Disclamer : Rien ne m'appartient
Titre : Wild With All Regrets
Auteur : Cithara
Traducteur : Ange Phoenix
Bêta : Antidote
Résumé : Deux ans après la bataille finale, Severus languit à Azkaban avec peu d'espoir de gagner sa liberté. Le ministère accepta finalement de tenir un procès, attendu depuis longtemps, à une seule condition : que Severus soit remis à la garde de Harry pendant la période de liberté conditionnelle. Severus et le monde des sorciers avaient changé entre-temps, et Severus devait se réconcilier avec ses deux changements.
Autorisation : J'ai l'autorisation de l'auteure pour cette fanfiction
Wild With All Regrets
Chapitre 3
Severus était assis dans le fauteuil près du feu dans le salon, sa baguette sur les genoux, fixant les flammes d'un air absent. C'était une journée froide pour une fin de septembre, et ces jours-ci, le froid l'affectait plus que jamais. Ce serait mieux quand il aurait de la viande sur les os, quand il ne serait plus un squelette ambulant, mais il devait admettre qu'il était devenu un peu obsessionnel quand il s'agissait de chaleur.
Il passa ses doigts sur sa baguette, c'était la centième fois qu'il le faisait ce matin. Cela faisait deux jours qu'elle lui avait été rendue et il ne l'avait pas quittée des yeux depuis. Il n'avait pas encore fait de magie avec elle ; malgré l'assurance d'Hermione qu'elle n'existait plus et qu'elle était introuvable, il restait prudent. Il y avait aussi, s'il était honnête, quelque chose d'autre qui le retenait, la peur de refaire de la magie après deux ans, l'inquiétude que son pouvoir ait pu être endommagé de la même manière que sa santé l'avait été.
Il avait entendu parler de ce genre de choses ; les traumatismes pouvaient souvent causer des dommages à la magie d'un sorcier ou d'une sorcière et dans les cas les plus graves, cela pouvait même faire d'une personne un cracmol avec peu ou pas de pouvoir. Il savait que ce n'était pas le cas pour lui, il pouvait sentir le pouvoir en lui, même s'il était resté en sommeil pendant si longtemps. Il craignait cependant de ne plus pouvoir l'utiliser comme avant, que sa magie, comme le reste de sa personne, n'ait été irrévocablement altérée.
« Professeur ? » fit la voix de Harry, et Severus leva les yeux pour le voir rôder dans les escaliers.
Il avait eu l'intention de dire à l'homme de l'appeler par son prénom il y a quelques jours, pour lui accorder cette petite mesure de familiarité et diminuer les barrières entre eux, mais pour une raison quelconque, il ne l'avait pas fait. Peut-être craignait-il que cela incite Harry à faire une offre similaire, alors qu'il trouvait que la sensation du nom de l'homme sur sa langue était trop étrange pour être utilisée.
« Voulez-vous venir voir le bâtiment que j'ai pensé que vous pourriez utiliser pour préparer des potions ? Si ce n'est pas bon, nous devrons penser à autre chose. »
« Vous supposez que je vais accepter la demande ridicule du ministère », répliqua Severus, l'ancienne rudesse se glissant à nouveau dans sa voix.
Harry sourit simplement. « Je suppose que vous n'êtes pas assez stupide pour le faire. »
Severus roula des yeux, mais se leva néanmoins, rangeant sa baguette dans la poche arrière du pantalon qu'il portait. Il vit Harry y jeter un coup d'œil et pendant un instant Severus pensa qu'il allait dire quelque chose, mais il se contenta de passer sa langue sur sa lèvre inférieure puis il se dirigea vers la porte d'entrée.
Il suivit Harry dehors et grimaça légèrement lorsque le vent froid s'enroula autour de lui. Il n'avait pas mis les pieds à l'extérieur de la maison depuis qu'il était venu y vivre près d'une semaine auparavant et malgré le jour gris et terne, il pouvait voir à quel point c'était joli.
