Hey! Comme promis, voici le premier chapitre ! J'en profite pour vous dire que j'ai déjà écrit les cinq premiers chapitres, donc je ne devrais pas avoir de problèmes de publication

Autre chose... Ellana aura quatorze ans à Noël (pendant le Bal, quoi) et ses amies en ont treize (sans parler de Melian qui a dix-sept ans) donc je vais inclure plus de romance à partir de maintenant... avec une pointe de LGBTQ+ donc homophobes s'abstenir, voilà ^^

Enjoy and review !

Chapitre 1 : La Coupe du Monde de Quidditch

M

« Tu as décidé d'inviter qui pour la Coupe du monde ? »

Melian se tourna vers sa sœur, surpris. Il ne l'avait pas entendu arriver, plongé dans la confection d'une potion de Chance liquide, ou Felix Felicis. Le laboratoire de potion du Manoir Forester était situé au sous-sol, à l'abri de la lumière et insonorisé, pour éviter les accidents.

« Liam, pourquoi ? »

La coupe du monde de Quidditch aurait lieu dans deux semaines, et leur père avait reçu des billets gratuits de la part du Ministère des Sports, suffisamment pour amener tous ses camarades de classe s'il le voulait. Ellana et lui avaient donc le droit d'inviter un ami chacun.

« Est-ce qu'il t'arrive de te séparer de Liam, de temps en temps ? » se moqua Ellana.

« Et toi ? Tu vas y aller avec Draco ? Ah, non, c'est vrai… il préfère trainer avec Pansy Parkinson. » répliqua Melian, tout en sachant que c'était un coup bas de sa part.

« Je voudrais inviter Cassiopée, mais j'ai peur de la réaction de Père s'il apprend que son père est un moldu et sa mère une née-moldue… » avoua sa sœur.

C'est étrange, se dit Melian. Ses paroles indiquent qu'elle est inquiète, pourtant sa voix et son visage sont parfaitement lisses… Sa sœur avait grandi. Les évènements de sa première année l'avaient changé, et sa deuxième année n'avait rien arrangé. Pourtant, il avait du mal à croire qu'elle se transformait, petit à petit, en la parfaite sang-pure.

Au moins, son opinion sur les moldus restait inchangé, contrairement à ses amies, Greengrass et Goyle, qui ne cachaient plus leur mépris pour l'autre monde. Melian redoutait le moment où sa sœur rejoindrait leur point de vue.

« Est-ce qu'elle peut se procurer le billet par ses propres moyens ? »

« Je pense que oui… il doit bien rester de la place… »

« Alors invite quelqu'un d'autre, et vous vous retrouvez là-bas, je ne vois pas le problème ! »

Ellana eut un sourire, un vrai pour une fois. Trop souvent, il l'avait vu afficher son visage de marbre, pendant les réceptions des solstices et des équinoxes. Trop souvent, il l'avait vu imiter son propre sourire poli.

« Je pensais que tu m'aiderais à dérober un billet à Père, mais il semblerait que tu te sois assagit… » dit-elle avec un sourire en coin.

« Je ne vois pas où tu aurais pu trouver une idée pareille… cette née-moldue t'a-t-elle influencée à ce point ? » rétorqua Melian, avec le même sourire. C'était lui qui le lui avait enseigné, après tout.

« J'ai effectivement une très mauvaise influence… » Ses yeux posaient la question qu'elle n'osait formuler à voix haute.

« Demain soir, les parents vont dîner avec les Flint. Ils ne reviendront pas avant minuit, au moins. »

« Dans ce cas… j'imagine que ce sera le meilleur moment pour que tu m'aides à faire mon devoir de potion ? »

« En parlant de potion, tu peux m'aider ? J'ai besoin de racines d'asphodèle. »

E

Ellana échangea un regard avec son frère, avant de sortir sa baguette pour examiner les protections placées sur le bureau. Il s'agissait de la partie la plus difficile : s'ils ne désactivaient pas les sortilèges de protection correctement, leur père s'en rendraient compte, et ils seraient bon pour une séance d'entraînement le lendemain.

« Dommage qu'Astoria ne soit pas là, c'est la meilleure en sortilège… » grommela Ellana.

« Tu me blesses, petite sœur ! N'ai-je pas passé mes Buses avec Optimal en Sortilège ? » s'offusqua Melian.

« Ce n'est pas avec cette mentalité que tu vas passer tes Aspics… »

« Passe tes Buses et on en reparlera après… et je te souhaite bonne chance pour l'Arithmancie ! » répliqua-t-il avec un clin d'œil.

Plutôt que de répliquer, Ellana lança un sort d'analyse, qui lui indique le type de protections qui entouraient le bureau. Après, il ne lui restait qu'à annuler et/ou contourner ces protections, ce qui était plus facile à dire qu'à faire.

« Il a mis un sort de repousse-moldu sur la porte ? » s'étonna Melian. « Comme si un moldu arriverait à passer la porte d'entrée… »

« On ne sait jamais, il pourrait passer par la fenêtre ! » protesta Ellana, blaguant à moitié.

Melian ne daigna pas répondre, mais elle senti son amusement. Leur père était paranoïaque, ce qui, en soit, n'était pas une nouveauté. Au moins les cours qu'il leur avait fait prendre avaient leur utilité.

« Il en reste un, mais je n'arrive pas à comprendre son but… » dit Ellana. « Il ne sert pas à repousser ou à dissimuler, ce n'est pas une alarme… »

« Il sert à reconnaitre l'identité magique d'un sorcier. Je dirais qu'il ne laisse passer que les parents, puisque Mère vient souvent ici. » expliqua Melian, les sourcils froncés.

