Hello !

J'aurais mis super longtemps à publier, navrée. Les études et la vie passent vite, j'ai donc fait poireauter cet écrit, mais pas pour rien, puisqu'il est très long !

Il y a la présence de quelques smuts dans ce chapitre –pas gratuits, qui apportent quelque chose à l'histoire. Le rating monte donc au M ! Cela dit, si vous voulez les sauter (sans mauvais jeux de mots), à votre aise !

Hormis ça, pas mal de fluff au rendez-vous :3.

RAR :

Hinatea : Merci beaucoup, c'est super gentil à toi ! La suite est là x3

Charlie Forrest : C'est en cours de réflexion :3 merci beaucoup pour ton retour en tout cas !

Bonne lecture !


5

I Love you like lalala

Alors qu'ils prenaient le thé chez Pentious, Niss se sentit soudainement mal à l'aise. Pas à cause de son petit-ami, non, certainement pas. Mais sentir ses mains sur son corps lui fit une sensation étrange. Pent l'embrassait passionnément, sa queue s'enroulait autour de son buste, ils étaient on ne peut plus collés. Ça ne le gênait pas. Sentir les mains du serpent taquiner ses hanches, un peu plus. C'était sans insistance. Subtile. Pourtant, depuis quelques temps, les contacts devenaient plus profonds, plus demandeurs, plus désireux. Niss n'en était pas contre. Aucunement. Il en était excité. Ils échangeaient parfois des regards ou des baisers qui n'auraient trompé personne. Desquels ils ressortaient tous deux un peu pantelant. Beaucoup. Avec une envie de plus et des sensations profondes. Il n'était pas un enfant, il savait très bien ce que ça voulait dire. Ni Pent ni lui n'abordaient le sujet, car ils n'étaient pas prêts — sans doute que le serpent oui, lui… c'était une autre histoire. Enfin, Niss ne savait pas. Il n'avait pas envie de sembler effarouché — il l'avait été, mais il avait de moins en moins de mal dans cette relation. Il en avait envie, oui. Toutefois, l'idée de le faire avec un homme, alors qu'il avait eu tant de blocage avec les filles, ça le faisait tellement flipper. Lui et le sexe, ça n'avait jamais été facile. Mais il faudrait qu'il aborde le sujet un jour avec son amant.

Avec douceur, il se libéra du baiser et apposa sa paume sur le torse de Pentious. Le serpent fronça les sourcils, la main venant caresser sa joue. Ses yeux se perdaient dans les siens, un moment privilégié qui n'appartenait qu'à eux. Niss était en confiance. Toutefois, une boule d'anxiété naquit dans sa gorge. Les doux membres qui le réconfortaient l'encourageaient à se détendre.

« Un problème, Niss ? »

Le susnommé eut un petit soupir. Il se mit à rougir, et se dit qu'à défaut d'être subtile, autant y aller à fond.

« Je crois que je suis pas prêt pour… tu sais.

—Comment ça ? »

Niss eut un soupir de frustration. Pourquoi Pent était-il si lent à la détente parfois…

« Pour baiser, merde !

—OH. »

Oui, Oh. Niss cacha sa tête contre le torse de son amant, la gêne lui brûlant les joues. Bordel, il n'avait jamais été aussi humilié de lui-même. Il avait un peu peur de ce que Pent allait dire, surtout après son exclamation de soudaine compréhension. Le serpent redressa son visage doucement, Niss lutant contre la pulsion de se dérober à son regard après ce qu'il venait de dire. Il se comportait comme une vierge apeurée, et cazzo di merda, ça lui plaisait pas.

« Nous ne sommes obligés de rien, Niss. » Se disant, il déroula sa queue, laissant ses hanches libres. « Je ne souhaite pas te mettre de pression.

—Je sais. Mais je voulais en parler, parce que, ben, ça fait un moment, nous deux. »

Pentious hocha la tête. Niss le regarda, attentif à ses expressions.

« Je ne dirai pas que ça ne m'a jamais traversé l'esprit. Cependant, il est plus sage de prendre notre temps. Comme pour le fait de s'embrasser.

—Ça ne te frustre pas ? »

Un baiser fut déposé sur son front.

« Bien sûr que non. Puis, nous ne sommes pas obligés d'aller jusqu'au bout d'un seul coup… on peut explorer. Quels sont tes expériences à ce sujet ? »

Ah, la question fâcheuse arrivait. Il ne dit rien, se contentant de se soustraire à la main de Pent sous son menton et de fixer ses pieds. Le sang bourdonnait à ses oreilles. Une exclamation étonnée de Pent le fit se concentrer sur lui, pas loin de le faire blanchir. Il crut avoir compris que l'autre avait compris. Redondance, mais bordel. Pentious s'exclama, légèrement plus pâle lui aussi :

« Oh bon sang, Niss… Pourquoi tu ne me l'as pas dit avant ? »

L'araignée bredouilla dans sa barbe inexistante, gêné au possible. Pour un mafieux et un démon en enfer depuis pas mal de temps, c'était la honte. Il avait peur que Pent soit dérangé de ça, alors il se justifia.

« C'est pas comme si j'étais complètement puceau. » Devant le regard de son petit-ami, il poursuivit : « Je… j'ai essayé, avec des filles. Pas plus loin que les préliminaires. J'ai jamais réussi à… enfin, tu vois. Pas faute de me forcer. Je pense que je suis impuissant. »

Pent encaissa, ayant tout de même un fin rictus.

« Il me semble pourtant quand je t'embrassais avoir déjà senti quelque chose contre ma queue…

—DIS PAS ÇA ! »

Arackniss avait gueulé. Cramoisi de gêne, il avait envie d'étriper Pent. Celui-ci rit gentiment.

« Tout ça pour dire que je ne pense pas que tu sois impuissant.

—Je sais pas…

—Rappelle-toi notre discussion sur les blocages, entre autre. Je pense qu'il s'agit du même problème. »

Niss soupira. Sans doute. Il avait peut-être raison. Il n'argumenta pas, laissant Pent continuer.

« Puis, être avec quelqu'un que tu n'aimes pas pour faire plaisir à ton père, on aura vu plus excitant.

—C'est sûr, » avoua Niss. « Mais je suis vraiment flippé d'avoir ce problème avec toi.

—Oh non, je te le redis, au vu de ce que j'ai senti, ça ne sera pas le cas.

—Pent, bordel de merde ! » Niss s'agaçait. « Ça me gêne ! Puis c'est pas la même chose avant que pendant ! »

Il le savait, ça, quand même. Le serpent eut un rire. Gentiment, il caressa la tête de son bien-aimé. Niss se déroba en grognant.

« Bref. Ça te dérange que… je sois pas… ?

—Non. Niss, prends cinq minutes pour respirer. Si je dis que je voulais le savoir, c'est pour ne pas te brusquer malgré moi. Je suis avec toi depuis quatre mois, ça fait bientôt un an qu'on se connait. Je t'aime. Et je ne ferai rien dont tu n'aurais envie. Ne te tracasse pas. »

Arackniss était cramoisi. Pentious ne lui avait encore jamais dit qu'il l'aimait, et lui, bien peu à l'aise, ne s'y était pas aventuré. En plusieurs mois de relation, ça pouvait se comprendre que de tels mots finissent par éclore, plus tôt ou plus tard en fonction des affects. Il n'en était pas rebuté. Mais gêné, ça, oui. Il resta coi, le souffle coupé, la gorge sèche. Il ne parvint pas à lever son regard vers son amant. Pent se pencha néanmoins pour embrasser ses lèvres, une main douce sur sa hanche le faisant frissonner.

« Regarde-moi, Arackniss. »

Il employait le nom complet, maintenant. Quand Pent ne l'appelait pas Niss, c'est qu'il était très sérieux. Ce dernier redressa huit pupilles chancelantes dans sa direction.

« Ça te gêne, que je te dise ça ?

—Je… T'sais comment j'suis. » Il bougonna. « Mais Pent, moi aussi, je… »

Il l'aimait aussi, ça, il le pensait depuis un moment, ça ne datait pas d'hier.

« Je comprends. »

Une main caressait ses cheveux, la fourrure épaisse se pliant à la paume. Arackniss soupira. Il secoua la tête.

« Nan, tu comprends pas. J'ressens ça depuis qu'on s'est mis ensemble. Je m'en veux de pas être foutu de passer au-dessus de ces blocages. Mais c'pas contre toi. T'es parfait avec moi. J't'aime aussi, Pent. J'ai jamais ressenti ça avant. »

Oh putain, on aurait pu faire cuire un oeuf sur ses joues. Il allait crever de gêne. Vraiment, sa dignité et son égo criaient outrage, son coeur hurlait pour qu'on le saigne, et le sang dans sa tête lui semblait proche d'exploser. Le sourire qui se peignit sur la face du serpent, ses yeux ourlés d'affection et le léger rougissement sur ses joues, lui apprit que la déclaration avait été bien reçue.

« Tu es si adorable, » ronronna le serpent en fonçant vers ses lèvres, « ça me donne envie de te couvrir de baisers.

—Att- attends ! »

Trop tard. Un Arackniss cramoisi se fit voler la bouche dans le plus grand des calmes. Un baiser doux, d'abord, qui se mua petit à petit en caresse plus sensuelle. Les lippes du serpent se mouvaient sur les siennes, en un rythme harmonieux, léger. Avant de renforcer la pression, sa langue en V taquine faisant sursauter Niss dans le baiser lorsqu'elle pulsa contre sa lèvre inférieure. Il suivait le mouvement, sans qu'il n'en soit pas familier, sa gêne le faisait souvent prendre la place du guidé. Bientôt, l'appendice s'aventura au-delà de la barrière de ses dents, jouant avec sa consoeur. Un frisson remonta l'échine d'Arackniss. Il eut chaud. Le visage bouillonnant, sa veste lui parut infiniment lourde. Il s'agrippa au cou de son amant avec sa première paire de bras, l'autre occupée à poser ses mains sur le torse contre le sien. Pent l'étreignait, lui aussi.

Ils n'auraient pas pu être plus rapprochés. Plus unis. Ou si, ils auraient pu… et Niss se mit doucement, mais sûrement, à réfléchir à l'idée. Son bas-ventre eut une sorte de tiraillement qui lui sembla beaucoup trop agréable. Un couinement éclot dans sa gorge, mourant contre les lèvres de son amant, qui, avec leur proximité, avait dû entendre le petit son étouffé, en plus de sentir la vibration de son tressaillement. Contre le canapé, Pent se mit à le plaquer sur le coussin, couchant son corps au-dessus du sien. La taille de son bassin força Niss à écarter les jambes, ce dernier les enroulant autour de sa queue. Un frisson le saisit lorsqu'ils raffermirent le contact. Pent laissa partir ses lèvres après un temps, étant largement aussi pantelant que lui. Niss déglutit difficilement, tandis que le serpent tripotait le noeud papillon de son costume, pour faire un peu redescendre la température.

« Excuse-moi, je me suis un peu emballé.

—Ça ne m'ennuie pas… »

Bêtement, malgré sa voix bougonnante, Niss montrait ainsi qu'il ne crachait pas sur une petite répétition de l'embrassade.

Ils se sourirent, malgré la gêne présente en Niss. Il se posait nettement moins de question. Tout ce qui comptait, c'était le corps chaud de son serpent, ses lèvres douces, ses mains qui cajolaient son corps, et leurs souffles qui se mêlaient fiévreusement. Pour aujourd'hui, il allait laisser tout ça de côté. Il savait juste qu'il avait une putain de chance d'être tombé sur Pent, et aussi niais que ça puisse l'être, il en était heureux. N'aurait pas pu être davantage comblé. Lorsque la bouche du plus vieux se posa dans son cou, un nouveau mot d'amour résonnant à son oreille, il crut défaillir. C'était parfois si étrange, d'être amoureux comme ça. Il n'avait pas envie de dire adieu au sentiment, encore moins de s'en séparer. Alors il s'abandonnait. Les bras chauds du serpent le convainquaient qu'il en avait le droit. Que c'était naturel. Ça allait contre toutes ses craintes et bientôt, bientôt, il avait la sensation qu'il n'en aurait plus.


C'était humiliant. Avilissant. Gênant. Tout ce qu'on pouvait mettre comme adjectif du style, avec chiant en tête de liste. Parce que oui, ça le faisait bien chier. Arackniss avait comme une envie de taper dans un mur et de péter des bouches dans la plus douce des cordialités. Il n'avait pas la possibilité d'oublier qu'il était pas supposé être aussi stupide que ça, mais qu'il l'était quand même. Ses lacunes le rattrapaient. Elles le faisaient chier, ses blocages en prime. Ça faisait du démon l'humble possesseur d'un vocabulaire très fleuri. Quand il était frustré, niveau jurons, il dépassait Tony. Et là, il devait le voir. Ils avaient repris contact et passaient régulièrement du temps tout les deux. Ça leur faisait du bien. Leur lien retrouvait une tournure plus saine qu'il ne l'avait jamais été avant. C'était toujours bizarre, et Niss s'en voulait toujours autant pour la manière dont il avait pu se comporter avec son frère. Il était tout de même heureux de le voir. Même si, là, clairement, il y allait en traînant des pieds.

Il était toujours un peu angoissé quant à l'idée de sauter le pas avec son amant, et il se disait que son frère, qui avait nettement plus d'expérience que lui en matière de sexe entre hommes, pourrait lui donner quelques infos. Au vu de son caractère quelque peu — beaucoup — moqueur, ajouté à sa tendance à faire des commentaires des plus salaces, il se disait que Tony allait bien bien se foutre de sa gueule. Arrivé devant le Happy Hotel, il se racla la gorge avant de cogner, se faisant immédiatement ouvrir par Charlie d'un sourire éclatant. Elle le poussa à entrer en le tirant par la main, s'exclamant qu'Angel ne devait pas être très loin. Si Niss grimaçait quand on employait le faux nom d'Anthony, il laissait couler, comme ce dernier préférait visiblement que les autres l'appellent ainsi. Il resta dans le vestibule avec la démone, celle-ci l'abandonnant pour passer dans la pièce suivante. Un autre type, que son frère avait déjà appelé Alastor, passa et lui fit un sourire — enfin, il souriait toujours ce con. Et bon dieu qu'Arackniss l'aimait pas. Il était grave effrayant. Pourtant, Tony semblait l'adorer, et s'échinait à le charmer. C'était très bizarre. Enfin, il n'allait pas juger. C'était pas ses affaires, en plus.

« Oh, Niss, t'es là ! Ton sugar Daddy, il est déjà reparti ? »

Arackniss sursauta. Anthony venait de lui asséner une claque amicale dans le dos. Avec un petit sourire en coin, il se foutait déjà de sa gueule complet. Ce n'était pas la première fois qu'il faisait cette blague sur Pentious. Certainement pas la dernière. Il soupira, s'agaçant malgré lui :

« Pent n'est pas un sugar Daddy.

—Si tu le dis… C'est quel genre de Daddy, dans ce cas ? » minauda Tony avec un petit clin d'oeil, et ce sourire qui devenait démesuré allié à une posture équivoque. « Sévère ? »

Niss grogna. D'autant que le sous-entendu ne lui échappait pas. Avec ce dont il voulait parler, ça rendait cette connotation encore plus piquante. Il s'empourpra.

« Tu fais exprès, bordel.

—Totalement. »

Le petit silence fut comblé par le ricanement amusé d'Anthony. Ah ça, ça commençait déjà mal. Arackniss se sentait plus du tout d'aller plus loin dans son initiative avec ces conneries. Semblant réaliser qu'il l'avait mis de travers, Tony lui fit signe d'approcher et à Husk — ce putain de chat qui tirait toujours la gueule — de leur servir à boire. Non sans flirter de manière totalement éhontée sur sa façon de tenir le goulot. Bordel, lui n'aurait jamais été aussi direct avec Pentious sur ses intentions. Oh, c'était bien pour ça que son frère lui serait utile. Ce faussé entre eux n'avait jamais paru à Arackniss aussi ridicule qu'à l'instant.

« Ta gueule, finit par claquer Husk en réponse aux avances de Tony, prends ce putain de verre et fous-moi la paix.

—Oh, Husky ! Ne sois pas si froid, chaton, je pourrai te détendre ~ !

