Chapitre 2 : Nouveau départ

POV Ace

Le bidonville brûle. L'immense brasier illumine le ciel, éclipsant la nuit par une luminosité malsaine, dérangeante. Depuis longtemps, les hurlements de terreur des habitants de la décharge de Goa se sont tus, remplacé par le crépitement des ordures, déversant dans le ciel l'odeur nauséabonde du charnier. Pourtant, je reste là, au milieu des flammes, laissant mes pulsions s'apaiser enfin, se nourrissant du chaos ambiant. La vengeance est délicieuse, tellement savoureuse qu'elle efface le goût de cendre dans ma gorge. Dans mes yeux, la lueur prédatrice s'apaise enfin, rassasiée. Oh oui, le sang pour le sang, les flammes purificatrices pour cette horreur, j'ai rempli son rôle. Personne ne touche à mon frère.

- A… A l'aide…

Je m'arrête, surplombant le corps brûlé de ma petite taille. Lentement, un sourire s'étira sur mon visage, faisant craqueler mes lèvres gercées. Oh oui, que de bonheur. Le voilà le véritable responsable, celui qui a déclenché la colère des D.

- Bluejam…

- S'il te plait gamin, aide-moi…

- Je pourrais… Si seulement tu ne t'en étais pas pris à mon frère. Après tout, te ne récolte que ce que tu as semé, répondis-je sadiquement.

- Tu… tu es un monstre !

- Non, je suis un éveillé.

Sans rien ajouter, j'enjambe le corps à moitié calciné et repris ma route, quand le hurlement de Bluejam me fait m'arrêter. Tournant légèrement la tête vers l'ancien pirate, j'écoute les malédictions qui me sont lancés, souriant doucement.

- Aller en enfer ? Mais j'y suis déjà. Je vais simplement le présenter au monde. Hiken !

Là où se trouvait auparavant ma silhouette enfantine se trouve désormais un immense dragon fait de flammes, faisant rougeoyer encore plus les braises, déclenchant un nouvel incendie dans cet enfer terrestre. Longuement, j'absorbe la douleur des âmes des victimes de ma colère, avant de me diriger vers ma demeure, reprenant apparence humaine. Je serais nourri pour un temps. Mon petit-frère n'est pas encore apte à se confronter à la véritable apparence des D. Il ne comprendrait pas. Quelle ironie tout de même ! Les dragons célestes utilisent leur volonté pour chasser les dragons qui sont la véritable apparence de ceux qu'on nomme porteur de la volonté du D !

- Où allons-nous aller ?

La question de Luffy se mêle au crépitement des flammes, s'élevant dans les airs, touchant doucement le prince éveillé. Reprenant mes esprits, je remarque mon retour à la cabane, où j'avais envoyé Luffy afin de regrouper nos affaires. Nous devons partir maintenant, avant que le navire de la marine n'arrive. Les dragons célestes ne laisseront pas un D en vie. Si j'ai couvert les traces de mon frère par mon aura, je ne peux pas le laisser ici, dans le risque qu'il se fasse attraper. Nous devons tous les deux partir, le temps que Luffy apprenne le contrôle.

- Je ne sais pas Luffy, là où le vent nous portera.

- Nous ne pourrions pas rester ici ? Demanda d'une petite voix le plus jeune.

- Non, pour Sabo. Nous devons réaliser son rêve et parcourir la Grand Line. De toute façon, nous ne pouvons pas rester ici, le gouvernement ne doit pas te mettre la main dessus.

- Papy pourrait…

- Le vieux ne peut plus rien pour nous. Ne t'en fais pas, je te protégerais. Je te le promets.

Je me tourne vers mon frère, plantant mes yeux gris dans ceux onyx de Luffy. Oui, je le protègerais envers et contre tout, c'est mon rôle, mon devoir, pour mon roi. Je le formerais du mieux que je le pourrais au pouvoir du D, afin que Luffy ne laisse plus jamais exhaler son don sans pouvoir se protéger ensuite. Notre voyage sera long, nous ne serons en sécurité nulle part, mais c'est indispensable. Tant que Luffy n'est pas capable de cacher son éveil, je ne pourrais pas le laisser seul, même si cela signifie devoir se faire passer pour un monstre en superposant mon pouvoir à celui de mon petit-frère.

Jetant un dernier regard au reste fumant de la décharge, dernier témoin de la violence de son D, je se détourna et prit la main de Luffy. Je le fis lentement descendre la falaise, jusqu'à atteindre le village de Fushia. Ce village qui a vu se succéder des générations de D, parfois éveillés, parfois endormis, mais jamais oublié. Parfois, je les envie, ces gens si simple, à des milliers de kilomètres de sa douleur, de cette rage qui me fais suffoquer, m'empêchant de respirer, me laissant dans la bouche ce goût de chair humaine brûlée. Pourtant, même quand mes yeux se voilent, mon regard inexorablement ancré dans une scène apocalyptique, je résiste. Je ne me laisserais pas sombrer dans cette fureur ardente, pour mon petit-frère. Je veillerais sur lui, qu'importe que je me brise les dents ou m'arrache les ongles face aux hurlements des âmes parasitant mon esprit. Je resterais, jusqu'à ce que la lumière de mon frère éclipse le brasier dans mon cœur.

D'un geste souple, je saute à l'intérieur de notre petite embarcation pour vérifier une dernière fois l'ensemble de nos affaires. Je peux ainsi laisser un peu plus de temps à mon frère pour les adieux. Je n'ai jamais eu ma place dans la communauté de Fushia, contrairement à Luffy. Peut-être qu'un jour, d'ici un an ou deux, mon petit-frère pourrait revenir ici afin de profiter de la vie, de ne pas avoir à fuir comme moi. Quelques minutes plus tard, le garçon de dix ans monte à son tour et je mis les voiles, sans un regard pour l'île qui m'a vu grandir. Ne pas s'attacher, seul ma mission compte, seul mon frère compte. Du haut de mes treize ans, je suis désormais le responsable, celui qui veillera la nuit, le jour, fera à manger et nous maintiendra en vie. C'est son rôle, en tant que frère, en tant D, en tant que prince pour son roi.

- Ace ! Regarde ! Le monstre marin ! C'est lui qui a mangé le bras de Shanks !

Pourtant, au lieu de nous attaquer, le Kai-Ô incline simplement la tête, reconnaissant la puissance des enfants de la mer. Quand l'aube naquit enfin, notre embarcation n'est déjà plus visible des côtes. Heureusement pour nous, car l'aube apporte avec elle un navire de la marine, qui fit frémir les plus anciens du village. La dernière fois qu'un tel bâtiment s'était amarré à Fushia, deux D endormis étaient morts et un enfant était devenu esclave.

Les amiraux eurent beau chercher, nulle trace de nous n'étaient visible. En fouillant plus loin sur l'île, ils arrivèrent en vue de la minuscule cabane, où seul un enfant y vivrait, celui qui avait détruit le tas d'ordure. Il aurait tué ses seuls amis avant de s'enfuir. Comme un monstre, tel un éveillé. De là naquit la première prime de Ace : l'enfant éveillé pour 500 millions de Berry. La première d'une longue série. Qu'importe, je suis le bras armé du D.