Notes d'Auteur : Mes salutations ! Vous l'avez peut-être remarqué, cet ensemble de texte est consigné sous le genre de la « tragédie », cela indique donc qu'il a une progression vers un acmé inévitable... En fait, je n'aime pas les « bad end », donc la fatalité se retrouve dans ce chapitre ; dans ce nouveau chapitre, ce sont des fouilles archéologiques qui vont attester de l'existence de l'Eden.


« Je vous rappelle qu'on est là sous ordre. Si on se la joue pilleur de tombe, ou si quelqu'un trouve ça drôle de garder un truc de côté, on est certainement cuit pour le reste. »

Varliu nous dévisageait tous les deux. On sait très bien qu'il prend ça au sérieux, rien que sa défense gauche attestaient de son passé

« Oui, chef. »

Il nous jaugeait, son regard noir nous sondait avec agressivité : ça ne serait pas la première fois que l'on garde quand même un petit objet, ou un rien qui traîne. Enfin... C'est pour ça qu'il engage des Zumi. Un Tuskar a l'avantage du physique, et dans ce métier, on a certainement pas celui du terrain. On sait qu'il est sérieux, et on soutenait le regard pour le lui transmettre.

Quand il détendait son expression, il donna un coup du manche de son sabre dans le mur vert du temple

« Ça, c'est pas un cristal résistant. Mais si on fait partie des premières expéditions dans ce genre de vestige, c'est parce qu'on vient de se rendre compte que c'est plein de magie, et que le seul moyen de passer, c'est de dévitaliser le cristal. On appelle ça de l'Ezur, comme le groupe de continents avant la Pangée.

Il tapait de plus en plus fort, et le cristal pliait comme un métal chaud, s'étendant sur les bords,e t laissant finalement son centre s'entr'ouvrir

« À ce que je sache, on sait pas récupérer la magie. J'ai juste désolidarisé ce point avec l'une de vos inventions, on pourra entrer, sortir et refermer. »

Ah... C'est pour ça qu'il avait besoin d'un outil de séparation de mana...

Le mur s'ouvrait suffisamment pour que l'on voit à travers les rayons de lumière, la poussière et les couleurs ambrées de la chambre... Un peu plus et il était à notre taille. Encore un peu, et c'était suffisamment grand pour Varliu. Toujours plus, et on était prêt à faire entrer et sortir du matériel.

Une fois le détecteur de piège mis en place, nous avions quartier d'heure libre pour observer les lieux sans toucher quoi que ce soit.

Je restais à observer les rais de lumière qui provenaient du plafond... Nous sommes pourtant dans le fond d'une montagne... Le ne pense pas que ce temple serait resté tant oublié si des brèches menaient directement en son centre...

« Dites, c'est quoi ça ? »

Armand me faisait signe. J'allais le voir, et Varliu me suivait.

… Voilà pourquoi on ne doit pas jouer avec la luminosité... J'étais assommé par le retour dans l'ambiance ambrée du temple... Armand avait trouvé un large écrou dans le sol. Un genre de racine en sortait... Varliu grommelait

« Un écrou, ça peut cacher un mécanisme encore actif. Ramène le détecteur de piège ici. »

Alors que je me réhabituais à la luminosité des lieux, je voyais les branches bizarres de la racine... C'est pas seulement du bois. J'avais l'impression de voir des circuits, ou des veines. Les racines ressemblaient à une main, et l'écrou à une épaule. Je voyais plus loin ressortir des pics de la même matière, un genre de couronne... Une dalle encore à côté était différente ; bombée, métallique... Un poitrail ? En me penchant, je voyais que ces ensembles n'adhéraient pas au sol, qu'ils avaient été posés ici...

Armand revenait avec son détecteur de pièges. Je me relevais

Je voyais des amphores en céramique entreposées un peu plus haut, et des reflets d'ombre semblaient s'animer dessus... J'avais l'impression de voir des alpagas courir sur place, se dirigeant vers l'autre côté des amphores...

« Pas l'air d'y avoir le moindre mécanisme, pas même magique. »

Je retournais mes yeux vers le membre sur le sol, et mon impression de tout à l'heure se calma. Je ne voyais plus la forme d'un bras... Et la plaque bombée ne l'était finalement pas tellement... Les alpagas avaient disparu de la surface des amphores. Je voyais qu'en fait, ils étaient gravés dessus... La lumière m'a peut-être joué un tour...

« Sarah, Varliu m'interpellait, t'as pas dormi de la nuit, tu vas bien ? »

En retournant le visage vers lui, je revoyais les pics de bois, puis j'apercevais une lueur rouge à peine visible dans un de ses creux en bois. Deux. Des yeux ? Directement, je remarquais au plafond un genre de brouillard, mélangé à la poussière des lieux, qui allait dans un sens précis...

« Sarah ?

— Ça va. J'ai juste l'impression de voir des choses...

— On n'est pas n'importe où, ajoutait Armand, qu'est-ce que tu as cru voir ? On peut pas négliger une magie qu'on n'aurait pas remarquée. »

Je leur expliquais ce que j'ai cru voir, et que je pensais que ça venait de la lumière. Après avoir répété le même processus sans effets supplémentaires, ils m'ont demandé de continuer à inspecter les lieux, mais de prévenir si quelque chose arrivait.

Le flot continu de lumière blanche au plafond m'interpellait... Je suivais sa trajectoire.

Il va jusqu'à une partie clairement surélevée, qui s'étend sur les rebords de la pièce... Une estrade ? Une autre pièce prise dans l'éboulement, peut-être ?

