Bonjour bonjour ! Me revoilà avec un 4e chapitre pour cette fic qui me tient éveillée la nuit à des heures pas très raisonnables xD. Je vous laisse donc avec la révélation du statut de Flavie Delangle, sa grande annonce pour Maya, et la réconciliation progressive de Mayla (oui, il se passe beaucoup de choses, désolée si ça semble un peu rushé sur les bords, je m'astreins à une limite de mots et parfois c'est complexe...) Bref, enjoy, et merci aux lecteurs qui laissent kudos et commentaires, c'est adorable ! :)


Chapitre 4

Hold On


POV Maya

Sekou s'installe au volant avec Max sur le siège passager, tandis que Jo, Flavie et moi nous entassons sur la banquette arrière. Mes trois amis ne se sont pas départis de leur air éberlué, que j'avais d'abord mis sur le compte de la situation chaotique, mais que je comprends de moins en moins à mesure que le temps passe. Alors que la Clio de Sekou quitte la place de parking, je m'éclaircis la gorge :

— Bon, je sais qu'on ne va pas tous les jours aux urgences voir une ancienne amie à moi qui a dégueulé en plein concert, mais qu'est-ce que c'est que ces têtes ? Vous avez vu un OVNI ou quoi ?

Sekou me jette un coup d'œil dans le rétroviseur central. Flavie, à côté de moi, pousse un profond soupir.

— Bon… J'imagine que l'OVNI ici, c'est moi.

Sans un mot, les trois autres hochent doucement la tête, l'air impressionné. Je commence à m'agacer de ne pas saisir un traître mot de ce qui se trame.

— Et je pourrais savoir pourquoi ? questionné-je d'un ton un peu trop sec.

Flavie se tourne vers moi. De près, son visage, si semblable à celui de Lola, m'apparaît peu à peu plus singulier. Ses yeux sont d'un marron clair, presque verts. Quant à ses cheveux, coupés en un joli carré long d'une perfection surnaturelle, ils prennent une couleur différente en fonction de la lumière, tantôt châtain, tantôt roux, tantôt blonds. Je prends alors pleinement conscience de sa beauté et me mords la lèvre à ce constat.

— C'était rafraîchissant de te rencontrer sans que tu ne saches qui je suis, commence-t-elle. Mais je vois que j'ai été démasquée par tes potes !

Elle embrasse du regard mes trois compères et leur adresse un sourire rassurant, puis revient à moi.

— Je suis Flavie Delangle. Une actrice. Pas vraiment célèbre, mais un peu… « connue » depuis deux ou trois ans.

Elle lâche la phrase du bout des lèvres, apparemment gênée de devoir se dévoiler ainsi. Je comprends immédiatement que je me trouve en face d'une personnalité dont je n'avais jamais entendu parler jusqu'alors, et son comportement depuis que je l'ai rencontrée fait soudainement sens, comme si j'avais enfin rassemblé les pièces d'un puzzle. Tandis que je reste figée, ouvrant des yeux de merlan frit, elle pince les lèvres en une moue adorable.

— J'aurais préféré qu'on apprenne à se connaître sans que tu le saches… J'adore que les fans me reconnaissent dans la rue, ce sont vraiment des amours, mais c'est aussi reposant d'être incognito !

C'est le moment que choisit Jo pour intervenir. Garder le silence semble avoir été un supplice pour elle.

— Flavie, je… je t'aime ! bégaye-t-elle avec une expression d'adoration ridicule sur le visage.

— Nous aussi ! renchérissent en chœur Max et Sekou à l'avant.

Flavie éclate de rire.

— Comme je le disais : des amours ! Vous êtes vraiment trop choux, mais je vous le demande, ne me voyez pas comme une star ou je ne sais pas trop quoi. Je trouve votre groupe super cool, et c'était sympa de pouvoir venir à vos concerts en passant à peu près inaperçue ! Pour moi, c'est vous les stars, conclut-elle avec un sourire.

