Chapitre 2 :
-J'ai faim, siffla Marc-Antoine.
Harry leva la tête de ses cours et regarda le zonure. Ce dernier venait de grimper sur la table du salon où il s'était installé.
-Tu as tout le temps faim, répondit Harry en Fourchelangue, et tu as déjà mangé ce soir.
Le reptile avait d'ailleurs eu une ration plutôt conséquente mais ça ne l'empêchait pas de venir réclamer.
Le ventre de Harry gargouilla à cet instant. Il jeta un bref coup d'œil sur l'horloge, se demandant s'il devait être inquiet ou agacé par le retard de Draco. Deux semaines qu'ils ne s'étaient pas vus, ça devenait plutôt pesant.
-Tu as faim aussi, constata le lézard dans un sifflement concerné, tu ne manges pas assez de sauterelles, c'est pour ça.
-Probablement, admit Harry, refusant de débattre encore une fois de l'alimentation des humains avec l'animal de compagnie de Draco.
Dès qu'il s'agissait de nourriture Marc-Antoine devenait plutôt obtus. Harry grattouilla le dessus de sa tête écailleuse et le reptile ferma les yeux de contentement, comme un chat. Harry avait proposé de le garder Square Grimauld et Draco avait accepté, probablement parce qu'il considérait que, étant donné que Marc-Antoine pouvait communiquer avec Harry, le lézard serait plus heureux avec lui qu'enfermé dans une chambre de professeur.
-Ton maître est en retard, soupira Harry en Fourchelangue.
« Et le repas est froid » rajouta-t-il pour lui-même parce qu'il ne voulait pas que Marc-Antoine re-embraye sur le sujet de la nourriture. Etrangement, au bout de quelques mois, on pouvait se lasser d'entendre en détail les degrés de succulence des différents insectes.
Il fit craquer sa nuque et replongea dans son livre. Il n'arrivait pas du tout à maîtriser le sortilège qu'il devait connaître pour lundi. Ce qui n'aurait pas vraiment été grave si le seul à y être parvenu en classe n'avait pas été Ophiuchus. Harry était content que son ancien élève soit aussi doué mais ça avait quand même quelque chose de vexant de se faire devancer par lui.
Il sursauta en entendant du bruit dans sa cheminée. La seconde d'après, la silhouette mince et indolente de Draco Malfoy y faisait son apparition. La première chose que fit le blond fut d'épousseter distraitement son veston.
« Un gentleman dans ma maison », pensa Harry. Le gentleman en question leva ses yeux gris vers lui et eut un sourire en l'apercevant.
Le cœur de Harry accéléra sa cadence, juste comme ça.
-Désolé, commença Draco en sortant de la cheminée, Mimi a inondé tous les WC de l'école, on a dû réparer les brèches, impossible de me libérer plus tôt.
Harry se leva de sa chaise, s'approcha sans rien dire. Draco cessa de parler aussi mais ne cessa pas de le regarder. Et son regard disait « tu m'as manqué ».
Puis Harry fut assez près pour toucher le veston du blond, assez près pour sentir son haleine, et enfin assez près pour l'embrasser.
Ils ne mangèrent que plusieurs heures plus tard.
°O°O°O°
« Comment va ton bras ? demanda Draco quand son souffle fut revenu à une allure plus normale. - Ils couraient dans un parc moldu de Londres depuis une bonne heure déjà. - Il avait décidé de suivre l'entraînement de Harry, du moins le dimanche sur deux où il pouvait venir Square Grimauld, mais il était vite fatigué.
Potter, lui, semblait à peine essoufflé, mais il avait évité de trop bouger son bras droit depuis qu'il s'était réveillé.
L'ancien Gryffondor termina de boire sa bouteille d'eau avant de redresser ses lunettes sur son nez.
-On fait aller, répondit-il.
OK, ça, ça voulait dire « J'ai un mal de chien » dans le langage de Pottérien.
-Je peux te le masser quand on sera rentré si tu veux, proposa Draco.
Potter eut un petit rire nerveux. Peut-être avait-il peur qu'on les entende ? Mais c'était ridicule et si jamais des journalistes sorciers les voyaient, il n'y aura là rien de louche. Depuis cet été, il n'était pas rare de les voir ensemble à l'extérieur, même s'il y avait souvent d'autres personnes avec eux, comme les amis de Potter. Les journalistes pensaient tous que Draco faisait à présent partie de la petite bande de leur précieux héros. Apparemment, avoir sauvé l'Elu lui donnait le droit d'être son ami.
