Hello tout le monde, vous allez bien ? Moi, la forme.

Je publie ce chapitre le lundi 24 mai 2021 (j'aime bien les lundis fériés, pas vous ?)

Je ne vous embête pas plus longtemps.

Bonne lecture ^^


Chapitre 3 : Guerre au Sommet


Après une longue conversation impliquant la révélation du statut d'ancienne esclave de Lucy, la véritable identité de Ray, la vérité sur la mort de Gol D. Roger et une interview des pirates au Chapeau de Paille — le médecin, Chopper, avait d'ailleurs reconnu la jeune fille ayant interviewé le docteur Kureha après qu'elle l'ait soignée —, ces derniers étaient partis, se dispersant et promettant de revenir d'ici trois jours, une fois que leur navire aurait été recouvert par Ray.

Malheureusement, ils avaient été cueillis en chemin par Bartholomew Kuma — l'original cette fois —, et avec l'intervention de l'amiral Kizaru, ils s'étaient retrouvés totalement impuissants. Ray était intervenu pour retenir l'amiral, mais cela n'avait pas suffi à empêcher Kuma de les disperser aux quatre coins du monde. Lucy et Shakky avaient suivi tout cela grâce à Trombone, avec Hachi, Camie et Pappug, qui avaient pleuré, horrifiés du sort de leurs sauveurs.

Lucy, après ses échanges avec les pirates, avait appris leur implication avec la bande de Duval... Ils ne s'appelaient plus les Exocet Riders, mais les « La vie en rose » Riders, ou quelque chose dans ce goût-là. Bref, un surnom moche et stupide de l'avis de la jeune fille. Cependant, c'était suffisant pour les retrouver et leur expliquer la situation.

Habillée en garçon, elle les retrouva sans mal et leur raconta les derniers événements, et le fait que, malgré tout, Ray s'occuperait tout de même du revêtement du Thousand Sunny, mais qu'il allait falloir le protéger en attendant le retour de ses propriétaires.

La bande d'anciens marchands d'esclaves accepta avec joie la mission confiée par Ray — c'était son idée — et suivirent le journaliste jusqu'au grove où le navire avait été déplacé pour plus de discrétion.

Ray n'était pas là, naturellement, il se cachait de la Marine, et Shakky tenait son bar. En revanche, Bartholomew Kuma était là et montait la garde. En les voyant, le Grand Corsaire releva la tête et les regarda fixement.

« Avez-vous l'intention d'attaquer le navire des Chapeaux de Paille ? demanda-t-il d'une voix si désincarnée qu'elle fit frissonner tout le monde.

– Non, répondit tout de même Duval. Nous sommes, au contraire, là pour le protéger !

– Je les accompagnais juste, précisa Lucy. Bon, les gars, j'y vais. Au besoin, passez au bar de l'Arnaque, il y a des chambres et des repas. Par contre, préparez-vous à raquer un max ! »

Les hommes acceptèrent avec plaisir la proposition, puis s'installèrent confortablement. Visiblement, Kuma n'était pas agressif, autant en profiter.

De son côté, Lucy se dépêcha de rentrer au bar, ressentant la présence de Trafalgar et son second là-bas. Se transformant en chat pour plus de discrétion, elle n'en perdit pas moins en vitesse et se faufila avec aisance au milieu des pirates et autres bandits peuplant la zone de non-droit, avec toutefois plus de facilité qu'à l'accoutumée car, en raison de la récente présence de l'amiral Kizaru, les hors-la-loi se faisaient plus discrets en attendant que la Marine se calme un peu.

Avec la future guerre contre Barbe Blanche qui se préparait, ce n'était là que douce espérance.

Parvenue à destination, Lucy entra dans la bâtisse éclairée, et vint se frotter contre les jambes de Shakky qui sourit avec une bienveillance qui n'était adressée qu'à elle.

« Alors mon petit Lu, tu ne m'avais pas dit que tu avais un rendez-vous galant avec le petit Trafalgar... »

Lucy glapit sous la moquerie, tandis que Trafalgar, assis au bar, s'étouffait avec son verre d'alcool. L'ours polaire tenta bien de tapoter le dos de son capitaine, mais celui-ci repoussa sa patte, qui l'aurait certainement envoyé dans le décor s'il l'avait laissé faire. Le chat retrouva sa forme hybride, et Lucy fusilla Shakky du regard, sous l'air amusé et moqueur de la patronne.

