CHAPITRE 1: PROUVER MA VALEUR

- ... Sans transition, revenons sur l'affaire médiatique numéro une ici, au Texas, dans la petite ville de Pinkerton ou une série de meurtres à ébranlé les populations locale : des meurtres sordides ou un assassin cannibale mange des concitoyens. Cette affaire fait énormément écho à l'affaire "Clown" survenue deux ans plus tôt, ou un homme torturait et tuait ses victimes, face caméra, affublé d'un masque grotesque avant de les manger une fois la caméra coupée, le hic étant que Jason Floydd, le présumé "Clown" croupirait en prison ... Avec nous ce soir, l'inspecteur Roman Lennox en charge de l'enquête. Inspecteur bonsoir ...

- Mouais ... - Répondait l'inspecteur. Roman Lennox n'avait jamais été du genre bavard et il avait horreur des plateaux télé, sa présence ici n'était voulue que par le capitaine de police qui voulait rassurer la population texane.

Roman Lennox avait la quarantaine, ancien militaire, plutôt bien bâti, tatoué. Véritable rebelle dans l'âme, il n'hésitait pas à contourner les règles, un flic qui aurait dû perdre sa plaque depuis longtemps. Ce qui l'avait sauvé était clairement son taux de réussite dans ses enquêtes et c'était également ce qui lui avait ouvert la porte de la place d'enquêteur principal sur l'affaire actuelle à la condition non-négociable de coacher la jeune inspectrice adjointe Lyana Perry, présente à ses cotés.

Et cette jeune inspectrice ... C'était moi.

Lennox n'avait aucune envie d'être la, ni même de faire bonne impression. Depuis quelques jours que nous travaillions ensemble, je pensais la même chose que mon père : Lennox est un emmerdeur de la pire espèce : il était grande gueule, je-m'en-foutiste, obsédé par son boulot, pas présentable et peut-être même alcoolique.

En tout cas, depuis le peu que je le connaissais, je pouvais dire qu'il aimait bien boire et, vous vous en doutez : il ne m'aimait pas.

Il ne m'aimait pas pour la même raison que les autres collègues : j'étais vue comme la fifille chérie du maire, couvée par papa et j'avais beau avoir supplié qu'on me laisse bosser sur cette enquête difficile, Lennox et les autres ne me voyaient que comme la fille à papa qui gagne de l'avancement grâce à son père.

Et là, vous vous dites que je suis ce genre d'héroïne qui n'a jamais tiré aucune ficelle pour me retrouver sous les projecteurs, que je veux faire mon trou comme tout le monde et que je veux être vue à ma juste valeur et bien navré de ne pas être à la hauteur de vos attentes, mais les critiques sont réelles : je SUIS une fille à papa et j'ai effectivement tiré les bonnes ficelles pour avancer.

La vie n'était pas faite pour les héros altruistes, les vrais héros étaient morts ou en prison, j'avais un tremplin qui m'était accessible, j'en avais profité, qui aurait dit non ? Soyons sincères : si la vie vous offrait une opportunité, même si c'était dégueulasse, vous la saisiriez, non ?

C'est ce que j'avais fait.

Pour autant je n'avais pas choisi cette voie juste parce que papa pouvait m'ouvrir les portes, si j'avais voulu un travail pépère, je serais devenue l'assistante de mon père et je toucherai un salaire très confortable. La vérité c'est que je suis devenue flic parce que le crime me fascine, pas dans le mauvais sens évidemment, mais j'avais toujours voulu être celle qui résous des enquêtes, trouve des indices et j'en passe. J'étais imbattable à Cluedo et j'avais voulu faire tout cela dans la vraie vie. Bon, j'avoue, c'était un peu réducteur, mais ça en faisait partie.

J'avais étudié la psychocriminologie, j'étais une criminologue, j'aimais à penser que ma présence sur cette affaire était due à cela, mais je savais très bien que papa avait fait pression sur le commissaire pour me faire faire équipe avec l'inspecteur.

Revenons à Lennox qui tirait sur sa foutue cravate, un accessoire qu'il n'avait visiblement pas l'habitude de porter. Il se contentait de réponses courtes et directes. Il ne voulait pas en dire trop.