-Tu n'es pas là pour jouer au kiné, répondit Harry.
Draco lui adressa un coup d'œil appréciateur.
-Je pense que ça ne sera pas une trop grosse corvée de tripoter ces deltoïdes, biceps, triceps et autres muscles radiaux. Oui, je crois que je survivrai…
Harry secoua la tête, amusé, mais sans pouvoir cacher un léger rougissement qui donna à Draco l'envie de le pousser contre l'arbre le plus proche et de l'embrasser jusqu'à le laisser tout pantelant et aussi étourdi qu'il l'était lui-même.
-Bon, fit Harry avec une lueur de compétition dans les yeux, le premier à l'aire de transplanage pourra masser tout ce qu'il veut et aussi consciencieusement qu'il le veut.
-Massage en profondeur donc ? susurra Draco, s'apprêtant mentalement à sprinter aussi vite que ses jambes et ses poumons voudraient bien le lui permettre.
Les lèvres de Potter s'incurvèrent, formant une mimique entre le sourire et la moue, tout à fait fascinante.
-Ouaip, murmura-t-il en lui jetant un regard en coin, ça fait longtemps pour toi, non ?
Draco se demanda si Harry essayait de l'allumer. Si oui, il y parvenait très bien. Parce que évidement que ça faisait longtemps ! Lors de leurs relations sexuelles, Draco était, pour le dire crûment, le plus souvent « celui qui la prenait dans le cul ». Pour des raisons qu'il ne voulait pas analyser, c'était bien plus commode de laisser Harry mener la danse. Mais ça ne voulait pas dire qu'il n'aimait pas inverser la tendance… Bordel, il adorait voir le brun sous lui, haletant, suppliant pour plus, ou le chevauchant avec ses lunettes de travers, comme s'il risquait d'en mourir s'il ne l'avait pas en lui. En réalité Draco ne savait pas trop ce qu'il préférait, en dessous, au dessus, sur les côtés, tête-bêche, dans un lit, contre un mur, sous la douche ou à même le sol. Tant qu'il s'agissait de Harry Potter, tout lui allait.
Draco choisit de ne pas répondre et commença à courir. Il entendit un « Hey ! » outré derrière lui mais ne s'arrêta pas, ne se retourna pas et courut encore.
°O°O°O°
Faire l'amour à Potter était toujours un moment un peu effrayant. Parce que c'était comme voler quelque chose ou voler tout court, Draco ne savait pas trop. En tout cas, ça avait toujours un goût d'interdit et de liberté. A. Chaque. Fois.
Ce qu'il savait, c'était que son cœur menaçait de sortir de sa poitrine. Que ses mains touchaient tout ce qu'elles pouvaient. Que sa bouche léchait la peau moite et salée à sa portée.
C'était effrayant d'être à l'origine du fait que Potter se tordait sous lui, s'agrippait à lui, suppliait pour lui – ou du moins pour qu'une partie de lui continue de lui faire ça « Oui, là ! Juste là, Draco! Encore ! Merlin, ne t'arrête jamais ! »-.
Etles yeux verts démesurément ouverts, à la fois fiévreux et affamés, semblaient lire directement dans son âme.
C'était effrayant.
Effrayant d'être à ce point amoureux.
°O°O°O°
Un cri fit se réveiller Harry en sursaut. Il se tourna immédiatement vers Draco dont il ne voyait pas grand-chose dans la pénombre.
« Draco ? Draco, ça va ? demanda-t-il, tâtonnant d'une main pour trouver une épaule, un bras, n'importe quoi pourvu qu'il puisse s'assurer qu'il allait bien.
Sauf que le blond eut un brusque mouvement de recul avant que Harry ne le touche. Ce rejet fit mal mais l'ancien Gryffondor était plus préoccupé par le besoin de savoir comment allait Draco. Il attrapa sa baguette et lança un Lumos.
Le blond grogna et plissa les yeux devant le brusque afflux de lumière.
-Ça va ? répéta Harry d'un ton plutôt angoissé.
Un œil gris le fixa méchamment alors que le torse nu et pâle en face de lui se soulevait rapidement.
-Ouaip, grinça finalement Draco, juste un fichu cauchemar. Tu ne peux pas baisser ta putain de lumière ?!
-Désolé, dit Harry et d'un geste de sa baguette, il diminua l'intensité lumineuse.
