Bonsoir à tous !
Un nouveau chapitre, un nouveau déboire financier. On aime !
Peut-être un peu moins drôle que ceux d'avant. Disons qu'on vois plus l'idée de "pas avoir de fric ça craint". Notez que j'aime bien le personnage d'Aiolia, c'est juste que, il fallais en choisir un et c'est tombé sur lui xD
J'espère que ça vous plaira !
Le roi en cage
Athènes était, comparativement à d'autres capitales d'Europe, plutôt petite. D'une superficie de trente-neuf kilomètres carrés, habitée de six-cents mille âmes et des poussières, la ville était quand même assez étendue pour ne pas croiser des gens de sa connaissance ; la preuve, Aiolia n'avait jamais rencontré de camarades chevaliers lors de ses expéditions secrètes. Enfin, secrètes… Milo était au courant. Il lui servait de couverture.
Qu'on se le dise, le chevalier du Lion était un jeune homme droit dans ses bottes, fidèle à sa déesse et assez amical une fois une méfiance naturelle dépassée. Mais tout homme est amené à pécher. Il l'avait lu dans la bible qu'il avait trouvée une fois en passant chez Deathmask. Il n'avait aucune idée de ce que pouvait faire là ce livre saint, et ne voulais pas le savoir, mais l'idée était là : même les plus vertueux s'écartaient du bon chemin.
Et là, le bon chemin était matérialisé par le pauvre salaire que Saori Kido leur versait, et qui ne parvenait même pas à couvrir ses dépenses mensuelles pour réparer la tuyauterie de son temple. Parce que oui, si le Temple des Gémeaux s'effondrait sur la tête de ses proprios, celui du Lion inondait régulièrement la salle de bain. Et Aiolia en avait marre d'avoir les pieds dans l'eau à chaque fois qu'il allait se laver les dents !
Il avait donc cherché a se trouver un petit travail pour trouver les fonds nécessaires aux réparations. Sauf que voilà : personne ne voulait d'un jeune homme de vingt ans, non diplômé, qui sortait de nul part et avait des horaires aléatoires. Pourtant, ses camarades dorés avaient fait jouer leurs propres réseaux ; Kanon lui avait cherché une place au port, Aldébaran le voisinage de son immeuble de garde, mais rien. Rien ! Ô désespoir, ô marché de l'emploi ennemi, il était condamné à se mouiller les chaussettes chez lui.
Et puis, alors qu'il était prêt à ravaler sa fierté et aller mendier chez la déesse, il avait trouvé un moyen de remonter ses finances.
Bon, c'était illégal. Mais à quoi s'attendre d'autre quand c'était Deathmask qui vous dégottait la chose ? Et puis bon, il n'était pas le seul à pencher vers l'illégalité. Dhoko pouvait bien dire et prendre ses airs de vieux maître sage, son alcool de contrebande était quand même ça : de la contrebande. Et que dire des placards de Shaka…
Le quatrième gardien l'avait donc pris un pitié (ce qui était un peu vexant) et lui avait donné l'adresse du bar où il se rendait ce soir. Il y avait des tables de jeu où les sommes pouvaient très vite s'élever, mais Aiolia n'avait rien d'un joueur ; il connaissait à peine les règles du poker, ses seules expériences de jeux s'étant déroulées à trois heures du matin, complètement arraché dans le temple du Scorpion. Pas terrible, donc.
Non, il n'y allait pas pour jouer aux cartes, mais pour jouer des poings.
Dans le sous-sol du bar se tenait tout les samedis des combats, illégaux bien sûr, mais qui pouvaient faire gagner beaucoup d'argent.
Pas fou, Aiolia n'utilisait jamais son cosmos. Déjà parce que c'était interdit par Athéna, ensuite parce qu'il n'était pas habitué à combattre de simples humains ; il aurait été facile d'en tuer un par erreur. Il ne prenait donc avec lui que ses bons vieux muscles. Avec son entraînement ultra-intensif, ça serait facile de vaincre ses adversaires.
Il avait été surpris !
D'accord, il tenait très bien la barre. Il pouvait encaisser un nombre impressionnant de coups, et avait une technique impeccable… Mais c'était souvent le cas de ses adversaires. Parfois, il devait vraiment y aller à fond pour l'emporter.
