«Rogue?!
- C'est mon nom Potter. Bravo pour cette étonnante manifestation de mémoire.
- Je... Mais... Vous... Je ne comprends pas.
- Toujours aussi éloquent Monsieur Potter.
- Vous vous foutez de ma gueule?! Vous revenez d'entre les morts et vous vous moquez de mon élocution alors qu'une personne censé être morte se tient devant moi.
- Comme vous l'avez si cordialement souligné, je suis supposé être mort. Mais votre présence en ces lieux gâche fortement ce plan. Encore en train de traîner où il ne faut pas Potter. Je vais donc m'éclipser discrètement tandis que vous retournerez bien gentiment à votre vie glorieuse tout en oubliant que vous m'avez vu vivant.»
Le grand homme esquisse un mouvement pour partir mais Harry se relève brutalement -accentuant au passage son mal de crâne- et lui attrape le poignet. Une grimace de dégoût et d'agacement est clairement visible sur le visage du potionniste alors qu'il se retourne vivement vers le plus jeune.
«Lâchez. Moi.
- Vous ne pouvez pas partir comme ça.
- Ah non?
- Non. Vous devez m'expliquer d'abord.
- Je ne vous dois rien Potter. Rentrez vous ça dans le cerveau à coups de pelle si ça vous chante mais laissez-moi tranquille. Et par pitié, retirer votre main répugnante de mon poignet.»
Le bras de Harry retrouve brusquement sa juste place le long de son corps. Il sent ses vertiges reprendre violemment mais il serre les dents et réplique tout de même:
«J'ai besoin de savoir Rogue. Je vous ai vu mourir sous mes yeux... Je... Vous savez à quel point je m'en suis voulu de ne rien avoir pu faire? J'aurai voulu vous dire tant de choses... Je...
- Oh comme c'est touchant... Voyez-vous ça, le Sauveur du monde sorcier éprouve des regrets envers son très détesté professeur de Potions... Pitoyable Potter. Trouvez quelqu'un d'autre à harceler, je ne m'abaisserai pas à lécher vos bottes pleines de terre.
- Je- Écoutez Rogue. Je sais que je n'ai pas toujours été facile avec vous-
- C'est le moins qu'on puisse dire.
- Et j'en suis désolé. Mais vous n'étiez pas tendre non plus. Si vous m'aviez laissé entrevoir ne serait-ce qu'un petit peu, qui vous étiez réellement, ça m'aurait tout de même beaucoup aidé.
- Et qui suis-je réellement à votre humble avis Monsieur Potter?
- Quelqu'un de bien.
- Bien essayé Potter, ricane Severus. Mais vous ne m'aurez pas à la flatterie. Si votre Altesse veut bien m'excuser, j'ai des choses importantes à faire, comme acheter des ingrédients précieux mille fois plus intéressants que vous dans le petit village devant nous.
- Écoutez. Je sais que vous n'avez aucune envie de me voir. Mais pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir une discussion civilisée entre adultes dans laquelle vous m'expliquez comment vous avez fait pour ressusciter, pour ensuite vous donner la paix, à laquelle vous aspirez visiblement, pour le reste de vos jours?
- Laissez-moi réfléchir... Non.
- Mais... pourquoi?
- Premièrement, vous avez parlé d'une discussion entre adultes. Voyez-vous un adulte autre que moi dans les environs? Je ne crois pas. Ensuite, je n'ai pas besoin de vous et votre foutue curiosité, retournez donc auprès de votre idiote de femme et laissez-moi tout de suite cette paix que vous me promettez.
- Pardon? J'ai 28 ans Rogue, les gens changent. Si je ne suis pas adulte, vous non plus, il suffit de voir l'immaturité dont vous faîtes preuve depuis seulement quelques minutes. Et si vous n'étiez pas tel un gamin immature qui refuse de lâcher le morceau juste par entêtement, vous verriez que c'est simplement normal d'expliquer à quelqu'un pourquoi nous ne sommes pas morts alors que nous sommes supposés l'être.
- Bien. Nous sommes donc deux gamins immatures. Alors très bien, vous avez gagné. Je boude, crache-t-il avec une voix emplie de mépris.»
Un vertige plus puissant que les précédents s'empare du corps de Harry alors qu'il s'apprête à rattraper l'homme. Il ferme un instant les yeux alors que le monde tourne autour de lui de façon inquiétante. Cela ne dure qu'un moment fugace, mais quand il rouvre les yeux, Severus a disparu.
OoOoOoO
D'un geste las, Harry pousse la porte de la maison qu'il partage avec sa femme et sa fille. Il s'agit d'une grande bâtisse à la façade blanche nacrée, plantée au centre d'un immense jardin luxuriant.
