Chapitre trois : Marque des Ténèbres et Déclaration de Guerre


Une fois la nuit tombée et les souvenirs achetés, le groupe composé des Weasley, Harry, Hermione et Envy se dirigea vers les bois éclairés par des lanternes vertes et rouges étincelantes. Ils entendaient autour d'eux des cris, des rires, des bribes de chansons s'élevant de la foule. L'atmosphère enfiévrée contagia même Envy, qui se prêta au jeu, un chapeau irlandais sur la tête. Il suivit le mouvement jusqu'aux tribunes officielles, bousculé par la foule survoltée. Lorsqu'ils furent arrivés à destination, Envy et Harry se faufilèrent jusqu'au premier rang. Le spectacle qu'ils découvrirent défiait l'imagination.

– Waouh.

Même Envy, qui avait vu beaucoup de choses dans sa vie, resta sans voix. Cent mille sorcières et sorciers prenaient place sur les sièges s'élevant en gradins tout autour du terrain ovale. Sa première pensée, qui le frappa contre son gré, fut que ce stade contenait assez d'ingrédients pour créer une petite pierre philosophale. Il s'en voulut aussitôt de cette comparaison malheureuse. La force de l'habitude.

- C'est incroyable ! s'exclama Ron qui utilisait ses Multiplettes sur la foule. Regarde ça !

Durant le quart d'heure suivant, la loge se remplit peu à peu autour d'eux. Mr Weasley ne cessait de serrer la main de gens occupant à l'évidence de hautes fonctions dans le monde de la sorcellerie. Envy tenta d'en mémoriser les visages et les noms, au cas où il aurait besoin un jour de prendre une de leur apparence. Le ministre de la Magie en personne, Cornélius Fudge, arriva dans la loge et salua Harry avec chaleur, à la jalousie manifeste de Percy. Envy se força à la discrétion face à ce sorcier avec qui ses rapports laissaient place à l'amélioration. Il se demandait bien quelle réaction il aurait en voyant Edward arriver.

Si son ami revenait un jour, pensa Envy après une demi-heure d'attente dans la loge. Edward s'était séparé d'eux pour dîner avec les Lovegood comme promis et depuis, plus personne n'avait de nouvelles. Hermione s'inquiétait qu'il puisse s'être perdu.

- Ah, voici Lucius ! s'exclama Fudge avec joie.

Un rictus mauvais au coin de la bouche, Envy suivit la famille Malefoy du regard alors qu'elle se glissait le long du deuxième rang en direction de trois chaises vides, derrière Mr Weasley.

– Ah, Fudge, apostropha Lucius Malefoy en tendant la main au ministre de la Magie. Comment allez-vous ? Je crois que vous ne connaissez pas mon épouse, Narcissa ? Ni notre fils, Drago ?

– Mes hommages, madame, salua Fudge avec un sourire en s'inclinant devant Mrs Malefoy. Vous connaissez Arthur Weasley, j'imagine ?

Il y eut un moment de tension. Les deux chefs de famille échangèrent un regard peu amical. Les yeux gris de Malefoy se posèrent sur Weasley puis balayèrent le premier rang.

- Seigneur ! dit-il à voix basse. Qu'avez-vous donc vendu pour obtenir des places dans la tribune officielle ? Votre maison n'aurait certainement pas suffi à payer le prix des billets ?

– En réalité, intervint Envy en se plaçant de façon inconsciente en barrage entre Weasley et lui. C'est grâce à votre généreux don de l'an dernier. Vous vous en souvenez, j'imagine ? Drago en tout cas ne doit pas l'avoir oublié, lui.

Chacun des Malefoy changea de couleur en un instant. Narcissa devint blême et sa grimace désagréable s'accentua, Drago prit une teinte rouge brique en une fraction de seconde et détourna le regard de honte et de colère alors que Lucius finissait vert de rage.

- Désolé pour le retard ! s'exclama une voix familière et essoufflée. Une prune m'a explosé dans les mains, c'était affreux, j'ai dû aller me changer avant de ve-

Edward s'interrompit en voyant les Malefoy qui affichaient des expressions furieuses. Il évalua la situation en deux secondes et comprit la confrontation. Il sourit d'un air angélique.

– Bonsoir messieurs et madame Malefoy. Quel plaisir. Je n'aurais jamais pensé vous retrouver dans des tribunes aussi en hauteur. Drago ne doit pas se sentir très à l'aise, si ?

Les jeunes Weasley ne tinrent pas plus longtemps et ricanèrent. Malefoy senior fit un pas en avant pour se retrouver face à Edward, presque pointe de chaussure contre pointe de chaussure. Pour le regarder dans les yeux, Edward devait lever la tête, mais ça n'enlevait rien à son regard féroce et plein de défi. Lucius se pencha vers lui, ses yeux plus froids que les glaciers de Briggs.

– Je te conseillerais d'apprendre où est ta place. Sang de bourbe.

– Une menace ? Amusant..., souffla Edward à son tour pour qu'il soit le seul à entendre. Si j'étais vous, j'éviterais d'exprimer ainsi mes loyautés en public.

Le visage du Mangemort affichait la plus grande impassibilité alors qu'il reculait en le dédaignant pour s'éloigner avec sa famille et prendre leurs places. Edward ne le lâcha pas du regard pendant un long moment, puis Envy arriva dans son champ de vision.

