Disclam : Je ne possède pas Good Omens
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Chapitre un : L'autre procès
Un an était passé trop vite, il semblait à Rampa que c'était à peine hier, sur ce banc de Saint Jame's Park, que l'Ange et lui s'étaient déclarés officiellement de leurs côtés. Le répit avait été de courte durée. Ils mentiraient s'ils devaient dire qu'ils ne s'attendaient pas à un retour de flamme après leurs petits numéros lors des exécutions ratées.
Mais l'année avait été merveilleuse. Ils l'avaient passé presque tous les jours ensembles, sous prétexte initialement de surveiller les arrières de l'autre. Mais très vite, ils avaient laissé tomber l'excuse, parce qu'ils n'avaient plus besoin de justifier quoi que ce soit à qui que ce soit.
Si Rampa voulait apporter une plante pour la garder à l'œil, sous prétexte qu'elle était dissidente et que, par sympathie pour l'Ange, il lui donnait une dernière chance avant le broyeur, Aziraphale se contentait de déplacer une pile de livre près d'une fenêtre pour lui faire de la place. Et peu importait qu'une plante soit devenue dix.
Lorsqu'un soir, Rampa avait fini par dormir là, sur le canapé, la tête poser sur l'épaule de l'Ange, parce qu'initialement, c'était juste pour suivre ce qu'Aziraphale lui lisait à haute voix, l'Ange s'était contenté de miraculer une couverture pour son ami, et n'avait pas bougé de la nuit, ni arrêter sa lecture d'ailleurs.
L'apothéose de cette douce année avait eu lieu quelques jours plus tôt, lorsqu'ils s'étaient rendu à Tadfield pour célébrer le premier anniversaire de la non-Apocalypse avec tous ceux qui en avaient été les acteurs, Adam, avec Toutou bien entendu, et son groupe, Anathème et Newton, maintenant fiancés, Madame Tracy et le Sergent Shadwell qui formaient un couple des plus détonnant.
La réunion avait été heureuse, plus encore lorsqu'après quelques verres d'un excellent champagne français qu'ils avaient ramené, Aziraphale avec simplement glissé sa main dans celle de Rampa, sans le regarder, continuant de discuté lecture avec la sorcière, comme si s'était la chose la plus naturelle à faire.
Il ne s'était rien passé de plus, parce qu'ils n'avaient pour le moment pas besoins de plus, et qu'ils se donnaient le temps. Après tout, qu'étaient-ce que quelques jours lorsqu'on avait plus de 6000 ans ? Ils n'en avaient pas parlé non plus, les mots étaient inutiles entres eux, ils se côtoyaient depuis si longtemps…
Depuis lors, Rampa s'était sentit flotter, enrobé dans un cocon de joie, de tendresse et de douceur, de tous ces sentiments qui irradiaient littéralement de son Ange et que lui-même ressentait sans plus s'en cacher. Ils étaient libres, ils étaient ensembles, et ils seraient heureux.
Il l'avait cru. Vraiment.
Jusqu'à ce soir.
L'attaque avait été violente et rapide. Même s'ils s'y attendaient, ils n'avaient aucune chance de s'en échapper. Ce n'était pas un coté qui attaquait, mais les deux. Anges et Démons s'étaient alliés pour les maitriser rapidement, efficacement.
Et maintenant ils étaient là, agenouillés au centre des ruines d'une église, dans la banlieue lointaine de Londres, un terrain « neutre », les mains liés, un collier de restriction autour du cou pour les empêcher d'user de leurs pouvoirs et bâillonnés.
Cette fois-ci, Belzébuth n'avait pas commis l'erreur d'un procès publique. Il n'y avait que lui, Dagon et Hastur. Le prince de l'Enfer se tenait assis sur ce qui avait été autrefois l'autel, tournant le dos au Christ en croix de pierre, dont le visage rongé par la pluie n'était plus qu'un bloc de pierre poli.
A ses côtés, debout, le dos droit comme toujours, dans un costume impeccable aux accents violets, Gabriel irradiait de contentement. Près de lui, Michael et Sandalphon, eux-mêmes parfaitement apprêtés, attendaient, le visage sans expression mais eux aussi visiblement heureux.
- - Démon Rampant, Serpent d'Eden, et Principauté Aziraphale, Gardien de la porte Orientale, annonça Gabriel d'une voix claire, vibrante de joie, vous êtes ici présent pour être jugé pour haute trahison envers l'Enfer et le Ciel.