Un jardin s'étendait tout autour de la propriété, entouré d'un mur de pierre tordu. Dans une section, il y avait une table et des chaises ainsi qu'un petit étang, le son de la fontaine ruisselante s'infiltrant doucement à travers la fenêtre de sa chambre la nuit. Dans une autre section, il y avait un potager bien entretenu, et alors qu'ils s'en approchaient, Severus fut surpris de voir que plusieurs ingrédients de potions poussaient joyeusement parmi les rangées.
Harry le conduisit à l'arrière de la maison et il vit qu'il y avait deux dépendances, dont une qui semblait beaucoup plus solide que l'autre. Ce fut celle-là que Harry ouvrit, poussant la porte et s'écartant pour laisser entrer Severus. Il était à peu près de la même taille que son ancien laboratoire de potions à Poudlard et il y avait un long établi au milieu, qui avait manifestement été utilisé pour travailler le bois à un moment ou à un autre. Les murs étaient tapissés d'armoires métalliques et d'étagères en bois, et de lourds volets étaient accrochés aux fenêtres pour que la lumière soit bannie de la pièce.
« Nous allons devoir la nettoyer et la rendre un peu plus utilisable, mais pensez-vous qu'elle fera l'affaire ? » demanda Harry, les mains sur les hanches.
Severus passa ses doigts sur le bois brut de la table et leva les yeux vers Harry. « N'ai-je pas d'autre choix que de me plier à cette absurdité ? » demanda-t-il.
Harry soupira et laissa tomber ses mains, contournant la longue table pour se placer à côté de Severus. « Je sais que ce n'est pas l'idéal, mais si cela vous permet d'être ici plutôt qu'à Azkaban, n'est-ce pas préférable ? »
Severus détourna le regard des yeux verts pénétrants, détestant avoir l'impression que leurs rôles étaient en quelque sorte inversés, qu'il était l'écolier errant et que Harry était le professeur rationnel et pondéré qui essayait de lui faire comprendre son erreur.
Une main s'était posée sur son épaule et Severus essaya de cacher sa surprise. La main de Harry était chaude, un poids agréablement lourd sur son corps maigre, et il résista à l'envie de lever les yeux vers l'homme.
« Ça va s'arranger, je vous le promets », dit doucement Harry. « Je vous aiderai de toutes les manières possibles, je pourrais même vous aider pour les potions », ajouta-t-il, provoquant chez Severus un grognement d'amusement que l'homme ne put retenir.
« Suis-je vraiment un personnage si pathétique que vous ressentez le besoin de m'offrir votre aide pour quelque chose que vous détestez ? » demanda-t-il, se laissant enfin aller à lever les yeux.
« Il y a beaucoup de mots que j'ai utilisés pour vous décrire au fil des ans, la plupart que je vous ai dit en face, mais "pathétique' n'en a jamais fait partie. Cela ne va pas changer maintenant. »
La main s'était retirée, et Severus regretta qu'elle soit partie, un peu décontenancé par le réconfort qu'elle lui avait apporté.
« Quoi qu'il en soit », continua Harry, et Severus espéra qu'il était aussi inconscient de sa réaction qu'il en avait l'air, « Je ne déteste pas les potions, je détestais juste la façon dont vous les enseigniez. »
Severus était sur le point de dire à l'homme qu'il pouvait aller voir ailleurs quand il vit la lueur subtilement taquine dans son regard. Il se contenta de secouer la tête et de dire : « Je n'ai jamais dit que j'étais fait pour l'enseignement. »
L'expression de Harry s'adoucit et pendant un bref instant, Severus pensa que la main allait peut-être se retrouver à nouveau sur son épaule, mais ce ne fut pas le cas.
« Vous jouiez un rôle, je ne l'ai pas toujours compris. »
« Il n'y a pas besoin de me sacraliser », dit Severus, sentant un sentiment irrationnel d'irritation monter en lui.
« Je ne l'ai pas fait, » répondit Harry. « Il n'y a pas assez de naïveté en moi pour faire ça. »
C'était dit si doucement, sans amertume ni rancœur, que Severus se redressa brusquement. Il n'allait pas répondre et Harry sembla le sentir, car il se détourna et dit : « Ça ira alors, comme salle de travail ? »
Severus savait bien sûr qu'il n'avait jamais vraiment eu le choix, et il était conscient que faire autre chose que de s'y plier de bonne grâce reviendrait à lui rejeter au visage tout ce que Harry avait fait pour lui. Il n'était pas allé si loin pour se comporter avec si peu d'honneur.