– Pour reprendre l'expression favorite de Ron, c'était brillant.

Il avait les yeux étincelants de malice et son sourire allait d'une oreille à l'autre. Apparemment, humilier les Malefoy lui plaisait toujours autant. Ils partageaient ce passe-temps, dans ce cas.

– Ce n'était pas très malin, intervint Mr Weasley en s'approchant, l'air nerveux en lançant de fréquents coups d'œil à Malefoy. Énerver Lucius Malefoy est bien l'une des dernières choses intelligentes à faire.

– On s'en accommodera, répondit Edward.

Comprenant qu'il n'aurait pas le dernier mot, Arthur secoua la tête avec défaitisme et retourna s'asseoir tandis que les enfants venaient féliciter Edward et Envy pour avoir protégé l'honneur de leur famille. S'ils n'avaient pas encore convaincu les frères de Ron auparavant, maintenant c'était fait.

Alors que le match allait bientôt commencer, Edward s'avança jusqu'à la dernière place libre à côté de Harry, mais en se faisant, il bouscula quelqu'un. Ne l'ayant pas vu, il s'excusa en se retournant, pour découvrir... du vide. Perplexe, il observa l'elfe de maison effrayée qui le fixait de ses grands yeux humides en plaquant ses petites mains contre sa bouche ouverte. De quoi avait-elle peur ? Il l'interrogea, cependant l'explication sur son vertige ne le satisfaisait pas. Winky lui confia que son maître lui avait demandé de lui garder une place malgré sa peur et qu'en temps que bonne elfe, elle obéissait. Il n'était pas convaincu. La peur qu'elle avait affichée en le fixant lui laissait un drôle d'arrière-goût, comme si elle ne craignait pas que le vide.

Finalement, Winky jeta un nouveau coup d'œil apeuré vers la balustrade et se cacha les yeux derrière les mains. Edward lui, fixait l'espace vide à côté d'elle. Personne ne vint de tout le match. La place resta désespérément vide. Et cette étrange impression ne le quitta pas.


Une explosion réveilla Edward en sursaut.

En une fraction de seconde, son instinct seul le sauva du danger. Il roula hors de son lit pour éviter un morceau de toile de tente en feu qui se détacha du toit dans un bruit de déchirure effrayant. Les yeux secs, il les protégea derrière son avant-bras alors qu'une pluie d'étincelles tourbillonnait dans l'air. On les attaquait !

– Envy !

Affolé, il tourna sur lui-même. Envy se tenait debout, immobile et terrorisé. La vision le saisit un instant. Envy avait peur. Ce fut la seconde de trop. La tente s'embrasa d'un coup, les plongeant dans un brasier infernal.

À l'extérieur, il y eut des hurlements. Leurs noms.

Il y avait aussi des rires.

Edward prit Envy par le bras et le força à sauter contre la toile en flamme pour la traverser. Ils roulèrent dans l'herbe, les vêtements en feu. Un groupe de silhouettes sombres et sans visages assaillirent son champ de vision. Des cagoules.

Edward secoua Envy qui ne répondait pas, toujours aussi figé. Il fixait le feu avec de grands yeux écarquillés.

Il comprit enfin. Mustang. Depuis tout ce temps...

Un choc violent coupa sa respiration alors qu'il était envoyé plusieurs mètres en l'air.

- Edward ! hurla un groupe de voix familières.

Il prit sa baguette dans sa manche, mais avant d'avoir pu riposter, un autre sort le propulsa en l'air avant qu'il retombe de tout son poids. Un objet atrocement dur lui brisa les reins et il ouvrit la bouche sous l'impact.

Une lumière bleue passa au-dessus de lui pour toucher ses agresseurs. Ses réflexes reprirent le dessus. Il roula sur le côté, à l'abri d'une tente encore intact.

Dix ennemis masqués et armés. Des Mangemorts.

Quatre victimes suspendues dans le vide, sans défense. Des Moldus.

La foule fuyait en hurlant de peur. Aucun secours en vue.

Arthur, Bill et Charlie Weasley protégeaient les enfants. Amis en danger.

Edward agit par réflexe. Son Stupéfix toucha l'ennemi le plus proche et dans un effet de domino, envoya un second dans un tas de débris. Le maléfice qu'il lança un second temps rata sa cible. Bill le couvrit alors qu'il s'agenouillait près d'Envy qui paraissait reprendre pied dans la réalité. L'air hébété, il fixait son environnement sans manifester la moindre réaction.

- Bouge-toi, bon sang ! s'écria-t-il en le secouant. Réagis !

Il y eut une nouvelle explosion. Cette fois, Envy eut un sursaut et le fixa pour la première fois avec lucidité. Sans qu'Edward n'ait pu comprendre ce qu'il se passait, Envy fonçait vers le groupe comme un boulet de canon. Surpris par l'attaque frontale et physique, le groupe compact de Mangemort n'eut pas le temps de s'écarter et il en envoya trois au sol, inconscient. Trois tonnes de muscle pur dans l'abdomen, l'homme y survivrait-il ?

Balayant les pensées superflues, Edward attaqua à nouveau et toucha sa cible. Plus loin sur sa gauche, Arthur fit fuir les enfants vers les bois tandis que des gens du ministère débarquaient et tentaient de protéger les sorciers affolés des explosions et du feu. Mais ils semblaient avoir peur de lancer un sort risquant de provoquer la chute brutale de la famille de Moldus.

