Après avoir vu le making of de la série il y a peu, je me suis décidée à peaufiner ce chapitre et finalement le poster.
J'espère que vous passerez un bon moment si vous le lisez :)
Un moment opportun
Chapitre 3
Il ne s'était jamais interrogé sur son orientation sexuelle.
Avant la guerre, son intérêt avait été naturellement porté vers la gente féminine et il n'avait été que trop heureux de faire de son mieux pour plaire aux dames. Et ces dernières lui avait rarement refusé une danse, ou davantage s'il s'avérait qu'ils se plaisaient mutuellement.
Se reconstruire après avoir passé tant d'années dans la peau du Soldat de l'Hiver avait été difficile. Il était pourtant aujourd'hui à nouveau Bucky Barnes, celui avait grandit à Brooklyn, le soldat endurci à la guerre... et aussi l'homme qui avait survécu au formatage d'HYDRA et s'en était finalement libéré. Lorsqu'il avait refait surface, réellement refait surface, et que la crainte de perdre le contrôle de ses actes avait finalement disparue après son séjour au Wakanda, il avait compris et accepté que d'autres épreuves difficiles l'attendaient. Et ce, probablement, jusqu'à la fin de ses jours. Les victimes du Soldat de l'Hiver étaient trop nombreuses. Les souvenirs de ces années où il n'était qu'un outil, le bras usé pour abattre l'ennemi, étaient trop nombreux.
En conséquence, il avait emprunté la seule voie qu'il pouvait suivre et s'était efforcé d'avancer, d'essayer d'expier ses pêchés, et de se glisser dans un quotidien que l'on pouvait appeler une vie. Et cela, tout autant parce que c'était ce dont il avait besoin que pour faire honneur à Steve, Steve qui lui manquait terriblement, et pour qui Bucky était si heureux de savoir qu'il avait finalement eu droit au bonheur qu'il méritait. Steve qui n'avait cessé de croire en lui.
Ayo et Shuri avaient été des pierres angulaires dans son parcours, avant même qu'il ne commence à former des liens nouveaux, même si rares, même si éphémères, même si intrinsèquement liés à ses regrets. Avec elles, la moitié du chemin avait déjà été fait, elles savaient ce qu'il avait fait durant toutes ces années. Et, pourtant, avec générosité, elles l'avaient aidé et soutenu. Il leur en était profondément reconnaissant et il se considérait comme leur ami... et, comme l'être humain pas si bon que ça qu'il était, il avait réussi en quelque sorte à mordre la main qui l'avait nourri pour atteindre ses objectifs. Il ne regrettait pas son choix, parce qu'il continuait de penser que cela avait été la meilleure solution, mais il avait perdu leur confiance et leur amitié et il en était peiné. Il aurait peut-être mieux valu pour elles qu'elles ne ne lui offrent pas leur amitié. Peut-être...
En y pensant à posteriori, peut-être qu'au final, il aurait pu trouver une méthode pour faire les choses différemment, trouver une façon d'utiliser Zemo sans passer par son évasion...
Non, il avait fait ce qu'il fallait. Et même s'il aurait pu mieux faire les choses, il ne le savait que trop bien, il ne pouvait pas changer le passé. Il avançait.
Mais ces quelques mois entre le moment où il les avait quittées et celui où John Walker avait récupéré le bouclier ? Ils avaient été rythmés par des tâtonnements. Une certaine volonté de se faire sa place dans ce monde. Au milieu de ces gens. Discuter naturellement avec quelqu'un, échanger un sourire, dévoiler l'homme qu'il était tout en gardant les parts les plus plus sombres de lui-même à l'abri des regards, comme par son gant entraînant des questions silencieuses auxquelles il ne répondait jamais vraiment...
L'envie de construire davantage que cela n'avait jamais vraiment été là. Son esprit avait été bien plus focalisé sur le besoin de réparer ses fautes, d'apaiser sa culpabilité.