—J'en ai rien à foutre. »

Comme si le rejet ne l'atteignait pas, il continuait à le harceler. À croire qu'il avait envie de s'en prendre une. Niss but le verre qui lui était servi d'une traite, l'autre araignée se tournant vers lui avec un sourire.

« Alors frangin, quoi de beau ? »

Il allait clairement avoir besoin d'un deuxième verre. Ou un troisième. Il marmonna entre ses dents, et attrapa la bouteille pour se servir. Il enchaîna le shot pour de se tourner vers Anthony, qui haussait un sourcil, l'air de se demander pourquoi il était aussi nerveux.

« J'aurais un truc à te demander, Tony.

—Oh ? » Il l'enlaça, se collant contre son dos tout en chuchotant : « Tu veux des conseils pour faire grimper au rideau ton étalon, huh ? »

S'étranglant littéralement, Niss poussa une exclamation outrée. Se mettant à rougir, il eut du mal à reprendre contenance. Anthony se poussa, se laissant tomber sur le siège à ses côtés, à moitié mort de rire et sérieux.

« Attends, sans déconner ?!

—Ta gueule, Tony. »

Husk leur lança un regard. Il soupira, prit une bouteille sur le comptoir et marmonna qu'il se cassait. Niss comprenait, lui aussi en avait envie. Sauf que c'était lui qui devait avoir cette conversation. Personne pouvait le faire à sa place. Puis merde, ils étaient frères. Il fallait juste qu'il mette un peu d'égo dans sa poche. Ce qui ne l'empêchait pas de garder une face constipée avec son frangin qui s'esclaffait. Il lui tapota l'épaule gentiment tout en ricanant.

« Ok, ok, calme-toi et dis-moi ce qui te pose problème. J'devrai bien avoir un tuyau, ou deux, fit-il avec un clin d'oeil, à t'filer.

—La question n'est pas là, » rougit Niss. « J'ai juste besoin de savoir un truc.

—Huh ? »

C'était pas si dur. C'était, putain, pas si dur. Il allait y arriver. Prends tes couilles, Niss, prends tes couilles.

« Avant que je parle, promets-moi que tu vas pas te foutre de ma gueule. »

Le visage de l'araignée blanche, ses yeux fixés sur lui, un sourire qui se mua en une petite moue, avec un petit mouvement d'épaule, tout indiquait qu'il ne la tiendrait pas forcément. Arackniss poussa un soupir. Il se cramponna à son verre comme si sa vie en dépendait.

« Comment…ça se passe… au pieu ? Avec un autre mec, je veux dire ? »

Et ça y est, la bombe était lâchée. Niss déglutit.

Dans la tête de son vis-à-vis, sans qu'il ne le sache, ce fut un gros blanc. Ok, Angel croyait s'être douté que le serpent était le premier mec qu'il se tapait, mais à ce point là ? S'il lui posait la question, c'est qu'ils n'avaient toujours pas baisé ? Putain, Pentious devait avoir les couilles bleues à force… Il avait soudainement du respect pour le type. L'indexe au coin des lèvres, Angel fixa son frère. Il voulait pas le mettre de travers, surtout qu'il avait l'air d'en chier — presque littéralement, vu sa contraction — et qu'il pouvait se douter que c'était un sujet sensible. Une petite moquerie ne faisait pas de mal, toutefois.

« Bah, t'sais comment ça se passe avec les meufs. Un trou. Ta queue. Ou ton trou, la sienne. Peu importe. Du lube, des capotes et éclatez-vous. »

Niss sembla changer de couleur. Ricanant, Angel s'apprêta à lui tapoter de nouveau l'épaule, pensant qu'il s'en remettrait quand même s'il était un peu cash. Il en avait entendu d'autre de lui depuis qu'ils se voyaient. Toutefois, son frère baissa la tête, ce qui l'interpela réellement.

« J'ai pas fait grand-chose avec les meufs. »

OH… OH.

Oh.

Oh, bon dieu. Angel assimila l'information. Son frère était… Bordel de merde.

« T'es puceau ?! Putain, Niss !

—Je t'ai dit de pas te foutre de moi ! Et gueule pas ça comme ça ! »

Le visage meurtrier, Arackniss semblait dorénavant proche de la combustion spontanée. Oh non, c'était si drôle ! Bon, à voir, oui, dans la peau de Niss, ça devait pas l'être. Angel consentit à s'adoucir. D'autant qu'en soit, hormis que ça soit étonnant, il ne rirait pas du fait que son frère n'ait jamais baisé. Chacun sa vie sexuelle, ça ne le regardait pas.

« Rien rien ? » Devant le regard de son frère, il ajouta : « Juste pour savoir adapter mes explications, c'tout, j'te juge pas.

—Juste une branlette. Une pipe, où j'ai pas.… Ben, tu vois. L'truc, » avoua Niss, « c'est que… les seules que j'ai vu, c'étaient des putes, pour faire plaisir à Pope. Du coup, je, euh, ça m'faisait rien, fin, je–

—Tu pouvais pas bander. »

À la grande surprise d'Angel, Arackniss ne gueula pas. En se passant une main dans les cheveux, l'araignée soupira. Y allait falloir être un peu plus précis que ce qu'il avait été. Il comprenait mieux la situation. Si c'était totalement nouveau pour Niss… Logique que ça le mette dans un état pareil.

« C'normal, t'sais. Si elles te plaisaient pas, et si t'es bien bien gay…. Moi aussi, t'm'files une meuf, j'bande pas. Ça s'force pas.

—Je suppose…, » l'araignée noire poussa un autre soupir, « mais j'ai la trouille d'être impuissant avec lui. Et j'sais pas du tout comment il faut y faire. »

Angel ricana.

« T'sais, demander ça à un acteur de porno gay, c'est comme demander à un gars d'une secte s'il faut croire en son dieu. Ça peut être une bonne idée, mais d'mander à quelqu'un qu'est dedans jusqu'au cul, c'pas la meilleure façon d'avoir un avis accessible aux débutants, frérot. Surtout qu'toi, c'est du début-début, t'vas tout découvrir avec ton serpent… On est pas sortis de l'auberge. »

Niss, vexé, se fâcha.

« Putain, Anthony, tu me casses les couilles avec tes commentaires vaseux ! J'aurai jamais dû te demander ça, t'es pas capable de pas abuser deux minutes, cazzo di puttana ! »

Et v'là qu'il râlait en italien, maintenant. Merde, il l'avait mis en pétard. Angel se calma. Il aimait bien comme avec lui, il redevenait Anthony. Sa véritable identité avant son nom de démon. Il retrouvait son grand frère, et ça lui faisait vraiment très plaisir, au fond. Il regrettait pas d'avoir pardonné, de lui avoir laissé une seconde chance. Puis, bon, si Arackniss lui confiait ça, c'est qu'il lui faisait confiance. Il sourit. Certes, il ne se moquerait pas de sa virginité, mais de son embarras qui le faisait démarrer au quart de tour, ça…

« Te vénère pas, c'était pas méchant. J'vais t'aider, t'es mon petit frère.

—C'est moi le grand frère, j'te signale.

—Pas sur ce domaine, mon chou. »

Un nouvel étranglement le fit glousser.

« Je t'emmerde.

—En vrai, je parle surtout de la taille, t'sais, t'es vachement petit.

—Va doublement te faire foutre, Tony. »

Non, non, fallait pas qu'il se pète un fou-rire, sinon Niss allait se casser et il avait pas envie d'être méchant non plus. Effectivement, il abusait à peine. Il se racla la gorge, se forçant à reprendre d'une voix plus maîtrisée :

« Nan, mais, je déconne, je déconne, je vais être sérieux. S'scuse-moi. »

Arackniss poussa un soupir, aussi, Angel se reprit :

« Bon, déjà, je t'ai parlé du lube, va en falloir une bonne quantité. Ça fait un bail que j'ai commencé, mais j'sais qu'au début, tu douilles sévère, si tu te prépares pas assez, tu vas hurler. Pas d'plaisir, j't'assure.

—Ça fait mal ? »

Comment dire que ça faisait carrément pas du bien. Il émit un petit sifflement.

« Tu l'sens passer. Mais t'sais ce qu'on dit, la sodomie, c'est comme les sushi, c'délicieux si c'est bien préparé.

—Bordel, t'as pas des comparaisons moins obscènes.

—… Nm, non. »

Il lui expliquait, fallait pas demander la lune non plus. Arackniss restait agacé, ça se voyait. Il avait peut-être été un peu trash mais , il avait totalement raison cette fois.

« T'es grave vulgaire, Tony.

—Bah ouais, frangin. T'sais comment j'suis. J'suis cash, mais je t'écoute.

—Mouais. »

Angel lui caressa le crâne. Si Niss se déroba, il ne protesta pas.

« Allez p'tit frère. Ça va bien s'passer. T'es pas obligé de franchir l'pas d'un seul coup, p'tit à p'tit.

—Il m'a dit la même chose. Mais je me pose tellement de questions…

—C'normal. Demande à ton grand frère, » dit-il avec un clin d'oeil en désignant sa poitrine, « j'aurai les réponses.

—… Tu vas me lâcher avec cette histoire de grand frère. »

Angel sourit à Arackniss.

« Pose tes questions, j'arrête de déconner, promis.

—Ça fait deux fois que tu me fais cette promesse. » Angel eut une petite moue rieuse, Niss roulant des yeux.

« Le lube… faut en mettre beaucoup ?

—Ah, ça, prends un autre verre, je vais rentrer dans les explications profondes.

—Bordel… »

Un mauvais moment à passer pour Niniss, il pouvait s'en douter, mais certainement utile. Il en dirait rien à son frangin, pour pas l'inquiéter, mais Angel se souvenait très bien comment il avait morflé les premières fois. En étant très peu éduqué en matière de sexe anal dans sa jeunesse, les expériences s'étaient faites sur le tas. Avec leurs heurts et leurs débouchées merdiques. C'était en forgeant qu'on devenait forgeron, après tout, toutefois, il y avait la méthode douce et la méthode barbare. Il y avait été à la barbare — et des mecs qui s'y prenaient comme des manches ou avec. Putain, qu'il aurait adoré avoir quelqu'un pour lui expliquer comment s'y prendre. Ça lui aurait évité pas mal de mauvais moment. Raconter ça à un gars puceau était le meilleur moyen de le dégouter, cela dit, donc il allait s'en tenir aux renseignements, les confidences viendraient plus tard.

« Aaaah, alors, par où commencer. Faut en mettre sur tes doigts, les siens, bref, tu vois l'idée, et préparer le passage, si tu vois ce que je veux dire. Et vraiment préparer. Un petit doigt suffit pas. Faut un peu dilater tout ça pour que la queue puisse rentrer.

—Putain…, » Arackniss semblait déjà au bord de la syncope. « Ça… euh…

—Ça fait pas mal, s'il se démerde bien, si c'est ça qui te préoccupe. Faut qu'il y aille petit à petit. Un doigt par un doigt.

—Mouais, j'allais demander aussi… si ça suffisait.

—Hah, non…, » l'araignée blanche marqua une pause, « c'est mieux qu'il en mette aussi sur sa bite.

—Pourquoi tu parles comme si c'est moi qu'allait me la prendre… »

Niss eut une moue qui amusa Angel. Il pencha la tête sur le côté, réfléchissant un instant — faisant mine, en fait. C'était tout réfléchi.

« Une intime conviction, mon radar à bottom.

—Ton radar à quoi ?! »

Il éclata de rire. Arackniss était rouge de rage, de gêne, il ne savait pas trop, un subtile mélange des deux. Bordel, pensa Angel, je lui facilite pas la tâche. Mais je m'amuse trop. Décidant de rester gentil, bien que la tête de son frère qualifié de bottom resterait à jamais gravée dans ses souvenirs, Angel se retint de rire.

« Si tu recommences à–

—Attends avant de t'énerver, le coupa le plus jeune. Si j'dis ça aussi, c'est pare que c'est plus pratique qu'il guide. Si tu l'as jamais fait.

—Je suis pas…

—T'es pas sans aucune expérience, ok, mais c'est aller plus loin que d'habitude pour toi, y a pas de honte, Niss. »

Ce dernier se renfrogna, abandonnant la bataille. Sans doute rasséréné de ne pas se sentir jugé.

« Mouais. Et donc ? Je dois faire quoi d'autre ? »

Angel redevint un peu plus sérieux.

« Faut qu'il soit doux. Qu'il y aille pas comme un boeuf. Qu'il soit à l'écoute. Et que t'hésite pas à dire si t'as mal, si t'as besoin de faire une pause, ou d'arrêter. Si tu douilles comme un fou, t'amuses pas à tenter le diable, t'vois.

—O-ouais…

—Si t'es bien préparé, le rassura Angel, ça ira. Mais je peux pas te dire que t'auras pas mal du tout, quand c'est dedans, ton corps doit forcément s'ajuster. L'anus, c'est un muscle. Forcément ça s'étire pour prendre une queue et c'est dur au début. Mais ça s'habitue à force de pratique, je t'assure. Ce sera jamais comme du beurre, mais tu la prendras bien.

—Putain… »

Un sourire s'afficha sur le visage de l'araignée blanche. Son frère était déconfit. Il voulait pas non plus qu'il soit perdu ou qu'il ait d'autres questions sans réponse.

« T'as compris ?

—J'ai… même plus d'infos qu'il m'en faut, j'crois. J'ai jamais été aussi embarrassé.

—Tu m'diras comment ça se sera passé, en tout cas, » dit Angel croisant les jambes, « j'serai heureux d'me dire que j'aurai été utile.

—Ouais, on verra. »

Un petit silence éclata entre les deux frères, que le plus jeune rompit.

« Tu l'sens ?

—Pardon ?

—Bah, t'sais, toutes tes questions, tu m'le demandes pas pour jouer aux cartes après. T'le sens ? »

Niss se tut. Il parut réfléchir.

« Un peu plus. »

Du coin de l'oeil, Angel observa un silence, comme pour le pousser à en dire plus. Il l'avait peut-être embarrassé, fallait dire que c'était cocasse comme situation, mais il était là pour lui. Si Niss avait besoin de conseil et d'être rassuré, autant qu'il le dise franchement.

« Je te l'ai dit, » développa son frère après un petit silence, « j'ai un peu peur de ce qui va se passer et ça me rend très nerveux. Pent est adorable, mais…

—T'es peut-être pas encore prêt, t'sais. T'en as envie ? »

Le rougissement de son frère lui parut réellement mignon.

« Ouais… mais… tu vois…

—Si t'en as envie, c'est un début. Ça veut pas dire que t'es prêt. »

Arackniss parut se tâter. Aussi, de son côté, l'autre araignée décida de poser les bases. Parce que ça aussi, il aurait aimé qu'on le lui explique. Et étant dans une situation où il ne pouvait pas toujours dire non librement, c'était important à ses yeux que son frère, qui tentait vraisemblablement de construire un semblant de relation saine avec le ver de terre qui se prenait pour un overlord, sache qu'il avait le choix.

« Une autre chose, dit ainsi Angel, ce qu'est important, c'est l'consentement. C'ton corps, donc tu décides. Tu t'forces pas, s'tu veux pas, tu veux pas. Même s'il supplie comme un chien en rut. T'lui dois rien.

—Il n'est pas comme ça, jamais il ne me ferait ce genre de coup.

—Tant mieux, » son sourire était doux, « mais même. Toi aussi, t'sens pas forcé. Si tu veux pas, c'pas grave. Rien t'y oblige. Pense-y.

—C'est surprenant venant de toi. »

Arackniss croisa les bras sur sa poitrine, visiblement un peu perdu. Pour ne pas dire complètement largué par tout ça. Et ça se voyait qu'il l'était. Son frère ricana. Il croyait quoi, ce petit crétin ?

« Je suis peut-être une pute, mais ça veut pas dire que j'vais te conseiller d'écarter les cuisses si tu l'sens pas, imbécile.

—C'est pas ce que je voulais dire… »

Niss eut l'air de sentir un peu coupable d'avoir pu laisser penser ça, mais Angel secoua la tête, haussant les épaules. Il n'était pas vexé pour deux sous. Le plus âgé insista tout de même :

« Non, vraiment, Tony, je voulais pas dire ça.