– Minable, grogna Edward avant de foncer à la suite d'Envy qui avait comme d'habitude complètement oublié sa baguette magique et préférait utiliser ses poings.

Alors qu'il ne restait plus assez de Mangemorts pour faire léviter les Moldus, ceux-ci dégringolèrent avant d'être brusquement arrêtés en pleine chute par Bill et des sorciers chargés de la sécurité. Envy donna un dernier coup en plein visage d'un sorcier cagoulé dont il venait d'apercevoir une longue mèche de cheveux blonds. Les genoux fermement campés sur ses bras pour le maintenir en place, il agrippa la cagoule, les doigts comme des serres se plantant dans le visage. L'homme hurla de douleur. Sa voix, facilement reconnaissable, fit sourire Envy.

Au même instant, un concert de hurlements terrifiés provint de toute part.

– La Marque des Ténèbres !

Envy se releva pour voir l'immense forme flottant dans le ciel. Une gigantesque tête de mort et un serpent semblable à une immense langue luisaient au-dessus des bois.

Le poids sous lui disparut soudain. Il se tourna brusquement. Les Mangemorts s'étaient volatilisés.

Edward était assis plus loin et se frottait vigoureusement le visage de frustration. Son geste étala la suie maculant son front, ce qu'il ignora pour plutôt vérifier l'état de sa tenue. Ses vêtements, dans un état lamentable, déchirés et brûlés par endroit, fumaient encore faiblement à certains endroits. Puis leurs regards se croisèrent et ils se levèrent pour courir dans la direction de l'apparition de la Marque, comme tous les Aurors, à l'exception de ceux s'occupant des Moldus.

Ils durent s'enfoncer loin dans le bois avant de tomber sur le lieu du crime. Edward reconnut Winky, assaillie de toute part par Amos Diggory, Barty Croupton et d'autres sorciers. Harry, Hermione, Ron et Mr Weasley s'y trouvaient également. Les deux arrivants restèrent à l'écart, dans l'ombre, pour espionner la conversation houleuse.

– Celui qui a fait surgir la Marque aurait très bien pu disparaître en transplanant et laisser la baguette de Harry sur place. C'était habile pour le coupable d'utiliser une autre baguette magique que la sienne. Et Winky a eu la malchance de trouver cette baguette tout de suite après.

Très habile, en effet, pensa Edward, le regard dur alors qu'il examinait les environs, toujours sur ses gardes. Envy le dévisagea à la dérobée quand il ne faisait pas attention à lui.

Quel minable spectacle avait-il montré ce soir. Complètement figé de peur comme un idiot face aux flammes. C'était pitoyable. Que devait penser Edward de lui désormais ?

Le regard de son ami se durcit encore plus quand Winky hurla de sa petite voix suraiguë alors que son maître lui annonçait qu'il allait lui donner des vêtements, donc de la renvoyer de son poste de domestique.

– Pas de vêtements ! Non, maître ! Pas de vêtements !

Il était impossible de ne pas ressentir de la pitié pour Winky en la voyant se cramponner à son torchon et sangloter aux pieds de Croupton.

– Elle a eu peur ! C'est pour ça qu'elle est partie ! s'écria Hermione avec colère. Votre elfe a le vertige et ces sorciers masqués faisaient léviter leurs victimes ! Vous ne pouvez pas lui reprocher d'avoir voulu s'enfuir !

Bon sentiment, pensa Edward avec froideur en fixant Croupton comme s'il allait lui arracher la tête avec les dents. Mais il n'y avait aucune compassion dans ce cœur. S'il existait un cœur dans cette poitrine.

– Je n'ai pas besoin d'un elfe de maison désobéissant, gronda Croupton. Je n'ai que faire d'une servante qui oublie ses devoirs envers son maître et ne se soucie pas de sa réputation... Si personne n'y voit d'inconvénient, je crois que je vais retourner à ma tente. Amos, nous n'avons plus rien à apprendre de cette baguette magique... Si tu voulais bien la rendre à Harry.

Diggory tendit la baguette à son propriétaire qui la glissa dans sa poche. Quelle ironie. Utiliser la baguette de Celui-Qui-A-Survécu pour lancer la Marque des Ténèbres.

– Venez, tous les trois, leur intima Mr Weasley, toujours à voix basse.

Ils tournèrent les talons et passèrent près d'Envy et Edward sans les voir. Ces derniers contournèrent l'emplacement de Croupton, Diggory et des autres pour le diriger vers le lieu d'envoi du sort. Edward vit les pupilles d'Envy changer brusquement d'apparence alors qu'il examinait attentivement les alentours.

Rien. Pas la moindre trace.


- Mais où étiez-vous passés ? s'écria Arthur lorsqu'ils entrèrent dans la tente principale.

Les Weasley, Harry et Hermione s'y reposaient déjà, et tous affichaient des mines inquiètes avant qu'ils n'entrent, crasseux, découragés et pour Edward, furieux.

– Je vous avais dit de fuir ! Vous êtes sous ma responsabilité, vous deviez m'obéir ! Vous auriez pu être tué !

– On sait se défendre, rétorqua Edward, à cran et oubliant toute politesse. Et au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, c'est nous qui avons mis ces salauds au tapi pendant que ces fichus bureaucrates du ministère n'avaient pas assez de couilles pour bouger le petit doigt !