Il n'avait même pas été capable d'aller au bout d'un rendez-vous galant sans être hanté par la souffrance qu'il avait provoqué. Le joli visage de Leah et son attitude confiante ne l'avaient pas laissé indifférent, pourtant. Il était certes un peu rouillé mais il aurait pu se laisser entraîner dans la danse par une belle dame... Toutefois, son esprit avait été ailleurs et son corps ne lui avait pas fait ressentir ce manque familier qui le taraudait parfois dans sa jeunesse. Cela ne s'établissait simplement pas dans sa liste de priorité. Il était tout à fait fonctionnel mais, au final, peu pressé. Il n'avait pas vraiment songé à la question, ne s'était pas réellement demandé combien de temps il mettrait avant de s'impliquer à nouveau dans ce genre de relation et, en dehors peut-être de cette part de son ego qui lui soufflait qu'il pourrait quand même y mettre un peu plus d'ardeur que ça, il ne s'était pas inquiété de ne pas donner plus d'importance que cela à cette occasion manquée.
Bucky avait donc été jusqu'à ce point, si non pas parfaitement satisfait car son passé le suivrait inévitablement dans toute relation qu'il approfondirait, au moins consistant avec le cours qu'il donnait à sa vie sentimentale et son absence de vie sexuelle. C'était à portée de sa main, il n'en voulait pas réellement pour l'instant et, lorsqu'il se déciderait, il continuerait sur un chemin similaire à celui qu'il avait emprunté avant la guerre. Il savait qu'il pouvait être charmant quand il le voulait et que ce siècle, comme le précédent, ne manquait pas de femmes bien qui pourraient elles aussi le charmer.
Et maintenant il y avait Sam.
Sam était un homme bien.
Intègre et honnête.
Un équipier.
Un sacré combattant.
Une personne à qui il en avait voulu parce qu'il ne comprenait pas son choix et dont il avait pourtant toujours gardé le numéro de contact sur son téléphone. Ce qu'il avait eu de plus proche d'un ami dans ce pays après la disparition de Steve. A qui il avait commencé à penser comme son meilleur ami après l'affaire Morgenthau. Qui le comprenait parfois un peu trop bien. Qui l'avait accueilli à bras ouvert dans sa famille. Qui l'avait soutenu et qui avait donné de la valeur à son opinion. A qui il accordait maintenant une confiance comme à nul autre.
Il était attaché à Sam. Bien sûr qu'il était attaché à lui. Sam pouvait être frustrant, et même agir comme un vrai idiot à l'occasion et, pourtant, d'une certaine façon, c'était naturel et facile d'interagir avec lui. Il n'avait pas besoin de compartimenter avec cet homme, de s'efforcer de ne montrer que le meilleur de lui-même, il l'encourageait même à exprimer tout ce qu'il avait sur le coeur et il était moins réticent à le faire avec lui qu'avec n'importe qui d'autre. Etre à ses côtés était confortable, il se sentait à l'aise en sa présence. Dans un sens, cela rendait toute cette situation encore plus délicate et perturbante. Il avait dû faire face aux avances d'un homme pour la toute première fois et Bucky n'avait considéré cette déclaration en ces termes qu'après coup.
Sur le moment, la pensée d'entamer une quelconque relation de ce genre avec qui que ce soit l'avait pris au dépourvu et il avait réalisé qu'il avait peut-être volontairement choisi de ne pas prêter davantage d'attention à cette partie de sa vie. Peut-être parce qu'il ne se sentait plus apte à offrir ce que l'on attendrait de lui. Peut-être parce qu'il se demandait s'il parviendrait à accorder plus qu'une confiance superficielle à la personne en question. Peut-être que la perspective de se dévoiler complètement et de subir un probable rejet était plus insurmontable dans son esprit qu'il ne l'avait pensé.
Bucky avait résolument repoussé ces pensées puis s'était demandé s'il ne s'était pas trompé sur le sens de leur amitié, si le fait qu'il ait été attiré de cette façon dans l'orbite de l'autre homme ne résultait pas d'une tentative de séduction qu'il n'aurait pas comprise pour ce qu'elle était. Il avait été soulagé que ce ne soit pas le cas, qu'il n'y avait pas eu une mauvaise interprétation de sa part jusqu'à cette soirée, que leur relation maintenant solide malgré des passages houleux ne soit pas factice, parce qu'elle était réellement importante pour lui.
