Derek remit correctement le col de sa veste. Laura venait de rentrer dans le bar, il allait pouvoir rentrer chez lui. Il ne comprenait pas comment la jeune femme faisait pour se "libérer" du boulot quand elle se trouvait dans une pièce bondée de personnes plus huppées les unes que les autres. Personnes qui avaient, justement, toutes un rapport avec son travail. Non, sérieusement, parfois, Laura Hale était plus surnaturelle qu'il ne l'était. Une fois la porte du pub fermée, Derek s'autorisa un soupir. Il ne savait pas du tout comment s'y prendre pour relâcher la pression du travail mais il était a peu près certain que ce ne serait pas dans la rue ou dans un bar qu'il le ferait. Lui, ce qu'il voulait, c'était être seul et ne plus entendre les mots " concours ", "scène" ou "défilé". S'il poussait le vice un peu loin, il bouillonnerait de rage si on lui mentionnait un seul nom de participants a problème dans leur réception.
Il remarqua après une seconde de retard qu'un jeune homme ivre était assit sur le banc devant le bar. Pendant un instant, il fut perturbé de ne pas avoir sentit l'odeur du garçon avant, parce que d'habitude ses sens étaient en alerte quand il était dans le centre ville. Il mit cela sur le compte de la fatigue et il se contenta d'hausser les épaules avant de partir vers sa voiture. Derek se fit la remarque que le seul endroit où il pourrait vraiment se calmer les nerfs, ça serait chez lui. Chez lui, dans la forêt attenante à la ville, où sa famille avait fait rénover un bâtiment industriel abandonné. L'endroit parfait pour un loup-garou. De la place, du silence, des arbres : de l'intimité. Ce dont il avait vraiment besoin maintenant et qu'il était pressé de retrouver. Mais, alors qu'il descendait la rue pour atteindre sa Camaro, une voix le fit sursauter.
- Hé ! Hé ! Monsieur !
Derek se tourna en soupirant, avisant avec un sourcil circonspect la manière peu avenante avec laquelle l'ivrogne venait de l'interpeller. Il s'apprêta a repousser poliment l'homme pour être tranquille mais il perdit toute sa vigueur quand il sentit juste une main se poser sur son cul.
- Qu'est-ce que... S'il avait sursauté en entendant l'individu s'approcher, maintenant, Derek était interdit, les yeux écarquillés. Il n'en revenait pas ! Combien de chance avait-il pour que ce soit lui, Derek Hale -loup garou à ses heures perdues-, qui soit victime d'attouchements en pleine rue ? Mais enfin ! s'exclama-t-il en se saisissant du poignet du garçon.
Il réalisa que c'était une défense stupide au moment même où il prononça ces mots. (Quelle répartie, Derek, vraiment...)
Il eut l'impression quelque chose avait été enlevé au niveau de sa ceinture mais il savait très bien qu'il n'avait rien dans ses poches et que son porte feuille était dans le repli intérieur gauche de sa veste. C'est a ce moment là, quand l'insolent le fixait en une grimace boudeuse, que Derek pris le temps de le détailler. C'était un jeune homme qui devait avoir une vingtaine d'années. Peut-être vingt cinq ans, tout au plus. Frêle et presque maigre, il avait une peau si pâle que Derek pouvait compter les grains de beauté qui descendaient comme une voie lactée sur sa gorge. Même si l'autre plissait les yeux de mécontentement, le loup garou put apercevoir le brun clair de ses iris, semblables à la couleur qu'un verre de rhum.
Le charme qu'il avait empêchait surement Derek d'abîmer son visage, mais en réalité, ce qui le fit relâcher le garçon, c'était un crépitement étrange qui résonna dans son oreille. Il n'eut pas vraiment le temps d'analyser ce nouveau son parce que d'un coup, le plus jeune attrapa la veste du barbu des deux mains. Derek sentit un grognement monter dans sa gorge, désagréablement surpris par toutes les actions de son vis-à-vis. Qu'est-ce qui lui prenait encore, a celui-là ? Toucher ses fesses ne lui suffisait pas ? Voulait-il mourir si jeune ? Honnêtement, il ne comprenait pas ce qui l'empêchait de lui sauter dessus pour lui arracher la carotide, mais ça avait à voir avec le bourdonnement qui berçait son ouïe.