Derrière lui, Envy comprenait la raison de la colère d'Edward et son indignation. Après tout, il travaillait à leur poste un jour et ne supportait pas les militaires véreux, incapables ou lâches. Il devait être particulièrement remonté.

– Edward, calme-toi voyons...

– Non ! Je ne vais pas me calmer ! Leur rôle c'était de protéger ces Moldus et ils ont préféré sauver leurs miches à eux ! C'est intolérable ! Et comme d'habitude, c'est les mêmes qui doivent faire le sale boulot !

Edward piétinait de rage le sol de la tente.

– Comment peux-tu te permettre d'insulter l'autorité ? Si Bill et eux n'avaient pas été là, votre comportement aurait pu blesser les Moldus quand ils sont tombés ! C'est leur travail, ils savent ce qu'ils font.

Cette fois, Arthur semblait très en colère et prêt à crier.

– Moi aussi c'est mon boulot !

Edward donna un violent coup de pied dans une casserole tombée dans la panique et elle tapa durement la toile de tente avant de rebondir sur le sol dans un bruit mat. Perturbé et hargneux, Edward faisait les cent pas en se tenant le front. Sale et le couvert de coupures, il donnait une impression poignante d'impuissance et Envy comprit qu'il se trouvait en état de choc. Ce n'était pas bon du tout. Il fallait qu'il le calme avant qu'il n'en dise trop sur son passé. Il avait déjà commencé à donner des pistes sans s'en rendre compte.

– Calme-toi, tenta-t-il, avec précaution.

Les yeux brûlants de haine d'Edward se fichèrent sur lui en une seconde. Il réalisa que trop pris dans sa colère, Edward n'adressait pas ce regard assassin à quiconque présent dans la tente. Pourrait-il vraiment trouver des mots qui le calmeraient ? Il en doutait.

– Ça ne sert plus à rien de s'énerver, tenta-t-il tout de même en espérant toucher sa rationalité. Les Mangemorts sont partis et il n'y a aucune victime. Tu n'aurais rien pu faire de plus.

Les poings serrés et les lèvres pincées en une ligne mince, Edward paraissait tout à fait effrayant. S'il avait affiché cette expression pendant la guerre, il ne s'étonnait pas que ses ennemis craignissent de le rencontrer. Aucun argument raisonnable ne sortirait Edward de son état actuel.

Envy, sachant qu'aucune parole censée ne pourrait le calmer, décida de frapper en dessous de la ceinture.

– Tu crois qu'il penserait quoi de toi en te voyant comme ça, ton petit frère ?

Toute colère disparut et Envy regretta sa parole immédiatement. L'expression de pure détresse qu'il affichait faisait peine à voir. Il s'en voulait déjà terriblement.

– Je n'en sais rien, puisque pour toi, je l'ai abandonné. Je ne le reverrai jamais.

Puis Edward sortit de la tente en claquant la toile derrière lui. Mr Weasley l'appela et voulut partir à sa poursuite, mais la prise molle d'Envy se referma sur son bras. Laissant une famille et des amis soucieux... Et Envy complètement sous le choc, la bouche et les yeux grand ouverts, il était incapable de réfléchir. Il resserra sa prise sur le bras.

– Envy, il ne faut pas le laisser seul, objecta Mr Weasley.

Envy ouvrit la bouche plusieurs fois sans réussir à formuler la moindre pensée ni le moindre mot. Depuis tout ce temps... Il avait pensé que son Échange équivalent lui permettrait de retourner à Amestris. Apparemment, il s'était trompé. Donc depuis leur arrivée... Edward faisait son deuil de son frère tant aimé en silence, sans rien dire à personne ?

Cet angle changeait tout. Edward avait sacrifié sa vie pour lui.

Sa Pierre irradia de douleur dans sa poitrine et il se laissa tomber par terre en lâchant Arthur.


Hermione ne savait pas comment agir. Depuis le départ d'Edward une heure et demie auparavant, l'atmosphère dans la tente s'alourdissait à vue d'œil. Elle était extrêmement pesante, même. Pour essayer d'y remédier, ils avaient d'abord tenté d'agir comme si de rien n'était et avaient rassemblé leurs affaires avant de s'installer tous ensemble pour boire une boisson chaude qui les remettrait de leurs émotions. Ron et Ginny s'étaient généreusement proposés pour préparer du thé et ils l'avaient distribué à tous les occupants.

La tasse d'Envy demeura intouchée, et à l'heure qu'il était, elle devait être froide.

Assis contre la paroi, les genoux relevés, les bras croisés posés dessus et le menton fermement planté sur ses avant-bras, Envy ne dit plus un mot de la nuit et resta prostré dans un coin de la pièce. Il refusait toute approche et ne répondait à personne. Mais d'après ce qu'Edward avait dit sur son frère et de ce qu'elle avait pu en comprendre, la réaction du Serdaigle la laissait dans l'incompréhension. Il semblait y avoir tellement de non-dits entre eux... Edward aurait abandonné son petit frère pour Envy ? Ça ne lui ressemblait pas... Elle ne comprenait rien, ça n'avait strictement aucun sens. Pourquoi Edward aurait-il agi ainsi pour un garçon qu'en début d'année il semblait détester ? Pourtant, cette nouvelle n'aurait pas dû la surprendre, le discours d'Envy à Noël dernier avait laissé entendre une chose semblable. Mais alors la réaction du Serpentard ne faisait pas le moindre sens. C'était comme se retrouver avec un puzzle de mille pièces auquel il en manquerait les trois quarts !