Et ce n'était qu'après cela que le genre de Sam avait pris de l'importance. Qu'il ne l'ait considéré que comme une problématique presque secondaire l'avait laissé perplexe durant un long moment après qu'il ait quitté la maison des Wilson.
Autant qu'il pouvait s'en souvenir, il n'avait jamais eu ce genre d'attirance. Même à présent, il n'était pas totalement certain de savoir pourquoi il s'était laissé tenter. Il n'était pas impossible que ce soit en lien avec l'attitude posée et ouverte de Sam. A l'écouter, tout cela semblait tellement facile et sans contrainte. Se laisser simplement guider par ses envies. Plus qu'écouter ses mots - plus proches, un couple, du long terme, il avait assimilé leur sens plus profond. Et il s'était surpris à réellement l'envisager. Sous tous ses aspects. La pointe d'excitation qu'il en avait ressenti l'avait laissé désarçonné.
Marchant sans but dans l'obscurité, il s'était dit qu'il confondait forcément les choses. Qu'il ne considérait pas Sam comme davantage qu'un ami. Un ami très précieux, qu'il ne voulait vraiment pas perdre, mais pas un amant potentiel. Cette petite étincelle d'attirance pouvait s'expliquer. Il n'avait partagé le lit de personne depuis des années et il commençait finalement à ressentir un manque. Ou il essayait inconsciemment de faire plaisir à Sam en adoptant son point de vue. Ou il craignait que leur amitié ne survive pas à son refus.
Il avait songé à une myriade de justifications pour expliquer l'intérêt soudain qu'il ressentait, pour rendre moins attirante cette possibilité d'avenir que Sam lui avait présenté. C'était ce que lui recommandait son bon sens, ce que lui dictait son passé et ses expériences antérieures. Pourtant, après des heures de réflexions, il n'avait pas su se débarrasser de ses doutes, ou de l'image persistante du sourire chaleureux de Sam.
Alors, il avait décidé de chasser le premier doute. Peut-être, au final, pas le plus important mais celui qui aurait pu trop facilement servir d'excuse. Il était allé le voir dans sa chambre, se demandant encore lui-même s'il irait jusqu'au bout de son idée. Puis il avait agi d'une manière impulsive et il n'aurait pas dû s'étonner qu'une fois le premier pas franchi il en veuille davantage. L'expérience avait été étrange par certains de ses aspects. La dureté de son corps due à sa musculature développée, les poils doux et piquants contre son visage, l'odeur définitivement masculine. Mais l'excitation ressentie avait été tout à fait familière. Et intense.
Bucky observait le soleil se lever sur le porche de la maison et il essayait de se faire à l'idée qu'il désirait Sam Wilson. Qu'il désirait probablement tout ce qu'il voudrait lui offrir.
Il n'avait pas envie d'embrasser n'importe quelle dame qui croiserait son chemin ou de relâcher une tension qu'il avait jusque là ignoré. Il voulait son ami à ses côtés, être son partenaire pour affronter leurs adversaires quand l'adrénaline pompait dans ses veines, vivre dans cet hypothétique appartement et le voir chaque matin au réveil, s'amuser de ses remarques humoristiques et être témoin jour après jour de sa compassion qui semblait sans limite, lui redonner courage dans ses moments de faiblesse.
Répondre à ses sourires.
Embrasser à nouveau ses lèvres.
Sentir son corps chaud contre le sien.
Oui, tout ça... Tout ça le tentait beaucoup.
oOo
- Tu es debout de bonne heure.
- Je ne suis pas le seul.
Bucky était appuyé contre la façade de la maison, une main dans la poche de son jeans et il observait l'homme qui venait de franchir la porte pour s'installer contre la balustrade du porche, lui faisant face.
