'avait pas tort. Enfin, c'était une conclusion à laquelle lui aussi aurait pu parvenir de lui-même, alors ça ne comptait pas vraiment comme une défaite. Mais toujours était-il que faire semblant de s'apprécier n'allait pas être chose facile, surtout en prenant en compte le fait que la seule pièce dans laquelle ils acceptaient de se voir était la salle de réunion, à condition qu'ils n'y soient pas seuls – sinon, ils se lançaient un regard mauvais, une pique si c'était un bon jour, et retournaient à leurs bureaux respectifs.

Il se gara cette fois devant une bâtisse carrée, bordée d'un jardin soigneusement entretenu. Autant dire que leurs coups d'éclats, même minimes, ne passeraient pas ici.

Jean sortit de la voiture, Eren sur ses talons, et le brun arriva à sa hauteur.

- Ça ira ?

La moquerie dans sa voix était palpable, alors Jean dut faire un effort pour ne pas immédiatement monter sur ses grands chevaux.

- Ferme-la, marmonna-t-il.

Heureusement, ils pénétrèrent dans le hall d'entrée avant qu'Eren ne puisse rétorquer quoi que ce soit, et furent introduit auprès de la personne qu'ils devaient voir après quelques minutes d'attente silencieuses dans une salle décorée de larges tableaux. Le décor eut au moins le mérite de les mettre dans l'ambiance.

Eren commença son discours, reprenant l'entrée en matière qu'il avait employée plus tôt. Quand la cliente leur fit la même remarque que tout à l'heure, il se tourna vers Jean qui bondit à pieds joints dans la conversation, ignorant l'air moqueur affiché un instant sur le visage de son soi-disant partenaire.

- Les prix sont peut-être plus élevés, mais c'est que le service est d'une qualité supérieure. Comment vous contactent vos fournisseurs actuels ?

- Ils ne me contactent pas, affirma la femme après réflexion.

- Exactement, ou alors sûrement par mail automatique.

Jean la vit acquiescer et puis, à sa droite, entendit Eren prendre une inspiration, signifiant qu'il n'allait pas tarder à l'ouvrir. Plus rapide encore que la fois où il avait dû éviter une balle de basket mal placée, il posa sa main sur son bras discrètement pour lui signaler qu'il n'avait pas terminé.

Ce ne fut qu'une fois qu'il fut allé jusqu'au bout de son speech habituel qu'il ôta ses doigts. Une vague de froid le traversa et il se rendit compte alors de la chaleur qui émanait d'Eren. Ce dernier enchaîna, comme si de rien n'était, et quand ils s'affalèrent sur les sièges de la voiture une dizaine de minutes plus tard, ils avaient un contrat en poche.

- C'était pas si mal, marmonna Jean qui au fond, était largement soulagé.

- Ouais, pas si mal pour le deuxième meilleur vendeur du bureau.

Jean leva les yeux au ciel et, pour une fois, ne le fusilla pas vraiment du regard.

Ils poursuivirent avec deux clients supplémentaires et puis le besoin d'une pause se fit sentir, alors ils s'installèrent à la terrasse du premier fast-food qui croisa leur route.

- Tu penses que si on arrive à tout bien réussir Erwin nous remettra ensemble ? demanda Eren au bout de plusieurs minutes, l'air pensif.

Jean leva un regard horrifié de son burger.

- J'y avais pas réfléchi.

- Je pense qu'il l'a fait exprès.

- Explique.

- Je veux dire, il sait très bien que je peux pas te blairer – tout le monde le sait, alors il a dû se dire que nous forcer ça nous rapprocherait.

Jean mima le dégoût, et Eren acquiesça vivement.

- Pourquoi il y a pas pensé plus tôt ? demanda finalement le premier.

Le brun haussa les épaules.

- Je pense qu'il en avait pas grand-chose à faire. Armin a dû se plaindre. Ou lui donner l'idée.

- Sûrement les deux, grogna Jean. T'aurais jamais dû le pistonner.