- Quelqu'un pourrait m'expliquer ce que c'était que cette marque ? demanda soudain Ron en se réchauffant les mains contre sa tasse.

– C'est le symbole de Tu-Sais-Qui, répondit Hermione qui en profita pour essayer d'oublier ses questionnements sans fin. J'ai lu ça dans « Grandeur et Décadence de la magie noire ».

– Et ça fait treize ans qu'on ne l'avait pas vue, ajouta Mr Weasley à voix basse. Rien d'étonnant à ce que tout le monde ait été pris de panique... C'est comme si on avait vu Vous-Savez-Qui revenir.

– Je ne comprends pas, lâcha Ron en fronçant les sourcils. Après tout, ce n'est qu'une forme dans le ciel.

– Ron, il faut que tu saches que les fidèles de Tu-Sais-Qui faisaient apparaître la Marque des Ténèbres chaque fois qu'ils tuaient quelqu'un. Tu n'as pas idée de la terreur qu'elle inspirait... Tu es trop jeune. Imagine que tu rentres chez toi et que tu voies la Marque des Ténèbres flotter au-dessus de ta maison en sachant ce que tu vas trouver à l'intérieur...

Mr Weasley grimaça.

– C'était la pire terreur de tout le monde... La pire...

Un moment de silence grave suivit.

– En tout cas, s'immisça Bill. Celui qui l'a fait apparaître ne nous a pas aidés. Dès qu'ils l'ont vu, les Mangemorts ont été terrorisés. Ils ont tous transplané sans qu'on ait eu le temps d'en démasquer un seul. Et pourtant, avec la raclée qu'Envy et Edward leur ont mise à eux tout seuls... Je me demande comment certains ont pu se relever.

– C'était impressionnant, approuva Charlie en hochant la tête. Je n'avais jamais vu un sorcier se battre comme un moldu et réussir à gagner.

Les regards s'étaient progressivement tournés vers Envy qui ne réagit d'aucune manière. Hermione se demandait même s'il avait conscience qu'il n'était pas seul. Il était plongé dans son propre monde. Elle ne savait pas à quel point elle avait raison.

– Ce soir on a dû voir les derniers d'entre eux, reprit Bill. Ceux qui ont réussi à ne pas se faire enfermer à Azkaban.

– On n'a aucune preuve que c'était eux, Bill. Mais c'est sûrement vrai, concéda Mr Weasley d'un ton désenchanté.

– Ca j'en suis sûr ! dit soudain Ron. On a rencontré Drago Malefoy dans le bois et il a presque avoué que son père était un des cinglés en cagoules ! D'ailleurs, on sait bien que les Malefoy supportaient Vous-Savez-Qui !

– Mais qu'est-ce que cherchaient les partisans de Voldemort, commença Harry.

Tout le monde à part Envy tressaillit. Comme la plupart des sorciers, les Weasley évitaient toujours soigneusement de prononcer le nom de Voldemort.

– Désolé, s'excusa précipitamment Harry. Qu'est-ce que cherchaient les partisans de Vous-Savez-Qui en faisant léviter des Moldus ? À quoi ça pouvait bien leur servir ? Et pourquoi avoir attaqué Envy et Edward en particulier ?

– Malefoy.

La réponse, évidente, était venue de la porte. Edward entra définitivement. Il portait encore ses vêtements brûlés et son visage terriblement lisse, sans une once d'émotion. Il ne tourna pas une seule fois la tête vers Envy, et celui-ci se crispa sans oser le moindre geste. Chaque fibre de son être lui hurlait de creuser un trou où disparaître du champ de vision de l'ancien militaire afin qu'il ne le remarque surtout pas.

– Et à quoi ça peut leur servir de maltraiter des Moldus ? continua Edward d'un ton glaçant par sa neutralité. C'est leur façon de se distraire. Ils ont dû boire un peu trop ce soir et n'ont pas pu résister au plaisir de faire savoir qu'ils étaient encore là. Mais maintenant, ils savent qu'ils ont des ennemis imprévisibles desquels ils n'attendaient aucune résistance.

Le silence s'imposa de toute sa force alors qu'Edward traçait son chemin vers un lit sur lequel il déposa un tas carbonisé qu'il fallut un moment à Hermione avant de reconnaître la vague forme d'un sac de voyage. Il avait dû fouiller dans les débris de leur tente carbonisée. Il ne restait pas grand-chose. Déjà qu'ils ne possédaient que peu à l'origine...

Ne prêtant aucune attention au malaise que son retour avait engendré, Edward ouvrit le sac en toile noircie et en vida le contenu avant de soupirer et de se tourner vers eux.

– Excusez-moi pour mon comportement, Mr Weasley, je n'avais pas à m'énerver contre vous. Je n'ai aucune excuse.

– Tu étais sous le choc, bredouilla Arthur, déconcerté. Tu es tout excusé.

En réponse Edward s'inclina légèrement comme le trio l'avait déjà vu faire bizarrement plusieurs fois puis il se redressa et leur fit à nouveau dos pour fouiller dans les restes de ses affaires. Il sortait soigneusement les vêtements les uns après les autres. Un nouveau soupir franchit ses lèvres alors qu'il prenait un livre qui tomba en miettes. Pince allait le tuer quand il rentrerait à Poudlard.