Il entendit Draco soupirer puis se lever. Il était d'une pâleur maladive qui lui serra le cœur.
-C'est à moi de m'excuser, déclara le blond dont la voix traînante ne parvenait pas tout à fait à cacher le reste de terreur qu'il venait de ressentir. Je t'ai réveillé.
Il se dirigea vers la salle de bain attenante à la chambre sans le regarder. Harry remarque que sa main tremblait un peu sur la poignée de la porte.
-Aucun souci, répondit Harry un peu stupidement avant que la porte ne se referme sur son amant.
Ce qu'il aurait voulu dire c'était : « Depuis quand refais-tu des cauchemars ? », « Est-ce que ça t'arrive souvent quand tu es tout seul à Poudlard ? » et « Est-ce que je peux t'aider? ». et surtout :« Parle-moi, bordel ! ». Mais ça n'aurait servi qu'à faire se renfermer Draco encore plus.
L'ancien Serpentard voulait panser ses plaies tout seul dans un coin, à l'instar de ces fauves exotiques et sauvages. Et comme eux, il pouvait devenir dangereux lorsqu'il s'estimait acculé, sauf qu'au lieu de griffes et de crocs, son arme de prédilection restait ses mots. C'était probablement de la lâcheté mais Harry n'avait aucune envie de se retrouver sous leurs feux cette nuit.
Pas quand il ne leur restait que quelques heures avant que leur week-end ne se termine et que Draco ne reparte à Poudlard.
Quelques minutes plus tard, il entendit l'eau couler alors il décida de leur préparer du thé, essayant de ne pas imaginer Draco tremblant d'impuissance et de peur rétrospective contre le carrelage froid de leur douche.
°O°O°O°
Lorsque Draco sortit de la salle de bain, Potter était sur le lit, en train de lire un de ses livres de cours – un pavé – et deux tasses de thé se trouvaient sur la table de chevet. Et Draco se demanda ce qu'il avait dû faire dans une autre vie pour mériter quelqu'un comme Harry Potter. Car dans sa vie actuelle, il ne voyait vraiment rien pouvant expliquer qu'un tel homme l'aime et c'était bien là son problème. Entre autre chose.
Le soulagement qu'il vit dans les yeux verts quand ils se posèrent sur lui le fit se sentir comme le dernier des enfoirés. Après son cauchemar, il l'avait rembarré plutôt sèchement, la tête encore dans ses souvenirs affreux et ce n'était qu'après de longues minutes sous la douche qu'il avait pu se dépêtrer des derniers vestiges de son rêve. Lorsque le Maître laissait son empreinte, elle était faite pour durer, jusque dans son sommeil. Ou alors c'était Draco qui était trop faible pour se laisser envahir de cette façon.
« Personne ne peut être tenu pour responsable de ses rêves. » lui avait dit son dernier psychomage en date ( Déjà le troisième que Draco épuisait. Il avait promis à Potter d'en chercher un nouveau mais il ne l'avait pas fait. Pas encore. Les Psychomages lui filaient de l'urticaire ). Mais ce n'était pas ce que Draco avait envie d'entendre. Au contraire, il voulait pouvoir en être responsable car alors ça voudrait dire qu'il pourrait trouver un moyen de les contrôler. Un moyen de faire cesser les cauchemars. Et ce qu'il voulait plus que tout, c'était de pouvoir refaire de la magie sans ressentir cette angoisse qui dévorait tout au point qu'il ait envie de crever pour que ça s'arrête.
La magie lui manquait. Et ce manque était un gouffre dévorant.
-Tu veux en parler ? demanda Harry d'un ton hésitant.
-J'ai rêvé que l'Angleterre devenait une République, expliqua Draco de sa voix traînante. Fort heureusement nous sommes toujours dans notre bonne vieille Monarchie.
Potter leva les yeux au ciel et secoua la tête d'un air à la fois amusé et consterné, comme à chaque fois que Draco tournait en plaisanterie le sujet délicat qu'étaient ses cauchemars.
-Merci pour le thé, reprit cette fois Draco plus sérieusement, véritablement touché par l'intention.
Merci pour être là.
-Thé au citron avec du miel, expliqua l'ancien Gryffondor dont le visage s'éclaira cette fois de son fameux sourire en coin qui laissa Draco quelque peu sonné.
Ça ne devrait pas être permis d'être aussi séduisant. Mais Harry n'était pas seulement sexy. Si Draco se fiait à ses traits tirés, il était aussi fatigué. L'ancien Serpentard se fustigea, encore une fois, de l'avoir réveillé.
