Coucou ! Pour ceux qui auraient eu le courage de me lire et ont l'intention de continuer, je vous présente le premier chapitre. J'ai décidé que chaque chapitre porterait le nom d'un objet (Pourquoi ? Ben parce que ça m'amuse…). Celui-là s'appelle « Dossier ». Pourquoi ? Parce que cet objet très présent dans l'administratif est celui qui revient dans ce chapitre. Ce mot est aussi fortement connoté avec les enquêtes (dont celle qui a lieu dans ce chapitre).

Avertissement : sujets pas marrants du tout abordés dans ce chapitre. Bonne lecture quand même !

La guerre contre les Quincys avait pris fin trois ans auparavant. Cependant, rien ni personne ne s'en était sorti indemne, même pas les survivants. Chacun avait subi de terribles blessures, marquant à jamais autant le corps que l'âme.

Le Seireitei s'était relevé petit à petit, mais on pouvait apercevoir encore çà et là des traces de la sanglante bataille. En empruntant un virage, des amas de pierre et de bois mêlés, comme si un ouragan avait tout dévasté. En glissant dans les différents quartiers, des chaussées encore creusées, comme si des géants étaient passés par là. La priorité n'avait pas été de reconstruire les infrastructures, mais de soigner les nombreux blessés – presque tous avaient été sérieusement blessés - et d'entraîner les nouvelles recrues venues pour compenser les pertes immenses.

Mais surtout ces traces étaient… l'absence. Les Treize Divisions paraissaient si vides… Bien des hauts-gradés avaient succombé. Au-delà des sièges d'officiers encore vacants, c'était leur présence qui manquait cruellement. Celle qui était garante de l'équilibre entre les mondes. Celle qui motivait les troupes. Mais surtout, celle qui avait partagé des moments d'émotions intenses de fureur, de peur, de joie ou de détermination avec les survivants. C'étaient ces sinistres ruminations que le capitaine de la Neuvième Division ressassait. Sa main remplissait la paperasse, mais son esprit était ailleurs. A côté, même son exil de cent ans sur Terre par la faute d'Aizen lui paraissait être un événement joyeux de son existence. Au moins à ce moment-là, il était entouré de ses collègues et amis.

« Kenseeeeiiiii ! Je m'ennuiiiie ! piailla une voix plaintive. »

Rectification : entouré de ses collègues et d'une peste. Il jeta un regard mauvais à l'imbécile aux cheveux verts qui avait osé débouler dans son bureau sans avoir au préalable frappé à la porte. Pourquoi avait-il espéré qu'elle se calme avec sa réintégration au Gotei 13 ?

« Je te répète depuis plus de cent ans de frapper avant d'entrer.

-Ben t'as qu'à fermer la porte à clé !

-Tu serais quand même capable de la faire sortir de ses gonds espèce de brute !

-Tu m'as insultée, t'es vilain ! »

La Shinigami excentrique commença à se rouler par terre tout en débitant une litanie de mots sans logique. Sans se préoccuper d'elle, l'homme aux cheveux cendrés reprit tranquillement ses dossiers. Mashiro finit par se fatiguer et se remit sur ses jambes.

« Pourquoi tu fais toute cette paperasse, Kensei ?

-A ton avis ? En plus de mon boulot, je fais aussi le tien.

-Je comprends toujours pas pourquoi on doit en faire, rétorqua-t-elle en penchant la tête sur le côté.

-On doit créer des dossiers pour chaque nouvelle recrue, c'est comme ça. »

Le capitaine de la Neuvième Division remplit un paragraphe avant de ranger la fiche dans le dossier portant le même nom.

« J'ai faim maintenant ! Je veux des senbai !

-T'as à qu'à aller dans les cuisines de la division, les réserves ont été renouvelées hier, dit-il d'un air lassé.

-Ouiiii ! »

La porte claqua bruyamment et les pas dans le couloir devinrent de plus en plus lointains. Ouf, enfin débarrassée d'elle ! Pourvu que le reste de la journée fût calme. Hélas pour lui, le ciel décida pour cette journée de le faire royalement chier.