—On m'a dit pire, » rétorqua le susnommé, ce qui eut pour effet de pousser Niss à s'excuser, mais Angel le devança : « J'sais bien que tu voulais pas dire ça, t'en fais pas. »

Et c'était vrai. Ces paroles n'étaient rien d'autre que de la maladresse. Puis, d'un côté, bien que ce soit un biais idiot, ça pouvait se comprendre que venant d'un travailleur du sexe, un 'ose dire non' fasse un peu bizarre. Il était habitué à ce genre de réactions. Pas de la faute de Niss. À sa grande surprise, ce dernier posa une main hésitante sur l'une des siennes. Angel se sentit sourire, sincèrement. Son frère était adorable quand il rangeait sa fierté mal placée. Il aurait adoré qu'il soit toujours comme ça. Mais non, il fallait qu'il râle, qu'il tempête, qu'il fasse son tsundere en puissance. Ah, que c'était drôle de l'enrager aussi. Ce pourquoi, la curiosité le piquant, il posa la question qui lui brûlait les lèvres :

« Dis, t'as déjà vu s'il en avait… deux ?

—Pardon ? »

La tronche de Niss, figée par la stupeur, fut à se claquer le cul de rire.

« Les serpents en ont deux, tu savais pas ? Le tien doit être fait pareil, nan ?

—MAIS PUTAIN, TONY ! J'EN SAIS RIEN EN PLUS !

—C'pour la science, j'me renseigne moi. »

Entre divers insultes, dont un beau 'va te faire foutre, enculé' auquel Angel rétorqua que ça serait bientôt lui qui connaîtrait cette joie, ils finirent par revenir à leurs moutons. Il servit à boire à son frère, et but également. Bordel, tout ça, ça lui avait refait la journée.

« Tu m'diras, en tout cas, dit-il avec un clin d'oeil.

—Comme si j'allais te raconter ce genre de trucs, espèce de pervers ! » gueula Niss. « Pis j'sais pas si je le verrai tout de suite, il m'a dit qu'on irait petit à petit.

—C'est bien ça. Une pipe ou une branlette, c'est une bonne idée pour commencer. Blague à part, s'il en a vraiment deux, t'amuses pas à prendre les deux en même temps, tu vas pas y arriver.

—Tu crois quoi ! J'sais même pas si je vais le.. euh… bref, je sais pas pourquoi je parle de ça avec toi. »

Angel gloussa, se servant un autre shot de whisky. Le goût âpre lui faisait du bien.

« Bah, t'es venu me voir pour parler de sexe, c'est logique. Si tu veux des conseils pour bien sucer ou pour avoir un bon coup de poignet…

—J'ai une main droite aussi, pour ça, j'te ferai dire, » s'énerva Niss, « et genre, y'a une manière de…?

—J'vais te montrer ! »

Se disant, l'araignée blanche attrapa une banane qui traînait dans un saladier. Sous l'oeil circonspect d'Arackniss, il la pela lentement, et la porta à sa bouche. Lentement, il déposa ses lèvres sur le bout, l'embrassant, pour enrouler délicatement sa bouche autour du sommet. Puis, il poussa la banane à l'intérieur, faisant bien exprès d'accompagner la pénétration du fruit avec sa langue. Niss écarquillait les yeux, les lèvres retroussées, les sourcils froncés, et putain, il faillit s'étouffer en explosant de rire.

« Comme ça, souffla-t-il, faisant ressortir la banane avec un bruit de succion, tu fais gaffe à pas mettre les dents.

—… Je crois que je vais vomir. »

Niss regarda ailleurs lorsqu'il engloutit la banane pour de bon, trouvant dommage de gâcher. Puis, si Husk ou Alastor passaient par là — pas besoin d'être dieu pour savoir qu'il espionnait tout le monde assez régulièrement, celui-là — ils verraient ses prouesses et ça les motiverait à le sauter. Même son frère aurait bientôt plus de sexe que lui, si on oubliait son taffe. Il n'aurait pas été contre que l'un des deux se bouge le cul, ou le sien, que diable. C'était pas trop demandé, merda.

« Mais non, tu vas pas vomir, » dit-il en avalant goulument, « si tu vas doucement, tu–

—Je veux dire, à cause de toi !

—Prends donc mes conseils en compte, frérot, ça te servira.

—Mouais, je verrai bien. Mais, Tony… ? »

Le susnommé leva les yeux vers lui, tombant sur un regard d'arachnide bas, gêné et hésitant. Il fronça les sourcils insistant, se demandant de quoi il était question avant que son frère ne se lève et lui caresse le crâne.

« Je te remercie pour tout ça. Tu m'as beaucoup aidé.

—Avec plaisir, mon frère. Quand tu veux. »

Arackniss lui sourit pudiquement, Angel rendant l'attention. C'était excessivement rare que Niss ait des gestes affectueux envers lui, il n'aurait jamais cru que ça arriverait surtout deux fois d'affilée. Semblait qu'en effet, il évoluait pas mal. Il était sincèrement content de l'avoir aidé, s'il ne manquerait pas de le taquiner de nouveau et de lui demander des infos — pour la science, aussi pour vérifier que son petit copain ne s'était pas comporté comme un sac à merde avec lui —, il serait ravi si tout se passait bien pour lui. Avec les infos qu'il avait eu, il avait de quoi passer un bon moment sans que rien de dramatique ne se produise. Pis, si l'autre était plus expérimenté, il aurait déjà une base. Ça devrait bien se passer.

Ils changèrent de sujet, surtout parce que Charlie les appela depuis la pièce voisine pour leur demander s'ils voulaient un thé. Ils profitèrent une bonne heure, Alastor et Vaggie se joignant à eux bon gré mal gré. Il en profita pour draguer Alastor, ce congélateur émotionnel restant insensible à ses charmes. Il le ferait succomber, un jour, il l'aurait ! En tout cas, c'était mal le connaître de partir du principe qu'il lâcherait le morceau. Alastor ne pourrait pas être plus têtu, et Husk non plus. Puis, le serpent se pointa pour récupérer son cher et tendre. S'il leur coula une oeillade appuyée, Niss lui donnant un coup de coude discret, l'araignée blanche raccompagna son frère et son amant jusqu'à l'entrée.

Lorsqu'Angel croisa le regard de Pent, il lui dit d'un air mortellement sérieux que s'il blessait son frère, il aurait de ses nouvelles. Pentious, bien que légèrement pris de court, assura que ça ne lui viendrait même pas à l'esprit, visiblement touché par la considération de l'autre araignée pour Niss, tandis que celui-ci parut au bord de l'arrêt cardiaque. Ils se seraient bien marrés, en cette belle journée.


Deux semaines s'étaient écoulées depuis la discussion d'Arackniss avec Anthony. Il se prélassait en compagnie de son amant au lit, après une bonne nuit de sommeil. Très confortablement pelotonné contre le serpent, l'araignée poussa un soupir de bien-être en resserrant son étreinte. Pent dormait encore. Ils s'étaient embrassés jusqu'à s'endormir l'un contre l'autre, hier. Les mains du serpent avaient rasé délicatement sa taille, touchant sa peau à travers le tissu de son pyjama, tandis que quelques baisers avaient trouvé le chemin de son cou. Oh, les sensations légères mais piquantes l'avaient déstabilisé, sans qu'il n'en soit rebuté. Quelques caresses de l'épiderme, une sensation douce, plaisante, enivrante. Il y aurait bien succomber si le sommeil ne l'avait pas emporté. Il avait rudement réfléchi. Il commençait à se sentir prêt à aller un peu plus loin avec son amant. Le faire comprendre au concerné, ça, c'était plus compliqué. Oh, s'il avait initié ce genre de contact, c'est que Pent devait se douter de ce qu'il faisait, il n'était pas idiot. Niss, lui, loin de l'être également, avait quelque difficulté à verbaliser ce genre de besoin. Surtout pour une première fois. Son visage devenait cuisant rien qu'à l'idée d'ouvrir la bouche pour exprimer ça.

Cependant, connaissant son amant, les choses ne se feraient pas s'il n'indiquait pas qu'il était désireux qu'elles arrivent. Il faudrait bien qu'il se fasse violence, s'il voulait que Pent comprenne, parce qu'il ne pourrait pas deviner ce qu'il pensait. Ce n'était pas si compliqué. Il en était capable. Il pouvait le faire. C'était juste une question de courage, d'oser se lancer. Il n'en était pas dépourvu. Bon, tant que Pent reposerait contre son torse, ça ne risquait pas d'arriver, il n'aimait pas le réveiller quand il était si ingénument endormi. De son côté, il profitait de la tendresse qui lui était offerte, du câlin et de la chaleur de son compagnon. Il sentit que la tête du serpent bougeait contre son torse. Ah, il se réveillait, le moment coton commençait. D'abord, il eut un petit grognement en reprenant conscience, regardant autour de lui. Arackniss lui caressa les cheveux gentiment, sa main mimant avec difficulté des gestes tendres auxquels il n'était que peu habitué. Pentious sourit face à son visage rougissant. Il se redressa légèrement pour l'embrasser, sa bouche épousant la sienne avec douceur et sa langue taquinant l'ouverture de ses lèvres. Rien que la tentative lui mit le bas-ventre en feu. Il était définitivement complètement consumé par l'attraction physique entre eux. Il retint un léger gémissement en sentant la langue frôler un point sensible.

« Bonjour, Niss, » dit-il avec un léger ricanement. « Bien dormi ?

—'Jour, » il était cramoisi. « Parfaitement. Toi ? »

Pent s'étira, sa queue dépassant des draps et tombant sur le sol. Il la redressa, s'en servant pour soulever la couette et se remettre dessous, une grimace frileuse lui transformant les traits. Le serpent était toujours très sensible au froid, c'était adorable aux yeux de Niss. Ses moues caractéristiques étaient si mignonnes, il avait un petit froncement de sourcil, les pupilles braquées devant lui, et la bouche pincée tout en voûtant sa tête dans ses épaules comme si ça allait l'aider à avoir un peu moins froid. Tentative vaine, assurément. Surtout qu'en tant que serpent, il avait le sang-froid. L'ironie frappante possédait son charme. Dans ces moments, Niss mourrait d'envie de lui pincer les joues. Ils se chamaillaient de temps en temps, Pent lui reprochant d'être brutal avec ses pichenettes envoyées çà et là. Il les lui rendait volontiers, il fallait dire qu'ils se pliaient tous deux au jeu. C'était appréciable pour l'araignée de se dire qu'il pouvait à la fois être doux avec son amant et aussi… laisser sa brutalité de mafieux exister. Il n'avait jamais été éduqué pour être tendre. Il apprenait sur le tas, bien sûr. Ça finissait par devenir plus naturel. C'était amusant aussi de taquiner son amant. Pent attrapa habilement ses lèvres, un petit sourire en coin.

« Tu sembles de bien bonne humeur, mon petit sniper.

—O-ouais…, » rougissant davantage, Niss hocha la tête, « je… j'adore me réveiller dans tes bras.

—Tu es beaucoup trop adorable. »

Ce qu'il allait dire l'était sans doute moins. Et en absence de tact, il ne savait pas trop comment amener le sujet.

« T'sais, j'ai pensé…

—Hm ? » De sa main, Pentious rasait ses hanches. « Quoi donc ?

—Tu… voudrais me baiser ? »

Une bruyante déglutition retentit dans toute la chambre. Pent le fixa avec les yeux ronds.

« Niss.. tu es sérieux ? »

Arackniss se battit contre le réflexe de baisser les yeux. Il s'était lancé sur le sujet, il allait assumer comme un grand maintenant. Pas la peine de se dérober.

« Bah… j'ai pas mal réfléchi. J-je me suis dit que…

—Rien ne presse, Niss. Ne t'en fais pas.

—Mais je m'en fais pas ! » beugla le susnommé en frustration. « Je pense que je suis… prêt. Pas à aller jusqu'au bout mais…

—Tu veux essayer. »

Arackniss hocha la tête, littéralement en train de cuire.

« Ouais. J'ai envie de… enfin…

—Tu es vraiment adorable, » susurra le serpent.

Son visage ourlé par l'affection, il laissa sortir sa langue pour lui lécher la joue. Il en ressortit en pestant pour quelques poils qui s'étaient coincés sur son appendice. L'araignée dut se retenir de lui lâcher un 'bien fait' pour le moins puéril, mais qui l'aurait défoulé.

« Arrête ! » s'agaça Niss, croisant les bras sur son torse. « Y'a strictement rien d'adorable là-dedans ! »

Le serpent, ayant fini d'essuyer sa langue, l'embrassa tendrement. Niss rougissait comme jamais il n'avait rougi. Il aurait bien voulu gueuler au vu du visage bien trop tendre de son amant, mais la main de Pent dépassa doucement les muscles de ses hanches, lui coupant le souffle. Il déglutit difficilement, son partenaire remarquant ses réactions.

« Si c'est trop pour toi, » dit gentiment Pentious, « dis-le moi. Je ne veux pas te brusquer.

—Embrasse-moi, imbécile. »

Se disant, Niss attrapa lui-même les lèvres du serpent avec habilité. Il n'en fallut pas plus. Les mains fouillaient délicatement sa chair, à la recherche de ses points sensibles. Ce n'était pas la première fois qu'il caressait son corps, qu'il lui tenait la hanche durant une embrassade, effleurait ses reins, ses côtes, mais pas avec la même connotation charnelle, en quête de de découverte, d'affects nouveaux. Niss blêmit lorsque la langue du plus âgé parcourt l'os de sa clavicule jusqu'au creux de sa nuque. Il sentit ses dents raser la peau pulsante, une vive chaleur naissant en lui. Il n'était pas effrayé. Intimidé, incertain, oui. Il voulait quand même plus. Son partenaire l'embrassait çà et là, attentif à ses réactions, de petits soupirs fuyaient la cage de ses dents serrées. Pent mordilla la peau de son torse, sa main se posant le long de sa cuisse, caressant délicatement vers l'intérieur. Niss écarta les jambes, dans un réflexe qu'il ignorait en lui pour se rendre accessible.

Il déglutit durement, les doigts de Pentious glissant de concert sous le tissu de son caleçon. D'autres baisers se posèrent dans son cou, la main libre serpentant sur son torse découvert. Il se laissait faire, tentant un peu gauchement de rendre ses caresses à Pent. L'autre démon vint attraper ses lèvres, descendant délicatement sa main sur son entrejambe. Arackniss sursauta, un peu pris de court, mais il se força à se détendre. Pent ne bougea pas, se contentant d'embrasser sa joue avec une grande tendresse.

« C'est bon, Niss ? Ça ne te dérange pas ? »

Sa voix était douce. Il l'embrassa de nouveau.

Hésitant à peine, le susnommé secoua la tête, les joues brûlantes. Il en avait envie. Très envie. Ce n'était pas le problème, vraiment pas. Avec timidité, il raffermit le toucher de la main de son amant, avalant encore une fois sa salive avec difficulté.

Pent et lui. Allaient avoir un rapport sexuel. Il allait laisser un autre homme le toucher. C'était si intime.

Son petit-ami, certes. Mais il allait enfin… s'abandonner à ses pulsions. Chose qu'il n'avait encore jamais pu faire. Ce n'était pas la première fois qu'il se retrouvait en situation d'une telle interaction avec quelqu'un, celle-ci était voulue. Toutefois, relâcher la bride, même après des mois à dormir dans le même lit à moitié nus, c'était dur. Sa respiration se bloquait un peu dans sa gorge, au milieu de son poitrail, ses lèvres étaient sèches… il était un peu anxieux. Rien qu'un peu.

Sans en être rebuté, il était… intimidé. Toujours. Son coeur battait fort, si vite, dans sa cage thoracique. Il en aurait presque oublié qu'il n'était pas vivant. Mais entre les bras de son amant, il l'était. Il ne paniqua pas lorsque Pent souleva une première fois son caleçon, ni lorsque ses doigts effleurèrent la zone cachée par le tissu. Il ne remarqua qu'à peine trop tard qu'il n'arrivait presque plus à respirer, parce que Pent fronça les sourcils en l'embrassant.

« Niss, ça va ?

—Je…, » il se mordit la lèvre, l'angoisse affluant dans sa gorge. « J'ai envie.. mais…

—Doucement, Niss, prends ton temps. Respire bien. »

L'araignée obéit. Il prit le temps de prendre une inspiration, pour recouvrer son calme. Ça allait, il avait déjà l'habitude de la proximité avec son amant, il n'en était plus à péter un câble à l'idée d'être avec un homme. Aller plus loin le rendait un peu incertain et certaines pensées resurgissaient. Surtout la crainte de l'inconnu, de l'intimité. Un mélange qui le rendait insécure. Il s'en voulut à lui-même de ressentir ça.

