Doutes
La fin du mois de février approchait, j'avais pris mes repères, les noms des élèves rentraient de plus en plus. J'adorais mon travail plus encore chaque jour si c'était possible, c'était très stimulant.
Mes cours de la matinée étaient terminés, je n'avais pas de cours cet après-midi. Je me dirigeais donc vers la Grande Salle pour prendre mon déjeuner, des pas rapides derrière moi me firent me retourner, je pensais peut-être à un élève qui voudrait me poser une question, cela arrivait souvent. Je souris quand je vis que ce n'était que Drago, il me rattrapa rapidement, ses grandes jambes étaient pratiques. On se dirigea ensuite ensemble vers notre lieu de restauration.
« Tu n'as pas cours non plus cet après-midi il me semble ?
- Non non je n'ai pas cours,
- Ça te dirait de venir à la bibliothèque avec moi ? Je dois faire des recherches sur une potion, et ça devient vite ennuyant quand on est seul.
- Avec plaisir » C'est ce que j'aimais avec Drago, il allait droit au but, il ne cherchait pas midi à quatorze heures. Et surtout, il aimait les livres autant que moi. Il aimait le savoir.
Après un rapide déjeuner, nous nous dirigeâmes vers la bibliothèque. Celle-ci était totalement vide, les élèves profitaient des derniers flocons de neige. On prit place vers le fond de la bibliothèque, à une table un petit peu en retrait des autres, puis nous nous mîmes à travailler. Parfois, il lançait une plaisanterie sur mes sourcils froncés, sur mes doigts qui s'agitaient nerveusement dans mes cheveux, ou sur l'épaisseur de mon ouvrage. Je souriais, depuis notre septième année nous étions comme cela, à nous chamailler gentiment.
Quand le soleil entama sa chute, je rangeais mon ouvrage et mes affaires, le blond en fit de même. Nous bavardions joyeusement dans les couloirs, tout en croisant parfois un ou deux élèves trempés d'avoir fait une bataille de boules de neige. Je souriais en les voyant, j'étais envieuse de leur bonne humeur et de leur train de vie. Eux, n'avaient pas à faire face à un mari taciturne et absent moralement parlant. Ma journée avait été très agréable, et je n'avais pas vraiment envie de rentrer à la maison pour finir en pleurs sous le jet brûlant de ma douche.
« Drago, je vais aller à la volière
- Oui d'accord, besoin de compagnie ?
- J'en serais heureuse »
Arrivés en haut de la volière, je griffonnais rapidement sur un bout de papier que je ne rentrerais pas le soir car j'avais des copies à corriger. Je déposais le petit mot à un joli hibou gris qui s'envola aussitôt, je le regardais voleter à travers les petites perles glacées qui tombaient sur le sol. Je me détournais, je découvris un Drago nonchalamment appuyé contre l'entrée de la volière.
Il me fixait, tout en m'adressant son éternel sourire en coin, il me laissa passer, tel un gentleman. Le blond avait d'ailleurs toujours été comme cela, sauf peut-être pendant nos premières années d'école. Mais je me souviens parfaitement comment le Drago de quinze ans me laissait passer devant lui avant d'entrer en cours. Il l'avait toujours fait de manière à ce que personne ne s'en aperçoive, mais moi, j'avais remarqué, et cela m'avait intrigué à l'époque. Désormais je savais qu'il n'avait jamais été foncièrement mauvais. Cet homme adorable était juste tombé dans la mauvaise famille.
Le blond et moi nous dirigeâmes joyeusement vers la Grande Salle pour prendre notre dîner, dans un petit coin de ma tête je pensais à Ronald, seul à la maison. Mais je repoussais la culpabilité qui menaçait de sortir, hors de question que je cède, je n'avais pas envie de faire face à sa mauvaise humeur constante.
Pendant le dîner j'observais Drago à la dérobée, son sourire et sa bonne humeur étaient contagieux, quand il me jeta un regard rapide je me plongeais dans des souvenirs que je laissais de côté depuis bien trop longtemps.
Un baiser volé entre deux cours, une étreinte réconfortante après un cauchemar, un bras autour de ma taille durant la nuit, une première fois magique. Une séparation douloureuse.
« Hermione ? Tout va bien ?
- Euh oui, pourquoi ?