- Ça va pas du tout, mon grand. déclara l'autre en lui tapotant le torse.
Est-que ce débile venait de l'appeler "mon grand" ? En touchant son corps sacré ? La diva dans la tête de Derek poussa un petit cri outré en mettant sa main devant sa bouche.
- Est-ce que t'as un instinct de survie ? demanda Derek en haussant un sourcil devant l'acte.
L'autre ignora sa remarque et le noiraud sentit les mains de l'inconnu s'activer sur sa veste. Bientôt, il sentit des doigts courir dans les pans intérieurs de celle-ci. Cette fois-ci, Derek attrapa le garçon par le col et le souleva de terre. Ca n'avait pas du tout l'air d'impacter le jeune homme parce que celui-ci était concentré dans sa tâche.
- Mais qu'est-ce que tu penses pouvoir faire, putain ?
- C'est moche. se contenta de répondre l'autre homme, apparemment imperméable à ses remarques.
- Hein ?
Le brun ne regardait même pas le loup garou dans les yeux, préférant fixer la veste en caressant les coutures et la matière du tissus.
- C'est moche. Mais au moins c'est fin. Un petit point et ça devrait aller. répéta-t-il, dans sa bulle. Cette fois-ci, Stiles se débattit comme il put et fouilla dans les poches de son propre gilet. Mon gars, -et Derek grinça des dents à l'appellation décontractée, il n'aimait pas du tout ça- si t'as assez de thune pour acheter cette marque, prends au moins quelque chose qui te va bien.
Derek fut étonné quand le garçon brandit une aiguille, tout droit sortie de sa poche et Stiles profita de la surprise pour se faufiler hors de la prise du plus vieux. L'instant d'après, il était agenouillé sous la hanche de Derek, la tête en dessous de sa veste -en vis-à-vis direct avec le postérieur de son interlocuteur-. Le brun faisait passer un fil noir dans le chas de l'aiguille et, les yeux fixés sur le tissus devant lui, il marqua un pli en pinçant le tissus, s'assurant d'avoir bien prit le milieu du dos. Au centre de celui-ci, les coutures de la doublure formaient un axe de symétrie. Quelques instants plus tard, en râlant contre l'homme qui tentait de déloger Stiles de ses pattes, le garçon réussi a faire un pli creux. Il s'écarta -fut projeté, plutôt- loin de son œuvre, très aidé par un Derek en colère.
- Mais t'es un grand malade toi !
Ok, se dit Derek, en voyant a quel point l'idiot devant lui avait l'air de n'en avoir rien a carrer de lui ; peut-être qu'il devrait revoir la formulation de ses menaces, ou grogner, tiens. Pas plus inquiet pour sa vie que ça, Stiles se mettait à rire en marmonnant comme une comptine :
- Si t'as des attributs, montre ton cul.
Complètement torché, il tenta de tourner autour de Derek pour admirer son œuvre. La veste avait maintenant un tout nouveau pli creux qui cintrait sa carrure comme l'aurait fait un blaser. Le résultat aurait été plus bluffant s'il n'était pas ivre en le faisant, mais après un coup de fer a repasser, ça serait parfait. Le styliste se félicita tout seul en babillant sur la façon dont le postérieur de Derek était exceptionnel dans son pantalon sans break. Il allait commencer des rimes bizarres avec "fessier" et "couturier" quand Derek l'attrapa par la peau du cou pour le traîner derrière lui.
- Je t'emmène au commissariat.