Le nœud du problème étant que l'affaire "Clown" s'était bouclée sur l'arrestation d'un suspect qui semblait coupable à quatre-vingts pourcents. Quand la nouvelle vague de meurtres avait commencée, l'on avait pensé à un imitateur, jusqu'à ce que l'on remarque des détails qui n'avaient jamais été diffusés : des petits détails insignifiants, comme des griffures sur une table représentant une espèce d'hexagone séparé en huit parties et que l'on retrouvait également sur les scènes de crime actuelles et qui avait valu à cette affaire le nom de "l'affaire hexagone".

- Enfoirés de journaleux à la con !

Lennox râlait à juste titre, le journaliste avait essayé de le faire passer pour un incompétent, depuis le mode de l'hashtag "ACAB" la police n'avait plus la cote et les journalistes ne nous soutenaient pas, préférant donner de la voix à Jean Kevin, quinze ans qui détestait la police parce que deux flics ont fait une bavure, donc tous les policiers étaient évidemment dans le coup, le tout relayé sur twitter par un antifa quelconque qui n'a aucune information, mais qui sera lu par des gens aussi décérébré que lui.

Lennox traitait souvent cette génération de "débiles mentaux" et je pensais sincèrement que, sur ce point-là au moins, il avait raison.

Le souci restant que le tueur, qui qu'il soit avait fait une exception : une seule : une seule victime dont nous n'avions jamais retrouvé le corps : Chelsey Britt, disparue à l'âge de cinq ans et qui, aujourd'hui, devant en avoir dix-huit.

Rien ne prouvait que la jeune fille était encore en vie, mais si c'était avéré, non seulement nous cherchions à capturer un assassin, mais en plus, nous allions devoir retrouver la victime d'un enlèvement.

J'avais demandé à Lennox s'il pouvait me déposer chez moi, après tout, c'était sur sa route. Hélas, il me méprisait tellement qu'il avait décidé de me laisser me débrouiller avec un taxi.

Lennox pensait que j'avais la belle vie, que je me fichais de l'enquête et que j'en profitais juste pour m'afficher devant les caméras, il se trompait : je dormais très mal, parce que tous les soirs je me plongeais sur cette affaire.

Après la douche, je me posais à mon bureau, comme tous les soirs. Je tentais de relire une fois de plus le dossier de Jason Floydd, le présumé "Clown", mais n'y trouvait rien, comme d'habitude.

Après cela je décidais d'examiner le carnet de Jason : des notes en pagaille, comme sorties d'un esprit dérangé (ce que Jason était assurément : un dément)

Il y avait des phrases écrites au hasard, des dessins de qualité, mais affreux et gores, représentant des créatures monstrueuses et des cadavres dépecés.

Deux dessins revenaient souvent et se démarquaient : toujours cette espèce d'hexagone en huit partie, la partie centrale supérieure et inférieure, ainsi que celle des côtés gauches et droits étaient colorées, certaines fois en rouge. Je connaissais ce logo, j'en étais sûre. L'autre dessin était une espèce de labyrinthe.

Un labyrinthe, mais oui !

Je me levais de ma chaise et ouvrait à nouveau le dossier Floydd, il avait travaillé comme architecte sur le domaine Vespucci, un somptueux domaine de la noblesse située en bordure de la ville, une habitation de riche. C'était un endroit très fermé et connu pour sa tranquillité et surtout par le fait que l'on ne voyait jamais personne y entrer ou sortir.

Je jetais un œil sur internet et enfin sur les photos.

Si je ne me trompais pas, Floydd y avait vécu quelques temps et s'il avait effectivement un partenaire de crime, le dit partenaire était peut-être celui qui détenait la gamine. Il était donc possible de trouver des indices sur place. Cela ne donnerait peut-être rien, mais je devais tenter le coup.

Je décidais de m'y rendre, après tout, cela ne devrait pas durer plus de quelques minutes suivant le degré de coopération des habitants des lieux. Être flic vous ouvrait des portes, être la fille du maire vous en ouvrait deux fois plus.

Je me dirigeais alors vers mon armoire à vêtements : un jeans, un chemisier, un débardeur noir, des basket sombre et ma veste de cuir sur le dos, je me commandais un taxi et attendais patiemment que celui-ci n'arrive.

Quelques minutes plus tard, je descendais de voiture, payais le conducteur et me dirigeais vers les lieux.

Le domaine était grand, contourné par une muraille imposante et fermé par une énorme grille. L'on pouvait deviner la bâtisse, très à l'ancienne. La cour d'entrée possédait en son centre, une fontaine majestueuse. La double porte d'entrée était située au sommet d'une volée de marche. Le bâtiment était blanc avec des volutes dorées, plusieurs fenêtres étaient visibles, mais toutes fermées.