Alors non, ce n'était ni glorieux, ni gratifiant, mais merde, il avait besoin de ce fric. Et puis Milo lui servait d'alibi si on lui posait des questions. Aucun des ors n'était dupe ; les autres sortaient régulièrement du Sanctuaire pour gagner sa pitance. Que ça soit pour nourrir des chiens ou pour aller casser la gueule à des volontaires, au fond, quelle différence ? Enfin, c'était ce qu'avait dit Deathmask. Le Lion avait un peu plus d'état d'âmes… Donc il cachait son boulot à ses collègues.
Débile, aurait dit certains. Mais ça lui était resté de l'époque de Saga. Dissimuler, ne montrer que la façade la plus brillante de lui même. Bien sûr, plus personne ne le considérait comme un traître à présent, mais il n'arrivait pas à se débarrasser de cette attitude. Et apprendre qu'il faisait des combats clandestins, ce qui était interdit par le code des chevaliers, n'améliorerait pas son image. Sauf peut-être auprès de Deathmask, mais ce type était tordu.
Il poussa la porte du bar et une musique forte vint lui agresser les oreilles. L'établissement était déjà plein. Il était presque vingt-deux heures et la soirée commençait à peine pour les soiffards. Le Lion évita deux serveurs et se rapprocha du bar. L'homme qui le tenait lui fit un signe de main.
« - Hé, salut Léo. Tu descends ? »
Il hocha la tête. Le barman lui ouvrit la porte qui menait à l'arrière-boutique.
« - Bonne chance, mon gars ! »
Un escalier en colimaçon menait dans la cave ; au fur et à mesure qu'il descendait, Aiolia entendait des rires et des éclats de voix monter. Enfin, il déboucha dans la grande salle illégale.
Il y avait un ring, au milieu, monté de bois et de cordes un peu usé. Dessus, deux jeunes hommes, à peine plus que des adolescents, s'affrontaient le sourire aux lèvres. C'étaient des combats de chauffe ; il n'y avait pas de sang, pas de paris, rien que des copains qui voulaient se donner un peu en spectacle. Il y avait une trentaine de spectateurs qui sifflaient depuis les gradins. La forte musique à l'étage servait aussi à couvrir le bruit qu'ils faisaient en bas.
Plusieurs hommes levèrent la main pour le saluer. Il répondit par un sourire et se dirigea vers une femme grimpée sur une caisse en bois. Elle tenait un carnet usé et lui fit un sourire un peu salace quand il se présenta devant elle.
« - Hé, mais si c'est pas mon petit Léo. Tu montres enfin le bout de ton nez ? On commençait à se demander si t'était pas mort.
- Pas encore, non. Le boulot. »
Haris roula des yeux. Le boulot, et encore le boulot… Il était beau à regarder, ce type, mais il n'avait pas grande conversation. C'était même un des moins loquasses !Il prévenait toujours deux jours avant qu'il venait, se pointait, cassait la gueule à deux trois types et repartait aussitôt. Quelle tristesse. Enfin, qui était-elle pour juger ?
« - Comment vont les paris ?
- Plutôt bien, répondit-elle après avoir vérifié son carnet. Tu n'a pas vraiment d'adversaire sérieux, ce soir. Marco a annulé, blessure. Le reste, c'est plutôt du menu fretin.
- Cool. Et les cotes ?
- Sept sur un pour toi, mon mignon. Fais toi plaisir. »
Une bonne soirée, donc. Il pouvait espérer se faire jusqu'à deux cent mille drachmes s'il gagnait tous ses combats. Une petite fortune ! Avec ça, il pourrait faire réparer sa salle de bain, et peut-être même s'offrir quelque chose à côté. Pourquoi pas une nouvelle guitare ? La sienne commençait à être un peu usée. Et puis l'anniversaire de Seiya approchait. Il pourrait peut-être la lui céder.
« - Hé, blondinet. T'oublies pas quelque chose ? »
La bookmaker tendait la main avec un sourcil levé. Il déposa un billet dans celle-ci. Son droit de participation…
« - Amuse toi bien ! »
Rapiat.