Derek prit la direction qu'il espérait être la bonne d'après ses souvenirs, tirant Stiles derrière lui. c'est qu'il avait beau faire partie de toutes les personnes aux habitudes mondaines du bar, il n'en restait pas moins peu habitué au centre ville et à l'activité de celui-ci. Ses deux sœurs et lui préféraient la périphérie de la ville pour son calme et sa discrétion. Néanmoins, Laura et Cora étaient bien plus à l'aise que lui au contact de l'air pollué et des relations de complaisance avec leurs fournisseurs. Lui, il était plus à l'aise en retrait, avec un ordinateur sur les cuisses et des relevés de comptes à dresser. Son image ne touchait son domaine que lors de grands événements où toute la famille était conviée. Alors il ne bougeait de son fauteuil que lorsque ses sœurs le lui réclamaient.
Est-ce qu'il se souvenait seulement de l'emplacement du commissariat ? En tout cas, il fit semblant que c'était le cas. L'ivrogne ne fit que rigoler à sa phrase et cela agaça encore plus -si c'était possible- le jeune Hale.
- Quoi ?! Pourquoi tu rigoles ? Tu veux mourir ?
- Promesses en l'air ! lui reprocha-t-il. En plus, si je vais là-bas je vais vite sortir. déclara le châtain en trébuchant sous la prise désagréable que Derek maintenait sur son col et sa capuche.
- Et pourquoi ça ? Tu crois que les policiers seront plus cléments que moi ?
Le tutoiement venait tout seul et la colère l'aidait à délier sa langue. Si ça avait été quelqu'un d'autre et si le garçon ne sentait pas l'humain triste à plein nez, Derek l'aurait probablement déjà empalé sur ses griffes ou sur un panneau de signalisation.
- Mon papa est shérif. dit Stiles en présentant des faux pistolets avec ses doigts. Il pointa le visage de son vis-à-vis en émettant des petits "Pioou pioou pan pan pan !".
- C'est encore pire ! gémit Derek en levant les yeux au ciel. Et comme Stiles ne l'écoutait déjà plus et qu'il tirait sur des ennemis imaginaires avec des pisto-doigts, le brun finit par lui attraper les poignets d'une seule main pour obtenir son attention. Comment le fils du shérif a-t-il put finir dans cet état ? Il ne t'as pas briefé sur les effets de l'alcool ou quoi ?
Ok, c'était des reproches nuls et la diva intérieure de Derek roulait des yeux avec un "Sérieusement Derek ?" appuyé.
Cette fois-ci, Stiles força Derek à s'arrêter, cessant tout bonnement de marcher. Le loup garou se tourna vers lui en levant un sourcil. L'autre était apparemment touché par ses dires. D'une certaine manière, le noiraud était content qu'au moins une de ses remontrances ait un peu atteint le cerveau de l'ivrogne. D'une autre, le visage déconfit du garçon le perturbait. Il n'aimait pas du tout le chagrin qui transparaissait sous ses paupières. Mais heureusement pour lui, son inconnu oublia bien vite son coup de blues et, prit d'une saute d'humeur, il attrapa les deux mains de Derek comme pour les joindre en une prière et il chuchota gravement :
- Je crève la dalle.
D'abord, Derek se mit à regarder bêtement les mains qui tenaient les siennes. Les doigts du garçons étaient froids, et les sentir sur sa peau lui laissa une sorte de sensation humide et électrisante. Il n'eu pas le temps d'interpréter le frisson qui avait secoué son épiderme qu'il levait déjà les yeux au ciel en s'apprêtant a grommeler qu'il n'avait pas la gueule d'une cantinière a ce qu'il sache et qu'ils feraient mieux de retrouver le commissariat. Il était en pleine tirade quand il se sentit emporté par le garçon.
D'abord surpris par sa force, il se demanda ensuite si renifler le jeune homme pourrait l'aider a confirmer l'hypothèse qu'il avait des vers. Alors quand il prit une grande inspiration, il sentit son cœur se soulever. Maintenant qu'il y faisait vraiment attention, sous couvert de l'odeur de l'alcool, le brun avait une fragrance tout a fait spéciale. Il ne savait pas comment la décrire. Quand les gens qu'il rencontrait avaient l'odeur de leur chien, de leur chat, de leur savon ou de l'aérosol de leurs toilettes, lui, il avait juste une effluve bien à lui, sans parasite. Il avait beau se concentrer, rien ne lui venait en tête, pas même un autre parfum, un fruit ou une couleur.