« Comment on fait pour le contourner ? »

« On ne peut pas. Mais c'est un sort très compliqué à manier, et comme je suis entré dans ce bureau la semaine dernière, je pense pouvoir affirmer qu'on peut passer sans danger. »

« Il n'y a qu'un moyen de le savoir, j'imagine… »

« Tu crois vraiment qu'il ne va pas s'en rendre compte ? »

« Qu'on est entré ? ça dépend, tu as bien fait ton travail ? » plaisanta Ellana, avant de comprendre que son frère était sérieux. « Il a reçu une bonne douzaine de billets pour la Coupe du Monde, et il prévoit d'en utiliser six. Je ne pense pas qu'il se soucie de l'autre moitié… »

« Dans cas… après toi ! » déclara-t-il en ouvrant la porte.

Le bureau de Cassiel Forester était, aux yeux d'Ellana, l'une des plus belles pièces du Manoir. Situé dans une tourelle, il était circulaire, et les murs étaient constitués d'une seule et même bibliothèque, qui montait sur deux étages. Un index magique permettait de consulter, puis de ranger les livres situés hors de portée de main.

Trois fenêtres éclairaient la pièce, d'une lumière tamisée par un sort afin de préserver les livres. A une certaine heure de la journée, les halos tombaient exactement sur le bureau en bois d'ébène, et l'illuminaient d'une lumière féérique. Bien évidemment, ils avaient attendu le soir, donc leur source de lumière était une simple bougie.

« Tu sais où il les a rangés ? » demanda Melian, en examinant les lettres posées sur le bureau.

« Dans l'un des tiroirs ? » suggéra Ellana, pensant que c'était une évidence.

« Tu n'es jamais venue de ce côté du bureau, n'est-ce-pas ? » commenta son frère avec un sourire narquois.

Ellana se retint de rougir. Effectivement, lorsqu'elle venait dans ce bureau, c'était toujours pour s'assoir sur l'une des deux chaises en bois – par opposition au fauteuil en peau de dragon de son père. Elle ne voyait que ce sur quoi son père était en train de travailler, et qui était posé sur la table.

De l'autre côté, le bureau comprenait six tiroirs étiquetés, trois de chaque côté du fauteuil : finances, politique et propriétés à gauche, famille, relations et réputation à droite. Chaque tiroir était agrandi magiquement et divisé en sous-catégories.

Son père était non seulement parano, mais aussi maniaque du rangement, de la propreté et de l'organisation. Curieuse, elle inspecta le contenu d'un tiroir au hasard – celui nommé réputation, contenant des coupures de journaux concernant leur famille, mais aussi des serments magiques, des contrats, des pots-de-vin, tous ce qui permettait de contrôler l'image des Forester.

« Dans le tiroir famille ? » proposa Ellana.

Le tiroir en question était divisé en plusieurs parties, une pour chaque membre de la famille encore vivant. Ellana se retint d'examiner la sienne. Elle n'avait pas la moindre idée de ce que son père pouvait garder sur elle. Sûrement pas ses bulletins de notes.

« Ça vaut le coup d'essayer, je suppose. » approuva Melian.

Il plaça sa main au-dessus de la partie réservée à leur père, et s'exclama : « billets de la coupe du monde de Quidditch ! »

Ellana s'apprêtait à commenter cette étrange manière de procéder, ou peut-être à demander des explications, mais son frère ressortit le bras du tiroir, une dizaine de billets en main.

« Et voilà ton billet, princesse ! » déclara-t-il d'une voix trainante qui aurait pu appartenir à un Malfoy.

« Merci d'avoir enfreint la plupart des règles de la maison pour m'aider à inviter une née-moldue à la coupe du monde de Quidditch ! » dit Ellana, en prenant un billet.

« Tu peux toujours compter sur moi… » assura-t-il, avant d'ajouter : « Même pour t'introduire dans la Tour Sud ! »

Ellana feignit un cri de surprise, et plaque sa main sur sa bouche.

« Melian ! Tu n'oserais pas ! Personne n'est entré dans la Tour Sud depuis près de deux cents ans ! »

« Pardonne-moi, je suis allé trop loin. »

Ils échangèrent un regard et pouffèrent de rire. La Tour Sud était interdite d'accès depuis des générations, pour des raisons inconnues de tous – Ellana était pratiquement sûre que même son père ne le savait pas, mais qu'il respectait tout de même la tradition – et c'était également le repère de générations d'enfants Forester, qui souhaitaient plus que tout désobéir au règlement.

D'après leur grand-oncle, à chaque génération, les enfants de la famille Forester exploraient la Tour Sud, juste pour savoir ce qui s'y trouvait – c'est-à-dire absolument rien. La tour tombait en ruine, personne ne la nettoyait ni ne la réparait, mais elle restait inaccessible, par respect pour les traditions.

« Quand j'ai expliqué ça à mes amie, Anna a suggéré que la règle a été instauré juste pour le plaisir de savoir que des générations d'enfants allaient l'enfreindre… »

« Liam pense qu'il s'est passé quelque chose d'horrible, genre un meurtre ou de la torture, et qu'on ne l'utilise plus par respect pour les victimes. »

« Si c'était le cas, il y a longtemps qu'on ne se servirait plus de la salle d'entrainement. »

Melian se rembrunit, et tenta de s'excuser, mais l'ambiance détendue était brisée. Elle ne lui avait pas encore parlé du meurtre qu'elle avait commis, mais il avait subi la torture de leur père pendant des années, au même titre qu'elle.

Ellana rangea le bureau de manière à effacer leurs traces, puis ils replacèrent les protections sur la porte. Le plus complexe était d'intégrer leur père dans les protections, tout en effaçant leur propre présence.

« Et si on y allait ? » suggéra Melian, alors qu'Ellana s'apprêtait à retourner dans sa chambre.

