Bonjour, bonjour

Me voici avec une nouvelle fanfiction sur Fleur, Apolline et Monsieur Delacour.

Bonne lecture

Jess-Lili


Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? Tu fais du surplace. Si tu pouvais, tu prendrais l'échelle dans le cabanon pour être plus haute ; plus grande. Toi, qui n'as jamais aimé les hauteurs, tu sembles les chercher et même les apprécier. Comme si cela pouvait te rapprocher d'elle. Tu espères quoi ? Tu aimerais la rejoindre ; la revoir. Tu voudrais la prendre une dernière fois dans tes bras. Mais c'est impossible, ma chérie. Elle est partie. Elle ne reviendra pas. Elle ne reviendra plus jamais. Tu dois la laisser s'en aller. Tu ne pourras pas toujours vivre avec son ombre dans ton sillage. Tu ne pourras pas toujours faire comme si…

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? C'est comme si tu espérais qu'elle vienne prendre la tienne. Mais c'est impossible. Tu le sais, pourtant. Ma Apolline, elle ne reviendra pas. Je suis aussi triste que toi devant ce constat. Alors j'essaie d'avancer malgré la douleur qui tente de nous terrasser. J'aimerais, moi aussi, la voir réapparaître, comme si de rien n'était. Une partie de moi va toujours croire que c'est possible et qu'elle va revenir vers nous, sa famille. Qu'elle va rappliquer, repentante et la bouche pleine d'excuses, qu'on va croire pour oublier la frousse qu'elle nous a faite.

Elle est partie. Nous ne savons même pas où. Six mois maintenant. Tu ne te fais pas à cette idée. Moi non plus. Tu espères presque elle soit décédée. Ce serait presque moins difficile à supporter. Nous pourrions au moins savoir où elle est. Mais pas un geste de sa part. Pas un signe de vie… Elle nous laisse dans le doute.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? De ta main gauche, tu tiens ce collier qu'elle aimait tant. Tu voudrais la faire revenir vers toi ; vers nous. Elle ne pouvait pas partir de la maison sans son pendentif. Alors, pourquoi l'avoir laissé ici ? Tu voudrais qu'elle sorte de sa cachette et qu'elle apparaisse devant toi. Tu l'as perdue. Nous l'avons perdue. J'aimerais la retrouver pour te redonner le sourire. Ma Apolline, j'aimerais tellement qu'elle revienne, moi aussi. Fermer les yeux et espérer son retour parmi nous.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? Tu cherches un signe de sa présence. Tu te fais mal à son absence. Il n'y a plus de « Je t'aime » venant d'elle. Il ne reste que le silence. Son silence. Elle est partie sans dire un mot. Sans même un message, posé sur la table de la salle à manger. Elle était si volubile, pourtant. Elle est partie, sans un bruit. Dans le silence de la nuit. Elle s'est fondue dans la noirceur. Espérant peut-être que ça nous ferait moins mal. Mais ce cri que tu as poussé en constatant son départ… Il a tout balayé sur son passage.

Elle est partie… Elle est partie… Tu repasses cette phrase comme un mantra dans ta tête. C'est surréaliste. La tristesse fait place aux questionnements. Pourquoi ? Pourquoi est-elle partie ? Qu'avons-nous fait ? Quels sont nos torts ? A-t-elle manqué d'amour ? Est-ce seulement l'attrait de l'interdit ? L'attrait du danger ? L'attrait du monde extérieur, différent de notre mode de vie bien rangée ?