« Ça fera l'affaire », dit-il doucement, et Harry jeta un coup d'œil par-dessus son épaule, lui offrant un petit sourire et un hochement de tête satisfait.
Un Harry studieux et réfléchi, ce n'était pas un homme que Severus connaissait bien. Il était habitué à ce que l'homme se jette d'un désastre à l'autre, réagisse et vole de ses propres ailes, inventant tout au fur et à mesure. Le Harry avec lequel il s'était retrouvé lui était presque totalement étranger.
La journée de l'homme était occupée par le travail de la fondation qu'il avait créée avec Ron et Hermione. Il passait la matinée à parcourir le courrier et à y répondre, à programmer des réunions avec son représentant et son équipe juridique et à effectuer tout travail administratif nécessaire. L'après-midi, il s'installait dans l'un des fauteuils, plusieurs gros ouvrages étalés sur la table basse devant lui, et se familiarisait avec le droit des sorciers.
Si Severus avait eu besoin d'une preuve que Harry n'était plus le garçon qu'il avait connu, l'entendre discuter d'une campagne ou d'une autre lors d'un appel rapide avec Ron ou Hermione, une tasse de café à moitié bue à la main, avait suffi à le convaincre. Il avait l'air si compétent, si maître de lui, que Severus ne pouvait s'empêcher de se sentir légèrement inadapté à ses côtés.
Cela aurait été plus facile, peut-être, si Harry était toujours le jeune homme de 17 ans téméraire dont il se souvenait, avec son visage de garçon et son air constant d'incertitude. Il se serait senti sur une base plus solide si Harry avait encore une lueur de ressentiment, s'il avait encore l'hostilité qui avait caractérisé leur relation pendant tant d'années, mais rien de tout cela ne semblait plus évident.
Cela faisait presque un mois qu'il avait été libéré d'Azkaban, et Harry et lui avaient établi une sorte de routine. Ils étaient tous deux naturellement lève-tôt et se retrouvaient dans la cuisine vers huit heures chaque matin. Harry préparait le petit-déjeuner pendant que Severus s'occupait du thé et du café, marmonnant à chaque fois qu'il ne comprenait pas comment on pouvait boire du thé le matin, tandis que Harry se contentait de rouler des yeux devant ce discours qu'il connaissait par cœur.
Après le petit-déjeuner, Harry s'occupait de ses affaires pour la fondation tandis que Severus se retirait dans l'atelier qu'ils avaient aménagé pour servir de laboratoire de potions. Il détestait travailler, à toutes fins utiles, pour le Ministère, il détestait qu'on lui dicte sa façon de brasser, mais pouvoir revenir à l'art qu'il avait toujours adoré était trop merveilleux pour qu'il laisse son ressentiment l'emporter.
Les commandes du Ministère concernaient toutes des potions compliquées et complexes, qui nécessitaient une maîtrise du sujet et qui n'étaient pas simplement destinées à remplir les stocks de l'hôpital. Il devait passer toute la journée sur certaines d'entre elles, mais il essayait d'espacer la fréquence à laquelle cela se produisait, car sa santé était encore fragile et il avait généralement besoin de se reposer l'après-midi, en s'installant dans le salon douillet avec un livre de la bibliothèque étonnamment bien fournie de Harry.
Pour les commandes plus compliquées, Harry l'aidait, mais son assistance se limitait surtout à préparer les ingrédients et à garder un œil sur les choses si Severus préparait plus d'une potion à la fois. Les réactions de Severus n'étaient plus aussi rapides qu'avant et, à sa grande frustration, il trouvait qu'il était parfois facile pour lui de s'embrouiller alors qu'il était au milieu d'un processus qui demandait son implication.
« Vous rentrez ? » demanda Harry en passant la tête par la porte de l'atelier. « Je dois m'occuper de votre blessure. »
« Donnez-moi juste une minute, j'ai presque fini », répondit-il en gardant son attention sur la potion devant lui.