Le domaine était tellement silencieux et sombre que l'on aurait pu le croire à l'abandon.

J'hésitais à prendre mon arme : un Sig Sauer de quinze coups. En avais-je besoin ? Je décidais que oui, accrochant le holster autour de mes bras et remettant ma veste par-dessus.

Quelques secondes plus tard, je sonnais à la grille d'entrée et attendais quelques secondes avant que le grésillement se fasse entendre.

- Oui ? - Demandait une voix féminine à l'interphone.

- Je m'appelle Lyana Perry - Dis-je simplement, mais je n'eus pas le temps de poursuivre que l'hôtesse d'accueil me signifiait qu'ils n'achetaient rien.

-Je suis la fille du maire - Précisais-je, après tout, autant que cela serve à quelque chose.

Un long silence s'en suivi puis un son strident retentit, ouvrant les grilles devant moi, je pénétrais les lieux, m'avançant à mon rythme dans l'imposante cours. Tandis que je marchais, je pouvais voir la double porte d'entrée s'ouvrir sur une femme vêtue d'une élégante robe à jabots et tenant à la main un masque vénitien. Elle semblait sortir d'un bal.

- Bonsoir ma chère, je suis Irma, quel ravissement de vous accueillir en ces lieux. Pardonnez ma réaction, nous avons souvent des démarcheurs. Que puis-je pour vous ?

Je dégageais un rien ma veste pour montrer le badge de police accroché à ma ceinture.

- J'ai des raisons de penser que je pourrais trouver des indices sur une affaire en cours dans les murs de ce domaine.

- La police ? Diantre, qu'espérez-vous donc trouver en ces lieux ?

Décidemment, elle semblait comme sortie d'un autre temps.

- Etes-vous Madame Vespucci ? - demandais-je ce qui décrochait chez la dame un rire quelque peu forcé.

- Oh, grands dieux non ma délicieuse enfant, je n'ai point ce privilège.

Qu'avais-je espéré en venant ici ? Il ne suffisait pas de se pointer et d'agiter un badge pour pouvoir fouiller les lieux à ma guise.

- A votre connaissance, y a-t-il des passages dans le domaine, des endroits où personne n'a jamais mis les pieds ?

La dame me sourit.

- Ma foi, il y a les sous-sols qui sont interdits à tout le monde à l'exception des maîtres des lieux ... Peut-être devriez-vous demander directement à Dame Vespucci ?

- Oh non - Fis-je gênée - Je ne voudrais pas l'importuner.

- Ne dites point sottise chère enfant, dame Vespucci ne souffre d'aucun fardeau de travail et ne dort que peu et puis, vous semblez être un délicieux impondérable ...

La, mon cerveau bloquait ... "délicieux" elle me draguait ou quoi ? "Délicieux" alors que j'enquêtais sur un meurtrier cannibale, cela avait de quoi souligner l'ironie.

- Et bien, si Madame Vespucci accepte de me rencontrer, je ne vais pas refuser, mais assurez-vous bien avant que ma présence ne la dérange pas.

D'un ton un peu trop enthousiaste, la dame me répondit : - Que non, chère enfant, allons pressons le pas.

Nous arrivâmes dans un grand hall : le sol était fait de carrelages sombres aux motifs abstraits. Les murs semblaient faits de pierre vertes, si foncée que l'on n'aurait pu croire qu'elles étaient noires de jais, de quoi accentuer l'ambiance sombre des lieux. Deux escaliers se trouvaient de part et d'autre d'une double porte en bois et un tapis noir courait au milieu des marches grises. Le toit était haut ce qui semblait vouloir dire qu'il y avait plusieurs étages.

Voyant mon regard interrogateur par rapport à la porte isolée, la dame me précisait : - c'est l'entrée du petit salon.

Nous montions les escaliers de gauche pour arriver sur une grande mezzanine, celle-ci contournait toute la pièce, les deux escaliers s'arrêtaient et, dans l'autre sens, un troisième escalier montait à l'étage sur une deuxième mezzanine. - Suivez-moi - dit la femme en commençant à grimper.

A l'étage, elle toquait et ouvrait doucement la porte pour me laisser entrer. Je passais dans l'ouverture pour me trouver face à un spectacle pour le moins particulier : une immense pièce aux motifs dorés et murs saumon qui dénotait totalement avec les murs sombres du hall. Le sol était en latte de bois chic, surmontées par un tapis blanc. Une cheminée brulait dans un coin de la pièce. L'endroit était rempli de décorations d'époques diverses et de sculptures de plusieurs ethnies différentes, mais c'était les gens qui se tenaient la, devant moi qui étaient le plus bizarre, ils semblaient tenir la pause comme un groupe de mannequins en bois, attendant que je fasse mon apparition.