Les combats de chauffe se terminèrent sous les sifflements, et les premiers vrais affrontements commencèrent. Ils n'étaient pas nombreux ce soir – huit combattants. En toute logique, il combattrait donc quatre fois. Le vainqueur emportait une mise générale en plus de l'argent des paris sur sa personne, après que la part des parieur ait été retirée. Tout un calcul dont Aiolia ne pigeait pas la moitié. C'était le travail de Haris de calculer tout ça !
Son tour arriva bientôt. Il monta sur le ring sous les sifflets et encouragement du public. Son adversaire était un jeune homme, sans doute de son âge, qui levait les poings d'un air menaçant.
« - Une dernière volonté ? Ricana-t-il.
- Ne me dégueule pas dessus quand je t'aurais refait le portrait, répondit le lion sur le même ton. »
C'était arrivé une fois. Le public avait beaucoup rit, lui un peu moins.
La cloche sonna et son adversaire lui sauta dessus immédiatement. Il évita un coup de poing et profita de l'élan de son adversaire pour passer sous sa garde et enfoncer son coude dans son estomac. Un grognement de douleur s'échappa des lèvres de son adversaire avant qu'il ne recule pour lui envoyer un coup de pied. Il le bloqua d'un bras.
Ce type n'avait pas l'air très puissant. Il allait faire vite. Il saisit le pied qui fonçait vers sa tête et le balança dans les cordes du ring. Le public hurla sa joie quand l'adversaire utilisa la propulsion pour revenir à toute vitesse. Aiolia eut une grimace de douleur lorsque la peau de sa joue se déchira. Le connard n'avait pas retiré ses bagues avant de monter sur les planches.
Le premier sang rendit dingues les spectateurs. Aiolia décida qu'il n'allait pas avoir pitié et alla au contact un peu trop rapidement pour un être humain normal. Le nez de l'autre se brisa net sous le coup et il retomba dans les cordes.
« - Abandonne, ordonna Aiolia.
- Va crever !
- DESCENTE DE POLICE !»
Le hurlement paniqué surplomba la foule qui se tut une seconde avant que l'enfer ne se déchaîne. Tout le monde se mit à courir dans tous les sens pour espérer atteindre une sortie. L'adversaire d'Aiolia sauta par dessus les cordes pour courir se mettre à l'abri. Sauf qu'ils étaient dans une cave. Où voulaient-ils fuir ?
Le très noble chevalier au Lion bouscula deux type dans l'espoir d'atteindre la sortie. Il ne pouvait pas se téléporter au su et vu de tout le monde ! Et s'il se faisait attraper, comment justifier qu'il se retrouve en taule !
« - Main en l'air, messieurs ! Gueula une voix derrière lui. On va faire ça dans le calme et personne ne sera blessé !
- Nique ta mère ! Répondit une voix dans la foule. »
Il se retourna pour voir que quatre flics bouchaient la sortie. Haris, bien sûr, avait disparu. Quatre boxeurs essayaient de se frayer un chemin à grand coup de poings. Ils se firent rejeter avec violence. L'un d'entre eux lui rentra dedans et ils basculèrent au sol. La tête d'Aiolia tapa violemment contre le sol en béton.
Lorsqu'il rouvrit les yeux, il y avait beaucoup moins de cris. Il se redressa avec un grognement. Il avait dû s'assommer pendant quelques minutes.
« - Hé là, belle gueule. Tu restes tranquille. »
Il cligna des yeux. Un policier était penché au-dessus de lui. Il avait une moustache immense.
« - T'es vivant ?
- Je crois, marmonna le lion.
- Génial. Met les mains devant le bide, on t'embraque.
- Merde, marmonna le lion.
- J'te l'fais pas dire, mon gars ! »
Et l'enfoiré se mit à rire.
« - Hé, le boxeur. T'es libre, bouges ton cul. »
Aiolia sursauta. La voix du policier l'avait tiré de son demi-sommeil. Il se redressa sous les sifflets des deux ivrognes du banc d'en face. Devant lui, le moustachu ouvrit les barreaux avec un air moqueur.