« Allons mon poussin, calme-toi, ne va pas te faire de rides d'inquiétudes.

– J'ai demandé à Trafalgar si je pouvais l'interviewer, pas de le voir sous un quelconque prétexte fallacieux sorti tout droit de ton esprit pervers, Shakky !

– Tu as le droit, tu sais. Oh, à moins que Trafalgar ne soit pas intéressé ?

– Shakky ! protesta — en vain — Lucy, toujours travestie en garçon.

– Je n'ai rien contre un peu d'amusement, » intervint soudain le jeune pirate, remis de sa surprise.

Cette intervention manqua provoquer une crise d'apoplexie chez Lucy, sous l'œil de plus en plus amusé de Shakky. Lucy grommela surtout pour la forme, puis elle alla vers Trafalgar et lui demanda s'il voulait bien la suivre. Ils allèrent à une table reculée du bar et s'y installèrent, tandis que Shakky vint leur demander ce qu'ils prenaient.

« Avez-vous faim, ou juste une boisson ?

– Je prendrais bien mon dîner, oui, commença Lucy. Quel est le plat du jour ?

– Hachis parmentier.

– Très bien.

– Trafalgar ?

– La même chose.

– Je vous amène ça. Vous voulez boire quelque chose ?

– Un jus de pomme pour moi.

– Un whisky, » répondit le pirate.

Shakky acquiesça et partit préparer tout ça, prenant au passage la commande de Bepo. L'ours polaire fut surpris mais entama une conversation avec la patronne pendant qu'elle préparait le dîner.

« À propos de quoi voulais-tu m'interviewer ? entama sans préambule le pirate.

– Déjà, avant de commencer, merci d'avoir accepté ma demande. Ensuite, est-ce qu'on peut s'appeler par nos prénoms ?

– Si tu veux, Lucius.

– Merci ! s'exclama joyeusement Lucy. Alors... Avant toute chose, fit-elle en sortant Trombone, un calepin et un stylo, comment as-tu fait pour échapper aux deux faux Kuma quand tu étais avec Eustass Kidd ? »

°°o°°

La conversation entre la journaliste et le pirate dura bien trois bonnes heures, coupée à un moment donné par l'escargophone du pirate qui sonna, son équipage s'inquiétant sur la raison d'une si longue absence. Law avait dû les rassurer, et quand il en était revenu à sa conversation, Lucy lui avait parlé de Jean Bart. Le jeune homme avait confirmé qu'il avait profité de la débandade provoquée par le Chapeau de Paille pour libérer l'ancien capitaine pirate et lui faire intégrer son propre équipage.

Lucy avait été enchantée quand Law avait confirmé n'avoir rien à faire du statut d'esclaves ou d'anciens esclaves de certains individus ; pour lui, tous étaient des individus à part entière, et s'il se retrouvait face à un ancien esclave, il ne le vendrait certainement pas, mais le laisserait au contraire tranquille.

Cette affirmation n'était pas tombée dans l'oreille d'une sourde, puisque Shakky avait largement souri à ce moment-là. En interrogeant Bepo, l'ours lui avait confirmé que Jean Bart restait enfermé dans leur sous-marin tant qu'ils étaient sur Sabaody, pour des raisons évidentes de sécurité.

Trafalgar avait ensuite ressorti l'article que Bepo lui avait subtilisé, et la journaliste put avoir l'avis du pirate, et surtout son avis de médecin-chirurgien.

Il lui révéla les ordres qui avaient été donnés aux hôpitaux du monde entier si jamais une personne présentant les caractéristiques du saturnisme blanc se présentait à eux. Lucy en fut horrifiée mais nota tout consciencieusement, sans se douter une seconde de la véritable origine de l'homme qu'elle interviewait.

Les jours s'écoulèrent ainsi, entre détentes et parties de cache-cache avec la Marine et les marchands d'esclaves qui cherchaient à retrouver ceux qui avaient échappé à la salle de vente du grove 1 ce fameux jour où l'amiral Kizaru avait dû intervenir.

L'article de Lucy à ce sujet avait été relayé dans un journal populaire, et le journal en question avait d'ailleurs rencontré quelques problèmes avec des agents du Gouvernement un peu trop intéressés par le mystérieux Lord D. Lu qui dénonçait explicitement l'esclavage et dénigrait le rôle de la Marine à ce niveau-là.