« Capitaine Muguruma ! C'est terrible ! Venez vite ! Le capitaine-commandant m'a dit que c'était vous qui vous chargiez de ce genre d'enquêtes. »

L'interpelé regarda d'un air surpris la personne qui venait de s'incliner devant lui. A en juger par sa livrée, il travaillait pour le clan Kyôraku il comprenait mieux pourquoi la division de Kuchiki avait été écartée. Puis il nota son corps tremblant et ses yeux qui avaient constaté l'horreur.

« Que se passe-t-il ? »

Lorsque Kensei entendit la réponse qui arriva, il se dit qu'en effet il y avait là une excellente raison d'abandonner sa paperasse.

-Notre maître… Notre maître a été assassiné ! »

C'est ainsi que le capitaine aux cheveux cendrés se retrouva au petit matin dans la splendide demeure d'une des quatre grandes familles nobles et plus précisément dans la chambre du maître. Et pas seulement pour y présenter les condoléances de politesse : c'était sa division qui se chargerait de cette affaire, du moins pour l'instant. En effet, afin de respecter une certaine impartialité, jusqu'à ce qu'on ait prouvé que l'affaire concernant un noble n'était pas liée à des conflits avec d'autres nobles, la Sixième Division, dirigée par un Kuchiki, ne pouvait pas s'en occuper.

En dépit des rideaux relevés qui laissaient passer la lumière d'un beau matin ensoleillé, la luxueuse chambre lui paraissait oppressante : il se serait cru dans une sorte d'intestin géant dont les parois se rapprochaient trop près de lui. Le Shinigami souffla de façon imperceptible. L'atmosphère y était sûrement pour beaucoup : aux pleurs se mêlaient la mort et le sang d'ailleurs, l'odeur était encore plus forte et étouffante vers le centre de la pièce. Tournant ses yeux dans cette direction, il eut un haut-le-cœur.

Celui ou celle qui avait assassiné le maître de maison s'en était visiblement donné à cœur joie. Kensei s'approcha de l'amas de chair ligoté, affalé sur une chaise. Une fente assez longue barrait le haut du crâne, sûrement le coup de grâce le visage était énucléé le corps était mutilé. Baissant les yeux, il remarqua alors la macabre mise en scène. Autour de ce qui fut le maître de maison étaient déposés dans une mare écarlate à demi-séchée, comme des objets de collection, les parties qui lui manquaient : les globes oculaires dont les nerfs pendaient encore, les deux mains et le sexe sauvagement découpé. Il était prêt à parier que le pauvre homme avait été amputé vivant. Il se nota mentalement de l'envoyer pour un séjour à la Douzième Division.

« Ça ira, Inoue ? »

La recrue n'en était certes pas à sa première enquête, mais il s'agissait tout de même de la première enquête où la scène de crime ressemblait davantage à une charcuterie qu'à autre chose.

« Ne vous en faites pas Taicho, fit l'interpelé en plissant le nez sous les relents pesants, c'est mon devoir de me rendre sur les scènes même les plus gores. »

Kensei Mugumura sourit faiblement à cette réponse. Sora Inoue était vraiment talentueux et avait fini en trois ans le cursus qu'un Shinigami ordinaire aurait achevé en six ans. Certes, il n'avait pas le génie de Gin Ichimaru ou celui de Kaien Shiba, néanmoins il avait commencé dans la Neuvième Division en tant que 17e siège et avait grimpé les échelons très vite. Il avait d'ailleurs été nommé 7e siège pas plus tard que la semaine dernière. Le capitaine avait entendu des rumeurs comme quoi son subordonné étant le frère d'un des Ryoka, cela n'était même pas surprenant qu'il ait développé de telles facultés. Par contre, il ne savait pas si Sora se souvenait de sa vie antérieure ni si jamais c'était le cas s'il avait tenté de renouer les liens avec sa sœur. Ce n'étaient pas ses affaires de toute manière.