— T'es hyper sympa, en fait ! observe Jo, encore plus émerveillée. Une célébrité qui ne prend pas la grosse tête…

Flavie rigole et se prend au jeu des pitreries de mon amie. Effectivement, malgré son aura séductrice et sa popularité, elle sait rester simple et amicale. Comment ne pas l'apprécier ? Mais pour ma part, j'ai encore un peu de mal à me rendre compte de la situation. Je suis assise à côté d'une star de cinéma, d'après ce qu'on me dit. Une star qui ressemble comme deux gouttes d'eau à Lola… et qui vient de recevoir le vomi de cette dernière sur les genoux ! En l'espace de deux semaines, j'ai vu les deux copies conformes se retrouver réunies dans ma vie dans les circonstances les plus loufoques qu'on puisse imaginer. Pas étonnant que j'aie besoin de temps pour digérer tout cela. Sans compter que j'ai un million de questions à poser. Sans m'adresser à personne en particulier, je commence :

— Mais… comment ça se fait que vous connaissiez Flavie et pas moi ? Tu as joué dans quoi ?

Flavie s'apprête à répondre mais Sekou la devance d'un ton de professionnel :

— Tout simplement parce que tu n'aimes que le cinéma d'auteur ou qui date de la Préhistoire, et que tu connais à peine l'existence d'Internet. Flavie a joué dans plusieurs films qui sont passés au festival de Cannes et qui ont eu des Césars, comme Marlon ou les deux Stella. Et elle est mondialement connue depuis la série Skam qui passe à la télé en France mais qui est virale sur le Web à l'internationale.

Waouh… Cette fille n'est décidément pas n'importe qui. Dire que Lola lui a vomi dessus…

— Tu viens de réciter ma page Wikipédia ! s'amuse Flavie.

— Maya, tu dois ab-so-lu-ment voir toute sa filmo ! s'enthousiasme Max.

Oui, bon, pour le marathon Flavie Delangle, on verra plus tard. Ignorant sa remarque, je pose une deuxième question qui me turlupine.

— Il y a un truc que je ne comprends pas. Je sais que tu aimes bien notre musique et tout ça, merci, d'ailleurs, mais… on s'est à peine vues deux fois, et là, tu me proposes de nous accompagner à l'hôpital pour aller voir Lola alors qu'elle t'a vomi dessus ! Je m'attendais plutôt à ce que tu ne puisses pas la voir en peinture, et en plus, tu dois avoir des tas de trucs plus importants à faire…

— Premièrement, je ne vais pas lui en vouloir, elle n'a pas fait exprès, et je ne vais pas chouiner alors qu'elle est carrément aux urgences. En plus, tu m'as dit que c'était ta pote…

— Ex-meilleure pote, précisé-je en ignorant un pincement au cœur.

— Ah oui, pardon. La deuxième raison, c'est que j'ai quelque chose d'important à t'annoncer et que j'avais prévu de le faire ce soir, mais les circonstances ne sont pas folles, là… Mais c'était ça ou je te laissais filer et je ratais l'occasion en or.

— L'occasion de quoi ? dis-je, perplexe.

Flavie joint les deux mains sous son menton et prend une grande inspiration, les yeux pétillants d'excitation.

— Tu as été repérée pour mon prochain film !

Je sens qu'elle vient de m'annoncer quelque chose d'important, mais pour l'instant, la phrase ne fait pas grand sens dans mon esprit. Remarquant ma confusion, elle s'empresse de développer :

— J'ai découvert le Violon Dingue samedi dernier en sortant avec mes potes, parce que je suis en vacances, en ce moment. Et quand j'ai vu votre groupe, le coup de cœur a été immédiat. Mais toi, en particulier, tu as un vrai talent pour la comédie, ça se voit dans ta façon d'occuper la scène. Ça m'a frappée tout de suite ! Le truc, c'est que la prod de mon prochain film recherche justement une actrice pour le deuxième rôle féminin principal, quelqu'un qui ne soit pas spécialement connu. Je ne suis pas une chasseuse de têtes, mais j'ai moi-même été repérée pour mon tout premier film comme ça, en casting sauvage, et là, je sens que c'est toi la bonne ! Enfin, rien n'est encore fait, il faut voir avec l'équipe et le réal…

— Attends, attends, attends, je l'interromps (ce qui n'est pas une mince affaire car elle parle à toute vitesse). Tu me proposes de jouer dans un film ? Un vrai film de cinéma, genre professionnel ?