Juste, cette fragrance avait ce quelque chose d'unique et d'épuré qui donnait un sentiment de satisfaction à Derek. Celui-ci fronça les sourcils, se renfrogna -pas une seule odeur de vers, ça aurait dû le décevoir - il était pourtant sûr que le gamin avait des asticots quelque part pour remuer autant ! Derek voulu se dégager de l'emprise qu'avait le garçon sur sa manche. Mais celui-ci tenait bon et le loup garou avait peur de déchirer son costume de travail. Il avait beau rien n'y connaitre en trucs de luxe, ça n'en restait pas moins un costard qui valait une fortune. Peut-être pas pour lui, mais pour la compagnie HaleWillness®, c'était probable.
C'est à ce moment là que Derek sembla se rappeler qu'il avait vu l'autre homme avec une aiguille quand il s'était permit un rendez-vous improvisé avec son cul. Son cerveau fit enfin tilt a cette pensée et il se torsionna tant bien que mal pour observer les dégâts que le garçon avait probablement causé sur son pauvre vêtement. Mais tout ce qu'il vit, c'était un travail discret. S'il n'avait pas eu le même costume en une vingtaine d'exemplaires, il n'aurait jamais remarqué qu'une fente avait été rajoutée à l'arrière, de manière à mieux démarquer les deux parties du vêtement. D'un côté, Derek était en colère, parce que c'était sa veste putain, et ne lui avait même pas demandé son avis ! Mais d'un autre côté, le travail était nickel et même s'il se doutait que ce genre de pli ne devait pas demander beaucoup d'effort pour être réalisé, il ne pouvait s'empêcher de saluer le talent d'un mec bourré qui parvenait à se concentrer sur son travail même quand le tissus était sur un type qui désirait le tabasser.
Inconsciemment, sa colère s'était apaisée, et même si ce n'était pas un grand changement sur son visage, ses sourcils s'étaient défroncés. Il était plus curieux qu'énervé par le jeune homme. Derek se rendit alors compte qu'il ne connaissait pas son nom et qu'en plus de ça (et plus important, surtout), le gamin venait tout juste de se volatiliser.
Dans sa fuite, celui-ci avait tiré Derek au bord du parking. La route continuait en contre bas, mais a partir du moment ou on traversait un premier ravin, une bande d'asphalte et un bout d'herbe du bord de route, on arrivait en pleine forêt. Pendant une demi-seconde, Derek pensa a le laisser là, puisque l'autre avait l'air très heureux de vivre sa soirée d'homme torché et solitaire. Il allait tourner les talons quand il vit que le garçon se tenait là, les bras bien écartés au dessus de la pente, se prenant visiblement pour un avion. Le noiraud se ravisa et observa non sans crainte le gamin se mettre à courir en hurlant pour traverser ce qui le séparait de la forêt, droit vers la route. Derek fut soulagé de ne pas entendre de voitures aux alentours, parce que même avec une vitesse accentuée, il n'aurait pas pu le rattraper avant qu'il ne passe sous les roues d'un véhicule.
- Reviens ici, andouille !
La diva de Derek se fit un facepalm.
Le loup garou ne sut pas trop ce qui le motiva a suivre le jeune homme. Peut être un soucis de conscience qui lui disait que vu l'état d'ébriété avancée du garçon, il mourrait peut être dans son vomi a la fin de la nuit. Ou bien, c'était peut être parce qu'une voix silencieuse lui disait que le brun avait une odeur qui l'interpellait et qu'il voulait en connaitre plus sur une personne pareille. Et puis, qui sait, il pourrait peut-être noyer son ennui pour cette nuit, et espéra-t-il encore plus fort, peut-être même aller jusqu'à oublier son boulot ? Son loup intérieur avait des espoirs de quarantenaire avide de retraite et c'était un peu affligeant.