« C'est horrible, non ? Ça ne peut être que l'œuvre d'un monstre, murmurèrent avec terreur les serviteurs qui s'étaient arrêtés au pas de la porte. »

Le Shinigami hocha la tête. Certes, lors de ses nombreux combats, il avait vu des corps affreusement mutilés par les techniques exotiques des adversaires, dont certains faisaient preuve d'un sadisme quasiment inhumain – dont son collègue Mayuri. Mais là, ce n'était pas la même chose. La victime était un civil et qui plus est un civil n'ayant jamais suivi de formation de militaire. Il fallait préciser en effet que Kyôraku Shinobi était juge.

« Que s'est-il passé ? s'enquit-il tandis que l'autre officier recueillait des échantillons.

-Taicho, s'avança une femme d'âge mûr, le personnel s'est réveillé vers six heures du matin, comme à l'accoutumée. Je passe devant la chambre de Kyôraku-sama pour me rendre dans sa bibliothèque personnelle. Là, je sens un fort effluve de sang. Je frappe au battant et je lui demande s'il est blessé et s'il désire un nécessaire pour les premiers soins. Pas de réponse. Je cours prendre néanmoins la trousse à pharmacie et je fais coulisser le panneau. Et là… »

Sa voix se brisa.

« Je vois… je vois… le corps du maître… affreusement mutilé, dans un lac de sang. »

Et la pauvre servante éclata en sanglots, maladroitement réconfortée par un de ses collègues.

« Nous retrouverons celui ou celle qui a commis ce crime madame, soyez-en assurée. »

On entendit un reniflement puis un frêle « Merci ».

Le capitaine de la Neuvième Division réfléchit à la mise en scène. Soit l'assassin avait le sens du spectacle, soit… Il se pencha sur les organes. Soit il voulait communiquer quelque chose. En observant la virilité de l'homme tranchée sans soin et avec une incroyable violence, Kensei ne put s'empêcher de frissonner intérieurement en pensant à la sienne. Ça avait dû être une horrifiante humiliation pour la victime. Dire que son traitement comme un vulgaire poulet n'allait pas s'arrêter là : avant que le corps ne se disperse en particules spirituelles, il devait être autopsié à la Douzième Division pour approfondir l'analyse. Il ne leur restait que quelques heures.

« Inoue ?

-Je viens juste d'envoyer un Jigokucho à mon collègue de la Douzième Division. »

Kensei sourit d'un air approbateur.

« Vous non plus, vous ne détectez aucun résidu de pression spirituelle, Taicho ? s'enquit son subordonné en fronçant les sourcils devant son échantillon.

-Exactement. Cela signifie que le crime a été commis sans faire appel à des techniques de Kido. En ce qui concerne l'intrusion dans la propriété, il faudra enquêter en dehors de la chambre.

-Ainsi, le tueur serait une âme normale ?

-Ne conclus pas trop vite Inoue, seules des analyses plus approfondies de l'atmosphère et du corps de la victime pourront nous le confirmer. »

L'arrivée d'un intervenant interrompit leurs théories.

« Kami-sama ! Mon pauvre Shinobi. »

Kensei et Sora se retournèrent, ayant ressenti le reiatsu de leur capitaine-commandant depuis l'entrée de l'immense propriété. Ils s'inclinèrent avec un air respectueux et condoléant ; ils savaient que la victime appartenait à sa famille, mais en entendant l'exclamation d'une profonde tristesse, ils avaient compris à quel point les deux hommes avaient dû être proches.

« Shunshui-sama, saluèrent les domestiques. Nous sommes horriblement désolés. Nous savons que Shinobi-sama était comme un frère pour vous. »

Le brun ferma brièvement les yeux avant de les darder sur le capitaine de la Neuvième Division. Celui-ci ressentait la douleur aiguë de son supérieur bien que ce dernier en tant que chef du Gotei 13 se maîtrisait parfaitement.