Eren acquiesça à nouveau, et il apparut à peine étrange qu'ils se mettent d'accord sur deux choses différentes en moins de dix minutes – bien qu'elles soient approuvées sur fond de désapprobation mutuelle.

Une fois leur repas terminé, ils reprirent la voiture pour boucler leur journée. Finalement, la technique fonctionnait plutôt bien : ils se cherchaient dans la voiture et puis, devant les clients, prétendaient être le duo idéal. À deux reprises, Jean eut à poser sa main sur le bras d'Eren. Une fois, ce fut l'inverse, mais au bout du compte le principe et la réalisation restaient les mêmes : ils réagissaient bien mieux au langage physique que verbal.


I whisper things, the city sings 'em back to you


Le lendemain, Jean eut peur que ses efforts de la veille soient envoyés aux oubliettes par un Eren grognon, mais le brun se comporta comme il l'avait fait la veille.

Ils empochèrent tous leurs contrats de la matinée, et passèrent leur pause de midi dans la voiture de Jean.

- Si t'en mets partout, je te tue.

- Je sais manger, Kirschtein.

- J'ai des doutes.

- C'est la deuxième fois qu'on mange ensemble.

- Raison de plus pour me méfier.

Peut-être que l'absence de véritable conflit depuis vingt-quatre heures les mettait dans une position où ils se sentaient obligés de s'attarder sur des détails de gamin. Mais Jean y trouva un étrange sentiment de familiarité qu'il embrassa avec joie, tout en mordant dans son sandwich.

- Au moins j'ai le mérite de pas être insupportable, reprit Eren.

- C'est genre, ta réplique préférée ou bien ?

- Je fais que dire la vérité, dit le brun en haussant les épaules.

Jean masqua son amusement derrière son pain et le mit sur le compte de sa bonne humeur : il avait bien dormi cette nuit, leur matinée avait été fructueuse et Eren s'était révélé presque supportable, ce qui franchement suffisait à lui offrir la perspective d'une journée meilleure que la normale.

- Tu veux travailler toute ta vie dans le papier ? finit par lâcher le brun.

Jean s'offusqua de plusieurs choses à cet instant : Eren n'avait pas fini de mâcher, lui posait une question personnelle supposée amener une conversation et avait fait tomber un morceau de salade sur ses cuisses. Il ne sut pas vraiment ce qu'il le poussa à froncer les sourcils de ces trois éléments, mais ce fut suffisant pour que sa bonne humeur diminue doucement. Pourtant, il répondit quand même. Quelque chose dans sa logique lui souffla qu'il n'avait jamais expliqué ses projets à quelqu'un, et qu'Eren serait la meilleure personne pour les entendre. Parce qu'il avait beau éviter de lui parler à tout prix, il savait ses réactions et connaissait ses centres d'intérêts. Cinq ans, c'était long cinq ans, et travailler avec quelqu'un sur ce laps de temps suffisait à apprendre sur lui des éléments qu'on aurait préféré sûrement ne jamais savoir.

Toujours était-il que Jean répondit le plus sincèrement possible :

- J'aimerais écrire un film.

Les mots flottèrent un instant dans l'habitacle avant qu'Eren n'ait un murmure doucement approbateur :

- C'est cool.

Jean sentit tout de même ses épaules se détendre, comme si la réponse le rassurait alors qu'il n'y avait pas lieu d'y accorder de l'importance. Et pourtant, la validation lui faisait plaisir.

- Ouais, cool, répondit-il en mordant dans son sandwich avant de se tourner vers Eren, et toi ?

Le brun haussa les épaules.

- Je t'ai dit alors tu dois me dire, insista Jean.

- Ça existe pas ce genre de trucs.

- Si.

- T'inventes des règles, rétorqua Eren.

- Il y a pas de règles.

- Tu vois ?

- Du coup j'ai raison.

Eren leva les yeux au ciel, mais Jean crut voir un éclair amusé traverser son regard.

- J'aurais voulu être libraire.