Dans son article, Lucy n'avait naturellement pas fait l'éloge des pirates non plus, mais elle avait loué le splendide coup de poing en pleine face que le Chapeau de Paille avait envoyé à Saint Charlos, en raison des précédentes actions dudit Saint Charlos qui avait misé cinq cent millions de berries pour acheter une sirène — alors que c'était illégal aux yeux de la loi —, avait tiré sur un homme-poisson pour la simple raison que c'était un homme-poisson — la discrimination raciale étant tout aussi illégale que le trafic d'esclaves —, et avait ensuite voulu s'approprier ledit homme-poisson en tant qu'esclave, et gratuitement pour la raison que lui ayant tiré dessus, il était censé lui appartenir, ce pour quoi le Chapeau de Paille s'était énervé et l'avait envoyé dire bonjour au mur.

Cet article, relatant ainsi fidèlement les actions, n'avait absolument pas plu et, si le journal dans lequel Lucy l'avait publié avait pu s'en sortir en plaidant que c'était un scoop, et que surtout, le jeune homme ayant rédigé l'article avait insisté, Lucy, elle, avait vu sa tête être mise à prix.

Seulement, les autorités n'avaient ni son nom, ni son âge, ni son apparence, à part une vague description, ni même son vrai genre, aussi, elle était recherchée sous son pseudonyme de Lord D. Lu, jeune journaliste incitant à la rébellion aux cheveux noirs, ce qui était une couleur de cheveux extrêmement répandue.

Les autorités ne savaient même pas qu'elle avait mangé un fruit du démon, alors Lucy ne s'en inquiétait pas trop pour l'instant.

Pour l'occasion, elle ressortait habillée en fille et avait été révéler la vérité sur son genre à Law, sous les conseils avisés de Shakky. Le chirurgien, pas étonné pour un berry, lui avait expliqué avoir deviné la vérité dès leur rencontre, en raison de l'absence d'attributs masculins sur le chat qu'il avait attrapé par la peau du cou.

« Sérieusement ? Tu... tu savais ?

– Oui, je savais.

– Non, mais... depuis le début ?

– Depuis le début.

– Ah...

– Mais j'apprécie ta franchise. Par contre, quel est ton vrai prénom ? Je suppose que ce n'est pas Lucius ?

– Non, je m'appelle Lucy.

– Très bien. Eh bien, Lucy, je suppose que nous pouvons commencer à nous fréquenter, maintenant que les choses ont été dites, non ?

– Comment ça, nous fréquenter ? Je ne suis pas amoureuse de toi, Law !

– Tant mieux, moi non plus. Il n'empêche, reprit-il en la voyant prête à reprendre la parole, que je t'aime bien, et que ça ne me dérangerait pas d'entamer une amitié avec des avantages en plus avec toi, si toutefois ça te convient aussi.

– Hum... Ce n'est pas que je ne veux pas, mais...

– Je n'ai pas l'intention de te forcer à quoi que ce soit, que ce soit bien clair. Je suis un pirate, et même capitaine, mais j'ai des principes.

– Je sais, je... Merci. C'est juste que... Je n'ai jamais eu de relation, qu'elle soit amoureuse ou juste physique.

– Tu es vierge ? demanda soudain Law, s'attendant à la voir rougir.

– Non, répliqua Lucy, soudain très pâle. Non, je... non. Mais... ce n'était pas un choix de ma part. »

Law comprit ce que la jeune fille osait avouer à demi-mots et poussa un profond soupir en fermant les yeux. Il les rouvrit en entendant un soupir faire écho au sien et avisa l'air triste de Lucy, et son regard fuyant. Elle était blême.

« Je... je suis sale, hein ?

– Non, répondit-il spontanément sous la surprise de cette affirmation inattendue. Certainement pas. C'est celui qui a fait ça qui est sale, pas toi. Toi, tu n'as rien fait.

– Tu...

– Je suis médecin, tu sais. J'ai déjà soigné une femme à qui c'était arrivé, une fois, et... et c'était compliqué, révéla-t-il en se frottant la nuque et détournant le regard. Honnêtement, j'ai pas les mots, je ne sais pas quoi dire, mais ce que je sais... C'est que tu n'es pas responsable, ni coupable, ni sale, ou je ne sais quelle connerie du même genre. Tu n'es pas moins bien qu'une autre femme, c'est clair ?

– Je... Oui, c'est clair. Mais... c'est difficile. Et puis...

– Tu peux me dire, et tu peux aussi ne rien me dire. Quoi qu'il en soit, je ne te jugerai pas.