- Je te parle depuis deux minutes et tu n'as pas l'air de m'écouter.
- Oh, je suis désolée j'étais dans mes pensées.
- J'avais remarqué. » Je levais les yeux à sa dernière remarque, il ne m'en voulait pas, il avait les sourcils froncés et un léger sourire sur ses lèvres roses. Je lui demandais donc de répéter ce qu'il me disait, j'avais besoin de me concentrer sur autre chose.
Quand le repas fut terminé on se sépara chacun de notre côté pour nous reposer.
La journée de la veille m'avait fait énormément de bien, je n'avais pas pleuré une seule fois à cause de ma vie pitoyable et de mon mariage bancal. Le soir je rentrais chez moi, c'était le week-end, je m'imaginais que Ron allait être content de me voir, étant donné que nous ne nous étions pas vu la veille. Mais non. Quand il rentra du ministère, avec plusieurs heures de retard, la seule chose que j'eus droit c'est un baiser sur le front, la porte de la salle de bain qui claque, et l'eau de la douche qui commence à couler. Cette fois ci je ne m'apitoyais pas sur mon sort, je rangeais la table que j'avais mise préalablement, je fis disparaitre le repas qui mijotais et j'allais me poser devant la télévision. J'en avais marre.
J'entendis vaguement la porte de la salle de bain s'ouvrir et le pas traînant de mon mari se diriger vers la cuisine, je fis semblant de trouver le documentaire animalier très intéressant, pourtant j'aurais bien été incapable de dire de quoi il parlait, quand les pas de mon mari se dirigèrent jusqu'au salon où je me trouvais.
« Hermione ? On ne mange pas ? » Je fermais brièvement les yeux, il était dans mon dos donc il ne pouvait pas me voir. Mais la colère que j'essayais de refouler ne voulait pas se calmer, alors je laissais exploser mes sentiments. Marre de n'être bonne qu'à faire le ménage et à manger.
« Tiens ? Tu me parles ?! » Je criais en me levant, je vis le rouquin reculer d'un pas tout en fronçant les sourcils, contrarié.
« Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Ce que je veux dire c'est que tu ne m'adresses jamais la parole ! Tu rentres, tu m'embrasses tu prends ta douche tu manges et tu regardes la télé. C'est tout ! Tu ne me demandes jamais comment s'est passé ma journée ! Ce que j'aimerais faire demain ! Rien ! Jamais.
- Et alors ?
- Comment ça et alors ?
- Mes parents ont toujours été comme ça et ils sont les plus heureux du monde.
- Je ne suis pas ta mère Ronald. » Sur ces mots je transplanais. J'étais trop énervée pour rester ici. Tout cela était absurde. Comment pouvait-il croire que ses parents ne se parlaient jamais. Molly et Arthur était un couple incroyablement fort, mais ce n'était certainement pas grâce à une non-communication. Je soupirais en atterrissant à Pré-au-Lard. Il devait être 21h, les rues étaient vides.
Je me dirigeais donc rapidement vers le château, je ne savais pas où aller d'autre, et ici j'avais mes appartements, et quelques affaires, cela suffirait. Je ne m'attendais pas à ce que Ron comprenne ce que je ressentais, il avait toujours été un peu gauche avec les sentiments, mais tout de même je m'étais attendu à mieux. Il était peut-être là le problème, je m'attendais toujours à mieux de sa part, mais Ron restait Ron. Ronald n'était pas lui... Je resserrais les bras autour de ma poitrine, j'étais partie sans ma cape et j'étais frigorifiée. Je pressais donc le pas, je n'avais certainement pas envie de chopper une pneumonie maintenant.
Je soufflais de bonheur en atteignant les grilles du château, je me dépêchais encore plus dans le parc de l'école. La seule chose à laquelle je pensais c'était un bon livre au coin du feu. C'était sûrement le meilleur remède à ma détresse. Je sentais le froid mordre mes joues, je passais donc mes doigts gelés dessus, je remarquais qu'elles étaient mouillées, je ne m'étais même pas aperçu que je pleurais à chaudes larmes. Je priais donc pour ne rencontrer personne sur mon chemin, quand je me glissais à l'intérieur du château tout était silencieux. Je fis de mon mieux pour ne faire aucun bruit, ne voulant réveiller personne. Mais d'instinct je saisis ma baguette, on était jamais trop prudent.