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? Tu sais que même perchée sur cet escabeau, tu ne l'atteindras jamais. Nous ne savons même pas ce qui lui arrive. Je sais, tu en viens presque à espérer qu'elle soit là-haut. C'est sûrement pour cette raison que tu restes là, la main tendue vers l'étendue bleue.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? Même dans notre chambre, assise au bord de la fenêtre, tu fixes le ciel comme si tu attendais un signe. Comme si elle allait te faire un geste de là-haut. Comme si nous pouvions l'entendre crier tous ses maux. Tu aimerais avoir des nouvelles d'elle… Une lettre, un paragraphe, une phrase, un mot… Même un simple symbole, s'il est écrit de sa main, te rassurerait. Mais nos appels désespérés restent sans réponses. Comme si elle espérait ainsi, qu'on l'oublie. Mais rien ne pourra l'effacer. Pourquoi n'avons-nous pas tenté de l'arrêter ? Pourquoi n'avons-nous pas relevé un quelconque signe précurseur ?

Elle est partie. Elle est partie. Pourtant, tu restes là, à la chercher. Tu la cherches dans toute la maison. Tu la cherches dans sa chambre, dans le sous-sol, dans la cour. Tu la cherches en vain. Tu me regardes, hébétée, perdue. Tu voudrais te laisser tomber à genoux et laisser libre cours à tes pleurs ; à ta peur. Parce qu'elles peuvent être noires, les pensées qui hantent tes nuits blanches. Ces insomnies où tu tentes de la comprendre. Où tu te demandes pour quelles raisons notre Fleur est partie.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? En équilibre précaire sur cette petite échelle, tu fixes le ciel et tu marmonnes que tu l'aimes. Que nous l'aimons. Son absence se fait encore sentir. Malgré le temps qui passe, tu restes là, le regard hagard et fixé vers là-haut. Et ton cœur s'étreint parce que tu es certaine qu'elle y est enfin. Qu'elle a arrêté d'avoir mal. Parce que tu étais sûre qu'elle souffrait. Qu'elle nous appelait à l'aide. Mais nous étions sourds à ses appels.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? La neige recouvre une partie du sol et tu grelottes sous ta fine veste de laine. Pourtant, tu restes là. Tu ne bouges pas d'un iota. Tu espères qu'elle vienne nous retrouver. Tu espères avoir rêvé. Un simple cauchemar. Tu voudrais te pincer et te réveiller. Ne plus entendre en boucle, les coups à la porte. Oublier cette phrase : « Madame, Monsieur, nous sommes navrés. Nous avons retrouvé le corps de votre fille Fleur Isabelle Delacour dans la rivière près de… il faudrait venir… morgue… corps… »

Sans les laisser terminer, un cri de douleur a retenti. Le tien ou le mien, je ne sais plus. Peut-être bien le nôtre. Son corps… Les policiers ont dû répéter leur demande. Aller identifier son corps. Marcher, avancer. Réaliser l'impensable. Ça ne peut pas être notre petite fille, si pâle. Sans vie. Ça ne peut pas être elle, sous ce linceul blanc, c'est impossible… et pourtant… Elle est bien là… La douleur qui broie notre cœur… Puis finalement, les larmes qui coulent en un torrent inarrêtable.

Elle est morte. Elle est morte. Depuis quand les parents doivent-ils survivre à leur enfant ? Après douze mois de doutes et des questionnements, nous avons réponse à nos questions. Mais d'autres font surface ; d'autres nous hantent et nous détruisent à petit feu. Pourquoi notre belle Fleur ? Pourquoi elle ? Pourquoi nous ? Pourquoi quelqu'un là-haut nous a-t-il infligé ce deuil ? Il n'y a rien de pire que la mort d'un enfant…

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? As-tu peur de l'oublier, Apolline ? As-tu peur que s'efface de ta mémoire, le son de sa voix ? Il paraît que c'est la première chose qui s'estompe. Malgré les messages, malgré les vidéos. La voix s'envole en premier. As-tu peur que tes bras ne se souviennent plus de la douceur de ses rares étreintes ? Tu sais, j'ai peur aussi. J'ai peur d'oublier notre petite Fleur.

Pourquoi restes-tu là, la main tendue vers le ciel ? Il n'y aura pas d'autres rires. Il n'y aura pas d'autres sourires. Il n'y aura pas d'autres incessantes querelles. Il n'y aura pas de paroles dites dans le vide, alors qu'elle était déjà partie en courant. Les seules traces de sa présence, ce sont les quelques photos d'elle, ses cheveux roux au vent. Des photographies prises sur le vif, elle qui détestait tant se voir sur une image figée.