« Ça va, j'ai juste eu un coup de pression.

—Ce n'est pas grave. Dis-toi qu'on est obligés de rien. »

Arackniss opina. Le caractère rassurant de Pent l'aidait à se décontracter. Il savait qu'il ne le forcerait pas et la question d'être forcé ne se posait même pas. Il était prêt. Juste, très anxieux. Ça risquait de se voir. Prenant son courage à deux main, il poussa celle de Pent dans son sous-vêtement.

« Touche-moi. Je suis anxieux, mais je veux que…, » il se stoppa, rougissant.

Pentious s'empara de nouveau de ses lèvres avec amour. Sans enrouler sa main autour de sa verge, il alla seulement masser son pubis, ses aines et la zone proche de la base. Retenant son souffle, Arackniss essaya de se détendre, voyant que son partenaire ne souhaitait pas aller trop vite. Avec délicatesse, Pentious finit par saisir sa verge. Dans l'esprit d'Arackniss, ce fut un blanc. Une sensation étrange l'envahit, avant un bref plaisir. Il faillit sursauter, mais se retint aux lèvres de son amant. Pent était incroyablement doux. Comme toujours, toutefois, dans ce contexte, c'était assez perturbant. Pas dans le mauvais sens. Juste étrange. Il appréciait ça, tout de même. Il se laissa faire, le souffle court, des frissons dans le ventre et une sensation raide dans les jambes. Le coeur en plein tambourinage, il ferma les yeux durement, une main douce entamant un rythme saccadé, expérimental, sur sa verge. Un plus grand plaisir se forma en lui, lui faisant plisser les yeux. Pent embrassait son cou, inlassablement porteur d'une tendresse, tandis que lui restait figé, détendu et à la fois si étrangement troublé… Il cessa de penser lorsque le mouvement de poignet de Pent commença à devenir vraiment bon.

Un son jaillit de sa gorge sans qu'il ne le contrôle, le serpent lui souriant de manière amusé, il le voyait du coin de l'oeil. Il aurait bien râlé, toutefois, il n'en eut pas envie. L'araignée fut celui qui attira le visage de son compagnon vers le sien, bougeant maladroitement sa deuxième paire de bras vers le bas de son corps, pour chercher à exciter ses zones érogènes. Le serpent frissonna, sa main cessant sa torture bienfaisante. Il vint chercher celle de Niss pour la poser le long d'une petite fente qu'il avait déjà remarqué, mais pourtant quasi invisible quand on ne la cherchait pas.

« Ici, dit-il en guidant les doigts de Niss contre la paroi, se trouve mon cloaque. C'est très… hm… étrange, mais c'est l'inconvénient qui va avec ce corps de serpent. »

Il eut un soupir, signe qu'il regrettait sans doute son humanité. Niss pouvait le comprendre. Le corps d'un être humain et celui de son âme une fois en enfer n'avaient plus rien à voir. Il avait été fort surpris de constater que les siens étaient tous devenus des arachnides, en plus de n'avoir jamais vraiment compris pourquoi. Des mystères insolvables, assurément. Peut-être que son âme avait toujours eu les pattes noires. Que celle de Pent rampait. Il l'ignorait. Qui aurait pu dire ? Même Dieu devait pas être foutu de le savoir. Il se laissa guider, poussant le bord de son doigt contre la fine ouverture qui s'élargit sans protester. Cela lui fit écarquiller les yeux, Pent esquissant un regard gêné. Ah, il n'était pas le seul ! Il en eut un rictus léger. Avec douceur, il tenta de pénétrer une phalange, surpris par la moiteur qui s'échappait de l'entrée. Mais avant qu'il ne puisse faire davantage de geste, son amant l'arrêta, le gland de deux pénis commençant à poindre. Avec les yeux exorbités, Niss regarda Pent les guider à l'air libre en titillant sa propre paroi. Oh bordel, Tony avait eu raison, il en avait vraiment deux ! C'était si bizarrement fait ! Putain qu'il voulait pas penser à son frère maintenant, mais la seule image qui lui venait en tête était leur discussion. La bouche sèche, il s'exclama sans même y réfléchir, ruinant le moment :

« T'as deux… teub ? » Il était éberlué. « Sérieux ?

—Deux quoi ? » Pentious, semblant ne pas du tout comprendre le mot, piqua un fard. « Si tu fais allusion à mes pénis, je suis un serpent, tu sais… »

Oh bordel… Arackniss blêmit.

« Si ça t'inquiète, tu ne prendras jamais les deux d'un coup.

—HEUREUSEMENT ! »

Ça lui avait échappé. Niss avait crié, les joues rouges et une image mentale atroce en tête. Pent tapota son crâne, comme pour le rassurer.

« Sérieusement, Niss, nous ne sommes même pas obligés d'aller au bout maintenant… N'aie pas peur, je ne cherche pas à te brusquer. »

Il semblait assez mal à l'aise et Niss ne voulait pas qu'il pense que ça le rebutait. Ce n'était pas vraiment le cas.

C'était juste… étrange.

« J'ai pas peur, mais disons que, je m'y attendais pas.

—J'en conviens, ça surprend. »

À peine un peu. Son ton était nerveux. Arackniss eut toutefois un sourire, tendant la main vers l'un des membres de Pentious.

« Je peux… ? »

Le serpent hocha la tête, l'air soulagé de le voir prendre de l'initiative. S'emparant encore de ses lèvres, il reprit ses mouvements de bras, Niss entamant les siens. Au détour d'une bonne minute, ils se mirent à explorer l'autre et chercher à attiser leur plaisir mutuel. Niss se réjouissait considérablement d'avoir plus de deux bras, c'était rudement pratique avec un partenaire à deux pénis. Il touchait les membres, un peu désarçonné de les sentir aussi épais, pulsant contre ses doigts. L'araignée déglutit quand Pent vint déposer un doux baiser sur sa joue, chuchotant à son oreille qu'il était adorable. Ça le fit rougir considérablement. Il s'abandonna dans l'instant, profitant de la douceur de l'échange. Il n'y avait rien qui aurait pu le perturber. Aucune pensée, aucun affect. Tout n'était que bien-être.

Au bout de quelques minutes, leurs jouissances maculèrent leurs mains. Niss respirait difficilement, Pent tendu, la collerette déployée, ses yeux mis-clos jugèrent le serpent avec amusement. Il sentit un baiser humide contre son front et s'enfouit dans le matelas, le corps de son amant retombant à côté du sien. Il eut froid, mais des bras étreignirent son corps. Un sourire fendit ses lèvres alors qu'il alla rechercher celles de son compagnon. C'était agréable. Il ne pouvait pas le nier, n'en avait aucune envie. Le câlin s'éternisa, jusqu'à ce qu'ils sombrent dans les bras l'un de l'autre, sans même prendre le temps de changer les draps. Arackniss eut à peine le temps de penser qu'il était heureux du naturel de la situation. Ça n'avait même pas été si embarrassant qu'il aurait pu le croire. Pent le câlinait machinalement en dormant. L'araignée enfouit sa tête dans le cou du serpent, inhalant son odeur, les muscles faciès tendus de gêne mais en même temps… d'une gêne bienfaisante. Il était heureux. Sincèrement. Avoir expérimenté l'orgasme dans les bras de son amant, c'était une sensation géniale. Il avait presque envie de recommencer. Mais trop sommeil pour ça actuellement. Il eut un autre sourire, et succomba.

La lumière du jour ne le réveilla que de longues heures après. Les rayons des cieux infernaux indiquaient qu'il devait être plus de midi. Ils avaient hiberné longtemps. Lui plus que le serpent. À travers la cloison, il entendait l'eau s'écouler depuis la pièce voisine. Pent était visiblement parti se doucher. Niss serait la couverture contre son corps, toujours un peu sur le carreau, mais avec un doux sourire aux lèvres. Tout s'était… très bien passé. Voire même super bien. Il n'avait pas autant paniqué qu'il aurait pu le croire, en vérité. S'étirant entre les draps, il fixa le plafond, se disant qu'il était dans une torpeur beaucoup trop douce, son regard finissant par se perdre dans le vide. Il resta quelques minutes dans cette position jusqu'à ce que le bruit d'écoulement ne cesse.

Pent vint se coucher contre Niss, sa peau reptilienne mouillée le faisant grimacer entre ses dents. Il piqua un fard avant d'enfouir sa tête dans l'oreiller, le serpent déposant un baiser dans le cou à sa portée.

« Ça va, Niss ?

—Oui. Tu me fous juste de l'eau partout.

—Excuse-moi, j'ai tendance à laisser goutter pour que ma température baisse. »

Arackniss ricana, se retournant pour embrasser pleinement son compagnon. Sa peau chauffait déjà de nouveau, s'adaptant à la température environnante. Ça ne devait pas être facile d'être un animal à sang-froid tout les jours, en enfer. Surtout que ça n'empêchait pas Pent de lui servir de radiateur malgré le peu de chaleur qu'il dégageait. Le couple se câlina un long moment. Avant que le sommeil ne les emporte de nouveau, Niss se dégagea, s'enroulant dans un pan de drap en se dirigeant vers la salle de bain. Pent gloussa devant sa pudeur, mais l'araignée l'ignora, lui balançant qu'il n'avait qu'à changer le lit tandis qu'il se nettoyait. Il laissa toutefois retomber le tissu en entrant dans la salle de bain, dévoilant intentionnellement ses fesses. Il rit en entendant un sifflement appréciateur de son compagnon, s'enfermant dans la cabine de douche.

Pour un premier essai, il était concluant.


Arackniss pouvait dire qu'il était satisfait. Depuis bien une semaine, les sessions câlins, caresses, plus ou moins intenses entre lui et Pent devenaient un rituel régulier. Il fallait dire qu'il redécouvrait le peu qu'il connaissait du sexe. Et ce n'était pas pour lui déplaire. Le faire avec quelqu'un qui comptait pour lui, qui lui plaisait, c'était ce qui lui avait toujours manqué pour que ce soit agréable. Il n'avait donc jamais eu de problème. Il n'était juste jamais tombé sur les bons partenaires. Aussi stupide que ça puisse paraître, la constatation le soulageait. Tout allait bien. Son frère n'avait pas arrêté de le harceler par SMS pour savoir où ils en étaient lui et son amant, ce malgré les nombreux stops que Niss lui avait mis. Bordel, ce qu'Anthony était curieux — et lourd — quand il s'y mettait. Pas qu'il n'allait pas lui en parler du tout, notamment pour d'autres questions concernant l'étape supérieur, maintenant qu'il était renseigné sur… certaines parties de l'anatomie de Pentious. Des conseils ne le tueraient pas. Sauf qu'il ne voulait pas qu'il y ait de traces écrite. Que quiconque puisse lire les messages dans son téléphone ou dans celui de Tony lui mettrait la rage au ventre comme jamais, tant il serait gêné.

Il sonna à l'entrée du Happy Hotel, se faisant accueillir par Anthony lui-même qui lui jetait un sale sourire en coin. Il eut un soupir, sachant d'ores et déjà dans quoi il s'embarquait. Son frère le tira jusqu'au salon, un thé fumant les y attendant. Charlie, avec son sourire aimable, passa avec Vaggie et annonça qu'elle partait faire quelques courses pour ce soir. Husk sirotait une bière en lisant le journal local, pendant qu'Alastor les observait du coin de l'oeil en vaquant de son côté. On aurait dit qu'il complotait pour les buter. Le pire, c'était que ça pouvait vraiment être le cas. Une journée normale en somme. Ils se retrouvèrent seuls, bien vite, tout le monde quittant la pièce — ou, pour Husk, ne faisant nullement attention à eux. Arackniss prit sa tasse et la porta à ses lèvres, Tony croisant ses longues jambes en le fixant avec des yeux ourlés de taquinerie.

« Dis-moi dooonc comment tu vas, mon cher petit frère ?

—D'une, je suis pas petit, deux, je sais très bien ce que tu cherches à faire.

—À dire bonjour, voyons. Tu me connais. »

Justement. Pas besoin de parler plus, ils s'étaient compris.

« Et… ? » Tony tapotait sur ses jambes, rieur. « Il s'est bien passé quelque chose, non ?

—Oui, c'est le cas. »

Et voilà, il se jetait à l'eau. Il consentait à se confier, parce qu'après tout, c'était nouveau pour lui et en parler ne faisait pas de mal. Surtout en vue de l'étape supérieure qui se rapprochait. Anthony éclata de rire, frappant dans ses mains. Il avait l'air sincèrement content.

« Oh putain, bravo Niss ! »

Il riait aux éclats. Arackniss, lui, était, au sens propre du terme, rouge comme une véritable tomate. Il sentait le coup fourré arrivé. Il le sentait. Ça ne resterait pas sans commentaire, impossible venant de son frère. Son visage s'éclairait soudainement.

« Du coup maintenant tu le sais s'il en a deux ou pas !

—Tu commences à me les briser, Tony !

—Bah, tu sais… je suis un curieux ! C'est pour le travail ! »

Après la science, maintenant le travail ?! Il se foutait de la gueule de qui, celui-là ? Fusillant son frère du regard, Arackniss pensa qu'il allait sérieusement le tuer.

« T'en rates pas une.

—Allez, partage les infos avec ton cher frère. Je veux savoir comment c'était, moi ! »

Sa mâchoire se serra.

« Ça me gêne, crétin, fais pas exprès. Mais c'était bien. On a pas été jusqu'au bout, on a seulement… fait quelques caresses. J'ai beaucoup aimé. Vraiment, il est… adorable. Fidèle à lui-même.

—Ce que t'es pudique, » Tony levait les yeux au ciel. « T'as vu, c'était pas si dur. Et le matos ? »

Son clin d'oeil fit de nouveau rougir Niss.

« Il en a bien plusieurs. Enfin deux… tu vois.

—Oh bordel, t'as trop de chance !

—Pardon ?! »

Cramoisi et étonné, définitivement, l'araignée noire s'étouffa avec sa salive. À quel moment avoir un mec à deux pénis était une putain de chance, puttana di troia ?! Il grogna entre ses dents serrées.

« Tony, t'es pas sérieux…

—Nan mais je veux dire, ça fait encore plus de trucs à faire ! Moi j'me suis jamais tapé un gars à deux bites, j'suis trop jaloux ! J'te jure, tu te rends pas compte de tes opportunités ! »

Pour se faire déchirer les fesses, oui… Il avait pas envie de savoir ce que son frère trouvait d'attrayant à ça. Ça le faisait réellement flipper. Déjà que l'idée de s'en prendre une seule, ça lui titillait vigoureusement le trouillomètre, pour deux, il voyait même pas comment ça pouvait rentrer. Ça devait être atroce. Il eut un frisson — et pas de plaisir — à l'idée.

« Je pense pas que je suis apte à avoir une telle conversation, Tony. Et sois sûr que jamais je me prendrai les deux. Il m'a dit lui-même que ça n'arriverait pas.

—On verra ça quand tu te seras pris la première, » lui rétorqua-t-il avec un clin d'oeil, « mais ne lésine pas sur le lubrifiant surtout, quoiqu'il arrive. Surtout si tu t'aventures sur une double peine.

—Ouais, je sais, » dit Niss en ignorant son sous-entendu vaseux absolument entendu, « tu me l'avais dit. Ce sera pas tout de suite, mais je pense être prêt petit à petit. Tes conseils m'ont vachement tranquillisé sur le sujet.

—Ah, tu vois que t'aimes parler de cul avec moi ! »

Arackniss leva les yeux au ciel. Quel grand con, celui-là. Il était à ça, on aurait pu mimer un espace ridiculement petit entre deux doigt, de lui refaire le portrait. Mais il avait encore un semblant de principe et quand bien même son frangin s'apparentait facilement au roi des casse-couille, il faisait un effort de tolérance.

« Tu m'as bien rassuré quand t'as arrêté de te foutre de ma gueule.