– Merci, Law. »

Le pirate haussa les épaules, peu habitué à être remercié et, gêné de la voir reprendre des couleurs grâce à lui, il laissa son regard balayer la salle du bar et croisa celui de Shakky, puis celui de Ray, miraculeusement de retour ce jour-là. Sous l'air menaçant de l'ancien bras droit du roi des Pirates, Law frissonna.

« Qu'y a-t-il ? Law ?

– Je... Quel est ton lien avec Silvers Rayleigh ?

– Ray ? Il m'a sauvé la vie, avec Shakky, il y a un peu plus d'un an, et ils m'ont recueillie, et en quelque sorte adoptée. J'étais originaire de la même île que Ray, mais nous n'avons pas de lien familial, à part par nos sentiments respectifs. Je sais qu'il me considère un peu comme la fille qu'il n'a jamais eue avec Shakky. Moi, je le vois comme un deuxième père, et Shakky comme une deuxième mère, en plus d'être tous les deux mes protecteurs et mes bienfaiteurs. Pourquoi ?

– Oh, eh bien, il me regardait d'un air...

– Oh, ne t'inquiète pas pour ça. Ray est très gentil, il aime bien faire son dur dès qu'on s'approche de moi, mais tant que tu ne me fais aucun mal, il ne fera rien. Il ne te menacera même pas, et comme je suis sûre que tu es quelqu'un de bien, Law, tu n'as pas de souci à te faire ! »

Law acquiesça, à moitié rassuré. Il éviterait d'asticoter le légendaire seigneur des ténèbres ; il pouvait être téméraire, mais il n'était certainement pas suicidaire.

°°o°°

Deux jours plus tard, l'exécution publique de Portgas D. Ace allait commencer, et Lucy avait disparu de Sabaody depuis la veille. Law et Ray la cherchaient partout, tandis que Shakky les regardait faire avec un amusement non feint. Elle avait confiance en sa protégée, et savait qu'elle s'en sortirait, au contraire de Ray qui s'inquiétait plus que de raison.

Ah, les hommes... Tous les mêmes.

De son côté, Lucy avait profité de la présence du navire de guerre de la Marine du vice-amiral Garp pour y embarquer, se faisant rapidement une place auprès d'un jeune homme aux cheveux rose et de son ami blond, tous deux ayant tenté, avant l'embarquement, de la dissuader de monter à bord, car ils se dirigeaient tout droit vers une possible grande bataille à tendances meurtrières.

Lucky le chat les avait ignorés et avait bondi bien haut, pour ne revenir que quand le navire avait été sur les flots, un gros rat fraîchement tué entre les crocs qu'elle avait déposé sur le pont, attendant qu'on lui donne son repas en récompense pour se débarrasser des nuisibles.

Le vice-amiral avait bien ri de son attitude pompeuse mais avait négocié avec elle — sous l'air stupéfait des matelots — pour qu'elle revienne avec encore au moins une dizaine d'autres rongeurs. Sous les regards ébahis, le chat avait relevé le défi avec brio, et avait ainsi bénéficié d'une bonne plâtrée de pâté, de petits légumes verts et d'une demi-tranche de lard, accompagnés d'un bol d'eau fraîche.

Sans se faire prier, l'élégant félin avait tout mangé, avec grâce et distinction, puis avait entrepris, une fois sa pitance ingurgitée, de faire sa toilette sous les regards curieux. Quand elle en était venue à se lécher les parties intimes, certains s'étaient détournés, gênés.

Quand ils étaient arrivés à Marine Ford, toutefois, la boule de poils avait vite été oubliée, et les soldats s'étaient répartis les tâches avec une aisance que seule confère l'habitude.

Rapidement, les canons qu'ils avaient amenés avaient été installés, et chacun s'était vu assigné à un emplacement précis, où ils iraient se mettre dès le matin de l'exécution, et devraient se tenir prêts à demeurer debout pendant des heures sans bouger, avant que la possible bataille ne s'engage.

De son côté, Lucy se félicitait d'avoir été si proche de Coby et Hermepp — le garçon aux cheveux rose et le blond — car ils s'étaient révélés être une mine d'informations, notamment par leur lien avec le Chapeau de Paille. Trombone avait tout enregistré, et elle avait hâte de tout retranscrire sur papier.

Cependant, l'heure de l'exécution approchant, de même que le combat, la tension montait dans les rangs des soldats de la Marine, tous âges confondus. Certains avaient à peine seize ans, comme elle, et d'autres, comme Garp, approchaient à grands pas de la retraite.