Derek fit quelques pas, dévala la pente avec prudence, constata que la route était barrée au bout de la rue (Stiles n'aurait donc pas pu se faire écraser en traversant, mais Derek le considérait quand même comme stupide) et il prit son élan en inspirant l'odeur des arbres pour poursuivre Stiles. Comme il s'en était douté, la fragrance d'un bout de nature aussi perdu dans la ville que celui-ci ne pouvait pas être la même que celle qu'il avait le matin, quand il sortait de chez lui et qu'il se retrouvait seul dans une marrée d'arbres et de buissons. Ici, les pots d'échappement et les égouts n'étaient pas totalement dissimulés par l'effluve du lierre et de l'écorce. A bien y réfléchir, en voyant une grue pointer au dessus du bosquet d'arbres, cette partie de "forêt" ne devait pas être bien épaisse et directement donner sur un chantier ou une partie de la ville en construction.
Il retrouva le brun une centaine de mètres plus loin, au bout du bras de forêt. Derek avait vu juste, l'îlot de nature s'arrêtait là. Il ne fallait pas trop en demander d'un centre ville. Stiles s'était arrêté a l'orée de la sortie. Comme tout à l'heure, la vision qu'eu Derek de la scène fut celle d'un adolescent, les bras écartés comme s'il volait, droit comme un -i, mais cette fois-ci, il avait le visage tourné vers lui. De là où il était, Derek remarqua qu'un air de musique semblait danser sur les lèvres de son vis-à-vis. Il leva un sourcil quand il vit un sourire espiègle se dessiner sur ce visage juvénile. Stiles leva bien haut le menton et plissa les yeux. Il le défiait. Et cela fit tiquer Derek. Quelque chose dans l'odeur du brun et dans l'ambiance était passé du simple stade du "héééé je suis bourrééééé" à " Allez, maintenant, joue avec moi".
Inconsciemment, tout le corps de Derek avait répondu a cet appel. Tout comme son vis a vis, ses jambes se fléchirent un peu, cherchant l'élasticité du mouvement. Il avait oublié a quel point il était jeune et idiot dans l'âme, et son loup retraité avait soudainement oublié toutes ses louanges a propos du calme, de la sérénité et du repos. Ouais, parce que là, Derek et son loup étaient d'accord : ils allaient se le faire. Il ne réalisa pas tout de suite qu'un miroir de l'expression du plus jeune commençait a apparaître sur son visage. Bon, évidement, en plus barbu, grognant, vieux et Derekien, mais un petit sourire mutin quand même. Son instinct de prédateur se réveilla aux rires plutôt graves et stupides qui s'échappaient de l'idiot non loin de lui. Derek avait envie de lui courir après, de répondre a son air de défi. Personne ne les regardait, de toute façon. Et c'était comme si le jeune homme avait fait exprès de choisir cet endroit, comme s'il savait que Derek n'aurait même pas imaginé lâcher prise dans un lieu où des gens vivaient. Là, maintenant, il pouvait -et voulait- bien faire l'imbécile avec l'ivrogne - et foi de Hale, il n'allait pas ignorer un défi, même tacite-. Il n'eut même pas besoin de le faire, parce que Stiles le provoqua directement :
- Allez, je t'attends. Le noiraud crut rêver quand il vit ces mots se mimer sur les lippes du gamin.
Quelque chose se brisa en lui. Et le grésillement qu'il entendait dans son oreille sembla redoubler, comme s'il se mettait a crépiter joyeusement.
Une voix dans sa tête lui murmurait que c'était exactement ce dont il avait besoin : de la distraction et peut être même de l'amusement. (Le calme qu'il voulait depuis le début n'avait plus rien d'attrayant, maintenant). Mais ça serait un peu trop facile, s'il laissait le loup faire. Derek emmura alors ses sens, attendit plusieurs longues secondes qui lui parurent interminables et il se mit enfin a sa poursuite. Le loup garou eut a peine le temps de faire un pas sur la bute où le garçon s'était arrêté que celui-ci se mit a fuir en baragouinant des trucs bizarres. Plusieurs fois, le loup se demanda s'il n'allait pas se vautrer de tout son long dans la rue -puisqu'il avait rejoint la civilisation en sautant de son promontoire- mais c'était comme si ses pas incertains étaient retenus par des fils invisibles qui l'empêchaient de tomber. Le noiraud laissa une longueur d'avance à sa proie avant d'accélérer l'allure, le cœur battant.