Nonchalant, détendu, souriant. Patient, également, parce qu'il laissait Bucky le détailler du regard sans broncher. Il continuait à songer à la veille, aux possibilités, à ce que l'avoir à nouveau en face de lui lui donnait envie de faire, à ce qui serait inconvenant ou non, au fait que tout ceci était familier tout en restant un territoire inconnu pour eux deux.
La voix de Sam s'éleva à nouveau et il regretta pour la première fois depuis longtemps ce qu'il lui annonça.
- On a une mission.
- Ah. Urgent ?
Il avait laissé son téléphone à l'intérieur.
- Nan, ils doivent encore réunir des informations. Ils nous attendent dans deux jours à New-York.
Son soulagement dut pouvoir se lire sur son visage car son compagnon hocha brièvement la tête et n'en dit pas davantage sur le sujet. Bucky savait très bien qu'ils n'attendraient pas plus de quelques heures avant de plier bagages, parce que toute mission de leur ressort était susceptible de voir sa planification changer très rapidement, mais il n'aurait pas aimé devoir partir sur l'instant. Pas dans ces circonstances.
- Et de ton côté, il y a une raison pour laquelle tu es levé aux aurores ?
Puis, avant qu'il ne puisse penser à formuler une réponse, et avec un sourire en coin, Sam poursuivit.
- Peut-être un sujet particulier qui te trottait un peu trop en tête.
- Oh, rien d'important, fit-il en posant les yeux sur l'horizon et en sentant ses propres lèvres s'étirer.
Son compagnon laissa échapper un léger son qui laissait bien comprendre qu'il n'y croyait pas le moins du monde.
- Tu sais vraiment comment t'y prendre pour faire qu'un homme se sente apprécié, toi, déclara-t-il sur un ton dépité qui sonnait complètement faux.
Il croisa le regard de Sam et ne le lâcha pas.
Comment s'y prendre. Avait-il vraiment besoin de s'interroger tant que ça sur le sujet? C'était une question d'instinct. Cela avait toujours été une question d'instinct, avec n'importe quelle partenaire. Il avait retrouvé confiance en son instinct. Cela avait demandé du temps mais c'était bien le cas aujourd'hui. Et puis, Sam n'était-il pas celui qui lui avait rappelé, en des termes claires, qu'il devait vivre pour lui-même et non en fonction des attentes des autres, faire ses propres choix ?
Bucky abandonna le mur, vint se poster en face de Sam et posa sa main de métal sur sa hanche, le tirant un peu vers lui. Il vit son regard s'assombrir, sentit sa tension première disparaître.
Ça lui plaisait vraiment.
La clarté du jour jouant sur sa peau.
Sa proximité.
Sa chaleur.
Ou la façon dont Sam se pencha vers lui pour, après la plus brève des hésitations, lui voler un baiser assuré.
Si son corps et son esprit s'accordaient pour se dire qu'il se trouvait au bon endroit, avec la bonne personne et au bon moment, il n'allait pas les combattre. Il était Bucky Barnes, l'enfant de Brooklyn, le soldat, l'homme qui avait surmonté sa programmation et avait survécu à ceux s'étant proclamé ses maîtres. Si c'était ce qu'ils désiraient tous les deux à présent, il n'allait pas fuir en se cachant derrière des prétextes auxquels il ne croyait qu'à moitié lui-même. En étant tout à fait honnête avec lui-même, il ne trouvait pas de raison réellement valable pour se refuser, pour leur refuser d'être Bucky Barnes et Sam Wilson, amis, partenaires et... plus si affinités.
L'avenir promettait d'être intéressant, pensa Bucky avec un peu de fébrilité et un sentiment suspicieusement proche de la joie et de la satisfaction grandissant dans sa poitrine.
Fin
L'ensemble me paraît finalement un peu plus complet avec cette dernière partie et je vais laisser cette histoire se terminer à ce point.
Il faudra sans doute un peu de temps avant que je refasse une nouvelle incursion dans ce fandom... j'ai lu le roman "Loki, les racines du mal" sorti cette semaine et j'ai une méchante envie de lire beaucoup de fanfictions avec notre demi-dieu favori x)
En attendant, merci pour votre lecture et l'éventuel commentaire que vous me laisserez :D