Harry, habitué à ne pas avoir l'attention de Severus sur lui lorsqu'il était concentré sur la préparation de la potion, partit pour retourner dans la maison, et Severus abaissa la flamme sous le chaudron, heureux de constater qu'elle avait pris la couleur turquoise pâle qu'il attendait. Il pouvait maintenant la laisser mijoter pendant une heure, ce qui lui permettait d'aller faire soigner sa blessure.
Elle commençait maintenant à guérir correctement, et il avait seulement besoin de recevoir le sort de guérison qu'une fois par semaine plutôt que tous les jours. C'était à la fois un soulagement et une déception. La première fois qu'Harry avait lancé le sort, Severus ne s'était pas préparé à l'intensité du traitement. Harry utilisait une magie puissante et, plus important encore, c'était aussi une expérience très intime.
Harry avait dû le toucher pour l'exécuter, il avait dû passer ses doigts doux sur la ligne de la cicatrice rouge de colère sur sa gorge pendant qu'il murmurait délicatement les mots du sort. Si Severus pensait que son corps avait réagi à la vue de Harry se mordant la lèvre, ce n'était rien comparé à la façon dont il réagissait au contact de l'homme.
La magie fonctionnait ; les dernières traces de poison encore présentes dans son organisme étaient lentement éliminées et la cicatrice s'estompait à chaque exécution du sort. Il se sentait mieux qu'il ne l'avait été depuis des mois, et il n'avait pas réalisé à quel point il avait été affecté par sa blessure non traitée pendant si longtemps.
Il vérifia une dernière fois la potion et s'essuya les mains sur le chiffon humide qu'il gardait à proximité, puis se débarrassa de la robe de protection qu'il portait, la posant sur l'établi pour l'utiliser plus tard. Il rentra dans la maison et trouva Harry debout près de la cheminée, l'attendant avec un sourire.
« Venez, plus vite on commence, plus vite ce sera fini ».
« Ce n'est pas comme si ça faisait mal », répondit Severus en roulant des yeux.
« Non, mais m'avoir dans votre espace personnel pendant près de vingt minutes ne doit pas être votre idée de l'amusement », dit Harry, et Severus ne savait pas comment lui répondre. Il se contenta de déboutonner sa chemise et de la faire glisser sur son épaule, ressentant l'habituel sentiment de gêne d'être à moitié nu devant Harry.
Après un mois à respecter scrupuleusement le plan alimentaire d'Harry, Severus avait pris un peu de poids, et ne ressemblait plus à une victime de la famine. Cependant, il avait encore un long chemin à parcourir avant de retrouver complètement la santé, et son corps en témoignait. Il était toujours maigre, sa peau avait toujours une légère teinte grisâtre, et il devait toujours utiliser la potion topique que Maggie lui avait donnée pour traiter son mauvais état.
Il n'avait jamais eu le genre de corps à rendre les autres jaloux, mais il avait été en meilleure santé et avait autrefois un corps robuste qu'il aurait été beaucoup plus à l'aise de montrer au jeune homme qui, lui-même, ne manquait pas de charme. Présenter cette forme hagarde et usée par le combat ne faisait rien pour son amour-propre, et il ne pouvait s'empêcher de se demander à quel point Harry devait être dégoûté de devoir être si proche de lui.
« Il fait assez chaud ici pour vous ? » demanda Harry, connaissant la légère obsession de l'homme pour la chaleur.
« C'est bien », répondit Severus, reconnaissant que le feu brûle joyeusement dans la cheminée.
Harry se rapprocha et Severus inclina la tête, permettant à Harry d'accéder à sa gorge. Il garda son regard fixé sur l'avant, se concentrant pour essayer de lire le dos des livres qui lui faisaient face dans la bibliothèque. C'était une astuce qu'il avait appris la cinquième ou sixième fois que Harry avait exécuté le sort, trouvant que c'était une distraction utile pour occuper ses pensées, des pensées qui semblaient déterminées à dériver vers Harry.