Derek entra en chasse.
La sixième fois qu'il se retrouva à terre dans les monts de sable du chantier, Stiles riait plus qu'il ne criait et haletait plus qu'il ne respirait. La sensation de son instinct en alerte et la brûlure du danger qui chatouillait sa nuque quand il courrait valait toutes les sensations du monde. La chaleur affolante du picotement de son don de détection n'avait jamais été aussi bienvenue que maintenant. C'était grisant. Derrière lui, l'homme qui s'était prit au jeu semblait encore plus surpris par lui-même que par Stiles. Quand il le rattrapait, le noiraud avait dans le regard cette fierté d'avoir atteint sa proie -soit en la faisant trébucher soit en l'attrapant par les épaules pour la jeter dans un des nombreux tas de sable- et en même temps, c'était comme si il se demandait ce qu'il faisait là. A chaque fin de course, le brun le voyait hésiter entre arrêter le jeu où il était, et la deuxième option : continuer.
Comme si le désir qui tentait Derek a chaque fois qu'il courait après le plus jeune n'avait pas lieu d'être. Comme si l'envie obsédante d'empêcher tous les mouvements du gamin et de le soumettre à sa prise était dangereuse et de plus en plus présente. Derek regardait ses mains se poser naturellement sur les hanches ou les épaules de sa proie, étranger à son propre corps. Il se pressait a Stiles sans comprendre, comme si c'était l'instinct qui commandait sans que ça n'atteigne vraiment le cerveau. Il était horrifié de son audace, parce qu'il n'avait pas échangé de contact humain plus longs qu'une bise depuis au moins 5 ans, et qu'il ne se reconnaissait pas dans ce comportement.
Mais le temps qu'il réfléchisse à ses gestes et qu'il fronce les sourcils, Stiles en profitait toujours pour recommencer de plus belle. Il se faufilait, se tortillait et s'échappait en trébuchant et bon dieu ce qu'il était nul a la fuite mais qu'est-ce qu'il trouvait ça drôle ! Quand son souffle laborieux se mélangeait a celui de l'inconnu, c'était comme une récompense. Une récompense qui réchauffait ses reins et qui le faisait fuir encore plus. Il avait envie de provoquer son poursuivant, de le faire craquer et de le pousser a bout. Son cœur avait des accélérations entre la peur réelle et l'anticipation, l'excitation. Au bout de deux chutes, il était devenu évident qu'il était avide des placages, de leur proximité soudaine, terrifiante et brutale qui lui faisait oublier un instant tout l'alcool qu'il avait dans le sang. Il riait.
Enfin... Scott lui avait déjà fait remarqué qu'une fois bourré, il était même capable de rire en se voyant dans un miroir (Ça avait de quoi faire flipper d'entendre son pote subitement éclater de rire a deux heures du matin, alors que tout le monde dormait et qu'il avait juste croisé son reflet en allant vomir). Alors ce n'était pas un exploit de le faire rire une fois ivre. Mais ça l'était de le détendre au point de rire alors qu'il était sûr que leur jeu était quelque part entre le flirt et la stupidité enfantine. Bordel, Stiles n'était jamais à l'aise quand il trouvait quelqu'un sexy, jamais à l'aise quand il sentait une aura de danger aussi étouffante et encore moins à l'aise quand l'origine de son attention grognait en le plaquant a divers endroits. En fait, cette situation relevait du miracle, de l'incongru.
Mais c'était comme si une corde se tendait entre eux, comme si quelque chose était déjà là pour les retenir près de l'autre. Et ils jouaient a loisir avec cette tension.