Il regarda l'horloge. Dans un peu plus de deux heures, il allait devoir repartir pour Poudlard. Enfin, en réalité, la Cheminette de Potter était connectée à une Cheminette publique qui se trouvait à Pré-Au-Lard et de là, Draco devait aller à pied jusqu'à l'Ecole des Sorciers. Il devait donc partir tôt et il ne pouvait pas faire le trajet souvent de peur d'attirer l'attention des journalistes. Ils avaient donc décidé, lui et Harry, que pour l'instant ils se verraient un week-end sur deux. Et même si le mois d'octobre commençait tout juste, la situation lui pesait déjà.
Potter lui manquait. Chaque. Putain. De. Jour.
Bien sûr les choses seraient différentes si Draco pouvait transplaner…
-Il manque un miroir plein pied dans cette chambre, dit-il pour meubler la conversation alors qu'il s'installait avec son thé sur le lit contre Potter.
Harry et lui étaient torses nus et seuls leurs bras se touchaient. Le brun avait la peau chaude et c'était agréable.
-Hum ? répondit Harry distraitement en glissant ses deux bras autour de la taille de Draco et en posant sa tête sur son torse.
Ce fut un miracle que Draco ne renverse pas son thé.
-C'est vrai, reprit Draco, ravi du poids doux et chaud sur lui – même les cheveux qui lui chatouillaient le torse, ça lui allait -, je suis obligé de descendre dans le hall d'entrée pour voir si ma tenue est correcte. Ce n'est pas pratique du tout.
Il sentit le sourire de Potter tout contre sa peau et ça lui arracha un frisson de savoir ses lèvres si proches.
-Tu peux en acheter un, si tu veux, murmura le brun. Ça serait bien que tu choisisses des meubles pour la maison.
Oh.
La maison. Pas ma maison. Ça sonnait plutôt bien aux oreilles de Draco. Il glissa une main dans les cheveux noirs et entendit la respiration de Potter s'accélérer juste un peu. Ça aussi ça sonnait bien. Il ne pensait pas pouvoir ressentir du désir aussi vite après un cauchemar d'une telle intensité mais si en fait. Harry Potter le Garçon-Qui-Défiait-Toutes-Les-Statistiques.
-Et puis je trouve ça cohérent que le premier meuble que tu achètes soit un miroir, ricana le brun.
Draco posa sa tasse tranquillement par terre et décida que quitte à ce que Potter utilise sa bouche, il pouvait lui trouver une meilleure occupation que cet agaçant ricanement.
Et il la trouva.
°O°O°O°
-Pour l'amour de Saint-Emilion, Leto, montrez à Potter comment faire, vous aurez peut-être une chance d'inculquer le sort à ce résidu de basse fosse ! Pour ma part, j'abandonne ! Par le Gland du Chêne Pubère, Marvin, vous tenez votre baguette avec la même poigne que ma grand-mère impotente ! Vous êtes la pire section qu'il m'ait été donné d'avoir ! Une honte pour tout…
Harry cessa d'écouter le professeur Grant à ce moment-là et se tourna vers Leto, la mâchoire serrée.
-Désolé, prof-Monsieur Potter, murmura Ophiuchus, se rattrapant in extremis.
-Ce n'est pas de ta faute si ce type est un taré, répondit Harry en lançant un regard noir à Grant.
Bon, peut-être qu'il était de mauvaise humeur parce que Malfoy était reparti tôt ce matin et qu'il ne le verrait pas avant deux longues semaines.
-Je suis sûr qu'il ne voulait pas réellement vous traiter de résidu de basse fosse, reprit le jeune homme.
Harry se demanda vaguement s'il faisait exprès de retourner le couteau dans la plaie mais son ancien élève avait vraiment l'air dépité.
Sauf que c'était aussi un ancien Serpentard, n'est-ce pas. Et le fait que Harry couche avec l'un d'entre eux – et accessoirement en soit tombé amoureux - ne l'empêchait pas d'être un peu méfiant devant autant de sympathie.
-Grant insulte tout le monde, répondit-il en soupirant, pas seulement ses élèves. Je crains que ça ne soit sa manière de parler mais j'ai du mal à m'y faire.
-Oui, il a tout du rustre campagnard du siècle dernier.
Cette fois Leto avait une légère moue condescendante.
-Les deux donzelles, c'est quand vous voulez que vous commencez à vous bouger le croupion ! beugla Grant à leur encontre.