— T'as tout compris ! s'enthousiasme Flavie. Enfin, je veux pas te faire de faux espoirs, hein, mais j'ai déjà parlé de toi à la prod…

— Putain, mais c'est énorme, Maya ! intervient Max, ravi. J'ai toujours su que tu serais une star !

Sekou hoche la tête d'un air approbateur pendant que Jo pousse des cris de triomphes et va jusqu'à saisir le bras de Flavie pour marquer son approbation. Je me sens dans un état extrêmement confus. Ça n'arrive pas tous les jours qu'une star de l'écran vous propose de jouer dans son prochain film. Dans d'autres circonstances, j'aurais exulté sans même réfléchir. J'ai toujours rêvé de faire du cinéma depuis mes six ans. Depuis mon tout premier cours de théâtre. Jouer la comédie sur les planches est devenu ma passion, mais je me suis toujours demandé ce que ça donnerait de le faire devant la caméra…

Je n'ai pas le temps d'exprimer mon avis, car déjà, Sekou se gare sur le parking de l'hôpital. A présent, Lola est redevenue le centre de mes préoccupations, et mes quatre compagnons l'ont bien compris, puisque plus personne ne poursuit la discussion sur le prochain film de Flavie Delangle.

Fort heureusement, le hall d'accueil est presque vide, de sorte que nous n'avons pas à gérer d'éventuels curieux qui reconnaîtrait Flavie. Nous nous dirigeons vers le guichet d'information pour demander où nous pourrions trouver Lola Lecomte.

— Elle vient d'être transférée, nous répond la standardiste. Chambre 512.

Je la remercie, puis, après avoir jeté un coup d'œil aux différents panneaux indicateurs, nous dénichons l'emplacement de l'ascenseur pour accéder aux étages. Mes amis sont étrangement silencieux. Ils doivent ressentir ma propre nervosité. Quant à Flavie, elle ne cesse de consulter son téléphone, comme si elle attendait un appel. Je sais maintenant que c'est une personne très demandée, mais je ne peux m'empêcher d'en être irritée, la faute à mes nerfs à fleur de peau.

Quand nous arrivons enfin dans l'aile des admissions en urgence, une première déconvenue s'offre à nous. Un homme, que je suppose être un infirmier, nous barre l'accès au couloir en nous demandant ce que nous venons fabriquer ici.

— Pour les visites, c'est une personne maximum, signale-t-il. Et encore, vous avez de la chance, à cette heure-ci, normalement, il n'y a pas de visite du tout. Comme la patiente vient d'être transférée, on fait exception, mais vous allez devoir faire un choix, je suis désolée.

Le choix en question se porte naturellement sur moi, puisque je suis la seule à connaître Lola personnellement. Et heureusement, d'ailleurs, car j'aurais probablement fait un esclandre si les autres avaient eu la moindre hésitation à me désigner. D'une certaine façon, tant mieux si Lola ne peut recevoir qu'un seul visiteur. J'ai peut-être enfin ma chance de lui parler à cœur ouvert, si toutefois elle est réveillée.

Tandis que Lamifex et Flavie me serrent tour à tour dans leurs bras en me promettant de m'attendre à l'accueil, je pénètre sans bruit dans la chambre.

Elle est réveillée. Ses yeux me repèrent immédiatement, petits points sombres qui tranchent avec la pâleur de sa peau.

Je me rapproche de son lit à pas lents, comme si elle était un animal sauvage qui risquait de fuir au moindre mouvement brusque. Ses cheveux sont étalés sur l'oreiller d'une propreté irréelle. Cette fois, j'ai le loisir de contempler de près chaque détail de son visage. Tout dans son expression hurle la fatigue, la colère et la souffrance en sourdine.

— Hey, dis-je maladroitement en m'asseyant sur le fauteuil destinée aux visiteurs à côté du lit.

Elle ne peut bien sûr pas prendre la fuite, cette fois, mais au moins, elle ne refuse pas le contact.

— Salut.

