Yo !
Voilà un autre OS de la Nuit du FoF, écrit en un peu plus d'une heure sur le thème Règle.
Si vous avez des questions sur les Nuits, n'hésitez pas à m'en faire part !
Bonne lecture !
Premier jour
Ça la réveille au milieu de la nuit, une bouffée de chaleur, une fièvre, envie de vomir et faim, et elle n'arrive pas encore à décider si ça fait mal.
Merde.
Ça coule quand elle grogne, ou elle grogne quand ça coule, c'est un peu flou, elle n'est pas encore bien réveillée, il fait noir dans sa chambre et elle a envie de beurre de cacahuète.
Elle espérait avoir plus longtemps.
Elle aura tenu quatre mois sur une plaquette et demie, c'est pas mal. Elle se redresse, et c'est peut-être ça qu'il y a de pire. Devoir faire quelque chose. Trouver de quoi remplacer des serviettes, laver le boxer qu'elle porte avant que le sang ne s'incruste, est-ce que les altéens ont un équivalent des règles ? Elle regrette, maintenant, de ne pas avoir demandé à Coran.
Elle roule des épaules, c'est comme si elle avait des courbatures, mais en plus tenace.
Les courbatures, à force de combats et d'entraînements quotidiens, elle a l'habitude. Cette douleur-là, plus vraiment. Oui, elle décide que ça fait mal.
Que cette chose gluante qui l'englobe, ça peut s'appeler de la douleur, même si ce n'est pas que ça.
L'espace à travers la vitre ne lui donne aucune idée de l'heure, mais son corps sait. Son ordinateur le confirme. Tout le monde doit dormir.
Elle se traîne hors de son lit, elle se demande comment ça peut se faire, d'avoir à ce point trop chaud et trop froid en même temps, ça lui rappelle quand elle avait eu la grippe, enfant.
Elle avance lentement jusqu'à la salle de bains, essaie d'évacuer tout ce qu'elle peut dans les toilettes avant de devoir rester debout pour retirer la tâche de son boxer. Elle en a pris un autre, propre, et elle fouille dans les placards qu'ils ont rempli ces mois derniers. Elle attrape une serviette éponge et en découpe un carré qu'elle plie en trois avant de le caler entre son boxer et elle. Elle transpire.
Retire son boxer. Son haut. Quitte à ne pas dormir, elle peut bien prendre une douche.
Assise sur le carrelage, son dos lui fait mal, mais l'eau chaude est une petite bénédiction. Si ça ne lui donnait pas l'impression de se noyer, elle pense qu'elle pourrait s'endormir là.
C'est difficile de se savonner, et elle sait que si l'odeur part, elle reviendra vite. C'est décourageant. Elle regarde l'heure tourner. Bientôt, l'entraînement matinal.
C'est encore plus difficile de se lever et elle pousse, pousse, comme si c'était possible, d'éjecter tout le sang en une fois et d'en avoir fini pour ce mois-ci.
Merde.
Ça recommencera le mois prochain. Et celui d'encore après. Elle souffle fort pour se calmer, mais son expiration trébuche sur sa douleur et ses yeux la piquent. Elle se sèche trop vaguement pour que ce soit efficace, enfile son boxer avec sa serviette de fortune, son T-shirt qui pue déjà et fonce dans son lit. Elle peut peut-être attraper une heure ou deux de sommeil avant le réveil collectif.
Une demi-heure. C'est ce qu'elle a pu dormir, et encore, en plusieurs fois. Elle veut mourir sur la table du petit-déjeuner, elle veut manger quelque chose qui ne lui donnerait pas envie de vomir. Elle a envie de quelque chose de pimenté, avec beaucoup de goût et d'huile d'olive.
Allura est la première à arriver, et Pidge se redresse d'un coup. Pleine d'espoir.
« Est-ce que les altéens ont un cycle menstruel ? »
La princesse lui jette un drôle de regard, et Pidge suppose que si c'est le cas, du moins le nom ne ressemble pas. Elle reformule :
« Euh, en fait, comment fonctionnent les organes reproducteurs altéens ? »
La princesse plisse les yeux plus profondément, mais elle a dû comprendre cette question.
« Puis-je demander … pourquoi cet intérêt soudain ? »
Elle a l'air inquiet, et Pidge hausse les sourcils. Allura voulait qu'elles parlent de trucs de filles. Elle va être servie.
« J'ai un souci avec le mien. Enfin pas un souci. J'ai mes règles. Euh, mon vagin saigne.
— Tu saignes ? Tu es blessée ? Depuis quand ?
— Ah non non, tout va bien.
— Ça ne fait … pas mal ?
— Si.
— Alors pourquoi tu n'es pas dans une capsule ? »
C'est comique, en fait, et Pidge se sent presque mieux d'avoir pu poser problème à la logique de la princesse.
« Parce que je ne suis pas blessée.
— Tu n'es pas blessée.
— Non.
— Mais tu saignes.
— Oui.
— Et tu as mal.
— Oui. »
Allura la regarde comme une bête étrange, s'approche pour poser une main sur sa tête.
« Est-ce que tu t'es pris un coup quelque part sur le crâne ? Je devrais demander à Coran de jeter un coup d'œil.
— Je vais bien. Mais visiblement, tu ne peux pas aider. Je m'en doutais un peu. Vous avez des antalgiques ceci dit ?
— Des quoi ?