« Eh toi, qu'est-ce que tu fais en dehors de ton dortoir ? » Je fermais les yeux, merde, heureusement j'avais reconnu la voix traînante de Drago, je préférais que ce soit lui qui me voit dans cet état plutôt que la directrice.
« Eh je te parle, oh Hermione. » Il s'était exclamé en se rapprochant de moi, je fis demi-tour pour lui faire face. Même dans la pénombre ses yeux gris ressortaient follement.
« Merde, tout va bien ? » Il se rapprocha de moi, je le vis porter lentement une de ses mains, comme pour me laisser le temps de le stopper, à mon visage. Le blond effleura du bout de son pouce, les quelques larmes restantes, traitresses de mon malheur. Je pressais les paupières ses doigts étaient brûlants contre ma peau glacée, et son contact me mettait du baume au coeur.
« Merlin, tu es glacée, viens. » Il attrapa une de mes mains et me tira vers lui, je me laissais faire alors qu'il m'emmenait à travers les couloirs sombres. Il murmura un mot de passe et me laissa passer à travers un tableau. J'eus le temps de voir que la peinture représentait un homme de dos, qui regardait une femme qui lui faisait dos elle aussi. Je fronçais les sourcils, mais j'avais trop froid pour essayer de comprendre.
« Installe toi près du feu, j'arrive. » Je l'écoutais et m'assis dans un gros canapé de velours noir, face à la cheminée. Un gros feu crépitait, sûrement les elfes. Je ne pris pas le temps de détailler l'appartement ce soir là. Drago, revint en portant une épaisse couverture dans ses bras, il la déposa délicatement autour de mes épaules et s'assit à mes côtés.
« Tu veux boire quelque chose ?
- Non merci. » Ma voix était cassée, sûrement du fait que j'ai crié sur mon mari, et peut-être à cause du froid également. Je gardais les yeux obstinément rivés sur le feu, mais je pouvais voir du coin de l'oeil le blond me fixer attentivement les sourcils froncés. Il ne parlerait pas en premier, je le connaissais trop bien, il allait me laisser parler de ce que j'avais si je le souhaitais, ou aborder un autre sujet. Mais jamais il ne me forcerait à parler.
« Je me suis engueulé avec Ron. » Je vis la main qui était posée sur sa cuisse se crisper, il était sûrement difficile de parler de mon mari.
« Pourquoi cela ? » Drago essayait de maîtriser sa voix, cela s'entendait, mais je fis du mieux que je pouvais pour en faire abstraction.
« Je ne supporte pas notre relation, il ne me parle jamais... Il passe tout son temps libre avec Harry, et même si je l'adore j'aimerais passer du temps seule avec mon mari... Mais lui et moi on est tellement différents...
- Je vois. » Sa voix était dure, et je savais pourquoi. Il s'en voulait. Il s'en voulait de m'avoir poussée dans les bras de Ronald. Drago avait tellement changé, lui d'ordinaire si froid, avait réussi à développer la compétence "comprendre Hermione Granger". Le blond qui autrefois était renfermé et distant était désormais capable de ressentir certaines choses, depuis notre septième année.
« C'est moi qui t'ai poussé vers lui, et maintenant tu es malheureuse. » Il se leva brusquement et se posta devant la cheminée, je regardais son dos pendant quelques minutes, ses épaules se soulevaient rapidement, signe qu'il était énervé. Je levais mes fesses du canapé tout en laissant s'échouer la couverture sur le sol dans un froissement de tissus discret. Prudemment je m'approchais du serpentard, je passais mes bras autour de son ventre alors qu'il était toujours dos à moi. Je posais mon front contre son dos et fermais les yeux.
« Ne t'en veux pas Drago, tu m'as poussé vers lui mais je t'ai laissé faire.
- Si j'avais su...
- Drago, arrête... » Ses mains qui s'étaient posées sur mes bras se retirèrent, il se détacha de mon étreinte et je rouvris les yeux; il se retourna face à moi. Drago était impressionnant, tellement plus grand que moi. Je laissais mes yeux plonger dans les siens, alors qu'il se rapprochait de moi, ses bras s'accrochèrent à ma taille et me tirèrent près de son corps. Je plongeais ma tête dans son cou alors qu'il posait la sienne sur le sommet de ma tête.