Sa voix est grave et légèrement rocailleuse, mais beaucoup plus faible que la semaine dernière.

— Ça fait longtemps.

— Oui… (Elle déglutit avec difficulté.) Désolée pour la dernière fois. Je sais pas ce qui m'a pris.

Je me penche en avant pour me rapprocher d'elle.

— Tu veux bien m'expliquer comment tu en es arrivée là ?

Lola ferme les yeux et prend une profonde inspiration. Subitement, je m'en veux de l'obliger à me parler d'un sujet qui lui est manifestement douloureux. Mais avant que je ne puisse revenir sur ma demande, elle se met à parler. Et me raconte tout.


Flash-back

3 ans plus tôt

POV Maya

— Allô ? Daphné ?

— Maya, c'est… c'est Lola. Elle est à l'hôpital… Je… (A l'autre bout du fil, Daphné étouffe un sanglot.) Viens, je t'en supplie.

Le monde s'est arrêté de tourner à partir de cet instant, et les soupçons que j'essayais d'enfouir depuis plusieurs semaines à propos du comportement étrange de ma meilleure amie me sont tombés dessus. J'ai tout lâché, quitté la cour du lycée sans même me retourner et je suis sortie de l'établissement en plein milieu de la journée. Je savais que Lola n'allait pas bien. Depuis un moment, elle était plus distante, plus froide, et refusais de me dire ce qui se passait. Elle avait maigri, séchait les trois quarts des cours au lycée, ne souriait plus et s'obstinait à porter des vestes et des pulls alors qu'on était en plein mois de juin, comme si elle était malade.

Quand j'ai débarqué à l'hôpital, tout s'est confondu dans un brouillard de souvenirs flous. J'ai vécu ces heures dans une succession de flashs plus ou moins intenses. Daphné qui m'attendait à la porte de la chambre, le visage déformé par le chagrin, et ses explications-fleuve que j'arrivais à peine à comprendre à cause de ses sanglots. Les deux sœurs avaient découvert qu'elles n'étaient pas sœurs. Enfin, à moitié. Une photo compromettante de Julie Lecomte avec un homme qui n'était pas Thierry, leur père, avait révélé le secret au grand jour : Lola et Daphné avait bien la même mère, mais ma meilleure amie n'avait jamais connu son père. A l'âge de dix-sept ans, elle venait d'apprendre que Thierry, qu'elle avait toujours considéré comme son géniteur et dont elle portait le nom de famille, ne partageait pas son sang. Et que sa mère l'avait enfantée suite à un adultère.

Lola avait donc appris il y a un mois que sa naissance était le résultat d'une trahison qu'on lui avait soigneusement cachée. Elle avait alors sombré dans une spirale de haine grandissante envers Thierry, sa mère et son père qu'elle ne connaissait pas. Etant incapable de faire du mal aux autres, elle s'était mise à en faire à elle-même. Daphné tremblait de tous ses membres en me racontant tout cela, et le moment le plus difficile pour elle a été quand elle m'a expliqué comment elle avait découvert des lames de rasoir et des bouteilles vides dans la poubelle de la salle de bains.

A ce moment-là, je suis entrée dans la chambre comme une furie. Lola portait une chemise d'hôpital et avait des bandages partout sur les avant-bras. J'ai alors compris pourquoi elle tenait tant à mettre des pulls en plein mois de juin. Elle était consciente, si du moins on pouvait appeler « consciente » son apparence cadavérique. Le visage ruisselant de larmes, je me suis précipitée sur elle et j'ai saisi sa main entre les miennes.

— Lola… pardon, j'aurais dû me rendre compte, j'aurais dû insister plus…

Elle a retiré brutalement sa main, et mon cœur est tombé comme une pierre dans ma poitrine. Son regard était plus froid que tout ce que je pouvais imaginer.

— Va-t'en.

— Qu… qu'est-ce que tu… Je voulais juste voir si tu allais…

— Va-t'en, a-t-elle répété.

— Mais Lola… Tu veux que je repasse plus tard, ou… ?

— Ne reviens pas. Toi et moi, c'est terminé. On n'est plus amies.