— Des inhibiteurs ? Quelque chose à ingérer qui empêche de ressentir la douleur. »
Cette fois, Allura semble proprement scandalisée, et Pidge ne peut pas s'empêcher de rire. Ça contracte. Ça coule. Oh, voilà, ça fait mal à nouveau. Elle pose son front sur la table, fraîche. Elle a chaud à la tête, froid aux épaules, mal au ventre et ses jambes sont tendues. Cinq heures depuis l'arrivée des règles, elle en a déjà marre. Elle ne relève pas la tête quand elle entend la porte s'ouvrir, mais la voix d'Allura la fait grimacer.
« Je crois que quelque chose ne va pas avec Pidge. »
Elle grogne. Mince. Elle a pas la force de se redresser.
« Qu'est-ce qu'elle a ?
— Rien. La fatigue de la vie.
— Elle vient de me demander si j'avais de la drogue. »
Pidge se redresse. Ça, ça l'intéresse. Donc, dans la civilisation altéenne, existent des inhibiteurs de douleur.
« Et t'en as ?
— Pidge ! »
Shiro lui lance un regard désapprobateur et elle ricane. La main d'Allura se pose sur son épaule.
« Je crois qu'elle est blessée. Elle dit que non, mais elle est très chaude, elle dit qu'elle a mal, et les souris me confirment qu'elles l'ont vue pleurer et saigner sous la douche plusieurs heures cette nuit. »
Les souris. Ces traîtres. Maintenant, Shiro aussi a l'air inquiet, et elle n'a pas le temps d'expliquer que Lance intervient.
« C'est vrai que t'as une sale tête. T'as tes règles ? »
Le ton est plus prévenant que blagueur, mais cette phrase, elle l'a tellement entendue, presque à chacune de ses crises de colère, qu'elle n'entend pas.
« Oui. Et si tu fais une remarque, je t'étouffe avec ma serviette pleine de sang.
— Une serviette pleine de sang ! Shiro, porte-la jusqu'à l'aile médicale, je vais appeler Coran. »
Mais Shiro ne bouge pas. Il sourit quand Pidge ricane, et Allura le regarde comme s'il lui poussait une deuxième tête.
« C'est normal chez les humains, Pidge explique.
— C'est la première fois que ça arrive à l'un de vous.
— J'avais une pilule avant, c'est pour ça. Et ça arrive pas aux mecs. Enfin, pas aux mecs cis.
— Et il n'y a rien à faire ?
— Rien, à part prendre de la drogue et espérer que ces quatre jours passent vite.
— Quatre … vargas, tu veux dire ?
— Nope. Quatre jours. Un peu moins de quatre quintants. »
Allura tombe assise, et cette fois Shiro rit avec Pidge. Keith entre dans la pièce en silence, et Pidge ne sait pas s'il est trop mal réveillé pour parler ou s'il attend de savoir de quoi retourne la conversation. Hunk, lui, est plutôt intéressé par l'idée d'un petit déjeuner copieux. Il expérimente. Allura répète.
« Elle va saigner pendant quatre quintants. Et tout le monde trouve ça normal. Elle va avoir mal pendant quatre quintants—
— Eh, c'est surtout les deux premiers. Après, ça va mieux. »
Elle sursaute en sentant quelque chose de chaud contre son épaule. A côté d'elle, Lance lui tend un genre de bouillotte de fortune. Une gourde d'eau bouillante, enroulée dans un torchon.
« Ma sœur avait des règles horribles. Je sais pas si toi ça t'aidera ? Normalement, ça détend les crampes. Euh, je crois. »
Elle tente un petit sourire, attrape la source de chaleur. Ça brûle un peu, quand elle la pose sur son ventre, mais la sensation est presque agréable. Elle se sent mieux. Elle sait que ça ne va pas durer, mais elle prend ce qu'elle peut.
« Merci.
— Tu penses que tu peux tenir l'entraînement ? »
Elle plisse les yeux. Rien que la pensée de se lever lui fait mal. D'un autre côté, faire de l'exercice la fera saigner plus vite. Donc potentiellement, moins longtemps. Et puis … elle sourit, un sourire plein de temps qui fait frissonner les autres paladins.
« Si tu savais combien j'ai des envies de meurtre depuis cette nuit. »
Elle a hâte. Elle a mal en avance, mais elle a hâte de taper sur quelque chose, de faire mal autant qu'elle a mal.
Sur le terrain, elle crie, plus chaotique que jamais. Chaque coup l'épuise, chaque coup devrait être le dernier. Elle a tellement mal. C'est comme un surpassement, quand la barre de vie de son personnage est au plus bas, de dernières attaques ultra-puissantes. L'énergie du désespoir.
(Et les autres paladins se promettent de ne jamais la contrarier pendant ses règles.)
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Honnêtement pour moi ça a marché une fois, d'avoir une séance de sport intense et impossible à annuler en premier jour de règles. J'ai changé de serviette quatre fois en deux heures et j'ai senti mon âme s'échapper de mon corps quand je me suis étalé dans mon matelas mais j'ai presque pas eu mal des quatre jours de règles.
Aussi, Pidge est la première personne humaine à avoir ses règles dans l'espace. Ce qui est cool.
Et je réfléchis encore à comment fonctionne la repro chez les altéens mais je m'y connais pas du tout en biologie donc bref.
Mais vu la tête que faisaient Allura et Coran quand ils ont vu Lance traire Kaetelnecker … Je suis sûr que leur biologie est très différente de la nôtre. Y a des fics à écrire là-dessus. Si on s'y connaît en biologie.
Bref.
A bientôt peut-être !