Jean se souvint de la réaction du brun et se fit la réflexion que peut-être lui aussi avait peur qu'il se moque. Et honnêtement, des deux, il était le plus à même de le faire – non pas qu'il dépasse Eren en termes de subtilité, mais la question se posait.

- Cool, dit-il finalement.

Ce n'était pas un mensonge : Jean avait le souci de l'honnêteté, et même s'il voyait mal Eren dans une boutique à l'ambiance littéraire, le rôle en lui-même semblait intéressant.

- Ouais, souffla le brun, amusé.

Ils n'échangèrent plus jusqu'à leur client suivant, qui là aussi, leur permit de repartir avec un contrat en poche.

Le dernier de leur journée se révéla plus ardu, et ils eurent beau négocier du mieux qu'ils purent – Jean n'eut même pas à demander à Eren d'attendre, ni même inversement – l'homme ne démordit pas de son fournisseur actuel.

Quand ils sortirent, la frustration d'Eren était palpable, et Jean ne savait pas exactement ce qu'il devait faire. Déjà, il trouvait ça ridicule de s'énerver comme ça pour un truc qui faisait partie des aléas du métier – bien sûr, il comprit que ce n'était pas ce qu'il y avait à dire. Il se contenta de lui lancer des regards inquiets jusqu'à la voiture.

Eren s'arrêta juste à côté de cette dernière, levant les yeux vers lui.

- C'est ma faute.

Jean leva les yeux au ciel : au vu de son ton et de son regard, il savait ce qui allait venir.

- Pas la peine d'en faire tout un plat, d'accord ? C'est inutile.

- Je le connaissais.

- Ah ouais ? Il n'a rien dit.

- Ouais. Il me déteste – accessoirement.

- Eh bien, ajoute-le à ta liste interminable des gens qui peuvent pas te saquer. J'espère que je suis premier.

Eren le fusilla du regard et Jean ne sut pas si sa blague avait été appréciée ou non, alors il se sentit obligé de reprendre en levant les yeux au ciel :

- Quoi, tu lui as brûlé sa voiture ?

Quand le brun haussa les épaules sans répondre, la posture de Jean se fit plus tendue et il planta son regard dans le sien, insistant :

- T'as brûlé sa voiture ?

Eren soupira et finit par répondre :

- C'est genre, un mec avec qui j'ai traîné deux trois fois aux réunions générales – tu sais, celles auxquelles tu vas jamais parce-que « il y a trop de monde » ou « je préfère dormir » ? Ouais, voilà.

Jean mit quelques secondes à intégrer l'information.

- Donc c'est ton ex ?

- En quelque sortes.

- T'as brûlé la voiture de ton ex ?

- Il se peut que Mikasa l'ait un peu menacé ? J'en sais rien. On m'a à peine raconté.

- D'accord. Donc le mec a pas voulu de notre papier parce-que la sœur de son soi-disant ex l'a menacé au couteau ? Je compatis avec lui franchement, elle est super flippante.

Eren le fusilla du regard, mais il semblait plutôt satisfait que son collègue ne pose pas plus de questions que nécessaire.

Quand ils s'installèrent à nouveau dans la voiture, Jean eut la réalisation de sa vie : Eren avait un penchant pour les hommes.


But I hear sounds in my mind

Brand new sounds in my mind


Le lendemain, Jean accueillit Eren devant chez lui avec une mine affreuse. C'était ridicule. Il était ridicule.

C'était leur troisième et dernier jour de prospection, et il comptait bien mettre derrière lui toutes les pensées qui l'avaient traversé durant la nuit – et qui étaient terribles, merci bien.

Son manque de sommeil se répercuta cependant sur leur travail, et il ne prononça pas un mot de toute l'entrevue, malgré les quelques signes d'Eren quand ce fut son tour de prendre la parole : il avait trop peur de s'embrouiller et de buter sur les mots, de manquer ses phrases et de poser les questions qui lui brûlaient la langue.