« Au moins, il ne me traite pas comme le foutu Sauveur » se répéta Harry mentalement pour s'éviter de sortir une réplique mordante. En réalité, la plupart des formateurs le considéraient comme un élève lambda. Le souci, c'était plutôt ses camarades de classe. Après presque un mois de cours, eux, ils le regardaient toujours comme s'il sortait tout droit de la cuisse de Jupiter.
-Je pense que votre problème vient du fait que vous n'inclinez pas assez votre poignet vers le bas lors du second mouvement, expliqua rapidement Leto sans même lui demander de reproduire le foutu sortilège de protection qu'il était incapable de faire.
Harry fronça les sourcils et essaya le sortilège en s'appliquant à bien incliner son poignet. La bulle de protection apparut immédiatement dans un souffle qui les décoiffa, lui et les autres aux alentours, et qui engloba toute la salle, plus puissante que toutes celles que Grant lui-même avait faites en démonstration.
A sa grande consternation, quelques-uns de ses camarades de classe applaudirent. Leto, heureusement ne le fit pas. Il contemplait les effets du sort sans rien dire mais son regard brillait d'admiration.
-Par les Saintes Culottes de Merlin, rugit Grant en faisant tressaillir sa moustache, pas mal Potter !
-Par le Colon Sacré d'Alexandre le Grand, merci monsieur, s'essaya Harry.
Bon, il était loin d'égaler le niveau de Grant mais c'était un début. Grant lui lança un regard surpris avant d'éclater de rire. Il eut droit aussi à une grosse tape dans le dos, proprement douloureuse mais qu'il encaissa héroïquement.
Mais ses jeunes camarades avaient enfin troqué leur mine respectueuse par une beaucoup plus amusée et franche. A la sortie du cours, deux d'entre eux lui proposèrent même d'aller boire un verre.
Il dut refuser parce que sa journée à lui n'était pas terminée, il avait encore deux heures de potions avec les secondes années mais il fut plutôt touché par la proposition.
°O°O°O°
-On vient de nous prendre en photo ! râla Ginny en foudroyant du regard l'endroit d'où les paparazzi venaient de décamper.
Les sortilèges de Chauves-Furies de Ginny étaient encore assez célèbres pour qu'aucun journaliste ne s'attarde vraiment une fois son forfait commis.
-Il semblerait, admit Harry avant de déguster son plat de pâtes.
-Et ça ne te fait rien ? reprit Ginny furieuse.
Harry haussa les épaules et prit le temps de mâcher avant de répondre. Il jeta un bref coup d'œil à Hermione qui secoua la tête et ça, ça voulait dire « Débrouille-toi avec la rouquine ».
-J'ai l'habitude et tu devrais l'avoir aussi à force. Ils sont encore plus à l'affût lorsqu'on sort ensemble tous les deux. Le héros et la célèbre joueuse de Quidditch… anciens amants, toujours amis... Ils doivent espérer qu'on se remette ensemble.
Ginny fronça ses délicats sourcils.
-C'est ridicule Harry, soupira-t-elle. Je suis fatiguée de toute cette mascarade. Toi, on dirait que c'est loin de te gêner qu'on te prête des idylles, tant que c'est avec des femmes.
Cette fois, ce fut à Harry de froncer les sourcils. Merde, cette soirée avait plutôt bien commencé, pourtant. Ginny allait bientôt partir pour un stage de Quidditch au Portugal et ils avaient décidé de manger au restaurant avec Ron et Hermione, sauf que Ron avait eu un empêchement avec son travail et du coup, Harry se retrouvait seul avec les deux femmes.
-Qu'est ce que tu insinues au juste ? demanda-t-il. Je n'ai jamais demandé à ce qu'on me suive partout. Je donnerais beaucoup pour ne pas être célèbre.
-On sait tout ça, répondit Hermione, espérant probablement alléger la discussion. Ginny est juste inquiète de ce que son nouvel amoureux va penser demain matin en lisant le torchon plus connu sous le nom de Gazette de Sorcier.
-Un nouvel amoureux ? releva Harry un peu surpris en voyant Ginny rougir.
La rouquine avait déjà eu son quota d'aventures sentimentales depuis leur séparation. Mais jamais elle ne s'était inquiétée de ce que l'un d'entre eux pourrait lire sur elle dans les journaux. Jamais non plus elle n'avait rougi de cette façon devant lui… ou alors il y avait très longtemps, quand elle n'était qu'une gamine de dix ans.