Elle est morte. Elle est morte. Elle n'avait que quinze ans, notre petite Fleur. L'intrépide, la fonceuse. Notre petite fusée. Malgré son âge, elle était toujours et sera toujours notre petite fille. Elle n'avait peur de rien. Mais finalement, n'était-elle pas sa plus grande frayeur ? Avait-elle fui dans ce paradis psychédélique pour s'échapper d'elle-même ?

Ta main est encore tendue vers le ciel. Tu le fixes, à la recherche d'un signe. Un rare sourire s'esquisse sur ton visage. Tourné vers cet arc-en-ciel qui sépare l'étendue bleue. Ta main libre vient prendre la mienne. Tu la serres autant que tu peux. Tu as peur, je sais. Tu as peur d'être heureuse à nouveau. Peur de trahir sa mémoire. Peur de trahir le peu que nous savions sur notre propre fille. Parce qu'en fin de compte, elle nous était un peu étrangère.

Fleur est morte. Elle est morte. Cependant, elle restera toujours vivante dans nos esprits et dans nos cœurs. Les autres avaient raison, ma belle chérie. La vie continue. La douleur s'estompe peu à peu. Mais son souvenir restera toujours présent. Dix-huit mois depuis son départ. Six mois depuis que nous avons appris la terrible nouvelle. Pourtant, l'existence chemine encore. Elle avance, malgré la douleur qui broie encore notre cœur de parents, par moment.

Une dernière fois, tu tends ta main vers le ciel. La colombe s'envole. Fleur peut enfin reposer en paix. Elle a rejoint les anges. Elle veillera sur nous. J'ai encore en tête ses cheveux roux au vent. Notre petite fusée. Elle doit courir librement, là-haut. À l'unisson, des larmes coulent : de douleur ou de soulagement. Nous ne saurons jamais ce qu'elle a vécu, mais au moins, elle ne souffrira plus jamais. Une dernière fois, le glas sonne dans l'air froid du mois de novembre. Cette fois, c'est la réalité. Elle ne reviendra plus. Dans cette urne, ses cendres reposent pour l'éternité.

Elle est morte, Fleur. Mais chaque personne vit à travers nous, quand on pense à elle. Hors de questions que je laisse nos souvenirs d'elle dormir éternellement. Dans nos esprits, elle sera toujours vivante. Je te le promets. Parfois, par tristesse ou par nostalgie, son rire résonnera encore dans la maison. Jamais, elle ne sortira de notre tête.

Et chaque mois, sur sa tombe, nous irons poser un bouquet de lys bleu. La main tendue vers le ciel, nous aurons une pensée pour elle, notre grande fille. Elle était une mer tumultueuse. Elle était une chute ou même un ruisseau. Calme et apaisante, mais si grande et majestueuse à la fois.

Ta main retombe finalement le long de ton corps pour venir se poser sur ton ventre. Rempli d'une nouvelle vie. Ta main sur ton arrondi et l'autre dans la mienne, tu me regardes. Ton sourire tremblote encore sur tes lèvres. Tu laisses couler une larme. La crainte d'oublier Fleur est plus présente que jamais depuis que cette pousse à décider de germer dans tes entrailles. Depuis que cette parcelle de vie est venue s'installer, sans prendre en compte notre deuil et notre douleur. La vie s'est installée en toi, sans préavis. C'est la preuve que la vie continue. Malgré tout. Pourtant, tu restes encore plantée là. Tu tentes d'assimiler l'absurdité de la situation. Est-ce que cette nouvelle existence occultera celle de notre fille ? Est-ce elle, qui nous envoie cette inattendue nouvelle. Est-ce elle, qui a amené cette vie en toi ? De là-haut, a-t-elle une quelconque mainmise sur ce qui nous arrive maintenant qu'elle n'est plus ici ?