« As-tu des réponses à mes questions ? »

Je sursautais, mon pied se décalant dans un rai de lumière. Je fermais les yeux par réflexe, la lumière était particulièrement intense.

En les rouvrant, toutes les hallucinations que j'ai pu voir se manifestèrent de nouveau. J'avais l'impression de voir des étincelles du bras en bois. Toujours plus forte. Les alpagas courraient sur les murs, d'un point à un autre. Je criais. Le flot pâle était devenu un puissant rayon bleu se dirigeant vers le fond de la pièce. Plusieurs claquements forts s'entendaient. Des flambeaux. Tout le long de la pièce. J'attrapais une bombe fumigène dans mon sac. La voix d'à l'instant se répétait, plus distinctement. Mes jambes refusaient de bouger. Une voix de femme, forte, mais pourtant basse, rauque. Comme si elle sortait du cœur du temple. Je ne voyais pas les autres. Les rais de lumière s'abattaient là où je croyais qu'ils étaient il y a un instant.

Ma vision s'adaptait finalement à la lumière des lieux. Je voyais les sculptures alentours prendre vie. Les figures se multipliaient. Il y avait de toutes les races ; des Drakais portant des sceptres, des Torturrans équipés de cestes, ce grand Ursun à la masse et au bouclier. Je voyais certains des Anuran souffler dans le clairon de leur guitare depuis les estrades latérales. Un groupe de cinq races se dirigeant vers l'escalier, et une figure humaine, plus grande, brillante au milieu. Les cinq personnes se prosternèrent devant elle, et je voyais une lame lui sortir de la main.

Avant que je ne puisse distinctement comprendre cette silhouette, un grand nombre de ces races disparaissait. Les Anurans et les Ogres au clairon restèrent sur leur estrade, lentement disparaissant dans la lumière. Je voyais comme le spectre de Varliu et Armand apparaître à nouveau, mais seulement l'ébauche de leur corps. Les flammes des flambeaux descendaient vers eux

« Bougez d'ici ! »

Ils ne m'entendaient pas. Il faut que je les secoue !

En courant vers eux, je voyais clairement les yeux rouges du casque à épines de bois. Son poitrail brillant émettait un bruit aigu, et ma boule de fumée me tombait des mains.

En toussant à cause de la poussière qui s'est mêlée à la fumée, j'entendais un gros bruit. La peur me fit reculer un peu. Le bras s'abattait sur le sol, et j'entendais comme un engrenage puissant tourner, tourner...

Avant même de m'en rendre compte, quelque chose a tapé mon épaule, et mon regard l'esquiva quand je me retournais ; j'entendais déjà un cri étouffé venant du brouillard.

Le brouillard se dissipait.

Un homme aux longs cheveux d'argent et portant une lourde armure blanche se tenait au milieu de la pièce. En levant la main, un dragon apparut directement à ses côtés, simplement en prenant un teint de plus en plus vif, physique...

« À l'Eden... »

La bouche de l'humain ne bougeait pas. Les voix que j'entendais étaient multiples, successives, puis cacophoniques. Elles s'étaient finalement unies.

Énormément de texte défila sous mes pieds. Très vite... Je voyais seulement, en spectatrice défiler des noms comme « Eden », « Gardien Éternel », ou bien encore « Fléau » et « Babel »... Je voyais des noms apparaître de partout. « Aven », ou encore « Forêt de Delphes »... Cette Forêt, c'est là où nous avons trouvé ce vestige ! Mais que signifie ce « Cœur en Exil » ?

Avant que je ne me rende compte de quoi que ce soit, j'avais les oreilles qui sifflaient. Mon crâne vibrait, tandis que j'entendais trop de choses, trop de voix, une cacophonie absolue me transperçait le crâne

« Réveille-toi ! »

La voix de femme mit un terme à la cacophonie.

« Réveille-toi ! »

À l'unisson de toutes les voix.

« Réveille-toi, Sarah ! »

… Armand !

« Sarah ! »

Varliu ! Ma vision se brouillait d'un coup. Et je voyais tout gris, tout rouge, tout noir...

Varliu et Armand me tenaient les bras et les épaules. J'avais mal.

« Elle se calme. Tu nous entends ? »

Je secouais mes bras pour répondre à Armand. Il détendait sa poigne... Il est si fort que ça ?

« Qu'ai-je fait... »

Je me sentais à bout de souffle. Varliu me tenait toujours les épaules, et voyait que j'étais profondément appuyée sur lui...

« Tu as besoin de te reposer, insistait le Tuskar, On va sortir deux secondes... C'est peut-être pas bon de rester ici... »

Il regardait derrière son épaule, et s'assurait que je pouvais marcher...

« Il ne faut pas prendre quoi que ce soit, dis-je en manquant de forces...

— On t'écoute, on t'écoute.

— C'est un vestige de l'Ezur. Le Temple de Delphes. Une époque de guerre. Il y a eu du sang versé ici. Une autre époque encore avant. Des soldats géants. Un dragon. Torreyace. Un savan fou, monsieur Pross... Des hordes d'Ursun mauvais... Des pouvoirs sacrés, des démons.

— Grande sœur. Tu dois te reposer. On t'écoutera. On va refermer l'endroit. »

Oui... Ça ne fait aucun sens...

En sortant de la cavité, je voyais un flambeau bleu briller devant nous... Suis-je la seule à le voir ?...

« Je vais tout t'expliquer. N'aie pas peur... »

… Et la seule à l'entendre...