« Dans la salle d'entrainement ? » demanda-t-elle, confuse.

« Dans la Tour Sud. »

Melian avait l'air soucieux, mais il y avait également dans son regard un sentiment qu'elle n'était pas sûre de comprendre. Ellana réalisa qu'ils ne passaient presque plus de temps ensemble, à tel point qu'elle n'était plus capable de lire en lui comme dans un livre ouvert.

« Le premier arrivé a perdu ! » s'exclama-t-elle, avant de courir en direction des escaliers. Son frère ne mit qu'une seconde à reprendre ses esprits et à courir à sa suite.

Il y avait plusieurs moyens d'accéder à la Tour Sud, le plus rapide étant un passage dérobé, derrière les cuisines, qui permettait aux elfes de se déplacer dans le Manoir sans déranger les potentiels invités. De fait, un réseau de passages dissimulés reliait les différentes ailes du Manoir, et notamment la Tour Sud, bien que le couloir d'entrée de cette dernière ait été condamné des siècles auparavant.

« J'ai gagné ! » se vanta Melian, appuyé contre le mur qui bouchait l'entrée de la Tour Sud.

« Tu as demandé à Twinky ? » demanda Ellana, suspicieuse. Elle avait pourtant pris la voie la plus directe ! Comment aurait-il pu être plus rapide qu'elle, si ce n'était en demandant à son elfe attitrée de le transplaner ?

« Qu'est-ce qui te fait dire ça ? » s'offusqua son frère.

« Tu es trop rapide, c'est louche ! »

« Tu es jalouse, avoue ! »

Ellana fit la moue, et s'approcha du mur de pierre, qui n'aurait pas paru si suspicieux s'il ne s'était pas trouvé au fond d'une impasse. Il était protégé par divers enchantement, qui attirait l'attention plus qu'autre chose. Comme si l'endroit était fait pour être exploré.

Elle avait beau n'être pas venue dans la Tour Sud depuis près des années, Ellana se souvenait encore des contre-sorts nécessaires – qui incluaient de la magie du sang. Melian s'entailla légèrement l'index, puis il toucha plusieurs pierres dans un ordre bien précis, selon un code qu'ils avaient passé des mois à comprendre.

Un pan du mur pivota pour dévoiler une pièce circulaire, basse de plafond, et dont les fenêtres condamnées ne laissaient passer qu'un mince filet de lumière. Des toiles d'araignées, des nids de guêpes abandonnés, et des bruits de grattements dans les murs de pierre indiquaient à Ellana que la Tour Sud n'était pas entièrement dépourvue de vie.

Sur leur droite, le couloir se prolongeait sous forme d'un escalier, qui permettait de monter au dernier étage de la tour – la véritable raison de leur présence en cet endroit.

« On monte ? » demanda Ellana.

« Ce n'est pas comme s'il y avait quelque chose d'intéressant à voir en bas… » fit remarquer son frère.

Ellana haussa les épaules et entama l'ascension, armée de sa baguette qui illuminait l'espace d'un lumos. Les deux étages suivants étaient aussi vides que le rez-de-chaussée, donc dénués d'intérêt. Une fois en haut des escaliers, elle ouvrit la trappe qui fermait l'accès et se hissa sur le plancher du dernier étage de la tourelle.

Le dernier étage de la Tour Sud était ouvert sur l'extérieur. Il n'y avait pas de mur, juste quatre pilier soutenant une voûte, qui abritait la trappe. Tout le long de la plateforme, un parapet, qui devait autrefois servir de rempart en cas d'attaque, était désormais parfait pour soutenir un télescope et observer les étoiles.

Le télescope était en mauvais état, et était inutilisable, mais il restait une preuve qu'ils n'étaient pas les premiers à s'aventurer en haut de la tour interdite.

« Tu vois quelque chose d'intéressant ? » demanda Melian, les yeux tournés vers la voûte céleste.

Le Manoir se trouvait à l'écart de la civilisation, et lorsque toutes ses lumières étaient éteintes, les étoiles étincelaient dans le ciel nocturne. La vue parfaite pour les rêveurs à l'imagination débordante et les poètes en manque d'inspiration.

« Hum… La Grande Ourse, Orion, Cassiopée, le Dragon… » Ellana commença à lister les différentes constellations qu'elle avait appris à reconnaître.

« Oh, regarde ! La licorne ! »

Ellana fit un regard noir à son frère, qui lui répondit par un sourire narquois. Lorsqu'ils étaient enfants, leur mère tenait le rôle de précepteur, et pendant les cours d'Astronomie, Ellana demandait toujours où se trouvait la licorne – son animal préféré jusqu'à ses six ou sept ans.

« Maintenant que tu le dis, je vois la Girafe ! » répliqua-t-elle. « M. Je prends dix centimètres en six mois. »

« Oh, ne t'inquiètes pas, toi aussi, un jour, tu grandiras… regarde, tu vas bientôt rattraper ta forme animale ! »

« Ce n'est pas parce que je mesure cinquante centimètres et toi plus d'un mètre que je ne peux pas te vaincre, tu sais ? »

« Je sais, je sais, ton venin est mortel, tu pourrais me tuer en quelques secondes… »

Ellana lui tira la langue et reporta sa concentration sur les étoiles.

« Oh ! » s'écria Ellana avec émerveillement. « Je vois le Lynx ! »

« Le Serpent est derrière toi. » déclara Melian au même moment.

Ils échangèrent un sourire, et observèrent les étoiles jusqu'au retour de leurs parents, quelques heures plus tard. A aucun moment Ellana ne lâcha le billet pour la Coupe du Monde de Quidditch qu'elle avait fourré dans sa poche.

