Rating T.

Pas de spoil, seulement une subtile référence à Birth Of Livaï.


LA NOBLESSE DES SENTIMENTS

II. GUERIS MON CŒUR, CALME MA DOULEUR.

Il fait nuit noire et la pluie tombe sans discontinuer depuis déjà plusieurs heures, si bien qu'il est impossible d'estimer avec exactitude l'heure qu'il est. Même le couvert des arbres géants ne suffit pas à stopper ce déluge. Pour couronner le tout, un épais brouillard s'insinue dans la forêt, réduisant progressivement le champ de vision.

Cette journée avait pourtant bien commencé. Le soleil était haut dans le ciel et sans nuage... Puis, en fin d'après-midi, le vent s'est levé et le ciel s'est obscurci subitement. La pluie diluvienne qui s'est abattu avec force sur les explorateurs a rendu l'entraînement du jour bien plus hardu et harassant.

Erwin vient d'ailleurs d'en donner la fin et ordonne à ses hommes de se préparer au départ.

Les soldats, qui en sont encore à reprendre leur souffle, s'attèlent à la tâche en sellant leurs destriers et regroupant le matériel dans la carriole.

Le major prend le temps de jeter un regard circulaire à ses troupes. Personne ne parle. La fatigue se lit sur leurs traits tirés. Ils sont las, détrempés, écorchés et courbaturés mais il s'activent quand même avec efficacité. Ils ont besoin de réconfort. Ils le méritent bien. Erwin prend donc la parole, avec quelques idées en tête.

Vous vous êtes bien débrouillés aujourd'hui, les résultats de la prochaine expédition n'en seront que meilleurs. Je suis fier de vous. Rentrons sans attendre nous mettre à l'abri.

Tous les regards se tournent vers lui. Et bien qu'ils ne répondent que par des murmures ou de simples hochement de tête, les mots semblent avoir l'effet escompté. Savoir qu'ils vont pouvoir se coucher dans un lit ce soir, secs et le ventre plein leur redonne du courage et ils puisent dans leurs dernières forces pour se hisser sur leur selle.

Heu, Major ? Je ne vois pas le Caporal Livaï.

Hum ?

Le grand blond scrute la pénombre à la recherche du noiraud mais ne le trouve effectivement pas.

Je suis là.

La voix traînante du-dit caporal, beaucoup plus proche que les deux explorateurs ne le pensaient, fait sursauter Erwin.

Le blond se décale en apercevant des pieds derrière les siens et soulève sa cape. Le visage sombre et mécontent de Livaï apparaît alors. Les sourcils du major se haussent, dans un mélange de surprise et d'interrogation.

Le plus petit grogne.

Quoi ? Il pleut, je m'abrite.

Erwin finit par esquisser un sourire si léger qu'il échappe à tous sauf à Livaï. De toute façon plus personne ne les regarde, leurs camarades étant trop occupés à se préparer pour partir au plus vite.

Le plus petit détourne les yeux, agacé, les bras croisés. Erwin laisse sa cape retomber sur la tête de Livaï.

Il sait combien il haït ce temps de chien. Il peut sentir tout son corps tendu à ses côtés, toutes ses ruminations et... La douleur lancinante qui lui étreint les trippes.

Sa grande main se pose un instant sur ce qu'il devine -à travers la cape- l'épaule crispée de son caporal, en guise de soutien. Message silencieux. Je suis là.

Erwin redresse la tête pour s'adresser à ses hommes.

Tout le monde est prêt, alors à vos montures.

La cape d'Erwin de soulève et la source de chaleur s'éloigne . Livaï file tel un coup de vent vers son cheval, qu'il enjambe avec souplesse. Le major fait de même, et prend la tête de la formation.

Sous une pluie battante, les cavaliers galopent vers la base.

Cette épaisse brume poisseuse ne les aident pas à atteindre leur destination aussi rapidement que d'habitude. Ils sont même obligés de ralentir quelque peu pour ne pas foncer sur des obstacles ou se perdre.

Erwin en profite pour se rapprocher de Livaï.

L'homme reste silencieux, tête inclinée vers le bas. Il remarque que le plus petit ne regarde même pas où il va, s'en remettant à sa monture qui suit docilement ses congénères.

La capuche et l'obscurité ne le facilitent pas à distinguer et encore moins à déchiffrer les expressions sur son visage. Ses yeux gris clair, cachés sous ses cheveux, doivent actuellement être aussi sombres que les ténèbres qui les entourent...