- - Le premier procès ayant été un échec, reprit Belzébuth et Rampa s'agita, agacé, parce qu'il était assez bien placé pour savoir que son Ange n'avait pas été jugé du tout mais son ex-patron l'ignora, un second se tiendra ce soir.
- - N'étant plus une créature du Ciel, expliqua Gabriel en fixant ses yeux violet dans le regard clair de l'Ange, tu seras jugé par l'Enfer.
- - Comme toi, Rampant, le sera par le Ciel.
Le Serpent, bien qu'effrayé à l'idée d'un nouveau jugement –allaient-ils essayer encore une fois de le noyer dans l'eau bénite ? Imaginer son Ange au milieu d'un brasier infernal lui était physiquement douloureux - ne put retenir sa colère et s'il n'était pas enchaîner et bâillonner, il aurait sauté à la gorge de Belzébuth, Prince de l'Enfer ou non. Ses canines le démangeaient mais le collier de métal ciselé autour de son cou le brûlait, l'empêchant de se transformer.
A ses côtés, aussi calme que lui était agité, Aziraphale baissa simplement la tête, en signe d'acceptation –de soumission ?- aux paroles de son ancien patron. C'était étrange, même si le concept même de violence dégoutait son ami, il avait été créé guerrier, pourquoi ne combattait-il pas ?
Peut-être parce que leurs situation était désespéré ? Songea Rampa, en se laissant retombé à genoux, épuisé par ses agitations veines.
- - Principauté Aziraphale, Gardien de la Porte Orientale, moi, Belzébuth, Prince de l'Enfer et porteur de la parole de mon Maitre, Lucifer, je te condamne à tous les supplices de l'Enfer jusqu'à ta désintégration ou ma lassitude.
En entendant la sentence, Rampa s'était une nouvelle fois débattu contre ses chaines, l'idée même qu'un Démon pose un doigt sur son Ange pour le torturer lui donnait la nausée, il ferait tout pour l'empêcher, quitte à mourir étouffer par le collier qui lui brûlait la gorge.
Mais Aziraphale, qui s'était tendu en entendant Belzébuth parlé, se contenta de lever les yeux au ciel, sans un regard pour Gabriel et les Archanges. Le toit détruit de l'église laissait apparaitre une seule étoile, pâle et triste, si lointaine. Pensait-il à Alpha du Centaure ? Se demanda Rampa. Peut-être auraient-ils dû fuir là-bas ?
- - Serpent d'Eden, Démon Rampant, reprit Gabriel d'une voix forte, attirant son attention.
Allait-il lui aussi le condamné à la torture aux mains des Anges ? Est-ce que les Anges, qui étaient censés être les gentils de l'histoire, utilisaient-ils même la torture ? Mais même si c'était le cas, il s'en fichait, parce que lui ne comptait pas. Qu'ils le condamnent comme ils voulaient, tout ce qui comptait, s'était Aziraphale, son Ange. Il ne méritait pas l'Enfer, l'idée de lui là-bas le révoltait, l'idée qu'il soit séparé de lui était insoutenable.
La colère laissait place à la détresse, parce qu'il ne pouvait rien faire pour arrêter tout ça, parce qu'il savait, intellectuellement, que ce jour arriverait, qu'ils finiraient par payer d'avoir osé s'opposer à leurs anciens patron, mais comment pouvait-il l'accepter ? Pourquoi si tôt ? Pourquoi maintenant que de nouvelles perspectives s'ouvraient à eux ? S'étaient injuste, tellement injuste !
Perdu dans sa panique, Rampa ne remarqua pas le silence de Gabriel, qui continuait de le fixé, le regard perdu. L'Archange sursauta en sentant la main de Michael se poser sur son épaule pour le faire réagir, et il masqua son geste par un raclement de gorge, réajustant inutilement sa cravate.
- - Serpent d'Eden, Démon Rampant, moi, l'Archange Gabriel, Messager du Ciel, je te condamne à regarder. Sandalphon et Michael tournèrent la tête vers lui, visiblement surprit. Aziraphale sera torturé sous tes yeux. Aucun mal ne te sera fait, mais tu verras tout ce qui lui sera fait. Tu resteras avec lui jusqu'à la fin.
Rampa s'était figé en entendant sa déclaration, choqué. Au loin, un coup de tonnerre raisonna alors qu'au-dessus d'eux, un nuage voilait l'unique étoile visible.
A suivre...