Harry enlève son manteau et ses chaussures dans le hall. Ginny à la sainte horreur des chaussures qui salissent son sol toujours si magnifiquement propre. Refusant de mettre la paire de chaussons ridicule affublé du très charmant titre de 'J'aime ma femme' écrit en grosse lettres noires, cernées par d'énormes cœurs multicolores; Harry évolue donc sur le carrelage blanc marbré en chaussettes. Il marche jusqu'au salon et s'affale sur l'imposante banquette gris souris, donnant sur une énorme cheminée dans laquelle brûle un feu chaleureux.
«Tu es rentré chéri? Demande la rousse en apparaissant dans l'encadrement de la porte.
- Oui je suis là Ginny.»
Harry soupire et prend sa tête à deux mains, songeant un instant à l'envoyer valser contre le mur pour faire passer son mal de crâne.
«Ca va Harry?
- Mal de tête..., grogne-t-il.
- Je vois. Ne bouge pas je vais te chercher une potion.»
Ginny revient quelques instant plus tard et s'assoit à côté de son mari pour lui faire avaler la potion anti-douleur.
«Merci.»
Avec un geste doux, elle écarte une mèche rebelle du visage de son époux avant de déposer un tendre baiser sur ses lèvres. Harry reste de marbre, incapable de retourner son geste d'affection à Ginny.
Après la guerre, Harry s'est naturellement remis avec Ginny, comme si rien n'avait changé. Il est toujours parti du principe qu'il lui fallait juste du temps pour se remettre de tous ces événements et que c'était pour cette raison qu'il était incapable de lui retourner ses sentiments. Parce qu'il était en état de choc. Il avait seulement besoin de temps...
Il s'en est passé du temps... dix longues années. Et Harry est toujours incapable d'aimer Ginny autant que elle l'aime.
«Comment tu te sens?
- Ça va mieux merci.
- Je ne parle pas de ça Harry... Et tu le sais parfaitement.»
Un silence s'installe, pendant lequel Harry médite sur une réponse appropriée à sortir.
«C'est étrange de se dire que ça fait 10 ans n'est-ce pas? Demande la rousse d'une voix émue.
- Oui.
- C'est si proche. J'ai l'impression qu'hier encore, ils étaient tous là. Souriants. Vivants. Et en même temps, j'ai la sensation que ça fait une éternité que je les ai pas vu... Ils me manquent. Tous.»
Harry songe un instant à pousser le vice un peu plus loin en lui demandant si leur défunt professeur de Potions lui manque, avant de ravaler sa question, pour demander à la place d'une voix qui se veut inquiète:
«Et toi Ginny? Comment tu vas?
- Ça a été une journée assez intense en souvenirs mais... ça va maintenant. On est ensemble et on a avancé. Il ne faut pas laisser le passé nous couler. Mais on peut compter les uns sur les autres. Et aujourd'hui on est heureux. On est ensemble et on a notre magnifique petite fille. Et dorénavant, rien ne pourra plus nous enlever ce bonheur, pas vrai? On restera soudé quoiqu'il arrive? Pour toujours?
- Pour toujours, répond Harry la voix enrouée.»
Elle lui adresse un sourire chaleureux avant que l'inquiétude ne vienne se peindre sur ses traits.
«Tu es sûr que tout va bien Harry? Tu m'as l'air un peu pâle.
- Ça va Gin' ne t'inquiète pas... J'ai juste besoin d'un peu de repos... toute façon Kingsley m'a donné une semaine de congé.
- Oh mais c'est formidable! Je demanderai à mon assistant de gérer la boutique si tu veux. Et je resterai avec toi.»
En effet, Ginny Weasley est maintenant propriétaire d'une boutique de Quidditch sur le chemin de Traverse.
«Oh ne t'embête pas pour moi... Je peux m'occuper de moi tout seul, répond-il avec un sourire.»
La vérité, c'est qu'il ne veut pas avoir à supporter sa présence devenue trop lourde à supporter pour lui.
«D'accord. Mais si tu as le moindre problème, tu sais que tu peux m'appeler, pas vrai?
- Bien sûr Gin', je n'y manquerai pas.
- Bien, réplique-t-elle avec un petit sourire satisfait. Je te laisse te reposer, je vais chercher Lily à l'école.
- D'accord, à plus tard.
- A tout à l'heure.»
Une violente quinte de toux secoue Harry tandis qu'il cherche un plan pour retrouver son têtu professeur de Potions. Puis, alors qu'il rejoue leur dernière conversation dans sa tête en quête d'indice, l'esquisse fragile d'une idée se forme dans son esprit.
Voilà un deuxième chapitre.
Bon. Je vous avoue que j'ai hâte d'entrer dans le vif du sujet parce que pour le moment, il y a rien de bien croustillant XD
J'espère que ça vous plait quand même ...
Bises.