Sous le choc, j'ai reculé de quelques pas avec l'impression d'avoir pris un coup de massue sur le crâne. Pourquoi me rejetait-elle ainsi ? Quelle erreur avais-je pu commettre ?

— J'ai fait quelque chose de mal ?

L'espace d'un instant, j'ai cru entrevoir l'ombre d'une infinie souffrance passer sur son visage, mais elle s'est si vite volatilisée que je me suis dit que j'avais rêvé.

— Non, rien. Mais il ne faut plus qu'on se voie. Tu devrais partir.

S'est ensuivi des minutes interminables d'objections, de supplications, voire même de menaces de ma part pour l'obliger à me regarder, à m'expliquer. Son menton tremblait comme si elle allait se mettre à pleurer, et cela a semblé lui faire un électrochoc, puisqu'elle m'a asséné :

— Ne finis pas comme ta mère, Maya. Oublie-moi.

Ma mère était morte d'un accident de voiture causé par mon père qui était ivre au volant. Sans chercher à comprendre ce qu'elle entendait par là, j'ai perdu patience. L'insulte m'a giflée en plein visage, et pour éviter de décharger la vague de fureur qui a déferlé en moi suite à ces paroles, je suis sortie en trombe de ma chambre en me retenant de casser quelque chose. Je n'ai pas attendu Daphné. Je n'ai fait attention à personne. Je suis rentrée chez moi et je suis restée éveillée toute la nuit, repensant à Lola qui se mutilait et se droguait depuis des semaines, qui ne m'avait rien dit et qui maintenant me repoussait sans aucune explication, avec en prime une réflexion blessante sur l'épisode le plus difficile de ma vie. Elle n'avait jamais été méchante ainsi, gratuitement. J'étais perdue.

Le lendemain, j'ai reçu un message de Daphné qui m'annonçait que Lola allait être internée en hôpital psychiatrique pour une durée indéterminée. Le surlendemain, l'inquiétude ayant repris le pas sur ma colère et ma douleur, j'ai appelé Lola. La messagerie m'a indiqué que ce numéro n'était plus attribué. J'ai alors tenté de la contacter sur Instagram. Son compte n'existait plus.

Elle avait fait plus que de me rayer de sa vie. Elle s'était elle-même effacée de la mienne.

Retour au présent

POV Maya

En revenant sur cet épisode, le pire de ma vie après celui de la mort de mes parents, Lola pleure. Elle a une façon particulière de pleurer, qui n'altère en rien son visage, car les larmes se contentent de glisser sur ses joues silencieusement. J'ai compris, à présent, qu'elle cherchait simplement à ne pas m'entraîner avec elle dans l'enfer autodestructeur qu'était devenu sa vie. Je sais que j'aurais pu l'aider malgré tout. Mais je la pardonne, parce que je me rends compte que j'aurais fait la même chose à sa place. Je me serais éloignée d'elle pour la préserver. A présent, il est temps qu'elle comprenne que rien ne me fera plus reculer et qu'il est inutile de me repousser.

You've been on this road too long

(Tu es sur cette route depuis trop longtemps)

Hearing music but it's not your song

(A écouter de la musique alors que ce n'est pas ta chanson)

Wanna scream, but your voice is gone

(Tu veux hurler, mais tu n'as plus de voix)

— Tu as reçu mes lettres ? ai-je murmuré.

— Toutes. Je les ai gardées mais je ne les ai jamais ouvertes. J'avais peur de ne pas résister à la tentation de revenir vers toi en les lisant.

Je soupire. A vouloir ne pas me faire du mal, Lola nous en a fait à toutes les deux. Elle est restée volontairement seule, enfermée avec ses démons, sous prétexte de ne pas m'y exposer.