« - Ton pote a payé ta caution, t'a du bol. Si on te revoit, t'auras pas la même chance ! »
Son pote ? Qui ça, son pote ? Par pitié, faites que ce soit Milo. Quand il avait eu le droit d'appeler quelqu'un, il avait composé le numéro du standard du Sanctuaire. Le garde de faction avait été assez aimable pour accepter de passer le message à son ami du scorpion : venir le chercher à l'adresse du commissariat. Il avait ensuite assuré sa plus grande discrétion.
Il suivit le policier, qui lui rendit sa veste, et l'emmena à l'accueil. Là, un grand homme était penché sur le bureau et signait des papiers.
Aiolia pâlit lorsqu'il se redressa. Ce n'était pas Milo.
Saga était élégant, dans ses vêtements de civil. Il portait une chemise et un pantalon à pinces. Son visage n'exprimait aucun reproche, mais Aiolia sentit pourtant ses propres joues le brûler et ne put s'empêcher de baisser les yeux.
« - Tout est en ordre, fit le policier de l'accueil.
- Très bien, merci, répondit Saga d'une voix aimable.
- Et faites en sorte qu'on le revoie pas, hein ?
- J'essayerais. Bonne nuit, officier. »
L'ancien Pope tourna les talons et fit signe à Aiolia de le suivre. Celui-ci obéit sans un mot, et ils sortirent dans l'air froid de la nuit.
Le Lion enfonça les mains dans ses poches et releva durement les yeux. Saga pouvait bien lui faire tout les reproches qu'il voulait, il s'en fichait. En plus, de la part d'un type qui avait tué le Pope pour prendre sa place…
« - Tu vas bien ? »
Un peu désarçonné par la question, le jeune homme mis un instant à comprendre qu'il parlait de la coupure qui ornait son visage. Il y porta les doigts et gratta un instant le sang séché autour de la blessure.
« - Ah… Ouais, c'est rien. Un accident.
- Un accident qui t'a conduit en cellule ? »
Méfiant, Aiolia lui adressa un regard noir. Il ne voulait pas d'interrogatoire, merci. Saga respecta sa volonté en secouant la tête. Ils ne dirent rien pendant quelques secondes, avant que le cinquième gardien ne reprenne.
« - Pourquoi Milo n'est pas venu ?
- Il était de garde, expliqua le Gémeaux. »
Aiolia ferma les yeux. Merde, la garde. Il avait complètement oublié. Pourtant, Milo lui avait dit la veille au soir ; il avait échangé un tour avec Shura, et assurait donc deux services de suite.
« - Et il t'a prévenu toi ?
- Il a estimé qu'il valait mieux envoyer quelqu'un avec quelques notions de juridique. Au cas où. »
Au cas où il aurait eu besoin d'un avocat, sans doute. Au cas où il aurait été arrêté pour quelque chose de bien plus grave qu'une descente de police dans un bar illégal… L'idée lui laissa un petit quelque chose d'amer dans la bouche. Est ce qu'on lui ferait un jour confiance ?
« - Si c'est ce qui t'inquiète, tu n'es pas le premier que je vais chercher, fit Saga avec un léger sourire. Tu n'imagines pas le nombre de fois où j'ai sorti Deathmask de derrière les barreaux…
- Ben tiens, être comparé à un tueur en série psychopathe, voilà qui me réconforte, répondit sèchement le plus jeune. »
Il aurait juré voir une grimace discrète sur les lèvres du Gémeaux, mais elle disparue bien vite, et il reprit cette expression de neutralité affable qu'il abordait la plupart du temps. Dieu qu'Aiolia avait parfois envie de lui coller son poing dans la figure… La frustration et la colère qu'avait entraîné sa nuit en cellule le démangeaient. Il ferma les yeux. Non, Saga n'y était pour rien. Il ne pouvait s'en prendre qu'à lui même. Il inspira grandement l'air froid pour se remettre les idées en place.
« - Excuse-moi. Merci d'être venu.
- Je t'en prie. Je n'étais pas couché, de toute façon.
- À cette heure ?
- J'ai des tendances à l'insomnie. Et le plafond de ma chambre est fissuré, je préfère ne pas y dormir. Mourir dans son sommeil d'un bloc de marbre tombé sur le museau n'est pas très glorieux, tu l'avouera.
- Vous ne l'avez toujours pas fait réparer ?