M

Parce que la famille Forester ne se contentait pas du minimum, la tente choisie par Cassiel comprenait trois étages, tous aussi grands que la chambre de Melian. Evidemment, de l'extérieur, on aurait dit une simple tente six places comme celles des moldues.

Melian se serait sentit embarrassé si les Malfoy, en face d'eux, n'avaient pas amené leurs cinq paons albinos. Draco lui répétait qu'ils faisaient partis de la famille, mais en même temps, il n'avait pas l'air de connaître leurs prénoms. Au moins, les dangers publics (le surnom du monde sorcier pour les paons albinos des Malfoy) étaient retenus en laisse.

En d'autres termes, la Coupe du Monde de Quidditch était enfin arrivée. Liam, le meilleur ami de Melian, et Anna, une amie d'Ellana, séjournaient avec eux. Par un fortuné jeu du hasard, Cassiel n'avait pas remarqué les billets manquants, et donc Cassiopée – une autre amie d'Ellana – et sa mère assistaient également à la Coupe aux frais des Forester, sans que le patriarche ne soit au courant.

« Tu veux aller te balader ? » proposa Melian à Liam. « Apparemment, il vende plein d'accessoires de ce côté… »

« Hum… après tout, il ne nous manque plus que des chapeaux pour être entièrement aux couleurs de l'Irlande… »

« Je ne vois pas du tout de quoi tu parles ! »

Leur tente et la plupart de leurs affaires étaient du vert des Forester, qui était étonnamment proche du vert de l'Irlande. Et l'enfant qu'était Melian s'était habillé entièrement en vert pour supporter son équipe préférée.

« Vous partez ? » demanda sa mère, en sortant de la tente.

Même en camping, Abigail Forester dégageait la dignité et la magnificence dues à son rang, et ce sans faire d'effort particulier. Cependant, tout l'or du monde, et la lignée la plus pure qui soit, ne suffirait jamais à masquer la lassitude qui hantait ses traits.

« Nous allons simplement explorer les environs, Mère. Dois-je vous rapporter quelque chose ? »

Simple, polie, et dénuée de sentiment, voilà comment Melian trouvait sa réponse. Mais Abigail sourit fièrement en l'entendant. Il aurait presque pu deviner ce qu'elle pensait : le parfait héritier sang-pur.

C'était le masque que Melian avait appris à arborer en public dès son plus jeune âge : courtois, plein d'esprit et de bons-sens, et charmeur avec les dames du monde sang-pur. Abigail l'avait en tout cas éduqué dans ce sens, et elle avait toutes les raisons d'être fière de lui. Melian ne s'en sentait que plus dégoûté.

« Ramène-moi un drapeau bulgare, Mel ! » cria Ellana depuis le fond de la tente.

Sa demande, très peu digne d'une sang-pure, était la parfaite distraction pour éviter le sermon de sa mère. Melian se demandait parfois si sa sœur avait un sixième sens pour deviner qu'il avait besoin d'elle. D'un autre côté, son manque de formalité était peut-être un simple signe de rébellion envers leur père, qui avait trouver le moyen de travailler en camping - leur tente avait même un bureau prévu à cet effet.

« Bulgare ? » répéta Melian, outré qu'elle ait osé faire une suggestion pareille. « On utilisera la force s'il le faut, mais ce soir tu porteras du vert, Ella ! »

« Quel est le problème avec les Bulgares ? » demanda Anna.

Melian ne la connaissait pas énormément, mais de ce qu'il avait compris, Anna Baker était considérée sang-mêlée car sa mère, une sang-pure, avait épousé le fils de deux nés-moldus. En dehors de ça, c'était une jeune fille drôle, parfois maladroite, et ayant des résultats dans la moyenne.

Du moins c'était la présentation qu'avait fait Ellana lorsqu'elle avait demandé la permission à leur père de l'inviter. De ce que Melian avait vu, elle était pertinente et sarcastique – sûrement une conséquence de la fréquentation d'Astoria Greengrass.

En résumé, elle savait parfaitement pourquoi Ellana ne pouvait décemment pas supporter les Bulgares – l'un des joueurs venait d'une Famille ennemie des Forester – ainsi que la raison pour laquelle elle le faisait – énerver leur père, évidemment.

Dans le monde sang-pur, même le Quidditch était une excuse pour faire de la politique.

« Je te ramène un drapeau de l'Irlande, sœurette ! » s'exclama Melian, avant de partir en courant, Liam sur les talons.

« Tu ne crois pas que tu en fais un peu trop ? » s'enquit Liam. « Je connais la discorde qui oppose les Forester et les Krum, mais… »

« J'ai plus peur de la réaction de mon père… Et puis, sérieusement ? La Bulgarie ? Qui supporte la Bulgarie ? »

Le sourire exaspéré de Liam était tout ce dont Melian avait besoin pour se sentir mieux. Ils s'étaient rencontrés en troisième année, lors d'un travail de groupe en Arithmancie – Liam était à Serdaigle, et ils ne s'étaient jamais vraiment parlé avant ça.

Mais depuis que Melian avait réussi à briser le silence gênant alors qu'ils essayaient de travailler à la Bibliothèque, et que Liam avait éclater de rire face à sa stupidité, ils ne s'étaient plus jamais quittés – pour le grand plaisir de Melian.

« Viens, si on ne se dépêche pas il ne restera plus de drapeau bulgare… » fit Liam.

« Tu n'as pas entendu ce que j'ai dit ? »

« Si, et comme je te connais par cœur je sais aussi exactement ce que tu es en train de penser. Et puis… tu n'empêcherais pas ta petite sœur adorée de supporter l'équipe qu'elle veut, n'est-ce-pas ? »

« Non… quelque chose me dit que Père lui réserve une mauvaise surprise… » répondit Melian. « Je l'ai entendu parler avec le vieux Nott… »

« Le père de Théodore Nott ? »

Melian hocha gravement la tête. Nott était un ami de son grand-père, le père de Cassiel. Comme il avait eu son fils à un âge avancé, il n'était pas particulièrement proche des actuels sorciers les plus influents de la société britannique, chez qui il pourrait trouver une fiancée digne de Théodore. Ellana devait être une aubaine pour lui, puisqu'il entretenait de bonnes relations avec sa famille.