Une fois qu'ils furent dehors, Eren se tourna vers lui, trop inquisiteur pour son propre bien. Il avait toujours eu du mal à ne pas faire ce qui le démangeait, et aujourd'hui n'échappait pas à la règle, alors il attrapa le bras de Jean pour qu'il lui fasse face, au milieu des pétunias plantées en bordure du chemin.

- T'as pas bien dormi ?

Le concerné grimaça : la poigne d'Eren n'avait rien de doux. Il réussit tout de même à s'en dégager avec un mouvement d'épaule.

- Sans blagues.

- T'es triste ?

- Quoi ?

- T'as pleuré toute la nuit parce-que j'ai fait tomber de la salade dans ta voiture ?

Jean le fusilla du regard.

- Je suis pas d'humeur, d'acc-

- Sèche tes larmes, je nettoierai.

- Putain Eren-

- Quoi, c'est quoi ton problème, Jean ?

L'interpellé se sentit exploser. Toutes ses résolutions sur Ne Pas Devenir Violent se firent la malle, et il perdit bien vite tout self-control. Non sérieux, qu'est-ce qui lui prenait d'être aussi insupportable ?

Et puis quoi ? Et puis quoi, Jean ?

Est-ce qu'il aurait voulu qu'Eren le réconforte ? Qu'il lui dise « t'inquiète, c'est pas grave si t'as pensé à moi tout la nuit » ? Qu'est-ce qu'il attendait de lui pour que ses réactions l'agacent autant ?

Et puis Jean vit son sourire et les notes d'inquiétude dans son regard, et il comprit qu'Eren avait fait exactement ce qu'il ferait dans cette situation, alors il passa une main sur son visage pour s'empêcher d'imploser et leva les yeux au ciel.

- T'es vraiment pas possible.

- Tu me dis alors ?

- C'est pas tes oignons, Jaeger.

- Si. Ça impacte tes performances.

Jean comprit qu'il y avait plus. Eren était incapable de cacher ce qu'il avait à dire, dans n'importe quelle situation. Merde, il se laisserait même tuer par un cartel si un jour il en croiserait un à cause de sa trop grande bouche.

- D'accord, fit-il en haussant les épaules.

Eren ne le lâcha pas du regard.

- Alors ?

Et Jean devait trouver un truc à dire, vite. Il n'était pas comme lui. Il n'avait pas cette facilité à dire les choses, à faire des reproches et des compliments aux gens. Oh, il le disait, quand quelque chose ne lui plaisait pas, mais ce genre de conversation ridicule qu'il fallait encore qu'il ait avec lui-même, ça, non, il n'en était pas capable.

- J'ai fait des cauchemars.

Mauvaise réponse, visiblement : le visage d'Eren s'assombrit doucement. Il ne lui demanda pas de raconter et se contenta de hocher la tête, si bien que Jean se demanda si lui en faisait vraiment.

Il se trouva un peu bête, mais au moins, la conversation avait eu le mérite de le remettre sur les rails, et ils terminèrent leur journée en beauté.


I'll come get my things, but I can't let go

Oh, I wish I could get my things and just let go


En sortant de leur dernière entrevue, Jean se figura qu'il devait dire quelque chose.

Il se sentait étrange de regarder en arrière et se dire que sa relation avec Eren Jaeger avait évolué – chose qu'il pensait impossible jusqu'à il y a quarante-huit heures à peine, mais à bien y réfléchir, ce n'était pas aussi surprenant qu'une simple première impression, le genre qu'on a et qui ne se révèle jamais véritable.

Eren était insupportable et portait haut et fort tout ce que Jean détestait, à commencer par la couleur de ses yeux qui n'allait jamais avec celle de sa veste, peu importe laquelle il mettait. Et pourtant, quelque chose dans la façon qu'il avait eu d'évoluer à ses côtés durant trois jours, les détails que Jean avait remarqués au fond de son regard et l'habitude qu'il avait prise de venir le chercher, tout ça portait un sentiment de familier qu'il ne ressentait que trop rarement. Il avait passé sa nuit à détester l'association qu'il faisait mais cette dernière journée l'avait plus ou moins convaincu : ce n'était pas si terrible.