« Soutaicho, vous êtes ici… pour mener l'enquête ?

-Non, répondit-il en secouant la tête, ce n'est pas le rôle de la Première Division. Cependant, je veux être mis au courant de chaque détail de l'enquête.

-Très bien, opina Kensei d'un air compatissant et compréhensif. »

Il irait chercher les dossiers plus tard, alors il laissa les hypothèses venir à lui. Un règlement de comptes entre familles nobles ? S'il s'agissait d'une simple lutte de pouvoir, alors l'assassin envoyé par un noble jaloux aurait exécuté son travail d'une façon nette et simple. Or dans cette affaire, la victime avait sûrement été torturée vivante et la mise en scène relevait d'une humiliation ou d'un avertissement. Il penchait davantage pour la vengeance.

« Je vais interroger chaque personne vivant dans le manoir. Où puis-je recueillir les témoignages ? »

On lui indiqua un des salons. La pièce, pas très grande, était normalement chaleureuse avec ses vases en porcelaine émaillée où trônaient des branches élégamment taillées, ses meubles en laque aux formes arrondies ainsi que son tapis en laine aux doux motifs floraux. Cependant, le rouge dont étaient recouverts les murs rappelait un peu beaucoup le rouge sur le sol de la chambre.

« Kyôraku Shinobi avait-il des ennemis ? commença Kensei en sortant son encrier et du papier. »

Il avait ordonné que tout le personnel soit réuni dans la pièce voisine en attendant leur tour d'être interrogé. Il tenait à ce que chacun fournisse un témoignage honnête, sans être influencé par les appréhensions des autres. C'est pourquoi son 7e siège y faisait le pied de grue. En ce moment, c'était le cousin de la victime qui faisait face à l'enquêteur.

« Hum… non. Les Kyôraku font partie des Quatre Grandes Familles Nobles. S'en prendre à un de ses membres équivaudrait à une déclaration de guerre. Les membres de notre famille n'entretiennent aucune rivalité entre eux non plus, j'en suis le garant. »

Kensei hocha la tête en voyant que son supérieur avait anticipé sa question.

« Pas politiquement, mais plutôt au niveau… relationnel ?

-Shinobi s'entendait avec tout le monde, respectait ses pairs. Personne, je pense, n'avait de conflit avec lui.

-Avait-il prévu un mariage controversé ?

-Non, il est resté veuf après la mort de son épouse il y a vingt ans. Il n'a pas eu non plus d'aventures à côté. »

Cela collait. Le capitaine avait minutieusement fouillé la chambre de la victime mais rien n'indiquait qu'il avait eu une liaison. Pas de lettres ni de cadeaux. Donc la piste de la vengeance par un soupirant était quasiment à exclure. Pourtant, quelque chose l'avait dérangé. En dénichant les cachettes secrètes allant du double-fond d'un tiroir jusqu'aux doublures de son oreiller, il avait trouvé des estampes obscènes. Certes, tout le monde avait ses fantasmes et son jardin secret. Pourtant, ce fantasme-là… lui posait des problèmes éthiques. Il n'avait pas à juger en tant qu'enquêteur objectif. Pourtant, il n'était pas sans cœur ni infaillible. Fantasmer sur des petites filles au point d'en collectionner des images les figurant dans des positions explicites le choquait. Là encore, il avait eu du mal à se remettre de ces visions.

« Saviez-vous… que Kyôraku Shinobi fantasmait sur… les… petites filles ?

-Oui Kensei-san, pourquoi ? »

L'homme fut un peu décontenancé par le calme apparent de l'autre. Quand il ouvrit la bouche, sa voix fut aussi blanche que de la craie.

« Eh bien… Est-ce que des enfants de nobles auraient pu avoir affaire à lui ?