Et, dans le lot, bon nombre d'entre eux mourrait si Barbe Blanche décidait d'intervenir. Et il interviendrait, Lucy n'avait aucun doute à ce sujet.

Il faut dire, aussi, qu'elle avait longuement eu l'occasion d'en parler avec Ray, et qu'il lui avait expliqué en long, en large et en travers la philosophie du vieil homme, et le fait qu'il considérait que le plus grand des trésors était, non pas le One Piece, mais la famille, et que c'était son plus cher désir depuis tout jeune que d'en avoir une.

Avec près de 1 600 hommes sous ses ordres l'appelant « père », l'on pouvait raisonnablement penser qu'il avait atteint son objectif. Sans compter ses alliés.

Et, en tant que père, il était hors de question qu'il laisse un de ses fils se faire exécuter sans réagir.

Bref, la bataille s'annonçait rude, longue et sanglante, et Lucy tenait à être aux premières loges pour retranscrire tout ça, sans rien omettre ; il n'était pas question de laisser les journaux officiels soumis à la censure se charger de recouper les événements. Hors de question.

°°o°°

À la fin de la bataille, ou plutôt de la guerre, Lucy se sentit lessivée — mais pas dans le bon sens comme avec le pouvoir de la grande Tsuru. Non, là, elle se sentait moralement et physiquement épuisée, et le sentiment d'immense gâchis ne cessait de tourner dans son esprit, l'épuisant davantage.

Elle avait tout filmé, tout enregistré, avait même noté des paroles échangées à l'autre bout de l'île — merci à son Fluide de l'Observation surdéveloppé —, mais n'était pas intervenue, à aucun moment.

Ce n'était pas l'envie qui lui avait manqué, mais elle savait qu'elle ne pouvait se permette de griller sa couverture, surtout que personne n'avait fait attention à elle.

N'étant pas une combattante, elle aurait eu vite fait de se constituer cadavre en moins de temps qu'il n'en faut pour dire « monstre marin » si on l'avait découverte. En demeurant discrète, elle avait pu récolter les dernières paroles de Portgas à son frère et, par Davy Jones, qu'elle avait eu envie de pleurer à ce moment-là ! Mais elle s'était retenue.

Au moins, elle publierait fidèlement toutes ses paroles, et ce serait un dernier hommage, un moyen de permettre aux pirates de Barbe Blanche de savoir que leur petit frère de cœur et d'adoption les avait aimés, et qu'il les remerciait de l'avoir vu, lui, Ace, un jeune homme fougueux, plein de vie, et jeune, si jeune...

Un gâchis, voilà ce que c'était.

Elle avait eu envie de hurler quand elle avait vu Doflamingo récupérer le pyro-fruit, mais elle s'était abstenue. Ça l'avait démangée, parce que, vraiment, ce type n'avait aucun respect ou quoi ?

Sauf qu'elle avait promis à Shakky de rentrer entière, et en vie surtout, alors elle ne pouvait se le permettre. Surtout au vu des informations que Shakky lui avait transmises à propos du roi de Dressrosa. Il y avait des choses sombres autour de cet homme, et il faudrait qu'elle enquête dessus.

Plus tard.

Oui, plus tard. Là, la priorité, c'était d'écrire ses premiers articles, et de les publier. Comment les publier, d'ailleurs ?

Elle se souvint soudain qu'elle avait le numéro d'escargophone personnel de Hack. Se retirant dans un recoin isolé, Lucy reprit sa forme hybride habituelle afin de rédiger son article, usant d'écouteurs pour réécouter les enregistrements faits par Trombone.

Brave Trombone.

L'escargophone était tout tremblant, mais fier de lui. Lucy le félicita doucement, soucieuse de ne pas se faire repérer, et lui promit de lui chiper les plus belles salades dès que possible. Son ami acquiesça, le regard soudain joyeux, et Lucy l'envia pour son esprit simple de gastéropode. Il oubliait bien vite les horreurs de la guerre, et des morts.

... D'ailleurs, il faudrait qu'elle se procure la liste des décédés, afin de les lister ; qu'il s'agisse de soldats de la Marine ou de pirates, tous méritaient d'être cités. Ils ne devaient pas être oubliés. Ça ferait du boulot en plus, mais Lucy se promit de le faire, ne serait-ce que pour les proches des disparus qui méritaient de savoir.