- Voici la famille Vespucci - Précisait Irma - Dame Vespucci, Sieur Vespucci et leurs filles : Vittoria et Vesla.

Devant moi la petite famille semblait sortie d'un film de Tim Burton se passant à Venise : le père était dans un élégant costume à l'ancienne, avec une collerette, un chapeau blanc à motif doré et un masque moitié or, moitié noir, l'on ne voyait pas un millimètre de sa peau. La mère portait le même masque avec les couleurs inversées et une robe verdâtre à motifs dorés qui ferait passer celle de mon hôtesse pour une robe de pouilleuse. Les deux filles portaient des masques "loups" aux mêmes motifs que ceux de leurs parents. Vittoria, la blonde avait les couleurs dans le même sens que le masque de sa mère, quant à Vesla, la brune c'était de son père que son masque semblait tiré.

-Dame Vespucci, voici Lyana P ...

Mais mon hôtesse ne put terminer sa phrase, Dame Vespucci me regardait des pieds à la tête et leva la main en faisant un geste qui voulait clairement dire que je devais fiche le camp.

- Etes-vous sûre ? - Demandait mon accompagnatrice. La dame refit le même geste, s'en était trop pour moi, qu'elle ne veuille pas me recevoir était une chose, mais qu'elle me traite comme un chien cela ne me convenais pas, je m'avançais.

- Je suis de la police et j'ai de bonnes raisons de penser que je pourrais trouver des indices sur une affaire actuelle dans votre demeure.

De nouveau, le geste de la main.

- Bien - ajoutait Irma - nous allons prendre congé ... -

- Non, je n'ai pas terminé !

- Je ne suis pas sûre qu'il soit prudent de ... - Commençait Irma, mais je la coupais.

- Des vies sont en jeu, vos filles auraient pu être les proies de ce malade !

Irma me saisit l'avant-bras avec une telle force que j'eue l'impression que ses doigts allaient me briser les os. Elle approchait ses lèvres de mon oreille.

-Ecoutez-moi maudite sotte, j'essaie de vous sauver la v ... - Mais elle n'eut pas le temps de finir, cela ne durait qu'un instant, une simple seconde pour que Dame Vespucci pourtant à cinq mètres de moi me saisisse à la gorge. Ses doigts osseux et crochu entaillaient la peau de mon cou et je pouvais sentir que ses phalanges étaient plus longues que la normale. Son bras allongé était grisâtre et décharné et il me tenait de l'autre bout de la pièce. Son membre s'était allongé comme Dhalsim dans Street Fighter ...

La silhouette de Dame Vespucci semblait comme glisser sur le sol en s'approchant de moi. Elle parlait d'une voix caverneuse qui n'avait rien d'humain.

- Nous n'avons que faire de votre autorité, petit insecte ...

Je perdais connaissance la seconde d'après ...

Je clignais des yeux dans une obscurité envahissante, ma gorge et ma tête me faisaient souffrir.

De ce que je pouvais voir, j'étais dans une cellule. Le froid ambiant me fit comprendre que l'on m'avait volé ma veste, une seule lumière éclairait la pièce et je pouvais à peine apercevoir l'extérieur de la cage dans laquelle j'étais prisonnière.

Petit à petit, les souvenirs me revenaient : Irma, Dame Vespucci, son bras de cinq mètres de long. L'inquiétude me gagnait, était-ce réel ? Il fallait que je sorte d'ici au plus vite.

A peine levais-je la tête que je fus prise d'une quinte de toux violente. La petite ampoule nue du plafond me permit de regarder la paume de ma main couverte d'un liquide violet et fumant ... Un liquide qui provenait de ma gorge ...

- C'est quoi ça ? - M'exclamais-je tout haut.

- L'infection - Dit une voix provenant de l'extérieur de la cellule.

Sortant de la pénombre, je pouvais voir Irma arriver et s'affairer sur la serrure de la cage.

- Quoi ? Quelle infection ?

Tout à son affaire, Irma tentait de m'expliquer, son tic de langage à l'ancienne avait totalement disparu, comme si elle avait été contrainte de jouer un rôle.