-Certes, les Kyôraku sont parmi les mieux placés de l'aristocratie et bien des familles rêveraient d'une alliance prestigieuse. Cependant, jamais Shinobi n'aurait engagé de contrat de mariage avec une personne aussi jeune. C'est une lourde responsabilité sur des épaules aussi frêles et immatures et il a des principes. »

Kensei se retint de désapprouver la dernière affirmation.

« Et des relations hors mariage ?

-Je ne pense pas. Il ne me parle pas vraiment de sa vie intime. »

Le Capitaine-Commandant n'était pas la bonne personne à interroger pour obtenir ce genre d'information. Il espérait que les domestiques auraient davantage de renseignements.

Le capitaine de la Première Division prit le relais du 7e siège qui alla poursuivre son enquête dans le manoir et discuter avec le médecin légiste de la Douzième Division qui venait d'arriver à l'instant.

« N'oubliez pas de me faire un rapport à la fin de la journée.

-Bien entendu Kyôraku-Soutaicho, fit son subordonné avec un signe de tête respectueux. »

Il s'autorisa à réordonner ses papiers et à boire un peu. Son ventre gargouillait mais il n'avait pas faim : l'odeur persistante du sang, la mise en scène digne d'un étalage de boucherie et les fantasmes de Shinobi lui tordaient bien trop les tripes.

« Vous êtes Chiwa Homura, gouvernante depuis plus de 50 ans, c'est bien ça ? »

La femme aux cheveux gris hocha la tête avec une grande fierté.

« D'après les premiers résultats, votre maître est mort vers le milieu de la nuit, je dirais trois heures du matin. Que faisaient les gardes ?

-Monsieur, les gardes… n'ont rien vu, répondit-elle, visiblement furieuse. Ils m'ont dit qu'ils dormaient.

-Que faisait le reste du personnel ?

-Tout le monde dort à trois heures du matin, mais… nous n'avons rien entendu, même pas les cris de détresse de Shinobi-sama. Nous sommes impardonnables. »

La culpabilité et les remords étaient visibles sur son visage ridé.

« Madame, il est possible que l'assassin ait bâillonné votre maître. Personne, pas même le Gotei 13, n'accuse pour le moment personne de quoi que ce soit. »

La vieille femme inspira profondément.

« Votre maître avait-il des ennemis ?

« Je ne pense pas, non. Les Kyôraku sont extrêmement respectés grâce à la position de Shunshui-sama.

-Avait-il des relations personnelles houleuses ou décriées avec quelqu'un ?

-Non, Shinobi-sama s'entendait avec tout le monde. Il n'entretenait pas non plus de maîtresses. C'était un homme bien. »

La dernière affirmation risquait fort de contredire le reste de l'interrogatoire.

« Saviez-vous que Kyôraku Shinobi avait… un faible pour… les fillettes ? »

A cette question, la gouvernante détourna la tête, clairement embarrassée.

« Oui… »

L'homme avait peur de la réponse, mais il posa néanmoins la question.

« Et… entretenait-il des relations sexuelles avec elles ? »

L'interrogée demeura muette. Un long moment s'écoula où la gêne eut tout le loisir de s'installer confortablement sur un canapé avec un gros paquet de pop-corn dans les mains.

« Madame, je ne suis pas là pour dégrader l'image de votre maître, dit calmement le capitaine. Je vous pose ces questions afin d'envisager le plus de pistes possibles. »

Elle ne dit rien pendant quelques instants, puis lâcha du bout des lèvres :

« Oui… De façon régulière… Aucune des filles ici présentes n'est épargnée… »

Même s'il ne fut que peu surpris par l'aveu, Kensei retint un hoquet. Avoir des fantasmes sur des enfants, c'était une chose. Avoir carrément des relations sexuelles avec eux… là on entrait dans une autre dimension.

« Qu'en pensez-vous ?

-Notre maître fait ce qu'il veut…

-Sont-elles… consentantes ? »

Il en doutait sincèrement, mais il se devait de poser ses questions impartialement pour récupérer le plus de détails possible.