Pour commencer, l'article. Elle verrait pour la liste après, une fois qu'elle aurait rédigé son article et appelé Hack. L'article, l'article avait la priorité, elle appellerait Hack ensuite, puis elle se procurerait cette fichue liste. Le plus compliqué serait les noms des pirates, mais c'était faisable. Au pire, elle pourrait dessiner les portraits de ceux dont elle ne retrouverait pas les noms.

Décidée, la jeune fille s'attela à écrire avec férocité, noircissant son calepin de notes, le raturant à de multiples reprises, reprenant certaines tournures de phrases ne lui plaisant pas, notant dans des marges les différents titres de parties, s'enjoignant à ne pas se laisser submerger par l'émotion, réécoutant en boucle certains passages jusqu'à pouvoir les réciter sans même y penser, et finissant plus épuisée qu'autre chose, mais soulagée d'avoir réussi à écrire ses articles.

Son putain de scoop y était, et elle emmerdait la Marine et leur Justice Absolue à vomir. Le passage sur les Pacifistas allait faire grincer des dents, mais elle s'en fichait comme d'une guigne.

De même, l'acharnement de l'amiral Akainu Sakazuki y était décrit comme impropre à son rang, d'autant qu'il n'avait cessé d'appeler le Chapeau de Paille « fils de Dragon » — pas sûr que Sengoku laisse passer ça quand il le lirait... ni le Gouvernement.

Enfin, cerise sur le gâteau, elle avait fait un éloge funèbre à Portgas dont elle n'était pas peu fière.

Cela donnait ça...

Que dire du condamné, Portgas D. Ace ?

Condamné, selon la version officielle donnée par l'amiral-en-chef de la Marine Sengoku, avant la guerre, pour restreindre Barbe Blanche dans ses actions et son influence jugée bien trop grande par la Marine et ses actes de piraterie, mais, en vérité, condamné pour un crime qu'il n'a même pas commis, au nom d'une injustice qu'il faut absolument dénoncer, quand bien même cela est trop tard, car il ne faut pas que cela puisse se reproduire un jour. Jamais.

Lecteurs, lectrices, Portgas D. Ace était condamné avant même sa naissance pour la seule raison de son existence. Sa seule et simple existence était un crime aux yeux du monde.

Pourquoi cela ?

Parce qu'il était le fils du roi des Pirates.

Seulement voilà, Portgas a publiquement défendu le fait qu'il ne reconnaissait qu'Edward Newgate dit Barbe Blanche comme étant son seul et unique père, reniant par ces paroles Gol D. Roger.

Poing Ardent, avant d'être le fils du roi des Pirates, avant d'être le fils adoptif de Barbe Blanche, avant d'être le commandant de l'une de ses flottes, avant d'être un pirate, avant d'être le frère de saké de Monkey D. Luffy, avant d'être tout cela, Portgas D. Ace était un jeune homme qui n'avait pas choisi de naître ainsi, sous une telle identité, qui se cherchait, en quête de savoir s'il méritait seulement de vivre, et qui avait finalement trouvé une famille et des personnes chères à son cœur, l'acceptant pour qui il était et non pour ce qu'il pouvait représenter.

Lecteurs, lectrices, qui sont vos parents ?

Des médecins, des professeurs, des boulangers, des cuisiniers, des soldats de la Marine, des scientifiques, des agents du Gouvernement, des nobles, des gardes royaux, des brigands, des artistes peut-être... Quelques-uns d'entre vous ont peut-être même des pirates pour parents. Et vous, êtes-vous devenus comme vos parents ? Êtes-vous leurs doubles, leurs réincarnations ?

Certainement pas. Vous, lecteurs, lectrices, êtes vous-mêmes, et personne d'autre. C'est la même chose pour Portgas D. Ace.

Peu importe le sang qui coulait dans ses veines. Peu importe d'où il venait. Peu importe. Il aurait dû être condamné pour ses actes de piraterie, pour ses propres crimes, non pour ceux de son géniteur qui, à ses yeux, ne fut certainement jamais un père, d'autant qu'il ne l'a même pas connu.

Lecteurs, lectrices, ne vous laissez pas aveugler par les beaux discours du Gouvernement Mondial et de la Marine. Leur objectif de protéger le peuple est certes louable, mais celui de tuer des milliers de bébés et leurs mères sur la simple supposition qu'ils pourraient avoir un lien avec un pirate, n'est-ce pas totalement criminel, et même — osons le dire — monstrueux ?