—Oh, je te taquinais petit frère, j'ai peut-être été relou, mais ce qui m'importe c'est que ça se passe bien pour toi. »

Il lui donna une claque sur l'épaule. Malgré tout, Niss se sentait touché. Sincèrement. Tony avait dû beaucoup prendre sur lui pour lui pardonner, et pourtant, il restait bienveillant. Sur un regard entendu, ils changèrent bien vite de sujet. L'araignée blanche lui racontait ses dernières frasques au boulot, faisant pâlir Niss tant il n'était pas habitué à ce monde-là. En tant qu'Angel Dust, son frère menait une vie folle. Il paraissait tout autant aimer ça qu'une certaine fatigue pointait dans sa voix. Un mélange étrange qui intriguait le plus âgé. Il n'osa pas poser trop de questions, peu à l'aise avec le sujet, quand bien même en apprendre plus sur le quotidien d'Anthony l'intéressait. Il avait pas mal de temps à rattraper, après tout.

Pent vint au Happy Hotel au soir tombant pour le retrouver, ce n'était pas la première fois qu'il venait le chercher en vaisseau, Tony avait arrêté de le vanner. Charlie, dans sa douceur typique, lui proposa de rester pour le dîner. S'il refusait à chaque fois, il hocha la tête devant le haussement d'épaule de Niss, sachant qu'il appréciait passer du temps avec son frère, et que lui en profiterait pour se chamailler avec Alastor. Vaggie parut nettement moins enthousiaste au vu des caractères sulfureux des deux frères une fois dans la même pièce. Juste avant le repas, tandis que Niss échangeait un bref baiser avec Pent, il fut intrigué par un vent de conversation entre son frère et le démon radio.

« T'veux pas m'aider à découper quelqu'un, Al ? » disait Anthony.

Un rire interpella les oreilles de Niss.

« Es-tu sérieux ?

—C'pour le taf', t'sais. »

Le sale sourire complice qu'échangèrent les deux autres démons lui insuffla d'oublier ce qu'il venait d'entendre pour le moment. Il ne savait pas dans quelle combine il avait dû se fourrer en tant qu'Angel Dust, bien qu'il ait entendu des choses, des rumeurs, plus ou moins dégueulasses. On trouvait de tout, en Enfer, l'éthique n'existant pas… Enfin, Arackniss n'avait pas envie d'en savoir plus sur les activités de son frère.

Avant que Tony ne recommence à l'emmerder de ses blagues de culs graveleuses, et ne lui donne moult conseils non-désirés sur l'étape supérieur —limite, ça lui donnait plutôt envie de s'abstenir, surtout quand il lui expliquait comment il avait fait pour supporter une double péné dans le cadre d'un film…— il s'interrogea seulement sur son étrange manie de ramener toute demande incongrue au travail.


La semaine suivante, Molly était de nouveau invitée à prendre le thé. Elle avait les mains croisés sur ses jambes, sirotant sa tasse, tandis que Pent et Niss papotaient avec elle au sujet des dernières — énièmes — émeutes en ville. Pentious n'avait pas été étranger à l'agitation en question. Il en avait profité pour faire des siennes avec une récente invention, sa dernière innovation. Il adorait les vaisseaux, sa présente lubie étant d'augmenter la taille des structures qu'il fabriquait, afin qu'elles soient plus résistantes, et bien sûr, massives. Elles infligeaient ainsi plus de dégâts tout en résistant aux impacts. Sur le papier, c'était prometteur. Dans la pratique, face à un adversaire, un putain d'overlord, beaucoup plus puissant, ça faisait mouche. Les combats avec Alastor auraient dû lui servir de leçon. Ils s'étaient pour ainsi dire faits éclatés. Pent avait perdu un bras qui avait mis dix milles plombes à se ressouder — l'âme maintenait le corps d'un démon au complet par une sorte de lien intangible, et lui permettait de ressouder ses membres ou de les faire repousser tant qu'ils n'étaient pas exorcisés, cela pouvait cependant être long selon le degré de cassure. Niss avait sorti les armes, finissant une partie du travail en faisant fuir les démons inférieurs au service de l'overlord, et ils avaient pris la poudre d'escampette.

Ils demeuraient avant tout un couple de malfrats. Si le serpent comptait un jour annexer un district, il devait faire preuve d'inventivité. Soutenant son amant, Niss le suivait dans ses tentatives. Bon gré mal gré. Plus mal que bon tant que Pent n'aurait pas réparé son vaisseau, ou trouver un quartier plus facile à diriger. Molly riait gentiment en commentant ce qu'ils racontaient, et l'araignée souriait, tenant la main à son amant. Pent exposait ses prochains projets de croisade. Si Molly se montrait attentive, tantôt inquiète — elle essayait de le dissuader de se lancer dans ce qui le mènerait à un échec cuisant, elle louchait de temps à autre sur leurs mains jointes en gloussant. Niss aurait râlé, d'habitude. Il avait toutefois la tête ailleurs. Récemment, l'impression que quelque chose n'allait pas avec son frère ne le quittait pas.

Tony n'était pas le genre à laisser apparaître ses faiblesses. Il s'était toujours caché derrière une personnalité pour le moins exubérante pour éviter d'exposer ce qu'il ressentait à l'intérieur. Au vu de son vécu, Arackniss pouvait comprendre qu'il en soit arrivé là. Ce n'était pas facile d'être le paria d'une famille de criminel. On n'en sortait résolument pas indemne. Il avait dû compenser. Niss savait qu'il ne lui dirait pas s'il y avait un problème, surtout à lui. Mais peut-être qu'à Molly, il se confiait plus facilement. Le lien de deux jumeaux, c'était quelque chose de tangible. Ça paraissait donc hautement probable. Son travail actuel n'était pas facile. Ce n'était pas la première fois qu'il entendait parler du patron de son frère, ou qu'il le voyait loucher avec angoisse sur son téléphone. Il y avait forcément des problèmes. Le milieu de la prostitution, de la pornographie n'avaient pas pour dirigeants des enfants de choeur. Surtout en Enfer. Niss n'était pas un imbécile, c'était évident, ce qu'endurait son frère. Toutefois, il semblait que ça s'aggravait dernièrement. Et en bon grand frère, du moins s'efforçait-il de se rattraper, il se demandait ce qu'il se passait, s'il y avait quelque chose à faire.

Ils conclurent la conversation, puis Molly se prépara à partir, enfilant un manteau de fausse fourrure blanc, la couleur ne dépareillant pas la sienne. Niss l'arrêta avant qu'elle ne franchisse l'entrée de la demeure de Pent, d'une main sur le bras. Sa soeur serait honnête, ou le rassurerait, c'était une bonne idée. Molly pointa huit pupilles interloquées sur lui. L'araignée sourit à sa soeur, se passant une main derrière la tête, ébouriffant ses poils noirs.

« Dis, y'a quelque chose avec Tony, ou j'me trompe ? »

Le visage de sa soeur fut éloquent. Elle semblait ne pas du tout s'être attendue à ça. Prise de court, elle avait baissé les yeux, la mine contrite. Pent, de son côté, jeta un regard dans leur direction mais eut la décence de faire mine de ranger le service à thé avec les Eggs Boys pour les laisser discuter entre eux. Niss lui adressa un signe de remerciement mental. Ce mec était un ange, bordel. Molly joignit ses mains sur la lanière de son petit sac à main.

« Tu l'as remarqué ? » Elle eut un sourire triste, se mordillant la lèvre. « Il ne me dit rien à moi aussi… Je crois que c'est grave. »

Et merde. Niss était sur le derrière. Anthony n'avait même pas parlé à sa soeur jumelle… Il aurait dû s'y attendre. Ils étaient certes proches, mais il ne devait pas vouloir l'inquiéter, assurément. Arackniss avait cependant naïvement espéré que leur frère se serait confié à elle. Cela lui fit de la peine. Molly vint caresser son crâne avec douceur.

« Je comptais essayer de lui en parler, mais si tu veux le faire aussi, ça lui fera peut-être plaisir.

—Tu parles, à part faire des blagues sur le sexe pour me taquiner, c'est tout ce qu'il fait. Je pense pas qu'il irait me parler de ce genre de trucs. Il évite les sujets perso. »

L'autre damnée haussa les épaules. Elle emmêla doucement ses poils, Niss ayant un mouvement de recul en la fusillant du regard, parfois bien contrarié que son petit frère et sa petite soeur soient tous deux plus grand que lui. Tu parles d'une ironie.

« Je n'en suis pas si sûre. Il est vraiment heureux de votre relation, tu sais ! Ça lui fait plaisir que vous vous soyez retrouvés. »

Elle avait dit cela avec un doux sourire. Ce fut contagieux. Tony et lui passaient toujours les trois quarts de leur temps à se chamailler lorsqu'ils se voyaient, mais pour sûr, ils avaient une bonne complicité. Quelque fois, il arrivait que Molly passe aussi au Happy Hotel. Elle s'entendait très bien avec Charlie et Vaggie. Des trois italiens, c'était la plus agréable. Facile à aborder, sa présence était ainsi un rayon de soleil pour les résidents. Il fallait dire que Molly, c'était ça : quelqu'un de fondamentalement solaire. Elle savait se faire aimer de tous, à juste titre avec son caractère avenant. Ainsi, la fratrie s'entretenait régulièrement ensemble. Il était même arrivé que Tony passe chez Pent et lui lorsqu'ils recevaient leur soeur. Ça, c'était mémorable. Niss faisait souvent l'arbitre entre Tony et son serpent qui se fustigeaient comme un vieux couple. Ça pouvait être usant. Il savait bien que Pent et Anthony ne se supportaient pas du tout, mais faisaient des efforts pour lui faire plaisir. En soit, c'était adorable dans l'intention. En terme d'application, ça restait assez laborieux.

Niss laissa partir sa soeur après un hochement de tête pudique. Il n'aimait pas trop s'épancher sur ce genre de sentiment. Pas publiquement, du moins, pas vraiment. A peine fut-elle partie que Pent s'approcha de lui.

« Tout va bien, mon coeur ? »

Après un petit rougissement, Arackniss secoua la tête. Il se blottit contre le serpent, déposant un baiser sur sa clavicule.

« Je suis un peu inquiet pour mon petit frère. La routine. »

Pent lui caressa le crâne. Il opina du chef, et plaça sa main sous son menton en une posture réflective.

« C'est vrai qu'il semble un peu ailleurs, en ce moment. Peut-être y aurait-il quelque chose à faire avec la Princesse Charlotte ? »

L'araignée ricana. Cette façon qu'avait Pentious de s'adresser à Charlie avait tendance à amuser tout le monde, surtout Tony qui se foutait allègrement de sa gueule. Mais cette idée n'était pas stupide. Toutefois, chaque fois qu'on l'évoquait devant Tony, il refusait. Il n'y avait qu'avec Alastor qu'il semblait préparer quelque chose. Niss se demandait quoi.

« Il me semble que smiley-man s'en occupe, » rétorqua-t-il justement avec une moue.

Pent grimaça. Il détestait Alastor, ça n'avait toujours pas changé. Niss, lui, en avait toujours autant les chocottes.

« Il risque d'empirer les choses, ou d'avoir un ressort de prévu. Je n'ai pas vraiment confiance.

—Tony a confiance, lui. Je ne sais pas trop quoi penser. J'te rejoins sur le fait qu'il est chelou, mais t'sais comment il est, mon frère, il changera pas d'avis. Il est têtu comme une bourrique. »

Pentious eut un sourire.

« On se demande de qui il le tient…

—De mon père, sans doute. Et j'ai pas été épargné aussi, si c'est ce que tu sous-entends. »

Ils rirent en choeur. Puis, Pent se pencha sur Niss et l'embrassa affectueusement sur le crâne.

« On va rester vigilant, et on agira si besoin. D'accord ?

—Oui, » dit Niss en hochant la tête, « merci. De t'impliquer, je veux dire. Tu ne l'apprécies pas tellement donc…

—Il s'agit du frère de l'homme que j'aime. Il est normal que je sois attentif. »

Arackniss opina. De nouveau, il se blottit dans ses bras et inspira son odeur. Ça l'apaisait au plus profond de son âme, à chaque fois. Ils feraient bien ce qu'il fallait pour Tony. Même si, il fallait être honnête, et c'est ce qui était le plus perturbant, il n'y avait pas forcément de solution à la clé. L'enfer, c'était une sale puttana di merda.

Heureusement, les bras de Pentious qui l'enveloppaient dans une étreinte amoureuse et l'attiraient dans une volupté sensuelle avaient un arrière-goût paradisiaque.


Arackniss poussa un gémissement qui tirait violemment vers les aigu. La bouche de Pent, occupée entre ses jambes, lui faisait voir des étoiles. S'il en oubliait tout juste deux doigts qui taquinaient doucement son ouverture sans s'y avancer. Il attendait avec impatience le moment où ils y entreraient. Il se surprenait à en être excité. Pent le léchait doucement, insistant sur l'arrière du pénis, cherchant à l'engloutir jusqu'à la garde. Il était vraiment proche de… putain ! Les caresses remontèrent le long de son périnée. La langue qui serpentait sur la base de son sexe le rendait fou. Il ne cessait de gémir, le plaisir le traversant de part en part. Pent savait comment jouer de sa bouche, et bêtement, il se demandait parfois combien de partenaire il avait pu torturer de cette même façon. Il s'agrippait aux draps malgré lui, Pent s'appliquant pour sa fellation en venant caresser tendrement ses cuisses. Bon dieu, que c'était agréable. Beaucoup plus que quand il avait été sucer par une prostituée… Il fallait dire que si la bouche, avec son humidité naturelle, avait quelque chose d'excitant, le propriétaire des dites lippes avait aussi un rôle important dans l'affaire. Ça faisait au moins deux fois que Pent descendait entre ses jambes lui apporter ce doux plaisir et il n'aurait jamais cru que ça puisse être si bon.

Il aurait voulu que ça ne s'arrête jamais.

« P-Pent, je vais…, » articula-t-il faiblement.

Il allait vraiment jouir. Aussi utilisait-il ses dernières forces pour prévenir son partenaire avant de rendre les armes. Pent ne s'arrêta pas et Niss vint dans un long soupir, incapable de se contrôler. Les gémissements quittèrent sa gorge dans un son sifflant. Son amant retira très doucement sa bouche, avalant sans un bruit, et lui sourit. Son membre durcissait déjà de nouveau, comme s'il était prêt pour un second tour face au spectacle que lui offrait le reptile. Embarrassé, Arackniss se cacha les yeux et rougit.

« Tu n'étais pas obligé, tu sais…

—D'avaler ? »

Il avait évité de le dire, mais puisque son amant mettait les pieds dans le plat…. Il hocha la tête.

« Il n'y a pas de mal, j'avais envie de te faire du bien.

—C'est réussi. »

Il y eut un léger silence. Pent attrapa un verre, posé sur la table de chevet, et but une longue goulée, sans doute pour faire partir le goût. Avec hésitation, Niss attira son visage vers le sien pour l'embrasser. Sans mettre la langue, il n'avait pas envie d'avoir ça sur le palais… mais sentir ses lèvres contre les siennes, même après un tel acte, ça ne le gênait pas. La main de Pent caressa son dos, s'infiltrant entre lui et le matelas pour le tenir plus proche. Il soupira, sentant la double-érection de son serpent peser contre son ventre. Timidement, sa main descendit vers le bas ventre du reptile, là où se trouvait ses membres durs. Il les saisit, pouvant à peine toucher le deuxième autrement qu'avec le bout d'un doigt. À l'unité, son pénis semblait tellement épais… Pent s'arracha à son baiser pour en placer un autre, sur son front.

« Tu n'es pas obligé non plus, Niss.

—Moi aussi, je veux te faire du bien. »

L'araignée n'avait pas peur. Au contraire, il devenait de plus en plus à l'aise. Il continua d'effleurer son hémipénis, puis poussa Pentious à s'allonger sur la place à côté, dos contre le matelas. Ainsi, il put se placer au-dessus de lui. Sans hésitation aucune, sa bouche baisa le cou du serpent. Il décidait, pour la première fois, de faire une gâterie à son amant. Pent semblait avoir compris qu'il était déterminé, il se contenta de caresser sa tête. En ascension descendante, Arackniss s'amusa à consteller de baiser la peau du plus âgé, avec une légère appréhension — celle de ne pas se débrouiller — et amusé par les petits soupirs de Pent. Lorsqu'il atteignit son but, insistant de sa langue sur les parties les plus sensibles du plus vieux, posant quelques questions de temps à autre, si c'était assez bon, si c'était agréable, ou pas assez… Pent le guidait à prendre un rythme qui lui plaisait.