Mais Erwin n'a pas vraiment besoin de le voir, il devine sans peine vers quoi sont tournées ses pensées. Ou plutôt ce qu'il essaie d'éviter de regarder.

Il se contente de chevaucher à ses côtés jusqu'à apercevoir des lumières danser au loin, au milieu du brouillard.

Lorsqu'il se penche vers Livaï, ce dernier relève enfin la tête.

Nous sommes presque arrivés.

La boue éclabousse les bottes de Livaï lorsqu'il met pieds à terre. Il jette un regard aux soldats autour de lui. Ceux-ci se dépêchent de retirer le harnachement de leur monture, pressés d'aller se changer et de se restaurer. S'ils n'ont pas moufté de tout le trajet, les voilà maintenant qu'ils jacassent avec entrain, la promesse d'un succulent repas ayant chassée momentanément la fatigue.

Livaï pour sa part, n'a pas spécialement faim. Il ne désire que deux choses : retirer ses vêtements gorgés de flotte et laisser derrière lui ce saleté de brouillard.

Le noiraud retire la sacoche accrochée à sa selle. Il va la jeter sur son épaule, mais suspens son geste lorsqu'il aperçoit que quelque chose de rouge -il est certain n'avoir rien mis ayant cette couleur pourtant- se trouve à l'intérieur.

Livaï l'ouvre sans attendre, pour en extirper... Une fleur.

Une fleur au coeur noir et aux pétales de ce rouge flamboyant.

Une anémone.

Cela le laisse pantois.

Les rires et les soupirs des soldats s'évanouissent alors qu'ils s'éloignent des stabules pour rejoindre les baraquements. Le silence s'installe, uniquement brisé par le bruit de la pluie qui continue inlassablement de tomber et celui des chevaux qui machouillent paisiblement leur foin.

Et Livaï, lui, reste là, parfaitement immobile. L'eau dégouline de ses cheveux. Le froid glacial s'infiltre jusque dans ses os. Mais il n'en a cure.

Il ne voit plus rien d'autre que cette fleur qui se trouve dans le creux de sa main.

Son coeur et son esprit sont assailli par les émotions, à cause du message délivré par Erwin.

Mais c'est une sensation agréable et bienvenue, qui dissipe un peu la douleur provoquée par la remontée des souvenirs de ce jour funeste.

Il se sent mieux.

Il sait qu'il peut compter sur lui. Erwin lui a donné un but, le courage de se relever et d'avancer. Parce qu'après la pluie... Vient le beau temps.

Une anémone... pour soigner les douleurs et les chagrins.

Oui. Livaï ferme les yeux. Je persévérerai.

Une question reste toutefois en suspens.

A quel moment Erwin a-t-il pu glisser cette plante dans son sac, sans qu'il le voit ?

Oh. Ça lui revient. Ce moment, où il l'a senti se pencher vers lui, alors qu'ils chevauchaient côte à côte. Il se rappelle qu'il a aussi tendu son bras vers lui. Tch. Cette grande perche a vraiment le bras long.

Tout à ses réflexions, Livaï ne fait pas attention à son cheval, qui fourrage sa chevelure depuis tout à l'heure, créant des épis au passage . Le soldat ne revient à lui que lorsqu'il sent la lèvre supérieure de l'équidé lui chatouiller la main, prêt à s'emparer de l'anémone pour la manger. Non parce qu'elle à l'air vachement bonne en plus, et vu qu'il la lui tend si gentiment...

La main qui détient la friandise s'élève pour être hors de portée. Enfin presque. L'humain est trop petit et il lui suffit de tendre le cou pour l'atteindre. Aller, juste un petit bout !

La main se referme et Livaï la ramène contre son cœur.

Non ? Il veut la garder pour lui ? Bon tant pis...

Le noiraud flatte l'encolure en souriant doucement.

Désolé, ce n'est pas pour toi.

Erwin observe de loin Livaï essayer de mettre la fleur hors de portée de sa monture qui voudrait bien la croquer. Il sourit, non mécontent, avant de rentrer dans les baraquements.

N'abandonne pas.


~*o*Anémone*o*~

Persévérance, confiance, amour intense, tendre affection.

'' Ne m'abandonnez pas''


Un OS, pour moi, c'est comme de la mauvaise herbe. J'ai beau y mettre le point final, de nouvelles idées germent, pour créer une suite et je ne suis pas tranquille avant d'avoir tout arraché de mon esprit pour le coucher sur le papier.

Cet OS se transforme donc dès à présent en fiction à chapitres, avec comme thème, le langage des fleurs.

Merci d'avoir lu, et de partager vos impressions.