Ils étaient dans les gravats qui serviraient a construire la dernière maison au bout de la rue quand ils entendirent plus qu'ils ne virent un gardien passer dans la rue. Ils se turent, comme des gamins pris en faute. Le voisinage avait du avertir la police que des gens traînaient dans le chantier, et ce n'était pas très légal. Surtout que c'était le genre d'endroits propices à des échanges de drogues et des magouilles auxquelles ni Derek ni Stiles ne voulaient être mêlés. L'agent était armé d'une lampe torche -qui ressemblait a un véritable projecteur au vu de la lumière émise- et il marchait tranquillement sur le trottoir en construction, éclairant au hasard les touffes d'herbe, les gravats ou les véhicules de chantier laissés là.
- Y'a quelqu'un ? demanda l'homme au hasard, ayant probablement entendu la respiration chaotique de Stiles.
Pourquoi le noiraud n'était-il même pas essoufflé ? se demanda Stiles, et il l'avait probablement plus dit que pensé. C'était injuste !
- C'est bon ! Je sais que vous êtes là ! Sortez de votre cachette ! s'écria l'agent en éclairant la rue vers eux, sans pour autant exactement les éclairer. Pensant qu'il imaginait des voix, il se mit à grommeler dans son coin et commença a revenir sur ses pas.
L'homme d'affaire avec qui Stiles jouait depuis plus d'une demi-heure le plaqua sur le sable quand l'ivrogne se redressa pour interpeller l'agent qui braquait sa lampe dans tous les sens -encore une de ses idées stupides-. Derek plaça immédiatement une main sur la bouche du plus jeune et les aplatis tous les deux sur le sol quand la lumière sembla se diriger vers leur cachette. "Ferme la !" articula-t-il silencieusement, à deux doigts de faire les gros yeux. Le jeune homme eut un gloussement nerveux, l'adrénaline montant en flèche et il obéit a son assaillant, le cœur battant.
L'envie de braver l'interdit et de faire quelque chose d'insensé était persistante, obsédante. Et il avait d'assez mauvaises idées en tête pendant qu'il dévisageait l'homme qui le retenait. L'individu gardait la main sur ses lèvres, s'assurant que Stiles se taise. Et celui-ci était subitement conscient de son propre corps et de sa proximité avec l'autre. Notamment le fait que Derek le surplombait entièrement et que Stiles pouvait sentir la chaleur de son cou. Heureusement -peut-être- que son ivresse lui faisait tourner la tête et l'empêchait de mettre toutes ses envies bizarres et primitives a exécution.
Quand l'agent sembla en avoir marre de se cailler les miches en pleine nuit alors que les rues semblaient vides, il quitta complètement le quartier en chantier. Les deux hommes restèrent silencieux une longue minute, vigilants. Avant que Stiles ne décide que ça serait drôle de lui lécher la main. Derek la retira précipitamment avec un bruit indigné, comme si on l'avait brûlé. Cela fit rire Stiles qui roula sur le flanc jusqu'à ce qu'il ai redescendu tout le mont. Ils restèrent sans bouger, l'un dans l'herbe et l'autre dans le sable.
Resté sur la pente, Derek essuya ses doigts sans même avoir une once de sourcils froncés ou dégoûté. Il continuait juste a observer l'ivrogne, l'œil brillant et le sourire en coin. (Toujours Derekien, grognant et barbu mais un sourire quand même, et c'était beau !) Stiles était encore rouge sur le front et les joues, parce qu'il n'avait pas l'air doué à la course, et Derek le trouva à la fois adorable et stupide. L'adrénaline de leur escapade redescendait et maintenant, ils se sentaient juste bien, se reposant tranquillement dans un silence agréable. Ils se prélassèrent plusieurs minutes, Stiles tentant de figer les étoiles qui tournoyaient au dessus de lui et qui prouvaient qu'il était encore dans un état d'ébriété avancé. C'était comme si leur lien s'était distendu tranquillement et qu'un bonheur chaud les entouraient d'un voile.
Un gargouillement déchira le silence et Derek eu un gloussement moqueur quand il entendit l'autre homme marmonner des trucs sans queue ni tête, rouge de honte. Il le vit se lever et partir et cela parut bien moins drôle aux yeux du loup garou, sans qu'il ne comprenne vraiment pourquoi. Il n'aimait pas qu'il s'en aille.