Harry se mit à murmurer doucement, passant ses doigts sur la plaie de la main gauche, tandis que la droite traçait des motifs prudents avec sa baguette. Il était concentré et minutieux, et Severus savait maintenant qu'il était entre de bonnes mains. Harry semblait avoir un talent pour la magie curative, et même si Severus savait que l'homme n'avait pas l'intention de faire carrière dans ce domaine, il était convaincu qu'il s'en sortirait bien s'il le faisait.
La main de Harry était chaude contre sa peau, comme toujours, et Severus se demanda si l'homme lui avait jetée un charme de chaleur avant ces séances, ou s'il était naturellement chaud. Il sentait le savon et le shampoing au parfum de pomme qu'il utilisait, et Severus dut renouveler ses efforts pour se concentrer uniquement sur la lecture des titres des livres.
Il avait essayé de se dire qu'après avoir été si longtemps coupé du monde, son corps aurait réagi à n'importe qui, mais plus les séances se prolongeaient et plus il s'autorisait à jeter des regards furtifs à l'homme qui avait banni le garçon qu'il avait connu autrefois, plus il se trouvait incapable de tenir ce raisonnement.
Harry avait toujours été agréable à regarder, Severus ne l'avait pas oublié, malgré l'antipathie dont il avait fait preuve à son égard par le passé. Il n'y avait jamais réfléchi, d'autant plus que Harry avait été son élève en son temps, puis son ennemi supposé par la suite. Mais dans cette étrange petite bulle où il était confronté à l'homme jour après jour, où il s'asseyait en face de lui à l'heure des repas et où ils partageaient leur espace vital, il était impossible de ne pas remarquer à quel point l'homme était devenu beau.
Il luttait silencieusement contre cela, furieux contre lui-même d'avoir succombé à quelque chose qu'il aurait dû dépasser, quelque chose qui aurait dû être indigne de lui. L'homme était de vingt ans son cadet, pour l'amour de Merlin, sans parler du fait que leur histoire longue et très compliquée aurait dû mettre un terme à toute forme d'attirance qui aurait pu tenter de s'insinuer dans sa conscience. C'était la situation la plus ridicule dans laquelle il pouvait se trouver, et il se méprisait pour ça.
« Voilà, ça devrait faire l'affaire », dit doucement Harry en abaissant sa baguette et en regardant sa gorge, passant le bout de ses doigts sur la cicatrice qui s'atténuait.
Severus réprima l'envie de frissonner. Peu importe comment son corps souhaitait répondre à Harry, il était hors de question qu'il le laisse savoir. Il ne s'était jamais habitué à l'humiliation, et il était hors de question qu'il commence maintenant.
Harry se recula un peu et Severus enfila à nouveau sa chemise et il s'apprêtait à la reboutonner lorsqu'il réalisa que Harry était là, à regarder la cicatrice sur sa gorge en fronçant les sourcils. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait Harry le regarder comme ça, mais l'expression sur son visage était plus intense qu'auparavant.
« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda Severus avant de pouvoir s'en empêcher.
Harry sembla sortir de ses pensées et il leva les yeux vers Severus, presque coupable, essayant sans succès de former un masque impassible sur ses traits. Il se détourna et se frotta l'arrière de son cou, laissant une tache rougeâtre alors qu'il laissait tomber sa main avant de soupirer lourdement. Severus était sur le point de répéter sa question quand Harry dit doucement.
« Je ne savais pas. »
Severus fronça les sourcils et demanda à Harry de répondre : « De quoi parlez-vous ? »
« Je ne savais pas que vous étiez encore en vie », fut le murmure à peine audible.
Il se retourna et Severus fut surpris par l'expression du visage de l'homme. Elle était si intense, partagée entre le sérieux et le chagrin que Severus se sentit légèrement vaciller sous cette expression.
« Quand vous m'avez donné vos souvenirs, j'ai cru que vous étiez en train de mourir, que vous utilisiez votre dernier souffle pour me donner ce dont j'avais besoin pour aller tuer ce salaud. Si j'avais pensé... si j'avais su... je ne vous aurais pas laissé là-bas, je n'aurais pas... putain », souffla Harry en se jetant dans le fauteuil voisin.