Qui est le monstre, ici ? En quoi un bébé peut-il être une menace ? Ne faudrait-il pas, au contraire, l'éduquer avec amour et bienveillance afin qu'il ne soit pas tenté par le crime ?

Peut-être votre journaliste est-il un idéaliste qui espère de trop belles choses, qui fantasme un peu trop sur un monde utopique, mais c'est justement en se battant contre de telles horreurs, de telles injustices, que la Marine est censée combattre et non perpétrer, que les choses pourront avancer.

Lecteurs, lectrices, ne soyez plus de simples spectateurs impuissants, devenez acteurs. Personne ne mérite un tel sort. Personne ne choisit dans quelle famille, dans quel pays, sur quelle île il va naître. Personne ne peut décider de cela à l'avance, et c'est d'une injustice sans limite que de nous juger sur un élément sur lequel nous n'avons aucune maîtrise.

Si demain je dois être condamné, je refuse que cela soit en raison de l'identité de mes parents ou de mon lieu de naissance. Si demain je dois être condamné, je veux que cela soit pour des paroles que j'aurais dites, des articles que j'aurais écrits ou des actes que j'aurais commis, mais certainement pas pour des crimes pour lesquels je ne serais pas coupable.

Portgas D. Ace était innocent de ce pour quoi il fut exécuté.

Son exécution fut une mise en scène grotesque et grossière ne servant qu'à raviver inutilement la crainte du peuple d'un nom qui aurait dû demeurer dans les limbes, afin d'exposer outrageusement la puissance militaire d'une Marine oppressive et profondément abusive dans ses actions.

Portgas D. Ace méritait mieux que cela, et peut-être que mes mots ne seront jamais suffisants, mais il mérite, même après sa mort, d'être vu pour lui, en tant qu'individu à part entière, et non comme un vulgaire clone de son géniteur.

Portgas D. Ace, fils biologique de Portgas D. Rouge et de Gol D. Roger, petit-fils adoptif de Monkey D. Garp, frère adoptif de Monkey D. Luffy et d'un dénommé Sabo — apparemment décédé de ce que j'en ai compris —, fils adoptif d'Edward Newgate dit Barbe Blanche, frère adoptif des pirates de Barbe Blanche, grand frère protecteur, allant jusqu'à se sacrifier pour permettre à son cadet de survivre, un geste que bien peu auraient été en mesure de réaliser...

Portgas D. Ace aux Poings Ardents, tu étais un homme d'honneur malgré ton statut de pirate, et tu es mort en protégeant un être cher, ce dont bien peu de personnes peuvent se vanter.

Puisses-tu reposer en paix aux côtés de ton véritable père, Edward Newgate dit Barbe Blanche, Portgas D. Ace. Tu fus un criminel par tes actes de piraterie, mais ton existence seule n'était en rien un crime.

Après ce passage, Lucy retranscrivit les dernières paroles du jeune homme adressées à son petit frère, sans rien changer à ce qu'il avait dit, sans aucune reformulation d'aucune sorte.

À la fin de la rédaction de son article, Lucy se redressa pour s'étirer, se retenant de grogner quand elle sentit ses articulations craquer de protestation ; elle avait mal au dos. Son lit l'appelait. Dormir. Oreiller confortable. Matelas divin. Couette chaude et réconfortante...

Ce n'était pas bon, il fallait absolument qu'elle trouve un coin pour se reposer, mais où ? Peut-être auprès de Coby et Hermepp ? Ils avaient été sympathiques et, de ce qu'elle en sentait par son Fluide, ils avaient survécu et étaient même entiers, quoique Coby semblait particulièrement bouleversé.

Enfin, ce n'était pas si étonnant, il venait après tout de vivre sa première grosse bataille qui s'était transformée en guerre, rien que ça, et en plus il s'était carrément opposé à Akainu qui avait manqué le tuer de rage s'il n'y avait eu l'intervention de Shanks le Roux.

Il y avait de quoi être bouleversé, on le serait à moins. Lucy elle-même, malgré les horreurs dont elle avait pu être témoin lors de ses années noires, se sentait nauséeuse. Ç'avait été une vraie boucherie, et Moria qui en avait rajouté une couche en ranimant les cadavres à son compte...

Lucy frissonna. Elle désirait oublier ce passage, mais elle n'avait pu l'occulter quand elle avait rédigé son article, ou plutôt, le compte-rendu très fidèle des combats ayant eu lieu à peine quelques heures plus tôt.