- Où est-ce que tu vas ? demanda-t-il en se redressant pour suivre Stiles à la trace.
Apparemment, le jeu du chat était fini mais, au sourire que lui décocha le plus jeune en le voyant encore a ses côtés, Derek devina qu'il n'était pas au bout de sa peine. Peine qui n'avait pas l'air de le déranger, en fait. Ça faisait un moment qu'il ne s'était pas amusé comme ça et il aurait du mal a l'avouer, mais il se sentait détendu en présence de ce gars. Il appréciait sa compagnie, aussi bien distrayante auditivement, physiquement, que visuellement. La réalisation lui fit l'effet d'une gifle mais cela ne lui décrocha pas pour autant son plaisir. Derek desserra sa cravate et rattrapa le plus jeune.
Le loup garou sentit un bras lui donner des coups de coudes et le pousser un peu pour le provoquer. Il répondit a chaque bousculade par une autre, un peu plus forte, en veillant a ce que le plus jeune ne s'éloigne pas trop de lui. L'intéressé s'était mit a chantonner, déformant une musique de rock que Derek avait du mal a reconnaître entre les rires et la prononciation hasardeuse.
Il décida alors de remettre le sort de cette nuit entre les mains du jeune styliste, parce qu'inconsciemment, tout son être, en passant par son lui humain et son lui lupin (et même sa diva intérieure), s'accordaient a dire que l'adolescent était digne de confiance. En fait, il n'avait jamais été aussi a l'aise avec une personne étrangère de sa famille proche. Ca ressemblait vraiment à un alignement mystique des astres, a un cadeau de ses ancêtres ou de la pleine lune, voire même une faveur du Nemeton qui lui était accordée et Derek ne savait pas quoi faire d'autre que d'accepter tout ce qui arrivait pleinement et entièrement.
Hello les bébés fantômes ! Encore Merci de m'avoir accompagnée sur ce nouveau chapitre
(je crois voir réussi a tenir le délai pour l'instant, incredible !) oui, c'était a lire avec un accent anglais pourrave.
Alors ? Qu'est-ce que vous pensez de Derek ? Non mais parce que je sais que je l'ai un peu remanié à ma sauce
(je lui ait fait dire 'andouille', parce que c'était mon rêêêêve) mais j'espère qu'il est pas trrrooop OOC ...
Theel394 :
Hey hey hey Reverse !
Derek Hale re-rentre dans la place ! Je suis contente d'avoir réussi a faire rêver sur le costard (parce que bon, c'est pas vraiment le truc le plus facile a faire de décrire des vêtements, mais c'est assez marrant)
Hehehe merci beaucoup (j'espère que diva-Derek te fera rire aussi mdrr)
S'il y aura des loups-garous ? Je pense que tu as ta réponse avec ce chapitre ! ;p
Merci beaucoup pour tes reviews
Des bécots !
Ptitanonymous :
Hé oui, sur les devants de la scène, comme j'avais promis ! La question maintenant c'est comment ça a attéri entre ses mains ;))) Merci pour ta motivation et ton inspiration !
Akane :
Hello !
Merci beaucoup hehehe j'ai adoré écrire cette scène !
Wow tu dois vraiment en avoir beaucoup lu alors ! Hé, du coup j'suis un peu fière de moi si j'ai réussi a sortir un truc qui n'as pas encore été fait :D
Et voilà, avec ce chapitre je te dévoile une partie de ce que tu voulais savoir (la suite au prochain épisode mdrr)
Magnifique ? wow mirci bocou ;-;
lesaccrosdelamerceri :
Hey ! Effectivement c'est le moment pour moi de rappeler que l'alcool c'est mauvais pour la santé et que ca résout pas les problèmes (et encore moins les licenciement. Quoique... :p)
Merci beaucoup pour ton commentaire et ton enthousiasme ! Bonne lecture a toi hehehe
Et pour mes exams, j'espère avoir réussi a peu près (je pense pas avoir fait de grosse boulette en tout cas...) mais j'aurais les résultats courant juin !