Il n'osait pas prendre les deux en bouche, c'était trop compliqué de toute façon, alors il alternait, suçotant un gland, léchant la base du morceau de chair. Encore une fois, les deux pénis étaient particulièrement épais, surtout quand ils prenaient la forme de la pré-éjaculation. Pent gémissait de plaisir entre ses dents, doux sifflements qui se répercutaient dans l'air. En prenant courageusement l'un des pénis en bouche, il laissa le membre buter contre sa gorge, excité, et amorça un mouvement de pompe doux. Sa main, de l'autre côté, s'agitait sur le deuxième membre, lubrifié par sa salive. Sous peu, Pent jouit, le prévenant gentiment qu'il allait venir et Arackniss eut le choix de se reculer ou d'avaler. Il accepta d'avaler, sans sourciller et sans dégoût. C'était… beaucoup. Surtout que les deux pénis éjaculaient en même temps, l'autre semence s'étalant sur le ventre de Pentious, tandis que celle dans la gorge de Niss laissait un goût salé assez sévère se répandre dans sa cavité buccale.

Il avala lentement, relâchant le sexe, et se massa la gorge en toussotant. Il sourit à son amant, joyeux d'avoir réussi à lui faire plaisir, d'autant que c'était la première fois qu'il y arrivait en entier sans réflexe vomitif.

« C'était… bon ? » demanda-t-il à Pent.

Un léger sifflement lui répondit avec un petit clin d'oeil.

« Je crois que tu l'as vu, non ? »

Arackniss rougit. Il l'avait vu, oui, mais quelque peu hésitant quant à sa performance, il se posait la question. Après tout, il n'était peut-être pas très doué. En un coup, on ne faisait rarement bien. Il pourrait avoir mis un peu trop les dents, pas assez de langue, ou pas pris en bouche assez profond. Inquiet, il se tritura les mains. Pentious soupira avec complaisance, le prenant dans ses bras.

« Niss, c'était parfait, crois-moi. Bon, tu as un peu tendance à mettre les dents, si c'est ce qui t'inquiète, mais ça se travaille si tu le veux. J'ai tendance à les mettre également, surtout qu'elles sont longues. »

En effet, ses incisives effleuraient délicatement son pubis après chaque fellation, Arackniss étant excité par la légère sensation de piqûre qu'il ressentait contre sa peau. Il ne savait pas qu'il aurait pu développer de tels fantasmes. L'araignée hocha donc la tête, honteux de ses pensées.

« D'accord, excuse-moi d'être nerveux.

—Ce n'est rien, je t'assure. »

Leurs jouissances étant achevées, la discussion ayant calmé chacun d'eux, le couple s'embrassa, Niss toujours surpris que Pent n'ait aucun problème à ça après ce qu'ils venaient de faire…. Puis, réalisant que lui non plus n'avait pas objecté, il se laissa aller dans le baiser. Arackniss s'agrippa à la nuque de son amant. Ils plongèrent entre les draps, l'un contre l'autre, repartant pour des caresses légères. Elles n'avaient rien de sexuel, cette fois. Non, elles étaient douces, aimantes, porteuses d'affections. Niss ne pouvait qu'apprécier ce qui se passait. Ils fatiguaient, ainsi, l'araignée pensait qu'ils allaient s'endormir dans peu de temps. Les mains de Pentious rasaient ses propres doigts, remontant jusqu'au coude. Il adorait ces sensations si revigorantes et si salvatrices. Ça l'apaisait. Souriant, il rendait les caresses. Posséder six bras avait là son avantage. Pent fermait les yeux, se prélassant sous les cajoleries. Il se rendit compte qu'il s'endormit lorsque la main qui caressait son corps cessa son geste, assoupie également.


Le lendemain, un son vibrant le réveilla. Son portable. On les demandait, Pent et lui, au Happy Hotel. Plus précisément, la princesse Charlie organisait un dîner. Pent était bien sûr alléché à l'idée. Pour la forme, il avait râler que leur hostilité n'était pas évanouie. Un peu plus gêné, Niss se disait qu'en réalité, elle n'était qu'un cadavre enterré. Ça faisait belle lurette que rien ne s'était passé comme dans les plans machiavéliques de Pentious. Il ne les avait pas abandonné, pour rien au monde. Seulement, attaquer Angel Dust, le Happy Hotel, il avait occulté l'idée. Évidemment, Pentious était beaucoup trop délicat pour attaquer son frère. Encore moins les démons qui partageaient son simulacre de vie. Parce qu'il aimait trop Niss pour s'en prendre aux siens. Puis, il avait confessé « bien aimer Mademoiselle Charlotte, ». C'était vrai que Charlie était très agréable. Son tempérament poli et doux allait bien avec la susceptibilité de son amant, puisqu'elle ménageait l'égo de chacun. Avec les autres, ça dépendait des moments. Il ne pouvait pas supporter Alastor, et c'était bien réciproque — de toute façon, qui appréciait réellement ce dernier ? Il n'en savait rien. Il paraissait bien s'entendre avec Tony, mais c'était un grand maximum. C'est en maugréant contre lui que Pentious se prépara.

Bientôt, ils se rendirent au dîner. Au détour d'une conversation, Pent leur révéla qu'il savait jouer du piano. Tony le taquina, arguant immédiatement que les musiciens avaient un bon doigté, ce qui était bien pratique. Niss, piqué par une certaine curiosité quant à sa qualité de jeu, devint rouge comme une pivoine face à la blague de son frère, tandis que le serpent se mordit la lèvre avec sa propre canine, ce qui eut l'air douloureux. Charlie fut, quant à elle, on ne peut plus ravie et lui demanda de lui jouer quelque chose sur le piano de la demeure pendant qu'elle chantait.

Toute la maisonnée grinça des dents en réalisant qu'un duo de saltimbanque venait de se former… Et Lucifer savait —il n'était pas le seul — qu'une fois qu'elle était lancée, la princesse des enfers ne lâchait pas facilement son micro. Ce fut partit pour deux bonnes heures de chants, certes plaisant, mais quelque peu envahissant aux yeux de certains. Husk se bouchait les oreilles derrière son bar, Tony picolait, peut-être pour oublier, et Alastor lorgnait le lustre au-dessus du piano comme souhaitant qu'il s'écrase sur Pent, ou encore Charlie. Seuls Vaggie et Arackniss encourageaient leurs amants respectifs. L'araignée noire l'admettait ; savoir que son cher et tendre avait un tel talent —il jouait divinement bien— lui plaisait. Pentious était décidément plein de ressources. Tout ce qu'il découvrait de lui éveillait de doux sentiments, tendres. Il avait d'autant plus envie de partager son existence.

Avec le chant de Charlie, leur duo donnait un petit quelque chose. Même la mauvaise foi de Husk, Alastor et Tony ne pouvaient le leur enlever.

Pent jouait en toute innocence. Cela convainquit Arackniss qu'il était l'homme de sa vie.


6

Hotter Than Hell

On ne pouvait jamais savoir quel moment était le meilleur pour se lancer dans quelque chose de nouveau, d'inconnu. Arackniss avait envie, aujourd'hui, d'aller jusqu'au bout avec Pentious. Le serpent avait été très patient à son égard. Niss, lui, ne l'était plus vraiment. Il était prêt, réellement prêt, et il n'avait plus peur. Il était temps qu'il soit un homme, un vrai, et si pour en avoir parler avec son amant, il savait que ça ne l'obligeait à rien pour autant, il voulait le faire. Ce genre de paroles, si elles le culpabilisaient souvent, lui donnaient cette fois du courage. Il se sentait assez à l'aise avec Pent, alors pourquoi pas ? Le désir qui le prenait aux tripes, il ne voulait pas l'ignorer… Il aimait Pentious, coucher avec lui était aussi naturel, dans le sens où ça ne le dérangeait plus. Il ne doutait pas. Son amant n'était pas désireux de le forcer, il ne cherchait pas à imposer son désir, ni à initier davantage de contact. Ça faisait un moment que leurs rapports restaient les mêmes… il sentait que ça devrait venir de lui pour que Pentious réalise son désir. Il s'en doutait. Un peu nerveux, il riait dans sa barbe. Il se sentait comme un gamin qu'il avait pourtant passé l'âge d'être… Il avait envie d'agir comme l'homme qu'il était, non pas celui que son père voulait qu'il soit… Père qui se serait bien foutu de sa gueule s'il savait qu'à son âge, il allait faire sa « première fois ». C'était si bête à dire. Niss était prêt. Il était lui-même, maintenant. Ça semblait être le bon moment. Il n'y aurait pas pu en avoir de meilleurs.

Debout dans le salon, il regardait son amant jouer du piano. Le serpent donnait libre court à son imagination. Niss dodelinait de la tête en l'écoutant. De sa queue, Pentious se servit un verre de thé. Il conclut son morceau, et but gracieusement. Arackniss émit un petit rire, semi-moqueur –car il était diablement trop raffiné, semi-attendri. Parce qu'il était adorable. Il n'avait jamais vu plus adorable. Agacé par sa propre mièvrerie, il vint s'asseoir près du serpent. Pent lui proposa immédiatement une tasse, mais il refusa. À la place, il posa simplement sa tête sur son épaule. Calmement, il profita du moment. Il lui dirait plus tard ce qu'il voulait. Pent caressa sa tête, et l'embrassa sur le front.

« Tout va bien, Niss ? Tu es fatigué ?

—Nan, ça baigne. J'adore te voir jouer.

—Ce n'était que de maigres accords.

—Non, c'était parfait. Je les ai adoré. »

Sur un sourire entendu, Pentious et Arackniss s'embrassaient pleinement, cette fois-ci. Comme à leur habitude, les baisers avaient rapidement un goût de pas assez. Niss s'agrippa à la nuque de son amant, Pent lui caressant l'arrière du crâne, tandis que sa langue pénétrait dans sa bouche. L'araignée fit glisser ses mains sur les hanches du serpent, son autre paire de bras déboutonnant son blazer. Pent gloussa dans le baiser.

« Tu es pressé, mon petit Niss…

—Qui ne le serait pas à ma place ? »

C'était naturellement une question rhétorique. Comprenant qu'il comptait initier un rapprochement sensuel, Pentious fit lui aussi passer ses mains sous sa chemise. Sa queue de serpent vint chatouiller ses pattes. Arackniss ricana malgré lui, il était bien trop réceptif à ce type de cajolerie. La tension les gagnant au fur à mesure des caresses, ils se déshabillèrent bien vite. Le pantalon de Niss vola, le serpent le plaquant sur son épaule pour l'emmener jusqu'à la chambre. Excité, l'araignée sentait que son érection pointait déjà.

Alors qu'ils étaient nus, Arackniss ressentit d'autant plus le désir l'envahir. Il voulait Pentious. Être en lui ou qu'il soit en lui ne lui importait que peu. Il le voulait. Il en avait envie. Ce pourquoi, quand son amant le déposa délicatement sur le lit, venant préciser ses caresses d'une main décidée, il arrêta gentiment son geste. Le serpent embrassa ses lèvres, descendit dans son cou, embrasant tout son corps, avant de se redresser les sourcils froncés.

« Ça ne va pas ? »

Arackniss sourit. Il était un peu gêné à l'idée de dire ce qu'il voulait, mais il le fallait bien.

« Si, ça va. Pent, je dois te dire quelque chose. Je crois que je suis prêt à le faire, jusqu'au bout. Je veux que tu me fasses l'amour. »

Pentious eut de grands yeux, et Arackniss observa sa pomme d'Adam faire un aller-retour dans sa gorge. Il eut l'air soudainement plus timide, alors qu'il était le plus expérimenté des deux.

« Tu… Tu es sûr ?

—Oui. Tu… en as envie, toi ? »

Arackniss avait de loin autant de considération pour son petit-ami que ce dernier en avait pour lui. C'était naturel qu'aucun d'eux ne se force et qu'ils le veuillent tous les deux. Quand bien même Pent était expérimenté, il ne voulait pas le prendre de court. Aussi, l'araignée attendit la réponse avec une pointe d'appréhension. Le désir faisait de son bas-ventre un volcan en éruption.

Pentious rougit et hocha la tête, se grattant la crête avec un rire.

« Tu m'étonneras toujours. C'est moi qui craignais de te brusquer, et toi qui te soucie que je n'en ai pas envie.

—C'est bien normal, non ? »

Niss haussa les épaules, ses joues cuisant également. Ils échangèrent un regard complice, amoureux.

« J'ai de la chance de t'avoir, susurra Pent.

—Et moi aussi. »

Il s'en fut ensuite.

Les mains explorèrent le corps, elles l'avaient plus ou moins déjà fait, mais sans aucune retenue, sans se contenir, en sachant que rien ne les contenait. Qu'ils n'avaient pas à se restreindre. Ils caressaient leurs torses, leurs sexes et leurs fesses en s'embrassant à pleine bouche. Pentious saisit l'arrière de sa cuisse, qu'il fit monter sur la sienne, collant son bassin au sien. Ses deux pénis pointait déjà, si durs, si intimidant, mais Niss les désirait. Ils bougèrent un peu l'un contre l'autre, et l'araignée arrêta ses gestes pour s'assoir sur le bassin de son amant. En souriant, il fit bouger ses hanches, son sourire s'évanouissant à la stimulation agréable qui le saisit. Pentious lui sourit, et, plissant les yeux, prenant un air sérieux qui sembla si érotique à Arackniss, qui afficha le même air en miroir, il agrippa ses fesses. Ses mains fermes guidaient ses mouvements. L'araignée ne tarda pas à gémir de plus en plus franchement, son amant lui faisant écho. Leurs sexes et leurs testicules se frottaient, déchainant des ondes de plaisirs dans tous leurs corps. Arackniss sentait qu'il allait jouir si Pentious continuait encore.

Bien qu'il soit au-dessus, c'était Pentious qui menait. Un peu normal comme il était moins expérimenté. Ça l'excitait, ça aussi. Il en était un peu gêné. Il faisait de son mieux pour ne pas être en reste et accusait les mouvements que lui faisait faire son amant avec un apparent flegme. Il les rendait également, observant Pentious tourner la tête et fermer les yeux sous le plaisir. Il aimait causer ces réactions, et devinait que son amant devait bien aimer ce qu'il lui faisait faire également. Ils n'avaient encore jamais vraiment essayer ce genre de mouvement, et ça avait un côté amusant. Un peu frustrant, aussi. Cependant, Niss était convaincu qu'effectuer des caresses manuelles ou des fellations les auraient faits jouir beaucoup trop rapidement. S'ils voulaient tenir, mieux valait se préserver un peu.

Enfin, quand ce fut trop intense, Arackniss l'arrêta. Pentious et lui reprirent leurs souffles quelques instants, et il se sentit prêt à réellement commencer. Ces préliminaires avaient assez duré.

Arackniss déglutit.

« Je crois qu'on devrait…

—Tu es toujours sûr de toi ?

—Plus que jamais.»

Pentious hocha la tête. Arackniss retomba à côté de lui, et il l'embrassa tendrement, sa main caressant sa joue, son pouce insistant prêt de l'arête du nez. L'araignée sourit. Il était nerveux, maintenant… Evidemment. Mais confiant. Il ne savait plus trop comment faire à partir de là, aussi, il décida de laisser son amant mener.

« T'as du lubrifiant, Pent ? Pour qu'on puisse… ? »

Arackniss déglutit. Il avait lui aussi fait en sorte de se procurer ce qui serait utile à leur affaire, qu'il avait laissé dans un sac. Parce qu'il savait quand même comment on faisait pour que ça passe entre mecs. Toutefois, ça l'inquiétait un petit peu. Il avait une légèrement pointe d'anxiété. Il savait ce qu'il fallait pour une bonne sodomie, mais il était aussi bien au fait que la première fois, ça pouvait être très douloureux.

« Dans mon tiroir, j'ai un flacon. Niss… »

Ce dernier était clairement nerveux. Il n'osait pas demander ce que son petit-ami voulait, ni exprimer ce que lui voulait, parce qu'il ne savait plus. En sois, ils avaient le choix. L'idée d'être en Pentious lui plaisait, comme celle qu'il soit en lui… Mais il avait peur d'avoir mal. Il avait aussi peur de faire mal à Pent. Le serpent s'était levé pour se diriger vers le tiroir, et revint avec le flacon. Il le posa sur la table de chevet, et attira Arackniss à lui pour un câlin.