Et bon sang, qu'elle avait eu envie de rejoindre Law quand elle avait senti sa présence et l'avait entendu sauver Luffy ! Mais elle s'était retenue, il fallait qu'elle reste, jusqu'au bout. C'était son devoir de journaliste de terrain qui était en jeu, et surtout, elle faisait savoir, dès le début de l'article, qu'elle avait été présente pour pouvoir tout retranscrire sans rien omettre — au contraire des autres journaux plus « officiels », bien planqués à l'abri derrière leurs bureaux.

Enfin, elle aurait pu rejoindre Law. Concrètement, rien ne l'en empêchait.

Seulement, même si elle avait eu très envie de le faire, même si elle savait qu'en montant à bord de son sous-marin il y aurait de grandes chances qu'il la ramène auprès de Ray et Shakky saine et sauve, même si elle savait qu'il l'aurait engueulée — sans qu'elle ne puisse lui donner tort —, même si elle avait eu très peur — et qu'elle avait toujours peur — de se faire prendre, elle ressentait aussi le besoin de rester et de continuer à enregistrer ce qu'elle voyait.

Était-ce l'adrénaline, la conscience du devoir, ou au contraire de l'inconscience pure ? Peut-être était-ce tout cela à la fois, et plus encore... En y réfléchissant bien, il y avait probablement le fait que, si elle avait suivi Law alors que tous les regards étaient braqués sur le sous-marin jaune, alors non seulement sa couverture de chat aurait volé en éclats, mais en plus, elle aurait eu un sentiment d'inachevé.

Après tout, Lucy n'avait pas pris tous ces risques pour rien, que diable ! Parce qu'entre éviter les balles perdues, les tirs de canons, se faufiler entre les combattants sans se faire repérer, ne pas glisser sur la glace qu'Aokiji avait invoquée, ne pas tomber à l'eau quand Akainu avait tout fait fondre avec son maudit magma de merde, tout en évitant ledit magma au risque de finir en steak grillé, ressentir chaque mort à chaque instant à cause de son Fluide de l'Observation naturel et trop sensible...

Ça n'avait pas été une sinécure. Vraiment pas.

Lucy revint au moment présent en entendant son ventre gargouiller. Au moins, elle n'en avait pas perdu l'appétit, et c'était bien, parce que ça aurait pu ruiner ses efforts, après des mois à travailler pour retrouver un poids acceptable et la santé — avec la réapparition de ses règles, entre autres.

Il allait falloir qu'elle s'infiltre dans ce qu'il restait du bâtiment pour dérober un repas pour elle, et une salade pour Trombone — avec peut-être quelques fruits s'il y en avait —, et cela, sans se faire repérer.

... Heureusement que le seul escargophone encore en état sur l'île était le sien !


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Les réponses aux reviews ! (Enfin, à la review, hein...)

mariam150295 : Ah tu as de bonnes théories, j'adore ! Pour un souci de spoil, je ne répondrai pas, j'espère que tu comprends ? Mais je note les idées. Pour le romantisme, je tiens à le redire : c'est pas parce qu'il y a du cul que c'est forcément de l'amour (et inversement). Il peut y avoir une relation romantique sans qu'il y ait d'amour véritable non plus, ça peut être juste de la tendresse. Les relations humaines sont complexes et ne rentrent pas dans des cases.
Oui, c'est un Crossover, mais qui va faire le voyage dans l'autre monde...? Suspense... En tout cas, ça se fera entre les chapitres 7 et 8 (à l'heure actuelle, il y en a 11 finis, et le 12e est entamé).
Ah, et même si la fic est classée M, c'est pas pour ça qu'il y aura du gore à outrance (je n'en suis pas fan). M, c'est pour Mature, soit des thèmes adultes, mais c'est pas forcément explicite, ça peut être de l'ordre du subtil, ou bien des sujets qui n'intéresseront pas forcément un public moins mature. Mais après, la maturité n'est pas forcément liée à l'âge, tu peux avoir 15 ans et être plus mature que des personnes qui en ont 40, et inversement. C'est une jauge, ça permet de se situer plus aisément et de filtrer les histoires que tu recherches.
Heureuse que tu aimes Trombone (j'ai toujours adoré le trombone parlant des vieux PC des années 90, j'ai été tellement déçue quand il a disparu !)
Ne culpabilise pas d'écrire beaucoup, ça me fait grand-joie !
J'espère que cette suite te plaira tout autant.

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... reviews, please ?