- Hmm. Et ta salle de bain ?
- Toujours pas, non. »
Il échangèrent un regard ; Un de ses regards qui passait entre deux personnes qui avaient la même idée en tête. Et là, l'idée en question, c'était « putain de déesse radine qui nous oblige à vivre dans des temples qui ont absolument besoin de travaux qu'elle ne veut pas financer. »
Mais bon. Il ne fallait pas blasphémer. Alors ils gardèrent leurs pensées pour eux.
« - Vous allez demander à Deathmask de faire les travaux ?
- Il le faudra bien. Nous aurions du mal à expliquer à une entreprise pourquoi ils doivent pénétrer sur un site archéologique fermé au public pour refaire des toitures.
- Il prend cher.
- C'est ça où continuer à porter un casque en intérieur et dormir dans les bains qui sont à l'air libre.
- A ce point-là ? C'est… Triste, un peu. »
Pathétique, même. Saga devait bien l'avoir compris d'ailleurs, puisqu'il lui adressa un pauvre sourire.
« - Aldébaran a été assez aimable pour nous ouvrir sa chambre d'ami en cas d'intempérie. »
Ouais. Définitivement pathétique.
« - Ah elle est belle la chevalerie, marmonna le Lion. Vous dehors et moi les pieds dans l'eau.
- N'oublie pas les bronzes qui ont des courants d'air et le siège du Pope qui est bancal.
- Pardon ?
- J'ai fini par le caler avec un livre. Le tome trois d'Orgueils et Préjugés, si mes souvenirs sont bons. »
Les lèvres d'Aiolia s'étirèrent sans qu'il ne puisse l'empêcher. Imaginer le trône sacré, passé depuis des générations, calés avec un livre épais comme une brique, c'était… Sacrément risible.
« - Tu te fout de moi.
- Pas du tout. À moins que Shion l'ai fait réparer, il doit toujours y être. Tu regarderas à la prochaine réunion. »
Il le ferait, oui. Histoire d'être sûr qu'on ne se foute pas de lui.
Le silence s'installa à nouveau. Une voiture les dépassa à vitesse modérée et tourna à l'angle de la rue. Ils devaient attendre d'être loin de toute civilisation pour se téléporter au Sanctuaire ; sinon, Aiolia se serait épargné le trajet en compagnie de Saga. Pas qu'il ne l'aimait pas… Simplement, ils n'étaient pas proches (on se demandait bien pourquoi) et la situation présente était un peu humiliante.
En y pensant, le Lion se renfrogna. Avec sa chance, l'information allait circuler dans le Sanctuaire et alimenter les rumeurs qui courraient sur lui. Il y en avait sur tout les ors, bien sûr… Il se murmurait par exemple que Milo était un obsédé qui aimait profiter des charmes de son ami du Verseau, ou que Shura aimait un peu trop Athéna… Le cinquième gardien préférait rester loin des rumeurs. Plus prudent. Et maintenant, il allait être en plein dedans ! Bordel.
« - N'en parle pas à Aiolos, dit-il soudain. »
A la grimace de Saga, il ferma les yeux. Évidemment…
« - Je crains que ce ne soit trop tard. Il a payé la moitié de ta caution.
- Putain de merde ! »
Le Gémeaux ne releva pas l'insulte. Il pouvait comprendre la frustration d'Aiolia… Un peu. Enfin, pas la comprendre, mais l'imaginer.
« - Combien ?
- En tout ?
- Ouais.
- Cent soixante-dix mille. »
Cette fois, le Lion prit une grande inspiration pour s'empêcher de donner un furieux coup de poing dans le mur. Cent soixante dix mille drachme, c'était plus qu'un mois de salaire. Une petite fortune pour les ors.
« - Qui d'autre a payé ?
- Milo. Et moi. Aiolia…
- Non ! Ta… Tais toi. Ne dis rien. »
Saga referma sagement la bouche. Les émotions qui déformaient les traits du Lion étaient presque douloureuses à regarder. Il se mordit l'intérieur de la bouche. Peut-être qu'en demandant à Shion de faire un geste… En lui expliquant la situation…
Aiolia pressa ses paumes sur ses yeux un instant avant de se redresser.