Il laissa sa tête tomber dans ses mains et Severus le regarda en fronçant les sourcils, voulant dire quelque chose, mais n'étant pas sûr qu'il y ait quelque chose à dire. Il n'avait jamais pensé une seule seconde que Harry l'avait simplement laissé là-bas ; il était logique qu'il ait cru Severus mort, Severus lui-même l'avait cru jusqu'à ce qu'il prenne vaguement conscience que l'au-delà ressemblait beaucoup à ses quartiers.
« Ron vous a trouvé », dit doucement Harry en relevant la tête, mais sans croiser le regard de Severus. « Je... je voulais aller chercher votre corps... je ne pouvais pas supporter l'idée que vous soyez allongé là, tout seul et... » Harry se tut et prit une profonde inspiration. « Ron s'est porté volontaire pour y aller, il savait que ce serait trop dur pour moi. J'étais... j'étais un peu dans tous mes états. Vos souvenirs... la réalisation de... à quel point j'avais eu tort... ça m'a fait perdre la tête. Je lui ai demandé de vous ramener au château, pour qu'on puisse vous enterrer comme il se doit... putain... ce n'est pas morbide de dire ça à quelqu'un qui est bien vivant, devant vous ? » demanda Harry, les yeux se fermant, refusant toujours de lever les yeux vers Severus.
Il prit une nouvelle inspiration, puis continua : « Il n'en revenait pas de vous avoir retrouvé en vie. Il a envoyé son patronus au château et un groupe est venu l'aider. Aucun de nous n'arrivait à y croire, ça ne semblait pas possible. Je... je ne me suis jamais senti aussi mal de toute ma vie, je vous avais laissé là ! » dit-il avec force, levant finalement les yeux vers Severus. « Je vous ai laissé et je suis parti sans me soucier de rien... »
« Êtes-vous fou ? » demanda Severus, et Harry cligna des yeux et s'arrêta net.
« Quoi ? » questionna-t-il, confus.
« Vous parlez comme si vous m'aviez quitté pour aller prendre le thé et des scones avec Molly Weasley ! » dit Severus, résistant à l'envie irrésistible d'attraper Harry par la peau du cou pour le secouer jusqu'à ce que mort s'ensuive. « Vous étiez au milieu d'une bataille, vous n'aviez pas d'autre choix que d'aller combattre la plus grande calamité qui ait jamais frappé l'humanité des sorciers, et vous vous en voulez de ne pas être resté pour voir la lumière quitter mes yeux ? »
Harry fit une pause avant de dire : « J'aurais pu... j'aurais dû revenir après... ».
« Après être mort ? » demanda férocement Severus. Il contourna le meuble et vint s'agenouiller devant Harry, qui se recula légèrement dans le fauteuil, surpris. « Je vous ai souvent traité d'égoïste et je suis prêt à admettre que vous ne méritiez que rarement une telle insulte. Vous aviez dix-sept ans », dit-il, sa voix s'adoucissant un peu, « et un terrible fardeau venait d'être placé sur vos épaules. Vous êtes sorti pour mourir ce jour-là, vous êtes bel et bien mort, et le fait que je ne le suis pas est une chose que j'essaie encore de concilier dans mon esprit. S'il vous plaît, n'ajoutez pas ma survie aux autres fardeaux qui vous tourmentent. »
Harry le regarda, la mâchoire serrée, les sourcils froncés. « Vous n'auriez pas dû être laissé là-bas, comme ça », murmura-t-il. « Ce n'était pas bien. »
« Il y a peu de choses qui sont "bien" dans une guerre, » dit Severus, regardant Harry avec une expression aussi ouverte qu'il ne se l'était permis depuis des années, « mais si vous avez porté cette culpabilité déplacée pendant les deux dernières années, alors je vous exhorte, pour mon bien et le vôtre, à la laisser partir. »
« Ce n'est pas si facile », dit doucement Harry, avec l'air de faire de son mieux pour retenir ses larmes.
Severus soupira et se remit lentement en position debout, faisant de son mieux pour ignorer les protestations douloureuses de ses genoux. Il baissa les yeux vers Harry, qui ressemblait soudainement au garçon dont il se souvenait, fragile et vulnérable, souffrant et frustré de lui-même à cause de cela.