« Tu veux encore ? Je ne t'en voudrai pas si non. »

L'araignée secoua la tête. Si, il voulait, il n'avait jamais autant voulu qu'en cet instant. Mais…

« Tu…Tu veux que ça se passe comment ? »

Pentious lui baisa le front, puis la bouche. Très tendre.

« Comme tu veux toi.

—J'aurais tendance à dire ça, moi aussi ! Niss s'était exclamé, un peu frustré. Jong In rit.

—Tu veux que je mène ? »

L'araignée avait honte de reconnaître qu'il voulait être mené, parce que ce n'était pas le cas, il était meneur. Pentious se rendre compte à sa tête de l'effet de ses paroles, puisqu'il redemanda :

« Tu veux mener ? »

Le plus jeune démon ne savait pas. Ça faisait un moment qu'il fantasmait à l'idée de Pentious en lui. Et il fallait bien que l'un d'eux se décide. Il déglutit.

« Tu préfères quoi, toi ? »

Le serpent haussa les épaules.

« Honnêtement, les deux me vont. J'ai envie d'essayer les deux avec toi. Je saurais m'accommoder de ce qui te ferait le plus envie.

—Moi aussi. »

Pour ça, il était honnête. Seulement, il ne savait pas ce qu'il voulait d'abord. Pentious caressa sa cuisse, remontant vers son membre, et Arackniss rougit.

« Tu crois que ça va faire mal, si tu me prends, Pent ? »

Le serpent réalisa sa crainte, et suspendit tout geste. Sa main resta sur sa cuisse, à la caresser gentiment.

« Je vais être honnête. Une première sodomie, c'est douloureux. Tu n'es pas expérimenté, et je suis plutôt épais. Mais on a le lubrifiant, et on prendra le temps qu'il faut pour que tu sois à l'aise. Souviens-toi qu'on peut arrêter à tout moment. Le choix est tien. La seule chose que je te demande, c'est de ne pas hésiter à verbaliser tes besoins. Y compris si le besoin en question est 'stop'. D'accord ? »

Opinant du chef, Arackniss prit un souffle. Il décida d'être courageux.

« Je crois que je te veux en moi. »

Pentious rougit furieusement alors qu'Arackniss baissa les yeux. Il vint lui relever le menton, mais il ne paraissait pas plus sûr que lui. Niss le connaissait. Il savait qu'il devait s'inquiéter de lui faire mal. Ils s'embrassèrent alors, et ils continuèrent où ils s'étaient arrêtés. Niss fut sous le corps de Pentious, écartant les jambes alors qu'il collait son bassin au sien et descendait baiser son cou et ses clavicules. Arackniss ne l'avait jamais trouvé aussi beau. Caressant la peau sombre de son dos fin, il le laissa se reculer et saisir le lubrifiant. Il en versa une quantité généreuse dans sa main. Arackniss releva les fesses et attrapa ses jambes, sachant ce qui allait se passer.

Avant de commencer quoique ce soit, Pentious s'agenouilla entre ses jambes, et ce fut la chose la plus érotique que Niss avait vue de sa vie. Ils avaient déjà essayé les pratiques orales jusqu'à présent, mais savoir qu'il allait le prendre et le caresser en même temps… son érection se durcit davantage. Il ne se démonta pas en l'avisant embrasser son pénis.

L'araignée gémit à ce contact, son membre réagissant plutôt bien à la marque affective.

Pentious étala ensuite une quantité généreuse de lubrifiant contre son anus, et sur ses propres doigts. Arackniss se tendit.

« C'est froid… »

Pent lui jeta un regard et embrassa sa cuisse.

« Désolé. Ça va vite passer. »

Niss secoua la tête. Il ne pouvait pas y faire grand-chose. Puis, le serpent approcha un doigt et chercha son regard.

« Je peux y aller ?

—Vas-y. »

Le doigt rentra facilement grâce au lubrifiant, mais Pentious dut quand même forcer ses murs. Arackniss se raidit, ce n'était pas particulièrement agréable, un peu inconfortable, mais il saurait le supporter pour le moment. Quand Pent bougea, il déglutit bruyamment. Son petit-ami couvrait ses cuisses de baiser en bougeant son doigt lubrifié dans ses chairs, essayant au mieux de le dilater.

« Si tu as mal et que tu veux que je ralentisse, dis-le. Je ne souhaite pas te faire mal. »

Arackniss hocha la tête. Pour l'instant, ça allait. Pentious continua les doux baisers et les caresses, quand il lui demanda l'autorisation d'ajouter un deuxième doigt. L'araignée ne refusa pas, mais en revanche, l'intrusion fut clairement douloureuse, au point qu'une petite larme coula de son œil droit. Pentious voulut retirer ses membres et s'excusa, mais il le rassura. C'était normal, c'était la première fois, ça faisait forcément un peu mal. Quand les doigts bougèrent, au début, il ne ressentit que de la douleur et dut serrer les dents pour retenir ses gémissements endoloris de cascader ses lèvres. Pentious le remarquait et essayait de caresser son pénis de sa main libre, il le prit un peu en bouche, la sensation plaisante aidant Niss à se calmer. Enfin, les doigts de Pentious se heurtèrent à quelque chose qui lui fit pousser un cri de plaisir sous la surprise.

Le serpent sourit, manifestement ravi.

« Trouvé. »

Niss comprit de quoi il parlait, bien sûr. Ses doigts venaient de dénicher sa prostate, ce qui lui permettrait d'avoir du plaisir lors de leur rapport sexuel. Soudainement excité par cette sensation, il murmura doucement :

« Recommence, Pent… »

Ce dernier acquiesça. Ses doigts trouvèrent un rythme vif, assez régulier, mais tout de même doux, qui l'envoya dans les étoiles. Gémissant de plus en plus fort, devenant vite au bord de l'orgasme, Arackniss arrêta la main de son amant.

« Si tu continues, je vais… maintenant… »

Pentious hocha la tête. Il retira ses doigts. Arackniss déglutit en le voyant tartiner son pénis de lubrifiant, celui qui se trouvait le plus bas sur sa queue, et en rajouter à son entrée. Le membre de Pentious lui paraissait si imposant en cet instant, pas qu'il était en reste, mais le recevoir en lui… C'était beaucoup plus gros que ses doigts. En revanche, savoir que son deuxième membre frotterait contre le sien durant la pénétration l'excita. Le serpent vint l'embrasser tendrement, Niss entourant son cou de ses bras, et il se positionna, son pénis frottant contre l'anneau de chair dilaté.

« J'y vais, mon coeur ? »

Arackniss hocha vivement la tête.

Pentious entra alors en lui.

Son membre s'enfonçant entre ses murs, Niss s'agrippa désespérément au dos de son serpent, ses jambes venant se serrer dans le bas de ses reins, il était accroché comme à une bouée de sauvetage. Ça faisait mal. Il serra les dents et ferma les yeux sous la douleur intense. Pentious procéda petit à petit. Il fut à l'écoute de sa respiration, lui accordant des pauses. L'araignée apprécia, sincèrement. S'il ne s'était pas arrêté avant d'être entièrement en lui, il ne savait pas si… Enfin, heureusement, ce n'était pas le cas. Au contraire, il lui demandait même la permission de reprendre. Arackniss ne lui en tenait donc pas rigueur, il était loin d'être brutal. Le plus jeune tremblait, écrasé doucement par le corps du plus grand. Pentious l'embrassa, cessant à nouveau tout mouvement.

« Ça va ? »

Arackniss secoua la tête en guise de négation, la voix rauque, chargée de douleur :

« Ça fait super mal. »

Pentious eut l'air inquiet face à sa réaction.

« Tu veux que je sorte ? On arrête ? »

Niss fit à nouveau 'non' de la tête. Il en avait toujours envie. Il faudrait juste attendre. Après qu'il l'ait dit à son amant, celui-ci fit de son mieux pour raviver son plaisir, tout en soupirant sous le bien-être qu'il ressentait en étant en lui. L'araignée se sentait désolé de l'interrompre, mais Pentious le rassura quant au fait que ce n'était pas grave. Ils devaient attendre qu'il soit à l'aise avant de commencer réellement. Le serpent l'embrassa longuement, leurs langues jouant, alors que sa main se glissait entre leurs deux ventres pour caresser leurs deux érections, son autre main caressant son flanc. Niss ne tarda pas à soupirer de bien-être. La sensation de Pentious en lui ne fut plus purement douloureuse. Ou du moins, il se mit à désirer la douleur. Tant qu'elle ne faisait pas mal bien longtemps.

« Pent…, tu peux bouger.

—T'es sûr ? »

Ses yeux plissés et son visage inquiet le rendaient si beau. Niss se laissa aller sous le bien-être quand Pent caressa sa joue et remit un de ses cheveux blonds en place. Il prit une inspiration.

« Oui, je suis sûr. Pent… Je t'aime. »

Sur ces mots, le serpent attrapa ses lèvres, et souleva ses cuisses, commençant à bouger en lui. Alors qu'Arackniss se demanda s'il allait lui rendre la déclaration sentimentale, ce dernier porta sa bouche à côté du lobe de son oreille, qu'il taquina tout en se mouvant en lui. C'était toujours un peu douloureux, mais Arackniss ne voulait plus reculer à présent. Soudain, Pentious chuchota avec sensualité :

« Je t'aime aussi, Arackniss. »

Niss crut exploser sous les sensations qui l'assaillirent. Il se sentit si amoureux, si heureux, qu'il aurait pu jouir rien qu'avec ces mots. La douleur dans le bas de son dos l'en empêchait, mais il acceptait Pent en lui, et il se sentait de moins en moins déchiré intérieurement par son sexe. Non, il se sentait choyé, aimé, et résolument si heureux d'être entre les bras du serpent. Quand, après une série de mouvements infiniment doux, Pentious retrouva le chemin de sa prostate, il gémit son nom en se resserrant autour de lui, atteint par un plaisir beaucoup plus important qu'avec les doigts de son amant. Il ferma les yeux, se laissant aller sous les caresses et les baisers de Pent, et commença à remuer lui aussi les hanches, ne voulant pas lui laisser faire tout le boulot. Pentious poussait lui aussi des soupirs accompagnés des gémissements appréciateur. Leurs lèvres ne se quittaient presque pas.

Encore, Niss était heureux de ce qui se produisait.

Au fur à mesure que leurs bassins claquaient entre eux, et que le sexe de son amant frappait le point sensible au plus profond de son être, l'araignée lâcha un cri, sentant que l'orgasme était proche.

« Oh, Pent… ! »

Pentious attrapa ses hanches tout en l'embrassant et ses mouvements augmentèrent en cadence. Niss avait eu raison, son deuxième pénis frottait bel et bien contre le sien, et avec l'autre sensation en lui, ça le rendait fou. Il sut qu'il aurait mal après, mais il ignora les accents de douleurs au profit de son plaisir. Il avait l'impression que son sexe était touché depuis l'intérieur, que le plaisir montait beaucoup plus profond et beaucoup plus intimement que tout ce qu'il avait déjà expérimenté auparavant. C'était si génial, si bon, si…

En frémissant des pieds à la tête, il éjacula entre leurs ventres, ne pouvant plus penser, ses mains s'agrippant aux draps. Pentious continua de bouger en lui, gémissant fortement car il était devenu si étroit, et il éjacula à son tour. Ses deux verges vinrent en même temps. Arackniss se sentit rempli de la meilleure des façons, et il fut heureux d'avoir accueilli la jouissance de son amant en lui, ainsi que sur lui.

Le serpent l'aida à se nettoyer, ils avaient réussi à ne pas tâcher les draps, et si Arackniss ne pouvait plus faire un pas sans ressentir une vive douleur, il ne regrettait rien. Ils se couchèrent ensemble, l'un contre l'autre, en s'embrassant tendrement, n'arrêtant pas de se montrer leur amour même s'ils avaient terminé leur union.

« C'était génial.

—Sincèrement, Niss… ?

—Je pense qu'on devra attendre pour recommencer, mais c'était… sincèrement génial. »

Pent ricana.

« C'est toi, qui es génial. »

Ils s'attirèrent en un énième baiser. Le petit couple allait bien pouvoir profiter de sa soirée.


Un rictus fit face à Arackniss. De côté, moqueur, un peu sournois. Étrange.

Le genre de rictus qui faisait flipper.

Surtout quand ils appartenaient à Anthony. Qu'allait-il encore lui sortir comme connerie… ?

« Toi, mon gars, t'as couché !

—Pardon ?! »

À peine assis sur le canapé du salon du Happy Hotel, Tony lui avait lancé ce regard en biais, un tant soit peu pervers. Bon, un peu beaucoup. Arackniss sentit son visage devenir cramoisi. Ce n'était quand même pas marqué sur sa gueule qu'il s'était fait défloré hier, si ?! Bon, ok, il avait une démarche un peu chaloupée qui était un poil ambiguë, suspecte sur les bords. Ok, il grimaçait légèrement en s'asseyant. À peine, ça. C'était plus une sorte de rictus que personne de censé n'aurait remarqué. Ou alors il fallait vraiment être observateur, ou bien un gros connaisseur. Imperceptible, à ses yeux.

C'était un peu oublié à qui il avait affaire.

« Oh je t'en prie, » poursuivit son frère d'un haussement de sourcil, « t'as la tête de quelqu'un qui s'est fait ramoner, dans tous les sens du terme. Alors, t'as fait sauter le champagne ? T'es devenu un bonhomme ?

—Anthony, figlio di puttana ! »

Outré, son propre frère le rendait outré au possible. Arackniss croisa les bras, irrité, mais aussi un peu embarrassé. Ce n'était pas qu'il ne comptait pas du tout lui dire… mais pas comme ça, merde. Ils partaient sur un terrain glissant.

« Laisse donc mama tranquille, la pauvre. » Le regard mauvais de Niss parut le calmer. « Excuse, excuse. Alors ? L'serpent s'démerde ? »

C'était tout à fait le type de question qu'il avait espéré éviter. Et il savait très bien qu'il n'aurait pas dû. Bon dieu, pourquoi son frère était aussi… rentre dedans ? Certes, son occupation personnelle n'aidait pas. Mais ça ne faisait pas tout. Même avant d'être acteur porno, Tony avait toujours été du genre à taper… dans les sujets de fond. Sans tact, sans détour. Ça avait ses avantages, ses désavantages. Comme à présent.

Il déglutit durement.

« Ben, c'était… pas mal…

—Ah ! J'en connais un qu'en redemandera.

—TA GUEULE ! »

Tony éclata de rire. Sa poitrine se gonflait, ses poils s'hérissant quelques peu. Arackniss lui même sentait que les siens en faisaient de même. Plus pour la colère que pour l'amusement, en revanche. Bon sang, il adorait Tony. Mais Tony était le roi des petits cons. Il n'en avait jamais connu de pire.

Remis de son fou-rire, ce dernier lui tapota l'épaule. Il lui adressa une oeillade bienveillante, porteuse d'un amour fraternel qui lui fit chaud au coeur.

« Nan, sérieux, c'est cool que ça se soit bien passé pour toi, j'suis content.

—Merci. Mais ta gueule. »

Parce qu'il n'avait pas envie d'en parler plus que ça. D'un certain côté, il acceptait de l'admettre, il n'était pas non plus complètement contrarié que Tony soit au courant, et qu'il se montre supportif de sa relation avec Pentious. Ça le tranquillisait même, d'avoir un peu d'appui dans ces étapes cruciales de son épanouissement personnel.

« Tu sais que je l'avais prévenu, que s'il te faisait du mal, je lui cassais la gueule.

—Tu déconnes ?! »

Les yeux écarquillés, Arackniss dévisagea sérieusement son frère. Tony déplaça son énorme mèche blanche en arrière, cette dernière revenant s'arcbouter immédiatement.

« Nan. On touche pas à mon petit frère. Alors que t'aies un mec qui s'occupe bien de toi, qui te bichonne, c'est cool. Tu le mérites. »

Oubliant d'arguer qu'il était le grand frère, Niss ne put résister à poser la question qui le hantait depuis quelques semaines.

« Mais, et toi ? Avec Alastor, on dirait que vous êtes un peu… hm…

—On baise pas, si c'est ça ta question. J'sais même pas s'il a une queue et s'il sait quoi faire avec.