« Je… Elles n'ont pas l'air. Mais… Shinobi-sama nous nourrit, nous loge, alors d'une certaine manière, elles lui doivent bien ce… retour. C'est normal. »

Kensei se garda bien de lui rétorquer à quel point il désapprouvait. Cependant, hors de question de braquer la dame qui semblait adorer son maître.

A chaque fois le Shinigami posa cette question et à chaque fois il remarqua bien la gêne des domestiques. Cela expliquait aussi la forte proportion de petites filles parmi le personnel. En les interrogeant, il les avait fait toutes pleurer. Il n'avait jamais su s'y prendre au niveau relations humaines… mais il leur avait tout de même autorisé à passer l'interrogatoire avec un adulte à leurs côtés en guise de soutien psychologique.

Le geste désespéré d'une servante en ayant assez de servir à assouvir les caprices de son maître ? Improbable. Qui aurait suffisamment de force pour ce faire ? Il y réfléchirait plus tard. Se dirigeant vers le seuil du manoir, il passa alors aux gardes.

« Que faisiez-vous vers deux heures du matin ?

-Je… je ne me souviens de rien Taicho, je vous jure ! protesta le pauvre bougre en agitant les mains. Je faisais mon tour de garde dans le jardin, à côté de la fontaine, et puis… Le noir. Je me suis réveillé à peine quelques minutes avant la découverte du meurtre. Je n'ai rien vu venir, j'en suis affreusement désolé. »

Kensei fronça légèrement les sourcils et sortit du matériel, faisant le lien avec ce qu'il avait détecté dans les couloirs du manoir. Même très faible, dispersée par l'aération matinale, l'odeur très particulière demeurait dans l'air. Il était quasiment certain qu'un soporifique avait été diffusé pour endormir le personnel ou du moins, les plonger encore plus profondément dans leur sommeil. Il enverrait les échantillons à la Douzième Division. Ce qui était quasiment certain était que le meurtrier s'était introduit seul dans la demeure. Il faudrait inspecter les alentours pour savoir s'il n'avait pas bénéficié d'une aide auxiliaire.

L'enquête au manoir des Kyôraku dura toute la journée. Lorsque le soir, Kensei s'installa pour rédiger son rapport, il fit part d'une esquisse de reconstitution.

Tout d'abord, l'assassin s'était introduit dans la propriété des Kyôraku vers trois heures du matin, à un moment où la fatigue atteignait son paroxysme chez la plupart des êtres constitués normalement. Puis il avait endormi tous les domestiques avec une substance qui était actuellement en cours d'analyse avant de torturer tranquillement Shinobi Kyôraku avec son arme blanche – indéterminée pour le moment - et de se débarrasser de lui. Il n'avait pas vraiment traîné en réalité : il était reparti environ quarante minutes après son intrusion. Intrusion pour laquelle, apparemment, il n'avait eu besoin de ne recourir à aucune aide annexe.

Ce qui était troublant était que le tueur avait eu l'air de bien connaître l'endroit et la façon dont était organisé le personnel. Le capitaine aux cheveux cendrés avait alors pensé à un traître parmi eux qui lui aurait fourni les informations. Au vu des différents témoignages de la matinée, c'était l'hypothèse la plus probable. Mais alors, qui pouvait être cet assassin ? Un mercenaire ? Impossible ! Les mercenaires ne pouvaient pas franchir l'enceinte du Seireitei.

Son cerveau chauffait sérieusement là, il devait se calmer. Le Vizard finit par gribouiller rageusement sur un pauvre brouillon qui n'avait rien demandé. Où se trouvait à présent l'assassin ? Très probablement encore à l'intérieur de l'enceinte. Cela dit, il était plus facile d'en sortir que d'en entrer.