« Tu es sûr qu'ils parlaient de Théodore et Ellana ? Ils font du commerce ensemble, ç'aurait pu être le sujet de leur discussion, non ? »

« Ç'aurait pu, si je n'avais pas entendu clairement les mots "courtiser" et "d'ici sa septième année" tout au long de la conversation. »

Liam grimaça, visiblement à cours d'idées. Il n'y avait effectivement aucune méprise possible sur le sujet de conversation. Cassiel prévoyait de marier Ellana à Théodore Nott. Alors qu'elle n'avait encore que treize ans. Melian ne put retenir un frisson à l'idée de voir sa petite sœur, éblouissante dans sa robe de mariée, mais ayant seulement dix-sept ans.

« Dans ce cas… il faut relativiser. On a encore du temps pour trouver une solution, et… » Liam s'interrompit, hésitant à poursuivre. « Je connais un peu Théo… ce n'est pas le pire que ton père aurait pu trouver, surtout dans cette année. Imagine, s'il avait choisi Crabbe ou Goyle ? »

« Je préfèrerai qu'elle choisisse elle-même ! » protesta Melian, tout en sachant que Liam avait raison. « Déjà qu'il veut que j'épouse Jade Selwyn… »

« C'est officiel, alors ? » demanda son meilleur ami, les sourcils foncés, comme à chaque fois que quelque chose le dérangeait.

« Je n'ai toujours pas signé les papiers, donc techniquement non. Tu ne peux pas savoir à quel point mon père regrette d'avoir attendu ma majorité ! C'est pour ça qu'il s'occupe d'Ella dès maintenant. »

« Tu veux dire que si tu acceptais, elle n'aurait pas à se fiancer aussi tôt ? »

Melian devait admettre qu'il n'avait pas pensé à ce détail. Pourrait-il sauver sa sœur en acceptant son contrat de mariage avec Jade Selwyn ? En serait-il seulement capable ? Un coup d'œil à Liam lui donnait envie de dire non, mais il ne pouvait pas non plus se résoudre à abandonner Ellana…

« Et toi ? Tes parents ne t'impose personne ? »

« Tant que son sang est pur et que sa famille a de l'argent… je suis libre de faire ce que je veux, avec qui je veux. »

Liam avait un regard étrange en disant cela, comme s'il pensait à quelqu'un en particulier. Ce qui serait hautement improbable, puisque Melian ne l'avait jamais vu poser les yeux sur quiconque depuis qu'il le connaissait.

« Oh, ce ne serait pas Potter, avec les Weasley ? » s'exclama Melian, en désignant le héros national.

« Tu veux aller le voir ? »

« Non, pourquoi ? »

« Alors pourquoi prendre le temps de le pointer du doigt ? »

« Je ne l'ai pas pointé du doigt, je l'ai désigné d'un mouvement de tête ! »

« C'est pareil. »

« Non. »

« Si. »

« Non – en fait tu sais quoi ? J'ai envie d'aller le voir ! »

« Bien sûr que tu veux le voir, tu ne l'as remercié que deux mille huit cents cinquante fois pour le sauvetage de ta sœur… »

« T'as vraiment compté ? »

« Oui, c'est la trente-troisième fois. »

Melian éclata de rire et traîna son ami en direction de Potter. Ils longèrent des tentes toutes plus excentriques que les autres, parfois entièrement aux couleurs de leur équipe – les tentes des supporters irlandais ressemblaient à des parterres d'herbe, alors que celles des bulgares étaient juste… rouges.

Potter était en train de discuter avec trois Weasley, dont deux qui se ressemblaient trop pour ne pas être des jumeaux. Melian s'était toujours senti soulagé de tomber sur l'année sans Weasley – il s'agissait d'une famille très respectable à ses yeux, et donc une famille que son père ne l'autoriserait pas à fréquenter.

« Hey, Potter ! » s'exclama-t-il, en s'approchant du groupe. « Dis-moi que tu es pour l'Irlande ! »

« Quoi, tu connais quelqu'un qui est pour la Bulgarie ? »

« Ellana… je pense que cette gamine est une cause perdue… »

« Ron ici présent est pour la Bulgarie simplement pour baver sur Krum. »

« Hey ! » protesta le rouquin. « Je suis pour l'Irlande aussi ! »

« Vous avez intérêt… j'ai parié sur l'Irlande. » intervint Liam. « Krum va attraper le vif d'or, mais l'Irlande aura suffisamment d'avance pour gagner. »

Les jumeaux le regardèrent comme s'il venait de leur proposer le prank de l'année. Liam avait un don pour faire des paris – il tombait toujours juste, à tel point qu'il était célèbre parmi les parieurs de Poudlard. Si les jumeaux se dépêchaient, ils pouvaient toujours rectifier leurs propres paris et gagner le pactole.

« Comme si Krum pouvait attraper le vif… » marmonna Melian. Devant les regards choqués des Weasley, il explicita sa pensée. « Les Krum sont… comment dire… »

« Des ennemis de la famille Forester. » compléta Liam, qui avait senti son malaise. « Pour une raison obscure et probablement futile, qui empêche la pauvre Ellana de supporter l'équipe qu'elle veut. »

« Pff… tu sais bien qu'elle fait ça pour énerver mon père. »

« N'empêche que tu n'as pas la moindre idée de la raison pour laquelle tu dois détester Krum… »

« C'est un truc de sang-pur, de détester les gens par tradition ? » demanda Potter, à moitié sérieux.