- L'infection, c'est une sorte de virus, une saloperie qui nous fait muter. Une fois transformé c'est trop tard, on perd conscience, on ne pense plus qu'à se nourrir et la chair humaine et le met le plus délicieux. Vous n'en êtes pas encore là, vous avez une petite chance de vous en sortir. Il y a un antidote quelque part, mais je ne sais pas ou ... Probablement dans l'ancienne chapelle.

Un virus transformant les gens en mangeurs de chair humaine ? C'était rocambolesque et pourtant, comme tout le monde j'avais entendu parle de l'incident de Raccoon City, aujourd'hui c'était plus une légende urbaine, mais autrefois les gens y accordaient du crédit.

- Et vous alors ? - Demandais-je.

- Quoi moi ?

- Vous n'avez pas l'air de vouloir me manger ?

Irma semblait surprise de ma capacité de déduction.

- C'est ... Compliqué ... J'ignore pourquoi ça ne marche pas de la même manière sur tout le monde, j'ai des moments de lucidité et là je suis en plein dedans, comme quand j'ai essayé de vous faire quitter le domaine, mais vous ne m'avez pas écoutée.

Irma avait réussi à ouvrir la porte de la cellule. Je m'apprêtais à fuir, mais elle me rattrapait par le bras.

- Vous aurez besoin de ça. - Elle me tendait mon holster. - La famille Vespucci sont les pires créatures du domaine, mais ils ne sont pas les seuls. Il y a d'autres créatures, plus faibles, mais dangereuses malgré tout et votre arme ne sera pas de trop. Si vous n'arrivez pas à sortir d'ici, alors trouvez "la dame" elle est un peu excentrique, mais elle pourra vous aider. Vous la trouverez dans le petit salon ...

J'enfilais mon holster au plus vite, en réalisant que je ne pouvais pas quitter les lieux maintenant.

- Je ne peux pas sortir, il me faut l'antidote !

Irma semblait paniquée.

- Il faut que vous réussissiez à atteindre la chapelle, elle se trouve à l'extérieur côté jardin, si l'antivirus est quelque part, ça sera la-bas.

- Combien me reste-t-il de temps ? - demandais-je.

- Vous avez huit heures à peu près.

Elle commençait à avancer, mais je la retenais.

- Il se passe quoi au bout de huit heures ?

Irma semblait nerveuse - Vous allez devenir l'une de nous ... - Devant ma crainte, elle ajoutait - Cela ne veut pas dire que vous allez perdre l'esprit comme la famille Vespucci, vous pourriez très bien avoir toute votre tète ...

Cela me rassurait un peu et devant ma mine, un rien calme, elle crut bon de me mettre en garde.

- La faim de chair humaine est une chose que nous avons tous en communs et quatre-vingt-dix pourcents d'entre nous ne savent pas se contrôler. N'envisagez pas une seconde de faire confiance à votre chance, vous DEVEZ trouver le remède !

Je suivais ma sauveuse jusqu'au bout du couloir sombre et nous montions dans une espèce de monte-charge. Elle activait la cabine qui se mit à monter.

- Nous sommes au sous-sol - Précisait-elle - Depuis le rez-de-chaussée vous devriez peut-être pouvoir sortir.

La cabine s'immobilisait, Irma sorti en premier. - Venez ! m'ordonnait-elle, mais alors que je m'apprêtais à sortir, la main crochue de Dame Vespucci traversait le corps de la pauvre femme, ses doigts tendus devant moi décoré comme un sapin de Noël par les tripes et les intestins d'Irma.

-Sauvez ... - Elle n'eut pas le loisir de terminer sa phrase, le bras de Dame Vespucci emmenait le corps dans la pénombre ...

J'activais à nouveau le levier pour faire monter la cabine, pressée par la peur et le refus de mourir ici. La machine se mit à monter, tout à coup le bras de Dame Vespucci trouait le sol de la cabine. Depuis le trou, je pouvais le voir s'accrocher et monter le long de la trémie, tentant de se rapprocher de moi.

- Mais il peut s'étirer jusque ou ce fichu bras bon sang !?

La sonnette de l'ascenseur réagit me signalant que j'étais arrivée au dernier étage. Je poussais le rideau métallique sur le côté et sorti directement de la cabine juste avant que la main griffue ne démolisse l'intérieur. La cabine détruite tombait dans la trémie. Je rampais en arrière, mais la main était repartie, j'espérais que le poids de la cabine, même démolie lui était tombée dessus et l'avait tuée, mais j'en doutais fort ...