Depuis le début de son entrée au Gotei 13, Kensei Mugumura avait déjà reçu sur la table des dossiers bien mystérieux et sanglants. Mais cette affaire-là… Il aurait bien voulu ne jamais avoir eu à y plonger. Bien éprouvante comme il le fallait pour les nerfs. La journée s'était révélée horrible. Pauvre Inoue ! Il avait tellement pleuré et hurlé quand il avait appris la vérité sur Shinobi Kyôraku. Son capitaine comprenait parfaitement sa détresse, son horreur et sa colère. Se servir d'enfants comme ça pour des caprices… Il avait voulu rester impliqué dans l'enquête, mais il surveillerait de près le moral de son subordonné.

Une petite voix lui chuchotait au fond de son esprit que la mort affreuse de ce pédophile était bien méritée. Il soupira. Vivement que le capitaine Kuchiki prenne la relève…

« Nanao-chaaaaan, fais-moi un câlin. »

L'interpelée asséna un violent coup de classeur – rigide le classeur – sur le crâne du malotru qui poussa un glapissement aigu très peu guerrier.

« Taicho, vous avez autre chose à faire je crois !

-Quelle cruauté ! pleurnicha-t-il faussement. Je voulais juste passer du temps avec toi, ma fukutaicho adorée !

-Dans ce cas-là, vous allez vous installer au bureau à côté du mien et remplir tous ces papiers ! fit-elle d'un air sévère. »

Son fainéant de capitaine poussa un autre gémissement lamentable avant de lui obéir sagement et d'attaquer la première feuille du tas – énorme le tas : il était censé y avoir touché depuis au moins un mois.

Au bout d'un moment, la jeune femme brune le fixa d'un air soucieux. Elle avait très bien percé à jour son sourire enjoué qui était en réalité faux et sa voix gaie qui dissimulait en réalité une terrible souffrance. Elle le voyait bien, il remplissait certes les papiers, mais comme pour exorciser des brumes négatives : son visage était ailleurs et les tremblements de sa main, imperceptibles pour le commun des Shinigamis, ne l'étaient pas à ses yeux.

« Vous repensez encore au meurtre de Shinobi-sama ? »

Le cousin du susnommé perdit son sourire et ses yeux s'assombrirent. Sa main jeta un formulaire complété sur un tas avant d'en saisir un nouveau.

« N'hésitez pas à vous confier à moi j'ai toujours été là pour vous, non ? dit-elle d'un ton bien plus doux. »

Un silence de quelques instants, le temps de formuler les mots, de dompter l'affreuse vérité, puis :

« Je sais que tu n'étais pas forcément proche de lui mais… Shinobi… n'était pas qu'un membre de la branche cadette des Kyôraku, soupira Shunshui. Je ne me suis jamais réellement entendu avec ton père, Nanao. J'étais encore jeune et avais désespérément besoin d'une personne de mon âge. Shinobi jouait souvent avec moi, il était drôle, serviable et très attentionné; c'est ainsi qu'on est devenus très proches, il est devenu pour moi le frère aîné que je n'ai pas vraiment eu. Même lorsque je suis devenu Shinigami, il continuait de me rendre visite, d'écouter mes soucis, d'entretenir une relation épistolaire très régulière avec moi... du moins jusqu'à son assassinat. »

Il s'arrêta un instant, puis sa voix abattue se raffermit par un soupçon de colère.

« Pourquoi a-t-il été tué ? »

Certes, il avait vu mourir bien des gens qu'il appréciait, que ce soit les gens de la Huitième Division ou encore Jūshirō ils lui manquaient et la mort de ses plus proches amis assombrissait ses pensées et son cœur. Cependant, en tant que Shinigamis, ils savaient tous qu'un jour ou l'autre, ils y passeraient sur le champ de bataille.

C'était radicalement différent en ce qui concernait Shinobi. Son cousin serviable et chaleureux n'était en rien un guerrier, il n'était pas non plus un monstre que les gens abhorraient et craignaient. Au contraire, il était poli et aimable avec ses pairs. Sa mort… non, son meurtre était injuste. Mais sa colère était surtout dirigée contre lui-même. Sa gorge se serra et il passa à un autre formulaire. Même régler son compte à l'assassin ne ferait jamais disparaître sa culpabilité. C'était de sa faute, point à la ligne. Il était un Shinigami très puissant et loin d'être stupide. Pourtant il n'avait rien pu faire pour sauver Shinobi.

