Nessus -l'homme qu'Hadès voulait qu'elle fidélise- glissa la main le long de sa cuisse.
Megara se dégagea rapidement.
La conversation avait tourné au vinaigre lorsqu'il avait décidé de faire d'elle sa fille de joie et voilà que la brune se retrouvait coincée entre un mur froid et sa carrure.
Elle n'en pâtit pas et le défia du regard.
Elle était morte de peur mais elle n'allait pas lui laisser le plaisir de la voir ainsi.
Il se colla contre elle et elle hurla en se débattant du mieux qu'elle pouvait.
Elle remonta son genoux d'un coup sec pour le frapper dans les bijoux de famille et il se plia en deux de douleur.
La brune en profita pour s'échapper à grande foulée.
En jetant un œil à son agresseur pour être sûre qu'il ne la suivait pas, elle s'emplâtra dans le torse de quelqu'un.
C'est pas vrai ça, je viens de me débarrasser d'un mec et en voilà déjà un autre.
Hercules baissa les yeux sur elle, surpris, et sans bouger, regarda dans la direction d'où elle venait.
Il vu Nessus -fou de rage- se relever et foncer au galop vers eux.
Sans réfléchir, il se plaça devant Meg et arrêta le colosse dans son élan d'un coup de poing.
Devant l'air ahuri du type en face de lui, il comprit la situation et cela le mis dans une rage folle.
-"Tu comptais faire quoi là ? Lui demanda-t-il en fronçant les sourcils.
-Dégage de là poil de carotte, elle est à moi !" Beugla le blessé en se tenant le nez. Il saignait.
Hercules glissa les clefs de sa voiture dans la paume de Megara pour qu'elle aille se mettre à l'abri et s'avança vers son adversaire.
La brune, comprenant que la situation allait dégénérer, s'éloigna à pas de loup dans la pénombre.
Nessus bondit sur lui mais fut arrêté net par le poing du rouquin qui alla se ficher sous ses côtes.
Il s'effondra par terre en se tenant le ventre.
En douze ans de karaté, Hercules savait où frapper pour faire mal.
Dans le diaphragme, en l'occurrence.
Il s'accroupit à côté de lui.
-"Respecte les femmes." Lui cracha-t-il avant de se relever -non sans lui donner un coup de pied- et de partir.
Une brise fraîche joua dans ses mèches rousses.
Il marcha un moment dans la fraîcheur de la nuit, sans réellement savoir où il allait, un peu anesthésié par ce qui venait de se passer.
Au détour d'une ruelle, il pensa soudain à ses clés de voiture.
-"Oh merde."
Il regarda autour de lui pour essayer de repérer la jeune femme à qui il les avait confié.
La rue était déserte.
Il entreprit alors de retourner à sa voiture et accéléra le pas en rebroussant chemin.
Se rappelait-t-il au moins où il l'avait garé ?
Un sifflement derrière lui le surprit.
Megara, éclairée par des néons bleus, faisait tournoyer lesdites clés autour de son index.
Hercules eut un rictus de soulagement et secoua la tête.
Il s'approcha doucement avec un sourire mignon, et il reconnut la danseuse dont il n'avait pu détourner le regard de tout le repas.
Il n'avait guère réussi à l'identifier tout à l'heure à cause de la pénombre ambiante.
-"Je n'ai pas exactement eu l'occasion de me présenter alors voilà, je m'appelle Megara. Annonça cette dernière en lui tendant le trousseau de clés.
Hercules le prit délicatement et le rangea dans sa poche.
Pourquoi il me regarde comme ça le jeunot ?
-Hmmm… et toi tu es…? Tenta la brune devant le manque de réactivité du jeune homme.
Il sembla se réveiller d'un coup.
-Euh… Oui ! Hercules, je suis hum... Hercules. Enchanté.
C'est qu'il était éloquent le gamin.
-De même".
Elle baissa les yeux.
-"Merci pour le coup de main, j'aurais pu m'en sortir seule mais lui donner une bonne leçon n'aurait pas été dans mes cordes j'en ai peur.
-Pas la peine de me remercier mademoiselle, je ne faisais que ce qui était juste… Vous, hum… Vous allez bien ?
-Hey, ne me vouvoie pas, j'ai l'impression d'avoir des rides sinon.
-Oui oui, bien sûr, désolé. Mais ça va mieux ?
-Deux trois écorchures mais aucun point de suture donc je suppose que oui. Sourit-elle.
-Tu veux qu'on aille porter plainte ? Le commissariat n'est pas loin je peux t'accompagner si tu veux".