Walking miles, staring at the ground

(Tu marches des kilomètres en fixant le sol)

All alone inside the crowd

(Toute seule au milieu de cette foule)

Elle me raconte ses trois années d'hôpital psychiatrique, avec Daphné pour seul pilier au milieu du tourbillon infernal qu'était devenu sa vie. Sa première année terrifiante, isolée entre quatre murs et lâchée dans la cage aux lions avec d'autres addicts autodestructeurs. Sa deuxième année, où elle a commencé à entrevoir enfin des progrès, et peut-être, avec ça, le bout du tunnel. Mais sa mère a alors succombé à un infarctus, lié à ses années d'alcoolisme. Lola a à nouveau perdu pied. Alors qu'elle aurait pu sortir, elle a dû reprendre tout son combat à zéro, cette fois plus endurcie, encore moins innocente qu'auparavant. Elle s'est raccrochée à l'espoir de recommencer sa vie, et elle a réussi à revenir chez elle. Avec le projet de continuer sa vie, cahin-caha, sans moi. Mais me revoir, dimanche dernier, a bouleversé tout ce qu'elle imaginait, et sa volonté avec. Je comprends alors comment elle s'est retrouvée ivre morte au Violon Dingue.

Oh, hold on

(Oh, accroche-toi)

Just one more day

(Encore un jour de plus)

Hold on

(Accroche-toi)

You know you'll find a way

(Tu sais que tu trouveras une solution)

— J'ai pensé à toi tous les jours, dit-elle en me regardant droit dans les yeux. J'avais honte de ce que je t'ai fait.

Je soutiens son regard. C'est aussi le cas pour moi, mais je n'ai pas besoin de le lui dire.

— T'inquiète. J'ai appris à aller de l'avant, moi aussi.

Lola hausse les sourcils. Je me rends compte que je porte toujours ma tenue de concert tapageuse.

— Je te raconterai tout ça un autre jour, éludé-je. Pour l'instant, tu dois te reposer.

Elle ferme brièvement les yeux.

— Merci. Merci d'être là et de me pardonner. Et pardon pour tout le mal que je t'ai fait.

— Tout ce qui compte, c'est que tu es sur le bon chemin maintenant, et qu'on s'est retrouvées. (Je marque une pause.) Tu n'as pas idée de ta force, Lola Lecomte.

Elle esquisse un sourire triste.

— Tu parles. J'ai rechuté quatre fois depuis ma sortie. Et tu viens d'avoir un bel aperçu de ce que ça donne.

Je songe un instant à lui signaler que la personne sur laquelle elle a vomi est Flavie Delangle, une célèbre actrice de cinéma qui m'a, au passage, repérée pour son prochain film. Mais Lola doit se concentrer sur sa guérison en priorité, alors je repousse cette discussion à plus tard, ainsi que toutes les autres que nous avons à rattraper.

Comme il y a trois ans, dans ce même hôpital, je prends sa main entre les miennes. Cette fois, elle ne la retire pas. Ses lèvres s'étirent imperceptiblement. Ce n'est plus la Lola adorablement farouche des premiers cours de théâtre, ni la Lola du lycée au caractère bien affirmé qui adorait faire la fête. C'est une toute nouvelle Lola, marquée à jamais, désillusionnée. Les autres versions d'elle-même ne reviendront jamais complètement. Mais j'ai changé aussi. Et pour cette raison, cette nouvelle Lola n'est pas moins ma meilleure amie que celle d'avant.

Quoi qu'il soit arrivé en l'espace de trois ans, je la connais toujours par cœur. C'est ainsi que je décrypte dans son expression qu'elle est parvenue à la même conclusion que moi. Alors, avec un sourire, je murmure :

— Amies ?

Hold on

(Accroche-toi)

I'll be your reason why

(Je serai ta bonne raison)

Au fond de ses yeux, je distingue un discret pétillement de lumière, qui me conforte dans l'idée que tout espoir n'est pas perdu. Elle va s'en sortir et je serai là pour l'y aider. Elle me répond :

— Amies.

Hold on

(Accroche-toi)

You've got stars in your eyes

(Tu as des étoiles dans les yeux)

So let's paint the sky…

(Alors, allons peindre le ciel…)


Crédits : Extreme Music, Hold On


PS : Tant que j'y pense, n'hésitez pas si vous connaissez AO3 ou Wattpad à aller lire ma fic sur ces 2 sites si vous les préférez à FFN ! Mon username est le même qu'ici, saltandchlorine, sur les 2 sites ! Je vous mettrai les liens dans ma bio si j'y pense ^^