-Ce… c'est très récent, bafouilla-t-elle – et ça aussi c'était nouveau ! -. Mais il n'est pas le mec le plus sûr de lui quand on en vient à toi… Il pense que je pourrais toujours être amoureuse… Le pire c'est qu'il t'estime aussi beaucoup. Il t'adore même !
-Je le connais ? demanda Harry.
Il y eut un silence et Hermione leva finalement les yeux au ciel.
-Oh, pas besoin d'être si dramatique, soupira-t-elle – apparemment savoir son mari en mission imprévue avait tendance à mettre sa patience à mal -. C'est Neville.
-Nev ?!
-Moins fort, Harry, dit Hermione alors que Ginny rougissait encore plus.
-Nev ! répéta Harry plus bas sur un ton toujours aussi excité. Mais c'est génial ! Comment vous êtes-vous retrouvés ?
Cette fois Hermione ne répondit pas à la place de sa belle-sœur car Ginny la prit de vitesse.
-Une de mes collègues a été blessée lors d'un l'entraînement et notre guérisseur ne pouvait pas préparer le cataplasme qui aurait permis de la soigner pour le prochain match car il lui manquait des Musgrises, expliqua la rouquine.
-Ce sont des herbes très rares, Harry, rajouta Hermione comme s'il ne le savait pas (Bon ok, il ne le savait pas. Mais était-elle sensée savoir qu'il ne le savait pas ?...question stupide, il s'agissait d'Hermione. ). Et devine qui en fait pousser avec succès dans sa serre ?
Ça il savait ! C'était forcément Neville !
-Bref, reprit Ginny en jetant un regard agacé à Hermione ce qui empêcha Harry de répondre, comme je connaissais Neville, je suis venue avec notre guérisseur à Poudlard et une chose en entraînant une autre, Nev m'a invité à dîner… Tiens, j'ai aussi vu Malfoy lorsque j'étais là bas.
Harry sursauta presque à la soudaine mention de son amant et décida de siroter son verre de vin pour se donner une contenance.
-Je n'ai pas vraiment parlé avec lui, poursuivit Ginny, mais Neville semble plutôt enclin à éprouver une sorte d'estime pour lui. Enfin Malfoy a probablement changé en bien puisque vous êtes amis. Tu le vois souvent Harry ?
-Oui. Enfin non. Ça dépend ! s'embourba Harry. On va courir ensemble. Quelquefois. Les dimanches.
Les yeux de Ginny se plissèrent. Elle n'était pas dupe. Évidemment qu'elle savait qu'ils étaient amants ! Officiellement, Harry ne l'avait dit qu'à Ron et Hermione mais il était persuadé que la plupart des Weasley – du moins ceux qui savaient que Harry était gay - avaient compris que Malfoy et lui n'étaient pas seulement amis.
Il sentit la main de la rouquine se poser sur la sienne. Il devait faire une drôle de tête car elle s'était soudainement adoucie.
-Ce n'est pas grave Harry, murmura-t-elle, un jour tu seras prêt. Mais en attendant, tu devrais faire attention. Personne n'aime voir celui ou celle qu'il aime dans le journal, apparemment en train de flirter avec quelqu'un d'autre. Même si ce n'est que fabulation, ça peut blesser les gens. Je ne veux pas blesser Neville.
Et je ne veux pas blesser Draco, pensa Harry.
Mais il se contenta de hocher la tête.
Ginny avait raison. Ça l'arrangeait bien que les journaux à scandales lui prêtent des liaisons avec des femmes. Ainsi ils ne cherchaient pas plus loin. Ils le laissaient être ami avec Draco – homosexuel reconnu - sans penser une seule seconde que leur précieux petit héros pourrait baiser avec lui. Pourrait être amoureux d'un homme. Non, cette bande d'homophobes ne pouvaient pas l'imaginer aimer se faire enfiler par une bite – et pas n'importe laquelle, s'il-vous-plaît, celle de « l'ancien Mangemort » Draco Malfoy -.
Peut-être que ça blessait en effet Draco de le voir dans les tabloïds avec des femmes, mais Harry en doutait. Et puis de toute façon, le blond n'en parlait jamais. Et ce n'était pas comme s'il ignorait que Harry n'était pas hétéro. Si c'était le prix à payer pour protéger leur vie privée, alors c'était peut-être un mal pour un bien.
Oui, probablement.
A suivre…