Elle fut attendrie par sa proposition mais elle ne se voyait pas batailler au poste de police tout de suite. Elle n'était même pas sûre de vouloir porter plainte, cela semblait… beaucoup de problèmes ajoutés à ceux qu'elle avait déjà.
-"C'est gentil mais je pense que je vais rentrer, il se fait tard et j'aimerais me reposer.
Le rouquin sembla embarrassé un instant, comme s'il cherchait un moyen de passer un peu plus de temps avec elle sans avoir l'impression de forcer les choses.
-Je peux te déposer chez toi ?" Demanda-t-il en faisant tinter les clés dans sa poche.
Megara souffla par le nez avec un rictus moqueur. Elle voyait clair dans son jeu. Elle connaissait les hommes. La magie en avait disparu.
Elle s'apprêtait à refuser lorsqu'elle se rappela que son métro était fermé et franchement, rien que le fait de penser à faire un détour de six stations la démoralisait.
-"D'accord Supermâle. Où est ton bolide ?"
Un immense sourire illumina le visage d'Hercules tandis qu'il l'invita à le suivre vers sa Ferrari blanche à bandes bleues.
Elle ignorait que cette marque de voiture pouvait arborer autre chose que sa traditionnelle couleur rouge et jeta un coup d'œil plus poussé au personnage. Il était en costard, il était venu au Styx, il possédait un modèle unique de Ferrari. Bien peigné, des dents alignées au cordeau, une bonne bouille rasée au millimètre et des sourcils épilés ? Elle avait devant elle un phénomène. Un très riche phénomène même.
La portière de la voiture s'ouvrit automatiquement vers le ciel et Megara haussa un sourcil inquisiteur.
Elle se glissa à l'intérieur, l'odeur du neuf lui chatouillant les sinus.
Elle attacha sa ceinture et caressa du bout des doigts le cuir tanné des sièges. Hercules remarqua son geste et avoua du tac au tac :
-"C'est du faux."
Meg sourit.
-"C'est pas exactement ce qu'on est censé dire pour impressionner le peuple tu sais ?"
Il rougit et mit le contact. Les aiguilles des cadrans vrombirent.
-"Oui mais je suis contre l'exploitation animale alors hum…
-T'inquiète pas Supermâle, je suis d'accord avec toi."
Les portières se fermèrent automatiquement et ils prirent la route. Megara cala sa tête contre la vitre de la voiture et regarda les lumières défiler en espérant trouver un instant de paix.
Ils n'avaient pas fait deux virages que le téléphone d'Hercules sonna soudain, attirant son attention.
Il lui chuchota du bout des lèvres ;
-Ça t'ennuie si je réponds ?
Bon sang mon grand mais tu es dans ta voiture !
Elle fit non de la tête, amusée par sa délicatesse. Cette dernière n'avait pas l'air forcée, ce qui l'étonna, peut-être était-ce simplement son tempérament ?
Ce fut une femme à l'autre bout du fil, celle qui l'avait laissé tombé pour ce soir ? Elle en doutait, elle avait l'air âgée. Peut-être était-il du genre cougar ? Ah il l'avait appelé maman. Toutes ses interrogations furent balayées. Elle parlait d'une maison en banlieue. Non, d'une villa. Une invasion présumée de ratons laveurs ? Elle voulait qu'il aille voir. Maintenant. Il acquiesça gentiment comme le fils à maman qu'elle se doutait qu'il était et raccrocha.
Il se mordit la lèvre inférieure, une mimique anxieuse acquise depuis l'enfance.
-"Je te dépose et ensuite je vais aller jeter un œil à cette invasion. La rassura-t-il.
-Je viens."
Il haussa les sourcils.
-"Tu n'es pas obligée, je peux te déposer tu sais, je m'y suis engagé.
-Je viens avec toi. Je ne vais quand même pas te laisser seul face à une armada de ratons laveurs. C'est que ça mord ces bêtes-là." Sourit-elle.
Elle aurait préféré rentrer mais une force invisible la poussait à se laisser porter par les évènements. Et puis elle aimait les longs trajets de nuit.
Elle resserra son blouson sur elle et soupira de satisfaction, fermant les yeux comme s'endormirait une enfant.
Hercules la regarda un instant. Admirant la pâleur de sa nuque, les boucles de ses cheveux bruns, son nez fin et ses longs cils.
Elle avait l'air apaisée. Cette impression le rassura sans qu'il ne sache vraiment pourquoi.
Il passa alors la troisième d'un geste rapide et s'engagea sur l'autoroute.