—…C'était pas ma question. Vous avez une relation ? »

Se servant un verre de whisky, Tony leva les yeux au ciel.

« Je dirais plus un arrangement. Je t'en dirai plus une autre fois, mon frère. Sache juste que l'amour, c'pas pour moi. J'fais du cul, oui, pas du love. Ça, j'te le laisse, va. Profite et prends tout ! »

Et il lui fit un léger clin d'oeil. Niss n'ajouta rien de plus, parce qu'il n'avait pas envie de le mettre mal à l'aise. Connaissant la réputation du démon radio, il avait un peu de l'arrangement que son frère et lui avaient conclu. Si Alastor lui faisait du mal, il ne s'en remettrait pas. Il le vengerait, aussi. Quitte à partir en guerre seul, ça ne serait pas impuni. De l'autre, vu queTony paraissait tranquille à ce sujet. C'est qu'il n'y avait rien de trop dangereux derrière. Peut-être même qu'Alastor était aussi bien attentionné que possible envers lui. Ça restait des hypothèses. Toutefois, il aurait bien aimé, lui aussi, que son frère ait quelqu'un de bien dans sa vie. Alors même si Alastor était pas vraiment ce qu'on pouvait appeler quelqu'un de bien, tant qu'il ne lui faisait pas du mal, et qu'il l'éloignait du milieu sordide dans lequel il s'était fourré, Arackniss aurait bien aimé qu'il se trouve quelqu'un. Quelqu'un qui l'aide, qui l'épaule un tant soit peu. Parce que lui aussi, il méritait d'être heureux.


Quelques semaines plus tard, Pent, Niss, Charlie, Vaggie, Alastor, Tony et Husk étaient réunis au Happy hotel. Ils prenaient le thé, bon gré mal gré pour certains des convives. On ne pouvait pas dire qu'Alastor, Husk et Tony soient les plus sociables, même s'ils appréciaient la compagnie des autres. Enfin, pour Alastor, c'était moins sûr. Semer la zizanie était son inclinaison principale, en revanche. Il rebondissait sur les piques insidieuses des autres, et ses menaces proférées à coup d'ondes radios mettait tout le monde en sueur. Un après-midi tranquille, en somme.

Tandis que Charlie apportait des gâteaux, Vaggie croisait les bras, agacée par une dispute entre Angel et Husk. Il ne leur fallait pas grand chose en règle générale. Le premier était un provocateur en série, le deuxième une bombe à retardement avec un sérieux problème de nerfs incontrôlable. Pentious faisait au mieux pour ignorer les regards perçants d'Alastor et Arackniss… Arackniss observait tout ce beau monde, partageant à moitié l'agacement de Vaggie, mais aussi l'enthousiasme de la fille de Lucifer. Qu'on le veuille ou non, sa gentillesse avait de quoi contaminer même les plus sceptiques.

C'était bien pour ça que les autres restaient. Tony ne faisait que se plaindre de l'endroit, de certaines règles établies, mais il s'y sentait bien. Il était protégé. Il se trouvait même des alliés. Questionnables, certes, mais des alliés. Ils n'avaient aucune raison de fuir, ou de faire foirer l'opération qu'avait imaginée la précieuse Princesse. Le suspens résidait dans la question principale : sauraient-ils sauver leurs âmes ? Certains d'entre eux n'avaient aucun espoir de rédemption. Alastor le premier. Pour d'autres, nés en Enfer, il n'y avait aucune raison qu'ils puissent en sortir — Charlie. Tony… peut-être. Il n'était pas mauvais. Vulgaire, junkie, avec une grande gueule, mais un bon fond. Husk, Niss le connaissait pas assez pour en être sûr. Vaggie non plus, mais avec l'influence de sa compagne, à n'en pas douter, elle prendrait le plus facilement le bon chemin.

Heureusement, Pent et lui ne nourrissaient pas d'espoir inutiles pour leur salut. Passer du temps là-bas pour voir son frangin, ok, mais ils ne se réhabiliteraient pas. En tant que membre d'un gang, Arackniss avait commis des actions violentes et impardonnables. Des meurtres en chaînes, des assassinats. Du trafic aussi. Une âme comme la sienne, au paradis, on lui chierait dans le cou. Ça ne se sauvait pas.

En trempant son biscuit dans le thé chaud, Pentious enroula sa queue autour de la main de Niss.

« Dites-moi, Princesse Charlotte, votre recherche de nouveaux résidents avance bien ? »

Sa question n'était que de la politesse, évidemment. Il appréciait la jeune démone, et voulait converser en toute cordialité avec elle. Cette dernière sourit à pleine dent, prenant Vaggie par la main avant de se saisir aussi de la sienne. Pent ne comprit pas. Arackniss, en revanche, fronça les sourcils en sentant un coup fourré pointer le bout de son nez.

« Eh bien, je n'osais pas demander mais… est-ce qu'Arackniss et vous-même accepteriez de nous rejoindre ? Nous avons des chambres libre, et un grand espace. Vous pourrez vaquer à vos occupations sans être déranger. »

Pentious déglutit, ne s'étant visiblement pas attendu à celle-là. Et Arackniss aussi, tombait des nues. Elle demandait s'ils voulaient venir vivre au Happy Hotel ? Autant dire que l'option ne s'était pas imposée à leurs esprits. Le couple avait une petite routine, chez Pent. Ils pouvaient batifoler dans tout le manoir sans se soucier d'aucune âme qui vive, à part la leur. Ils pouvaient se dégager du temps pour s'entraîner au tir, pour Niss, et pour bidouiller des inventions, pour Pentious. Certes.. ils pouvaient aussi le faire ici. Mais est-ce que ça serait pareil ? Les deux démons se regardèrent. Ils hésitaient. D'une certaine manière, ils revenaient souvent ici. Parce qu'ils appréciaient les résidents de l'hôtel. Parce que le frère de Niss était là. Parce qu'ils avaient des compagnons pour les défendre en cas de conflit entre eux et l'un des seigneurs démons que Pent aurait décidé d'asticoter — ce qu'il devrait oublier s'ils s'installaient définitivement.

N'ayant jamais envisagé l'idée, Pent demanda à prendre Niss à part, sortant dans le couloir. Pendant ce temps, Angel, qui arrêta de s'engueuler avec Husk, se tourna vers Charlie.

« Attends, meuf, tu veux sérieusement que le monsieur double queue vienne foutre ses inventions de merde partout ? »

« MONSIEUR DOUBLE QUEUE ?! »

C'était Pentious qui s'était écrié, fou de rage. Arackniss dut lutter entre l'envie de rire, ou d'en décocher une à son frère. Parce que c'était risible. Charlie se mit entre eux, tentant d'agiter les mains pour les inciter à rester calme.

« Je pense qu'il convient de laisser Sir Pentious et ton frère décider, Angel. S'il te plaît, ne les provoque pas.

—Ça va, je déconne. Mais à moitié quand même. Ce type produit de ces saloperies, il va faire de l'hôtel une charpie.

—Et t'as pas ton mot à dire ! » intervint Vaggie. « Il y aura des règles, s'ils emménagent. On sait ce qu'on fait. »

L'araignée blanche continua à râler, mais encore assez gentiment. Certes, son frère et son amant s'entendaient moyennement bien. Beaucoup mieux depuis quelques temps. Arackniss était quand même rassuré que Vaggie sache être ferme avec lui. Si Tony ne se faisait pas recadrer, parfois, il avait du mal à comprendre les limites.

Soupirant, l'araignée se passa une main dans les cheveux. Pentious le dévisageait, l'attrapant par le poignet, faisant glisser sa paume dans la sienne.

« Qu'est-ce que tu veux faire, chéri ? »

Arackniss se sentit un peu paumé.

« J'en sais rien. » C'était bête, mais c'était sincèrement ce qu'il ressentait. « Je.. Ça serait pas une mauvaise idée, tu vois. Mais on y a pas du tout réfléchi, alors…

—C'est vrai, » admit l'aristocrate en opinant. « Ce pourquoi je voulais qu'on décide ensemble. Je suis d'accord avec toi, ça pourrait être bien. Surtout si, comme la princesse le dit, nous avons notre aile personnelle. »

Niss ricana.

« Tu serais prêt à arrêter de provoquer des conflits, si on reste là ? »

Le serpent croisa les bras.

« Ce n'est pas moi qui provoque le plus de conflit. Il n'y qu'à voir comment ton frère s'est adressé à moi…

—Je suis désolé pour ça, rougit Niss. Vraiment, Tony sait pas fermer sa gueule.

—Mais comment il le sait, ça ?

—Bah, euh, euh… »

Pentious balaya finalement sa propre interrogation d'un geste de la main.

« Bref, ce n'est pas la question. Il y a aussi Alastor qui me pose problème, mais je pense savoir l'ignorer. Et si tu parles des autres seigneurs, disons qu'être bien placé me permettrait de parvenir plus facilement à mes fins. »

S'il pensait savoir gérer, Arackniss ne mettait pas sa parole en doute. De plus, son plan n'était pas totalement idiot. Évidemment, Pentious était du type stratège, un brin manipulateur sur les bords —il n'était pas le seul, et il savait trouver les avantages là où ils se présentaient.

« Et sauver nos âmes ? » demanda Niss. « Tu y crois, toi ?

—Je n'en sais rien… On peut au moins essayer. »

Niss eut un rire amer.

« La tienne est dix fois plus pure que la mienne. J'ai été bien trop loin pour…

—Niss. » Pent serra plus fort sa main. « C'est faux. Tu ne sais pas ce que j'ai fait. Et je peux affirmer que tu possèdes une certaine pureté, toi aussi.

—Si tu parles de mon pucelage, tu me l'as enlevé. »

Le serpent consentit à rire, secouant la tête. Il lui caressa la joue, son pouce dessinant la rondeur, caressant les paupières de ses huit yeux. Il avait une infinie tendresse à son égard. Ça touchait Niss. Rien ne lui réchauffait le coeur autant que ça.

« Non, je parle de ton caractère. Tu es sincère. Tu t'inquiètes pour les gens que tu aimes. Tu es du genre à faire n'importe quoi pour eux. À tout sacrifier pour les autres. Que tu le veuilles ou non, ça demande une beauté d'âme dont de nombreuses personnes ne seraient pas capables.

—Pent…»

Il se jeta dans ses bras, des petites larmes lui coulant des yeux. Il hésitait encore plus. Que faire ?

« Tu aurais envie de vivre ici, Pent ?

—Peut-être qu'on pourrait essayer ? »

Ils échangèrent un sourire, puis un baiser. Revenant avec les autres, Pentious et Arackniss se tenaient encore la main. Le serpent fut celui qui prit la parole.

« Nous acceptons. Mais j'aurais des négociations. »

Charlie se leva d'un bond, frappant dans ses mains et enlaçant Vaggie.

« Oh oui, bien sûr, demandez ce que vous voulez ! »

C'était touchant. Elle était tellement ravie d'avoir de nouveaux occupants dans son hôtel qu'elle était prête à leur faire plaisir. Cependant, même Niss se demandait ce que son amant allait demander.

« Je veux des excuses de la part d'Alastor sur la manière dont il m'a traité.

—Oh bordel… »

Arackniss lâcha la main de son amant, se la passant devant le visage. Et ça allait encore partir en pugilat.

« Des excuses ? » demanda le démon radio, avec un sourire flippant. « Et que penserais-tu d'une petite correction supplémentaire ? »

Pent grogna. Charlie se retrouva de nouveau en position de tempérer.

« S'il vous plaît, ce n'est pas nécessaire d'en arriver là. Alastor ne fera plus rien, et Sir Pent, vous devriez laisser partir votre rancoeur.

—Ma rancoeur est justifiée !

—Et elle le sera d'autant plus avec ce que je vais faire, » ricana Alastor.

« Oh oui, sors tes tentacules, Alastor ! »

Anthony se renversa la tête en arrière, riant à gorge déployée. Il était excité par l'idée d'un combat, et Alastor répondit à son oeillade. Ça allait mal se finir. Arackniss grogna, tirant Pentious derrière lui.

« Charlie a raison, arrêtez tous les deux. C'est puéril.

—Ce n'est pas moi qui ai commencé.

—Oh, je vous en prie, s'agaça finalement Charlie, vous n'allez pas commencer ainsi ! »

Une ombre s'étendait dans le salon. Alastor fusillait Pentious du regard, et Pentious en faisait autant. Ils semblaient proche d'en découdre, et l'auraient sans doute fait si tout le monde n'avait pas protesté. Comme voulant renchérir, Alastor émit quelques grésillements. Mais avant qu'une remarque quelconque ne franchisse sa bouche, un bruit sourd retentit.

Une bouteille.

Venait de lui être envoyée sur la tête.

Husk, frappant dans la paume de Tony, paraissait particulièrement fier de lui.

Il venait de balancer une bouteille à Alastor. Et de signer son arrêt de mort.

C'était tout les jours comme ça ?

« Tu as osé…

—Y'avait plus de gnôle. T'avais promis d'aller en chercher. »

L'atmosphère fut paradoxalement plus détendue. Anthony se redressa, tapotant gentiment l'épaule d'Alastor, lui faisant signe de laisser tomber.

« Ah, ça, je peux aller en chercher. Ou les deux petits nouveaux y vont… J'ai déjà fait la vaisselle hier.

—Le calendrier est égal pour tout le monde, apposa calmement Charlie, Vaggie soupirant. Il faudra vous rajouter sur la liste. »

Arackniss se dédouane immédiatement.

« J'y vais pas, moi.

—Je suppose que c'est à moi qu'incombe la tâche, » soupira Pent. « Tu préfères rester ici, Niss ? »

Ce dernier opina. Comme ça, il pourrait vérifier que le démon radio restait en place et ne suivait pas son mec pour lui régler son compte.

« Je viens avec lui, plutôt que de vous voir tous vous entretuer, grommela Vaggie.

— C'est bien aimable. »

La démone embrassa sa compagne, Pentious faisant de même avec Niss.

Alastor semblait s'intéresser davantage à Tony qu'à ce qui se passait à présent, ce qui rassura Arackniss. Il se doutait que son frère le convaincrait de ne rien faire.

Le serpent et la lapine en route, il s'en fut.


Au bout d'une longue heure, revenu avec de l'alcool — il avait vadrouillé avec la lapine et s'était perdu en chemin, les deux compères ayant expérimenté un désaccord quant à la direction à prendre, Pentious se pencha sur Arackniss en l'embrassant tendrement. Son regard brillait d'amour, de joie, ainsi que d'une pointe d'amusement.

« On va passer un bon moment, ici. »

Niss ne pouvait décemment pas le contredire. Et il ne le ferait pas. Il n'en avait strictement aucune envie. La cohabitation s'avérerait complexe avec certains êtres. Mais l'endroit était bien, il ne le niait pas. Qu'est-ce que ça leur coûterait, d'éviter de trop boire, de ne pas faire de vagues, de ne pas attaquer d'autres démons ? Pas grand-chose. Ça leur éviterait de dépenser de l'énergie inutile. Pent pourrait toujours faire ses inventions, il faudrait juste qu'il soit plus délicat dans sa manière de les tester.

Et même s'ils n'arrivaient pas à atteindre le paradis, que leurs âmes ne méritaient pas le salut, celui qu'ils avaient trouvés était l'un en l'autre. C'était largement plus que tout ce qu'ils auraient pu espérer.

Même les âmes les plus pieuses ne connaissaient pas toutes une affection aussi pure que celle qu'ils se portaient.

Fin


Et voilà, c'est donc fini pour cette aventure !

Le mot surprise pour les attentifs était donc ahegao, soit une sympathique expression japonaise pour désigner l'expression de l'orgasme sur un personnage x'D. Pourquoi ce mot ? Parce que ça me faisait rire, et que d'un côté, ça colle plutôt bien à la dernière partie d'une certaine façon XD.

Sinooon, cette histoire aura été un peu longue ^^ mais j'espère que ça vous aura plu ! L'histoire est enfin terminée. J'avais annoncé une possible suite, je verrai ce que j'en fais. Pour le moment, c'est pas immédiat dans mes priorités, j'attends d'avoir désherbé des projets XD.

Reviews ? N'hésitez surtout pas, j'ose espérer que ça vous aura plu !

Merci d'avoir lu, et merci à tout ceux qui ont suivi cette histoire !