« - Je vous rembourserait. Je sais pas quand… Ou comment, mais je vous rembourserais.
- Je ne suis pas pressé.
- Mon cul, répondit-il d'un ton un peu agressif. Ton temple te tombe sur la gueule. Tu vas les payer avec quoi, tes travaux ? Des cageots de marbre ? »
Il se rendit aussitôt compte que son ton était peut-être un peu trop énervé. Il n'était pas en colère contre Saga, évidemment… Plus contre lui même, de s'être fait avoir comme un con. Il aurait mieux fait de se téléporter, et tant pis pour les témoins !
« - Pardon, soupira-t-il.
- Ce n'est rien. On parlera d'un éventuel remboursement plus tard. Quand la situation se sera tassée.
- Ouais. Merci. »
Le plus vieux inclina la tête, l'air de dire « de rien ».
A force de discussion, ils avaient atteint une zone industrielle déserte ; ils prirent le temps de regarder si des caméras de surveillance les filmaient avant de se téléporter. Ils réapparurent devant la porte du Sanctuaire. Là où les civils voyaient une illusion de ruine, eux pouvaient voir le poste d'avant garde éclairé, et la muraille de défense.
Les gardes, d'ailleurs. Autour de la porte, ils étaient deux ; un vieil homme doté d'une grande barbe et un jeune qui avait encore de l'acné. Le jeune semblait à moitié somnoler, alors que le vieux les salua dès qu'ils surgirent des ombres, et colla un coup de lance dans les côtes de son collègue pour le réveiller.
Ils ne leur adressèrent pas la parole -pourquoi faire ? Si un chevalier d'or voulait aller se promener au milieu de la nuit, il y allait, point. Ce n'était pas deux petits gardes de bas échelons qui pouvaient leur poser des questions…
Ils passèrent près du standard téléphonique. Le garde en faction les salua d'un signe de tête. Aiolia se demanda si c'était son imagination où s'il voyait bien le demi-sourire moqueur sur ses lèvres. Il serra les dents. Le type qui avait dit qu'il resterait discret. Son cul, oui ! Tout le Sanctuaire serait au courant dès le lendemain, il en était persuadé.
Le Chevalier du Lion sera la mâchoire et redressa les épaules. Il avait été victime de rumeurs et racontars toute son adolescence. Alors un peu plus, ou un peu moins, qu'est ce que ça pouvait faire ? Il monterait les marches sans courber le dos.
Saga lui souhaita bonne nuit et s'effaça lorsqu'ils arrivèrent sur le palier du troisième temple. Au quatrième, Aiolia eut une soudaine envie de taper sur le gardien des lieux. Deathmask avait bien de la chance de ronfler comme un camionneur dans ses appartements. S'il avait été de garde, il se serait pris un pain dans la gueule. Il le méritait, avec ses plans foireux !
Enfin, il retrouva les colonnes familières de son temple. Dans la salle de bain, il alluma la vieille ampoule qui éclairait à moitié pour observer son visage dans le miroir.
Le côté gauche de son visage était légèrement enflé et tâché de sang séché. La coupure avait déjà commencé a cicatriser. Elle ne laisserait probablement pas de traces. Dans cette soirée de merde, c'était déjà ça..
Il ouvrit le robinet et entreprit de se nettoyer sommairement. Pour la douche, il verrait demain. Pour le moment, il ne rêvait que de s'enfoncer dans ses draps et ne plus jamais en ressortir.
Une humidité au niveau de ses chaussettes le fit baisser la tête. Une flaque se répandait tranquillement sous son évier et se faisait une joie de tremper ses pieds. Il ferma lentement les yeux pour ne pas balancer son poing dans le miroir. Ça n'aurait pas arrangé la fuite, mais au moins, ça aurait fait passer sa frustration. Et sa colère. Au lieu de quoi, il ferma l'eau, retira ses chaussettes, et quitta la salle d'eau sans s'embêter à éponger l'eau.
Il n'avait déjà plus de plomberie, plus d'argent et plus de dignité. Un peu de moisissure ne ferait que rajouter une touche champêtre à la montagne de merde qu'était sa vie.
Rip, hein. Mais on l'aime quand même.
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