- Où avez-vous appris à vous battre de cette façon tous les deux ? demanda Bill, curieux.

Les épaules d'Edward tressautèrent puis se crispèrent. Très vite, il se détendit à nouveau en poussant un dernier long soupir. Il passa son pull calciné par-dessus sa tête et secoua une chemise en meilleur état provenant de ses affaires rescapées.

Horreur. C'était le seul mot venant à l'esprit d'Hermione. Les immenses cicatrices sur son dos ne passèrent inaperçues pour personne dans la pièce. La seule source de lumière — le feu dans une vieille lampe posée au centre de la tente — et ses lueurs dansantes leur donnaient un aspect effrayant. La plus inquiétante décrivait un large cercle juste au-dessus des reins. Un épisode extrêmement douloureux et potentiellement mortel avait sans doute provoqué cette marque rougeâtre. Si Harry était un survivant avec sa cicatrice sur le front, elle se demandait ce que cette affreuse cicatrice signifiait pour Edward.

Le tableau disparut bientôt sous le tissu alors qu'Edward s'habillait à nouveau et boutonnait sa chemise calmement.

– À la guerre, dit-il finalement alors que Bill avait définitivement perdu espoir qu'il réponde à sa question.

Plusieurs hoquets ne purent être retenus et il s'en fichait pas mal. Il était calmé, ça oui, Envy lui avait donné une vraie douche froide sur ce coup-là. Mais il n'allait pas bien pour autant. Sa réaction avait peut-être paru exagérée, même pour Envy malgré le fait qu'il connaisse la plupart de ses démons. Cependant, il ne connaissait pas les plus récents. Ceux survenus après le Jour promis et dont peu de personnes avaient connaissance. Pendant ces six mois de missions enchainées, il avait vu beaucoup de choses qu'il aurait préféré oublier, dont une en particulier.

Pendant toutes ces années, Mustang l'avait toujours protégé de la réalité en choisissant les expéditions les moins dangereuses, celles qui salissaient le moins les mains. Mais bientôt Mustang devint impuissant dans ce tri des ordres de mission. Edward se souvenait parfaitement du premier ordre reçu sans consultation de l'ancien colonel : Trois mois passés à Drachma, entre vagabondage et prison. Pour cette mise à mort dissimulée le visant, des innocents avaient perdu la vie. Il était parti avec trois soldats. Edward était le seul à être revenu. Pendant le premier mois à fuir ceux qui les poursuivaient depuis la frontière, il avait découvert l'égoïsme des hommes et leur cruauté.

Un jour, alors qu'ils mouraient de faim et que deux d'entre eux souffraient de maladies infectieuses, une situation semblable à celle survenue avec les Mangemorts cette nuit s'était produite. L'un des leurs avait été pris en otage par des soldats drachmaéens. Il avait été humilié, torturé, mais aucun de ses deux équipiers ne vinrent à son secours. Avec le recul, Edward se dit qu'ils avaient dû penser qu'une bouche de moins à nourrir ne se refusait pas, s'ils voulaient survivre. Et ils avaient fui, laissant Edward et le jeune otage se débrouiller seuls. Ce soldat n'avait même pas vingt ans, il était terrorisé et savait qu'il allait mourir. Il avait supplié Edward, désarmé par le départ des deux déserteurs venant de s'évanouir dans la nature.

Le garçon était mort. Edward fut emprisonné.

À son retour à Amestris deux mois plus tard, il avait réussi à rencontrer la famille éplorée de ce jeune soldat. C'était la première fois que son grade lui pesa si lourdement. Ce garçon — bien que plus âgé que lui — se trouvait sous sa responsabilité quand il était mort au combat, pour son pays. À côté de la peine et de la culpabilité, les papiers qu'il avait dû remplir ne représentaient rien. Les plaisanteries passée de Mustang lui demandant de ne pas mourir en mission sous ses ordres prirent une tout autre dimension. À partir de là, il ne perdit plus un seul homme sous ses ordres et il devint sans pitié avec les lâches. C'était toujours la même chose. D'abord ils protégeaient leur vie, puis celles des innocents. Son impuissance l'avait révolté ce jour-là. Il avait pratiquement tenu sa vie entre ses mains ! Il avait laissé ce soldat mourir...

Les mâchoires scellées, Edward rassembla ses cheveux — dont la pointe était roussie — en une queue de cheval haute. Puis il prit son sac qu'il referma avant de le laisser tomber dans un coin et de s'asseoir à l'autre bout de la pièce pour s'éloigner d'Envy et ne plus l'avoir dans son champ de vision.

Ce n'était pas la faute de l'Homonculus, qui n'avait rien demandé d'autre que d'être achevé par Mustang. Pourtant il lui en voulait terriblement. Alors que tout ça était de sa propre faute à l'origine. Si Edward ne l'avait pas sauvé de la vengeance de Mustang en premier lieu, il n'aurait pas eu à le sauver une seconde fois en abandonnant son monde. Mais en même temps, le prix de sa Porte aurait-il suffi pour sauver Alphonse s'il n'avait pas « modifié son destin », comme la Vérité le lui avait reproché ? Il ne savait plus... Il ne comprenait plus rien depuis le Jour promis. Il avait l'impression que d'un jour à l'autre, il pourrait se réveiller et se rendre compte qu'il vivait dans un mauvais rêve depuis tout ce temps.