Pressée contre lui, comme cela n'avait pas été le cas depuis longtemps, je laissais mes narines humer son odeur si caractéristique qui me plaisait tant.
Je laissais mes souvenirs divaguer, là, les yeux fermés, dans les bras de Drago.
« Hermione, je vais te détruire, va avec lui, il te traitera mieux que moi.
- Drago, je ne peux pas...
- Je suis trop abîmé par cette guerre, trop meurtri, tu as été ma lumière durant toute cette année, mais je ne veux pas être tes ténèbres. Il faut que je remette de l'ordre dans ma vie après la mort de mes parents... Va avec lui... Je t'ai fait du mal, je ne peux pas me le pardonner, et tu ne devrais pas non plus... Va avec lui, il te traitera mieux que moi, sois heureuse mon amour, pour moi.
- Mais c'est toi que j'aime... » Les larmes avaient commencé à couler sur mes joues, l'homme que j'aimais me quittait. Mais au fond je comprenais ses raisons, lui qui n'avait toujours connu que la douleur, la souffrance, la noirceur. Il ne voulait pas me blesser, il cherchait mon bonheur sans comprendre que mon bonheur était avec lui. Debout là, tous les deux, au milieu de notre salle commune, nous qui étions préfets-en-chef, il m'avait embrassé une dernière fois .C'était une baiser rempli de larmes, de douleur, d'amour, de promesses. Tous nos baisers précédents, nos rires, nos peurs, s'ancraient dans mon esprit. Et au fond de moi j'espérais, j'espérais qu'un jour il revienne me chercher. Lui, mon unique amour.
Plus tard, Ronald était venu me chercher à l'école, là devant tout le monde il m'avait demandé en mariage, d'un coup d'oeil vers mon ange blond, j'avais accepté.
Je laissais mes yeux se rouvrir calmement, Drago me pressait toujours contre lui.
« Pourquoi est-ce que tu pleures ? » Je passais une main sur ma joue, elle était humide de larmes.
« Je pense à certaines choses. » Il m'éloigna de lui, je fermais les yeux essayant de retenir son parfum dans mon esprit, de peur que ce soit la dernière fois; mais Drago ne m'éloigna pas beaucoup de son corps, quelques centimètres seulement. Seulement pour porter ses mains à mes joues et essuyer mes larmes. Il me fixait, je me sentis rougir sous son regard, jamais personne ne m'avait regardé comme lui le faisait depuis toujours.
« Tu es magnifique. » Jamais Ronald ne m'avait dit que j'étais belle, en soi la beauté extérieure ne valait rien, mais c'était toujours plaisant de savoir que quelqu'un nous trouvait jolie.
« Je viens de pleurer.
- Tes yeux sont plus intenses quand tu pleures, le bout de ton nez rougit quand tu pleures ça te donne l'air adorable, quand tu pleures tu mords tes lèvres et elle deviennent encore plus rouges que d'habitude, tu es magnifique quand tu pleures. Tu es magnifique quand tu souris également, tes yeux s'illuminent, et ton sourire est contagieux.
- Drago...
- Tu es parfaite... » J'étais sûre d'être rouge comme un coquelicot, alors je me dépêchais de me caler dans les bras de Drago et cacher mon visage dans son cou; je le sentis rigoler. Je le frappais donc à l'arrière de la tête pour le faire taire. En réponse il pinça ma taille, il savait que j'étais chatouilleuse. Je pouffais dans son cou.
« Hermione ? » Je détachais mon visage de sa peau, espérant que mes rougeurs se soient atténuées, je le regardais dans les yeux, puis lentement, avec prudence, il baissa son visage vers moi, je retins mon souffle. La lenteur de ses mouvements me permettait de me sauver si je le voulais, mais je savais que je ne voulais rien d'autre que lui en ce moment même.
Alors je le laissais faire, et quand ses lèvres touchèrent les miennes de la plus douce des manières, je retrouvais mon chez moi. Un chez moi que j'avais quitté depuis bien trop longtemps à mon goût. C'est comme si j'étais à ma place.
Voilà, j'espère que ça vous aura plu !
- Silver-Slytherin△⃒⃘