« Non, juste un truc de Forester. » le rassura Liam. « Je viens de la famille Fawley, et on est tous à peu près normaux. »

« Ça, c'est parce que ton père a renié ses parents pour épouser une née-moldue… » fit remarquer Melian.

« Un détail. »

« Qui fait toute la différence. »

« Entre normal et coincé. »

« Je ne suis pas coincé ! »

« Dit-il, en robe de cérémonie à la Coupe du Monde de Quidditch. »

Melian affronta Liam du regard. Sans son éducation sang-pure, il n'aurait pas été capable de dissimuler son sourire. Comme quoi, son incapacité à exprimer physiquement ses émotions pouvait parfois se révéler utile.

« Woah… c'est comme se regarder dans un miroir… » glissa l'un des jumeaux Weasley à son frère.

« Mais un miroir inversé. »

« Puisqu'on est toujours du même côté. »

« A quel moment est-ce que ça a dérapé ? » demanda Potter au Weasley le plus jeune.

« Probablement quand Forester a critiqué Krum… »

« C'est tout ce que tu retiens de la discussion ? » s'étonna Melian.

« Il y a le mot Krum dedans, donc oui, ça lui suffit. » confirma Potter. Weasley prit un air offensé, mais il ne démentit pas l'accusation.

« Bon, il va falloir qu'on se dépêche, sinon il ne restera plus de drapeau irlandais ! » s'exclama Melian.

« Je pense que tu voulais dire bulgare, Mel… » rectifia Liam.

« C'est ça… »

Les deux amis prirent congé du Survivant et se dirigèrent vers les stands de vendeurs ambulants. Melian acheta un nombre incalculable d'objets tous plus inutiles les uns que les autres – des rosettes, écharpes et banderoles vertes, pour ne citer qu'elles – sous le regard mi-amusé, mi-exaspéré de Liam.

« Oh, regarde-ça ! » s'écria le Serdaigle, en lui montrant une écharpe bulgare décorée de lions rugissants. « C'est parfait pour ta sœur, tu ne crois pas ? »

Melian jeta un coup d'œil aux autres clients : il n'en connaissait aucun.

« Fantastique ! Je vais lui en prendre une. »

« Tu as vraiment vérifié qu'il n'y avait pas de sang-purs autour ? »

« … Non ? »

Liam leva les yeux au ciel, et le ramena de force à la tente, un sac rempli de goodies pour les fanatiques irlandais sous le bras.

E

Il l'avait vraiment fait. Il lui avait ramené une écharpe bulgare. Ellana, qui avait au départ dit cela pour plaisanter, allait désormais devoir porter un objet qui, aux yeux de son père, serait un signe clair de rébellion.

« Merci, Mel… » grinça-t-elle en prenant l'hideuse écharpe.

« Tu as intérêt à la porter, par contre ! » dit Melian, qui se réjouissait visiblement de son supplice.

Ellana soupira et passa l'écharpe autour de son coup. Elle pourrait toujours l'enlever sous prétexte de la chaleur… quoique, vu le sourire narquois de son frère, elle n'était pas sûre de pouvoir y échapper.

« Admets que tu l'as légèrement cherché… » lui glissa Anna, que les politiques de sang-pur amusaient plus qu'autre chose.

Après avoir hésité longuement entre les amies qu'elle pouvait inviter, Ellana s'était rendue compte que, si son père lui avait offert un deuxième ticket, c'était pour montrer son influence et sa générosité en invitant des gens qui ne pouvaient pas assister à la Coupe – mais cette offre n'allait pas suffisamment loin pour s'étendre à Cassiopée, fille d'un moldu et d'une née-moldue.

D'où le stratagème pour lui voler deux tickets et les donner à Cassiopée et sa mère. Ellana était plutôt fière d'elle, sur ce coup. Et puis, comme Astoria, Lucy, Ginny et Luna venaient également, toute leur bande serait rassemblée.

« Je ne vois pas du tout de quoi tu parles. » rétorqua Ellana, en faisant un sourire forcé. « J'adore cette écharpe ! »

« C'est malheureux, car elle jure avec les couleurs de notre famille. » intervint une voix qui hantait ses cauchemars.

Cassiel Forester avait enfin daigner laisser son travail de côté pour rejoindre sa famille. Il jeta un regard dégoûté à l'écharpe, et la fit disparaître d'un « evanesco ». Ellana n'eut même pas le temps de protester qu'il lui ordonnait de changer de tenue.

« Ce n'est pas parce que nous nous trouvons sur la propriété d'un moldu que nous devons nous comporter comme tel. Va te changer. » ordonna-t-il.

Ellana baissa le regard sur son pantalon en jean, cadeau de Cassiopée, et sa blouse verte. Elle se sentait horriblement gênée d'être ainsi réprimandée devant tout le monde – pas seulement sa mère et son frère, mais aussi Liam et Anna, qui étaient étrangers à leurs problèmes familiaux. D'ailleurs, Anna portait des vêtements moldus, mais son père avait un minimum de courtoisie et d'hospitalité, aussi fut-elle exemptée de l'humiliation.

La tête haute malgré sa honte, Ellana s'interdisait avec toute la volonté de son âme de rougir. Elle remonta dans sa chambre – oui, elle avait sa propre chambre dans une tente de camping – et revêtit des robes d'été vertes. Elle allait finir par ressembler à un arbre, avec toutes ces bêtises.

Ce ne fut que lorsqu'ils atteignirent leur loge, où étaient déjà rassemblée la crème de la société sorcière, qu'Ellana comprit pourquoi son père avait insisté à ce qu'elle soit présentable.