Dans la tente, personne ne savait comment réagir. Perdus, ils détournèrent presque honteusement les yeux d'Edward pour se plonger dans leurs tasses. Au bout de quelques minutes, Mr Weasley se racla la gorge.

– Maintenant, il est très tard et si jamais Molly apprend ce qui s'est passé, elle va se faire un sang d'encre. Nous allons dormir quelques heures et nous essaierons d'attraper un Portoloin demain matin de bonne heure pour rentrer à la maison. Puis j'emmènerai Envy et Edward au ministère.

Les deux intéressés réagirent à peine.

- Interrogatoire ? demanda Edward.

– Bien sûr que non. Ce ne sera qu'une simple déposition. Il y a eu plusieurs témoins du combat et pour l'instant les Aurors essaient de retenir les informations. Ça va faire un boucan monstre quand les médias vont apprendre que deux étudiants ont été obligés d'agir à la place du ministère.


Deux jours plus tard, Envy faisait de nouveau la Une, quelques mois à peine après le procès contre Malefoy. Dès que la participation de deux adolescents à la bataille avait fuité, Rita Skeeter (qu'Envy allait commencer à bien aimer) avait sauté sur l'affaire. Elle avait pondu un article dépeignant Envy exactement comme il le souhaitait, même s'il avait conscience de ne servir que d'instrument à la journaliste. Dénigrer le ministère et son incompétence, voilà tout ce que Skeeter désirait. Peu importait Envy, puisqu'il utilisait la journaliste lui aussi. Attirer l'attention des partisans de Voldemort, voilà tout ce que lui désirait.

En effet, le lendemain matin de cette nuit mouvementée, Arthur Weasley les emmena, comme promis, Edward et lui, au ministère pour un interrogatoire dans les règles sur les événements survenus à la Coupe du Monde.

L'effervescence là-bas résulta en un manque de personnel. Ils furent laissés seuls dans le Bureau des Aurors pendant plus d'une heure à attendre que quelqu'un puisse s'occuper de leur déposition.

– On fait de bien piètres espions, tenta Envy, incertain quant à la conduite à adopter alors qu'Edward l'ignorait depuis la veille. Si chaque année on finit ici et dans le journal, autant passer une annonce disant qu'on ne vise pas que les Malefoy et les Mangemorts, mais aussi Voldemort, tant qu'on y est.

Edward ne montra aucune émotion et continua à fixer le bureau droit devant lui, comme s'il ne l'avait pas entendu. Poussant un soupir silencieux, Envy baissa les épaules, défaitiste.

Alors qu'il faisait mine d'ouvrir la bouche pour s'excuser, Edward releva brusquement la tête.

– C'est exactement ce qu'on va faire.

-... Pardon ?

– Quand j'ai voulu t'interroger sur la pierre philosophale, je me suis fait plusieurs gros coups de pub pour attirer Scar. Je savais qu'il essayerait de me tuer et que tu sortirais de ton trou pour me protéger. On va faire la même chose. Les Mangemorts nous prendront pour cible et on les attirera comme des mouches.

– C'est un plan risqué. Contrairement à ce que tu as pu faire, maintenant personne ne veut nous protéger et il n'y a pas qu'un seul tueur en série qui veut notre peau, mais toute une organisation.

– Il y a le serment magique de Dumbledore.

– Il ne sera pas toujours auprès de nous, répondit Envy, sachant qu'il argumentait en vain. Mais je suis d'accord sur le principe... En plus j'adore être dans la lumière, ça change de toutes ces années passées dans l'ombre. À quoi bon être jeune et mignon si personne ne me regarde ?

Edward, qui habituellement aurait grimacé un sourire, se contenta d'une expression neutre qui ôta tout espoir de réconciliation. Envy perdit son sourire et baissa la tête.

Depuis l'élaboration de ce plan et sa mise en pratique, rien n'avait changé entre eux. Ils étaient de retour à Poudlard sur ordre de Dumbledore afin de mieux pouvoir les protéger des médias en délire. Mais le mal était déjà fait, Envy avait profité de leur présence au ministère pour faire des déclarations à Rita Skeeter qui les avait notés avec soin et application. Sa Plume à papote avait frémi de plaisir en se mettant tout ce matériau sous la dent. Finalement, une jeune Auror du nom de Tonks la fit déguerpir, mais le photographe accompagnant Skeeter avait eu le temps de prendre quelques clichés. La Gazette du Sorcier avait choisi de publier le pire. Celui où Tonks, maladroite, avait renversé son thé sur les jambes des deux adolescents et avait dû se mettre à genoux devant eux pour réparer sa bêtise, paniquée.

« Le Ministère s'incline ! »

« Il aura fallu l'intervention héroïque d'un élève de quatrième année à Poudlard pour mettre les Mangemorts hors d'état de nuire. Où sont passés les Aurors ? »

« Sans lui, le Ministère aurait des victimes sur les bras ! »

Elle rappela aussi le fiasco de l'affaire de la Tour du cauchemar, dont elle avait affublé le procès Malefoy contre Envy, et dans lequel il avait été acquitté. Cynique, Skeeter termina en se réjouissant de l'indulgence d'Envy et qui avait consenti à aider le ministère en sauvant ces moldus et les sorciers présents. Puis elle termina sur un morceau de l'interview éclaire qu'elle avait du principal concerné.