« Je sais mieux que quiconque combien il est dangereux de s'attarder sur le passé. S'il vous plaît, ne fais pas les mêmes erreurs que moi, sachez qu'il n'y a rien que vous deviez vous reprocher. »
Harry n'avait pas l'air plus convaincu qu'il ne l'était quelques minutes auparavant, mais il hocha la tête avec résignation, le visage sombre. « Je devrais... je devrais commencer à préparer le déjeuner », dit-il doucement, se levant du fauteuil, Severus s'écartant pour lui laisser la place.
« Vous désirez quelque chose, monsieur ? » demanda Harry, s'arrêtant dans l'embrasure de la porte pour se tourner vers Severus.
Severus fit une pause et résista à l'envie de croiser les bras, se sentant irrationnellement sur la défensive à propos de ce qu'il allait dire. « Je pense qu'il est peut-être temps que nous apprenions à nous appeler par nos prénoms », dit-il doucement en voyant la surprise sur le visage de Harry.
L'homme resta silencieux un moment avant qu'un léger sourire ne se dessine sur ses lèvres. « C'est drôle de penser à vous en tant que "Severus" », dit-il, et quelque chose dans la poitrine de Severus frémit en entendant Harry dire son nom. Les joues de Harry rougirent légèrement et il ajouta : « J'ai tellement l'habitude de penser à vous comme au professeur Snape, l'homme qui m'a sauvé la vie un nombre incalculable de fois et que je ne peux m'empêcher de respecter, ou tout simplement comme à Snape, l'homme qui a fait de ma vie un enfer et dont je pensais qu'il vivait pour me tourmenter. Je n'ai jamais vraiment pensé à vous sous un autre jour. Enfin... ce n'est pas... strictement vrai, je suppose... » Harry se tut, les joues plus rouges que jamais.
Severus fit quelques pas de plus, intrigué de savoir ce qui pouvait bien faire rougir Harry comme une écolière. « Qu'est-ce que vous voulez dire ? » demanda-t-il, à voix basse.
Harry enfonça ses mains dans ses poches et baissa les yeux sur ses chaussures, tordant légèrement la bouche comme s'il était peiné par ce qu'il était sur le point d'admettre. « Je vous voyais comme le Prince », chuchota-t-il. « Après avoir découvert que c'était vous, je vous voyais toujours comme lui, comme la personne avec qui j'aurais pu être ami. Il m'a fallu beaucoup de temps pour le réconcilier dans mon esprit, mais je pense encore à vous comme ça... parfois. »
Severus n'avait aucune idée de ce qu'il était censé dire, il ne savait pas que Harry pensait à lui en ces termes et cela bouleversait son monde. Il devait dire quelque chose avant que le rougissement de Harry n'engloutisse tout son corps et que l'homme ne meure de mortification.
« Il est peut-être temps que nous apprenions tous les deux à nous considérer comme les hommes que nous sommes maintenant, plutôt que de nous accrocher à des idées fausses sur les hommes que nous étions », dit-il finalement, et Harry leva les yeux vers lui avec un sourire prudent.
« Je peux le faire », dit-il en hochant la tête. Il se racla la gorge et sembla faire de son mieux pour faire disparaître le rougissement. « Vous voulez déjeuner, Severus ? » demanda-t-il en faisant tourner le nom dans sa bouche pour essayer de s'y habituer.
« J'en serais ravi, Harry. »
Le sourire qu'il reçut en réponse valait bien la gêne qu'il ressentait en se laissant enfin aller à admettre que l'homme n'était pas simplement son ancien élève, n'était pas seulement le fils d'un homme qu'il détestait, mais était maintenant une personne à part entière. Reconnaître que l'homme s'appelait désormais « Harry » lui semblait être le premier pas sur un chemin qu'il n'était pas tout à fait certain de pouvoir emprunter. Il supposait que la seule façon de le savoir était de continuer à faire ces pas hésitants.
Et voici le troisième chapitre, en espérant que cela vous a plu !