Les familles rassemblées dans cette loge avaient toutes un point commun : un fils ou une fille en âge de courtiser.

C'était l'une des traditions qu'Ellana détestait le moins : lorsqu'un contrat de mariage était établi entre deux jeunes sang-purs – généralement entre quatorze et quinze ans – ils devaient se « courtiser » pendant deux à trois ans, avant que les parents ne décident si oui ou non ils étaient compatibles. Les deux adolescents étaient alors fiancés, et avaient un an pour préparer la cérémonie de mariage.

Cela signifiait que si les deux jeunes ne s'entendaient pas, le contrat pouvait être rompu. Ellana avait donc encore une chance de s'en sortir.

Pour son plus grand déplaisir, Cassiel lui prit la main et se dirigea immédiatement vers Thaddeus Nott et son fils Théodore. Soudain ravie de ne pas être vêtue du jeans, Ellana salua les deux Nott en s'inclinant légèrement, avant de se reculer pour se tenir d'un pas derrière son père.

Chez les sang-pur, la gestuelle était un langage à part. Le fait que seuls Cassiel et Ellana soient partis saluer les Nott voulait tout dire aux yeux des autres familles. Et devant celui qui risquait de devenir le père de son fiancé, Ellana devait à tout prix se comporter comme la parfaite sang-pure, intelligente, calme, respectueuse et obéissante. Elle ne pouvait imaginer la punition qu'elle recevrait, sinon.

« Cassiel, cela fait bien longtemps, mon ami. » salua Nott Sr. « Je ne me souviens pas t'avoir déjà présenté mon fils, Théodore. »

« C'est un honneur, monsieur. » dit aussitôt Nott.

L'expression neutre de ses yeux bleus ne laissait passer aucune émotion. Sa tenue, jusqu'à la manière dont ses cheveux bruns étaient coiffés, n'était qu'élégance et sobriété. Ellana l'avait déjà vu dans la salle commune : il passait son temps seul, à l'écart de ses camarades, toujours plongé dans des livres.

« Tout le plaisir est pour moi. J'ai discuté il y a peu avec le professeur Snape, qui ne tarit pas d'éloges sur ses élèves prometteurs, et je n'étais pas le moins du monde surpris d'apprendre que tu en fais partie. » répondit Cassiel, avant de tendre sa main.

Nott n'hésita qu'un fragment de seconde avant de la serrer, mais c'était un laps de temps suffisant pour Ellana pour comprendre qu'il n'était pas plus ravi qu'elle de se trouver là.

« Et tu dois être Ellana, n'est-ce-pas ? » s'enquit Nott Sr. « La dernière fois que je t'ai vue, ton grand-père était encore parmi nous… Eirian était l'un des plus grands sorciers qu'il m'ait été donné de rencontrer… »

« J'ai bien peur que vous ne l'ayez mieux connu que moi, monsieur. » répondit Ellana, avec un sourire qui exprimait à la fois le regret et le respect.

« Je ne sais pas si vous vous êtes déjà rencontré à Poudlard, même s'il me semble que vous avez des connaissances en commun… le jeune Malfoy, par exemple… » dit Nott Sr, en s'adressant à Ellana et Théodore.

« Je n'ai pas encore eu ce plaisir. » confirma Ellana, en jetant un rapide coup d'œil à Nott.

Assorti d'un léger rougissement, son regard pouvait être interprété comme de la timidité, ou comme un intérêt amoureux. Les deux lui donnaient envie de vomir, mais la présence de son père l'empêchait de faire autrement. Jouer les petites filles adorablement idiotes était, pour le moment, la meilleure solution qui se présentait à elle.

« Peut-être devrions-nous les laisser discuter le temps du match, Thaddeus… » suggéra Cassiel. « Et je suis sûr que ma femme aimerait vous revoir… »

Ellana ne savait pas si elle devait bénir son père ou le maudire. Car elle se retrouvait désormais seule avec Théodore Nott, à qui elle n'avait encore jamais adressé la parole. Tout ce que lui avait dit Draco à son sujet, c'était qu'il se croyait au-dessus de tout le monde… et c'était sûrement dû au fait que Nott ne faisait pas semblant de l'adorer à cause de son nom de famille.

Elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'elle était sensée dire. Devait-elle parler de leur potentiel contrat de mariage ? de lui ? d'elle-même ?

« Je suis désolée. » dit finalement Nott.

« Pourquoi ? Ce n'est pas comme si c'était ton idée… »

« Je suis désolé que mon père ait évoqué la mort de ton grand-père. » clarifia Nott, clairement mal à l'aise. « Ce n'était pas très délicat de sa part. »

Oh. Ce n'était pas exactement cette partie-là de leur conversation qui avait dérangée Ellana.

« Ce n'est rien. Comme je l'ai dit à ton père, je ne connaissais pas mon grand-père. » le rassura-t-elle. « Je suis plus inquiète par ce que mon père a prévu, à vrai dire. »

« Idem. »

Le silence revint, encore plus gênant. Ellana ne savait quel Fondateur elle devait prier pour venir la sortir de là. Au moins, ni l'un ni l'autre ne souhaitait cette situation – et ne comptait l'accepter. Si seulement Père avait choisi quelqu'un que je connais… même un camarade de classe…

Mais non, il avait préféré le fils d'un Mangemort notoire, qui passait son temps isolé du reste du monde, et qui ne disait pas plus de trois mots par jour. Remarque, ce serait peut-être plus facile pour elle de rompre le contrat si elle ne s'entendait réellement pas avec Nott.

« Tu… euh… tu es pour quelle équipe ? » demanda Ellana, pour briser le silence.