« – "Il faut bien que quelqu'un agisse", déclare le jeune garçon, dont le courage face à l'adversité n'était plus à douter. "Les Mangemorts sont une organisation obsolète et faible. Ils ont seulement profité de l'agitation pour essayer de faire savoir qu'ils existaient encore. Mais c'est voué à l'échec, ils ne représentent plus rien qu'un groupe de criminels de petite envergure, rendu imbéciles par l'alcool et impuissants par la vieillesse."

- "Vous êtes bien téméraire. Est-ce là une déclaration de guerre de la part de la jeune génération ?"

- "Je ne parlerai qu'en mon nom. Et effectivement, je défie quiconque d'essayer de détruire ce monde. Maintenant, ils savent qu'ils ont des ennemis imprévisibles desquels ils n'attendaient aucune résistance." »

Dumbledore leur avait tapé sur les doigts à tous les deux, Rita Skeeter et lui. Le mage provoqua un scandale auprès de la direction de la Gazette du Sorcier, qui en publiant cela pouvait mettre la sécurité de son élève en danger. On lui avait claqué la porte au nez en lui disant qu'Envy était majeur et avait répondu à l'interview de Skeeter en toute connaissance de cause. De retour à Poudlard, le directeur avait convoqué Envy pour un remontage de bretelle convaincant, mais son protégé lui avait donné la même réponse que Barnabas Cuffe en ajoutant qu'il ne craignait pas les Mangemorts, qu'ils s'amènent !

– Avez-vous pensé aux retombées que ces déclarations publiques pourraient avoir sur l'école et sur vos camarades ? Si les gens que vous avez stupidement provoqués veulent se venger, ils pourraient blesser des innocents !

– C'est à vous de protéger l'école. Je croyais que c'était le lieu le plus sûr de Grande-Bretagne.

À cela, Dumbledore n'avait rien pu ajouter, sachant qu'il avait raison sur la forme.

– Imaginez un peu ce que cet acte irréfléchi pourrait engendrer. Edward s'est lui aussi battu à vos côtés, et même si pour une raison que j'ignore Rita Skeeter ne l'a pas mentionné, les Mangemorts savent qu'il était présent lui aussi. Ils vont prendre votre déclaration de guerre au sérieux et Edward y sera mêlé lui aussi par votre —

– C'est lui qui m'a dicté les réponses.

Dumbledore en était resté sans voix et Envy avait mis fin à la conversation en quittant son bureau les mains dans les poches. Ils savaient ce qu'ils faisaient. Envy était mis en avant puisque moins susceptible de mourir définitivement en cas d'une attaque ennemie. Il avait mis le paquet pour qu'ils passent à l'action. Toutes ces provocations gratuites devraient les faire bouillir. Cette année, ils viendraient à eux. Ils découvriraient coûte que coûte où se terrait Voldemort.

Mais avant que ça n'arrive...

Envy jeta un rapide regard sur le journal qu'il tenait à la main.

À la rentrée, ça allait jaser dans les couloirs.


Ignorant les regards des quelques professeurs revenus de leurs congés pour préparer la rentrée scolaire, Edward déplia son exemplaire du Chicaneur envoyé avec un petit mot de la part des Lovegood.

« Nous sommes de tout cœur avec toi et te protégeons des machinations du ministère,

Luna.

PS Nous avons planté le prunier devant notre maison cette semaine, j'ai hâte de t'inviter pour que tu le voies »

Haussant un sourcil, Edward déplia le journal pour voir que la première page était consacrée elle aussi à l'attaque des Mangemorts, mais sous une tout autre forme et d'un point de vue diamétralement différent.

« Alliance du ministère de la Magie et des médias pour supprimer un opposant politique ? »

L'article en lui-même se résumait à une théorie du complot rédigée par le rédacteur du Chicaneur qui affirmait que le ministère et la Gazette du Sorcier s'étaient alliés pour faire supprimer Envy, car il leur ferait de l'ombre. Pour cela, ils auraient décidé de publier l'interview en la faisant très explicitement passer pour une réelle déclaration de guerre afin qu'Envy puisse être tué sans que personne ne doute du motif ni du coupable du futur crime.

Il aimait beaucoup les Lovegood, vraiment, pensa-t-il en souriant doucement. Avec leurs théories... Et puis, si le moindre Mangemort lisait le Chicaneur (ce dont il doutait fortement), il prendrait cette théorie comme une porte ouverte pour l'utiliser et essayer de tuer Envy en semant le doute sur le coupable. Ça ne pourrait qu'aider les Mangemorts à se décider à bouger vite. Et dans la précipitation, ils commettraient des erreurs. Avec ça, ils pourraient peut-être en capturer quelques-uns.

Débordant soudain d'affection pour Luna, il répondit immédiatement à son mot pour la remercier de ne pas l'avoir cité et d'essayer de faire éclater la vérité au grand jour. Sur cette dernière affirmation, il lui mentait peut-être un peu, car il savait que ce n'était pas la vérité. C'était lui qui tirait les ficelles par-derrière, mais pour faire plaisir à son amie, il accepterait, même de faire un tour du monde à la recherche du Ronflak Cornu.