La stricte Shinigami posa une main attentionnée sur l'épaule robuste.

« Nous retrouverons le meurtrier de Shinobi-sama. Et il le paiera. Mais pour le moment, vous ne pouvez rien faire. Prenez votre mal en patience. »

Elle lui servit du umeshu, bien moins alcoolisé que son habituel saké. Il accepta le verre machinalement mais sembla reprendre ses esprits dès la première gorgée.

« Ce n'est en rien de votre faute, Taicho. Vous n'êtes ni le roi des esprits ni un devin. »

Shunshui ferma les yeux quelques instants, puis un petit sourire revint sur son visage.

« Merci Nanao-chan, j'ai vraiment bien fait de te nommer comme vice-capitaine.

-C'est normal, Taicho. Je vais à l'association des femmes Shinigamis, n'hésitez pas si vous avez des soucis.

-Je peux venir avec toi ?! s'écria-t-il en reprenant son air idiot. »

Il reçut comme unique réponse une baffe monumentale qui l'envoya à terre.

Alors qu'elle marchait depuis cinq minutes, Nanao fronça les sourcils. Elle ne savait pas si elle virait parano ou si son sixième sens avait en effet détecté quelque chose, mais depuis quelque temps, elle avait la pernicieuse impression d'être épiée. Un farceur ? Un pervers ? Elle décida de mettre les choses au clair. S'arrêtant à côté d'un entrepôt, là où elle sentait, comme un viseur brûlant, les yeux qui la surveillaient, elle inspira calmement avant de déclarer d'une voix forte et ferme.

« J'ignore qui vous êtes, mais ce petit jeu a assez duré comme ça. Montrez-vous si vous en avez le courage. »

Elle attendit quelques instants. Rien. Toujours la légère brise, le brouhaha ambiant des rues… et toujours cette sensation désagréable. Sa voix se fit plus tranchante.

« Je vous ai dit de cesser ce petit jeu. »

Elle laissa son reiatsu envahir les alentours, espérant effrayer son stalker et le faire sortir. Certes elle était loin d'être la plus forte des vice-capitaines néanmoins sa puissance n'était pas à contester. La brune réajusta les lunettes sur son nez. Etrange… A part les Shinigamis, elle n'avait détecté aucune autre présence.

« Nanao-san, tu vas bien ? »

L'intéressée se tourna vers celle qui venait de s'adresser à elle.

« Momo-san, je crois que quelqu'un me surveille, mais personne ne s'est manifesté jusqu'à présent.

-Kyôraku-soutaicho ?

-Non ce n'est pas son genre, répliqua-t-elle en secouant la tête. Et puis, même s'il était d'humeur à se cacher pour me jouer un sale tour, je détecterais instantanément sa présence.

-Curieux, répondit l'autre brune en laissant elle aussi son reiatsu inonder les rues et les bâtiments environnants. »

Hélas, elle n'obtint pas plus de succès.

« Si ce que tu penses est vrai, alors l'espion finira bien par se manifester ou se lassera. Allons à la réunion, on a le prochain numéro sur les beaux gosses du Gotei 13 à terminer, conclut-elle d'un air émoustillé.

-J'espère... »

Les deux Shinigamis s'éloignèrent de l'entrepôt, sans se douter que les yeux qui espionnaient Nanao depuis quelques jours appartenaient aux pigeons postés là-haut...

-Kaien qui devient vice-capitaine 5 ans après son entrée au Gotei 13, alors pourquoi pas 7e siège 2 ans après l'entrée au Gotei 13?

-Je lis quasiment pas de roman policier, dites-moi si c'est crédible ou si j'ai oublié des trucs.

-Oui la pédophilie existe encore malheureusement… En attendant que les mentalités évoluent…

A la prochaine !