« Bulgarie. Mais tu es une Forester, donc tu dois probablement être pour l'Irlande… »

Au moins, il semblait connaitre l'histoire des Familles sang-pures… mais qu'est-ce qu'elle racontait ? C'était un bon point aux yeux de son père, pas aux siens !

« Je suis Serpentarde avant tout… ma loyauté va au vainqueur. » rétorqua Ellana, avec un sourire qui se voulait sournois, mais mignon, soit ce qu'on attendait d'une jeune fille bien éduquée.

« Dans ce cas, tu devrais soutenir la Bulgarie. » dit Nott. Il se voulait amusant, mais il avait plus l'air ennuyé qu'autre chose. Il avait probablement plus important à faire que de gérer une enfant.

Ellana vérifia que son père n'était pas là, et prit la parole, suffisamment bas pour que seul Nott puisse l'entendre.

« Ecoute, ça ne sert à rien de faire semblant, on ne veut clairement ni l'un ni l'autre de cette situation. » dit-elle, en laissant tomber son masque de petite fille mignonne mais stupide. « Je n'ai pas l'intention de me marier, et encore moins avec un mec que je ne connais pas. »

Nott eut l'air surpris – et peut-être légèrement offensé d'être traité de « mec ». Il ne devait pas s'attendre à ce que son masque dissimule une rebelle en quête d'indépendance.

« Et tu prévois d'éviter ce mariage comment ? » demanda-t-il, avec une pointe de sarcasme. « En disant "non" à ton papounet chéri ? »

« Ou en jetant un sort là-où-je-pense au tien ! » répliqua Ellana, piquée au vif.

« Je t'en prie, fais-toi plaisir ! Ce n'est pas comme s'il ne le méritait pas. »

« Qu'est-ce que tu comptes faire, alors ? Accepter de me courtiser ? Parce que je n'en ai pas l'intention. »

« Moi non plus, ne t'inquiètes pas. Je ne suis peut-être pas Malfoy, mais j'ai quand même une réputation à tenir… »

Qu'est-ce qu'il sous-entendait, exactement ?

« Allons, allons, calmez-vous les enfants ! » les interrompit Melian, au grand soulagement d'Ellana.

Tant que son frère arriverait au moment parfait pour la sauver, tout irait bien.

« Le match va commencer, regardez ! » ajouta-t-il. « Ellana, je crois que tes amies voudraient te parler. Quant à toi… Théodore Nott, c'est bien ça ? »

Il fit un sourire carnassier à Nott, qui se recroquevilla devant son aura menaçante.

« Merci, Mel ! » s'exclama Ellana, avant de rejoindre ses amies. Elle ne se retourna qu'une seule fois, pour faire un sourire moqueur à Nott. Il répondit par un regard meurtrier.

Le reste du mach se déroula sans accroc, à part une légère tension palpable du côté de Melian et Nott, qui semblaient plongés dans une passionnante conversation. Ellana le passa avec Anna, Cassiopée, Lucy et Astoria, à discuter de son futur fiancé.

« Alors ? Ton père a choisi Nott ? » devina Astoria. « Je pense que ça pourrait être pire, honnêtement. Mes parents sont en train de discuter avec les Flint, tu imagines ? »

« Encore, vous ce sont vos parents qui s'en occupent. Mon frère prévoit de me marier à Crabbe, parce que ce serait merveilleux, sa sœur et son meilleur ami ! » se plaignit Lucy.

« Parfois je me dis qu'être fille de moldu, ça a du bon. » commenta Cassiopée.

« Dit-elle, alors qu'elle est ici aux frais d'un sang-pur… » répliqua Astoria.

« Oui, mais ça il ne le sait pas… » rétorqua Ellana. « D'ailleurs, tout va bien avec ta mère ? »

« Oui, elle est partie rejoindre une de ses anciennes camarades de classe, du côté des gens normaux qui ne forcent pas leurs enfants à épouser leurs cousins. »

« Maintenant que j'y pense, je ne suis pas la première Forester à épouser un Nott… mais aucun n'est un ancêtre direct, donc c'est bon. »

« Tu veux dire que ça te suffit ? » s'étonna Anna. « La dernière Nott née Forester était quoi… une tante ? une cousine ? »

« Quelque chose dans ce goût-là… » confirma Ellana. Elle ne se souvenait pas de son arbre généalogique au détail près, mais le dernier mariage entre leurs deux familles ne remontait pas à très longtemps.

« Et tu es sûre que Nott n'a pas du sang Forester dans les veines ? » demanda Cassiopée, qui semblait sur le point de vomir rien qu'à l'idée d'épouser un cousin.

« Je vérifierai. De toute façon, cousin ou pas, je n'ai aucune intention de l'épouser ! »

Quelques instants plus tard, Krum attrapa le vif d'or – donnant ainsi la victoire aux Irlandais, qui avaient à peine dix points d'avance. Ellana et ses amies applaudirent poliment, bien que, à part Cassiopée, aucune ne soit réellement intéressée par le Quidditch.

« J'ai une idée ! » s'écria Cassiopée, avant d'appeler l'un des elfes au service de leur loge, et de lui demander des verres de champagne sans alcool. « Je dédie cette victoire à notre célibat, en priant pour qu'il dure le plus longtemps possible ! »

« Santé ! » s'exclama Ellana, en prenant une gorgée. Elle n'avait jamais bu d'alcool, et ne savait donc pas si le champagne désalcoolisé était semblable au vrai, mais l'effet psychologique était le même.

La fête dura une bonne partie de la nuit, en particulier chez les Irlandais. Ellana retourna dans sa tente avec sa famille, et ils discutèrent encore un bon moment – les enfants du match, les parents de mariage – avant de finalement aller se coucher.

Ce ne fut que vers deux heures du matin, alors qu'Ellana dormait paisiblement, que les hurlements commencèrent.