Je me trouvais dans une toute petite pièce avec un plancher en bois vermoulu, des murs de béton gris et un panneau électrique, probablement celui de l'ascenseur : il me paraissait bien trop petit que pour gérer l'électricité de tout le domaine.

Poussant la porte je déboulais sur le toit. La pluie me frappait le visage et d'ici je pouvais voir une grande partie des lieux, si je devais les fouiller j'en aurai pour plus de huit heures : outre le bâtiment principal sur lequel je me trouvais, il y avait une cathédrale non loin et une serre, au centre de tout cela semblait trôner une espèce d'étendue d'eau entourée par une espèce de haie, le tout entouré par une étendue de terre battue qui aurait pu être un excellent parc public.

Je devais trouver le moyen de quitter ce toit, si l'ascenseur était la seule manière d'y accéder et d'en partir, j'étais mal partie ...

Je n'avais pas beaucoup de choix : hormis l'endroit où j'avais posé les pieds, le toit grisâtre était en double pentes raides, parasités par des fenêtres ressortant en relief, à l'ancienne.

Je me glissais dans une sorte de petite rigole et entamais ma marche jusqu'à la première fenêtre : fermée ...

Je n'eus pas plus de chance avec la seconde, il me fallut atteindre le troisième : une chambre de petite fille, avec deux lits, probablement la chambre des deux filles des époux Vespucci.

La chambre ressemblait tout à fait à ce dont ressemblerait une chambre de petite fille si on se basait sur un rêve de petite fille : deux lits à colonnes roses, des licornes sur le papier peint. Une boite à musique, un cheval à bascule ... Ok, disons plutôt une chambre de petite fille des années quatre-vingts.

Je franchissais le tapis bleu turquoise pour ouvrir la porte de la chambre et me retrouver sur une mezzanine surplombant le hall d'entrée : celle-là même où se trouvait la pièce où j'avais fait la malencontreuse connaissance de la famille Vespucci.

Evitant soigneusement de retenter ma chance, je préférais descendre les escaliers, arrivant à la première mezzanine, découvrant les deux portes de part et d'autre, mais je n'avais aucun besoin de les franchir. Il fallait que je trouve l'antivirus me permettant de me débarrasser de cette saloperie qui me bouffait de l'intérieur.

Je descendais donc le même escalier que tout à l'heure, bien décidée à franchir la porte.

- Non, non, non - Fit une voix juvénile enjouée.

- Ca n'est pas la règle du jeu - renchérit une voix pratiquement similaire.

Les deux gamines : Vittoria et Vesla s'approchaient chacune de part et d'autre de la grande porte centrale : la sortie. L'une des gamines posa sa main sur la porte et une espèce de tentacule en sorti devant mon regard apeuré. Voir une femme allonger son bras et ses doigts étaient déjà effrayant en soi, mais voir une gamine sortir un tentacule de la paume de sa main était autrement plus traumatisant : le tentacule se séparait alors en dix morceaux, comme une espèce d'araignée tout droit sortie d'un film d'horreur. La nouvelle venue se déplaçait sur la porte et étendait ses "pattes" aux contours de l'entrée, enfonçant ses dernières dans le mur, bloquant la sortie. J'étais tétanisée ...

Je sortais mon arme, prête à tuer cette abomination quand les deux gamines se rejoignaient devant l'araignée.

- C'est stupide : ce n'est pas vivant - Dit Vittoria.

- Et en plus, tu vas attirer maman ... Répondait Vesla.

- Tu ferais mieux de chercher un moyen de l'anéantir, il parait que le feu est efficace ! renchérit Vittoria

- Mais non idiote ! c'est l'eau !

- Non le feu !

- Non l'eau !

Les deux gamines arrêtèrent leur dispute pour se tourner vers moi. Sous le masque qu'elles portaient, je pouvais voir leurs bouches s'étirer en un sourire malsain.

- A moins que ce ne soit aucun des deux ? - Dirent-elles en cœur avant de s'enfouir en courant et en riant vers les deux portes, sous l'arche d'escalier, hors de la portée de mon regard.

- Mais que se passe-t-il ici bon sang ? - Hurlais-je à la pièce vide. Cette histoire était délirante : des créatures venues d'on ne savait où, une porte bloquée par une espèce de poulpe bizarre et un virus qui courait dans mes veines ne me laissant que quelques heures à vivre, on aurait dit un très mauvais film de série B ...