Bien sûr, c'était un travail de toutes les minutes que de se dire qu'Eren Jaeger n'était pas si terrible, mais suffisant pour convaincre Jean que le plan qu'il avait élaboré dans la nuit pour au moins faire le point sur ce qu'il ressentait pouvait et même devait être mis en place.

Une fois qu'il fut garé devant chez Eren, l'ombre de son immeuble projetée sur sa voiture et l'empêchant de voir le soleil, il arrêta le moteur. Le brun haussa un sourcil : en général, Jean déguerpissait le plus rapidement possible.

- Bon, commença ce dernier en se raclant la gorge, soudain incapable de se souvenir de ce par quoi il avait décidé de commencer.

Eren lui accordait toute son attention, et lui était bien incapable de se concentrer sur autre chose que sur la façon qu'avait ses pupilles de s'agrandir doucement. Comme rien ne vint de la part de Jean, ce fut le brun qui reprit :

- Je voulais te dire quelque chose, aussi.

- Ah ?

C'était plus facile dans ce sens. Enfin, restait à voir ce qu'Eren avait à lui dire. Peut-être qu'il s'était fait de fausses impressions et que le garçon était sur le point de lui déballer ses quatre vérités – Jean n'avait pas besoin qu'on les lui dise : il les connaissait déjà.

Mais les rougeurs qui naquirent sur les joues d'Eren lui indiquèrent qu'il s'agissait d'autre chose, et il se sentit déglutir, certain que le son résonna contre toute la carrosserie.

- Ouais, reprit le brun. Comme c'était le dernier client, tu veux qu'on aille boire un verre ?

Jean dut saisir toutes les subtilités posées par cette demande avant de s'autoriser à répondre :

- Ouais, carrément.

Il sonnait trop étranglé pour être naturel, et la question qui lui brûlait la langue ne s'évaporait décidément pas, si bien qu'il reprit :

- « On » comme dans toi et moi, on est d'accord ?

S'il avait la capacité d'être moins subtil encore, ce serait un miracle.

- Ouais ? Ça t'embête ? Après tout, on a fait ça tous les deux.

Tous les deux.

- Non, ça me dérange pas.

Eren avait l'air d'avoir manqué le cœur de sa question, alors il reprit en l'entendant détacher sa ceinture :

- Et un « verre » comme dans… un verre ?

Eren interrompit ses mouvements et haussa un sourcil perplexe.

- Ouais ? Enfin, tout est dans le nom.

Jean hocha doucement la tête, cherchant ses mots pour ne absolument pas à avoir à prononcer l'expression terrible commençant par Rendez et finissant par Vous.

- Donc on sort ?

- Si t'es d'accord. C'est quoi le problème ? s'agaça Eren dont la patience légendaire ne l'était pas tant que ça.

- Pas de problème, pas de problème, marmonna doucement Jean.

- D'accord.

Et puis Jean décida que quitte à mourir de honte, autant le faire dans sa voiture, devant chez Eren.

- Comme un date ?

- Un quoi ?

- Un date.

Jean sentit sa température corporelle atteindre des sommets encore inconnus, et plus il voyait le visage d'Eren changer d'expression, plus il découvrait des degrés supplémentaires.

- Ok, lâcha finalement le brun, mettant fin à son supplice.

- Ok ?

La réalisation que ce n'était pas ce qu'Eren voulait dire au départ fut rapidement détrônée par celle qu'il était quand même d'accord.

- Ok.

Et ce fut sur ces sages paroles que le brun quitta enfin le véhicule, laissant derrière lui un Jean contemplant l'étendue de son existence et surtout, surtout, le point nouveau qui venait de s'y tisser.

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bim bam boum tjrs the same sh*t hihi

merci d'avoir lu, demain je post rien parce-que les prompts m'ont pas inspirée, mais je reviens dimanche avec Break up et Celebrity x Fan.

Prenez soin de vue, bisouusssss