QUATRIÈME CHAPITRE
— C'était une erreur.
Luxus fronça les sourcils. Qu'est-ce qu'elle lui racontait encore comme connerie ?
— On n'aurait pas dû faire ça, j'ai pas réfléchi.
— T'es en train de dire que t'as couché avec moi sans réfléchir ?
La tête basse Lucy resta silencieuse. Bien sûr que c'était une erreur. Les paroles réconfortantes, tout ça lui semblait si loin désormais.
Le sentiment de sécurité intense qu'elle avait éprouvée tout au long de la soirée lui brûlait encore l'estomac, mais elle ne voulait pas l'admettre. Non, elle ne pouvait pas.
Bien sûr qu'elle regrettait. Comment elle pourrait se résigner à partir maintenant qu'elle reprenait goût à la vie ? La meilleure chose à faire était d'y mettre un terme et vite.
— OK, j'ai compris.
Ces mots aussi tranchant qu'une lame de rasoir la firent sursauter. D'un coup, elle sentait la chaleur qui l'englobait telle un cocon, s'estomper peu à peu la laissant revenir au froid de la dure réalité. La gorge nouée, il lui était incapable d'émettre le moindre son. Puis qu'est-ce qu'elle pouvait bien lui dire de toute façon ?
Luxus ramassa ses affaires, éparpillés un peu partout dans la pièce, qu'il s'empressa d'enfiler avant de sortir sans un mot ni un regard.
L'obscurité s'installa progressivement dans le petit appartement. Les jambes repliées contre elle, la tête basse, Lucy ne versa aucune larme. Elle ferma simplement les yeux dans l'espoir de se vider l'esprit, mais rien à faire. Lentement, elle se décida à émerger du canapé pour prendre la direction de la salle de bain, tout en grattant du bout de ses doigts son avant-bras droit.
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La colère, la frustration, la peur. Il se sentait bouillir de l'intérieur. C'était quoi son problème franchement ? Tout se passait bien, très bien même. Puis il y a eu le réveil, et tout est devenu compliqué. Enfin. Elle avait tout compliqué, et maintenant il ne savait plus quoi faire pour l'aider.
Il était en colère. En colère contre elle, en colère contre lui-même.
Il était frustré. Frustré parce qu'il se sentait impuissant.
Il avait peur. Peur parce que si elle revenait à l'état dépressif dans lequel elle se complaisait depuis plus d'un mois, son état empirerait à nouveau.
À force de la côtoyer, il avait fini par comprendre une chose, plus elle se renfermait, plus la malédiction prenait le dessus, et c'était peut-être ça la faille. Il avait espéré que la faire sourire, et rester près d'elle l'aurait aidé à se sortir de cette spirale d'idées noires, mais là il ne savait plus quoi faire. Le visage crispé, il passa une main sur son visage. Le vieux, il devait aller voir le vieux.
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L'eau brûlante rougissait sa peau, pour autant elle n'esquissa pas le moindre geste pour changer la température. Perdue, elle scrutait le miroir suspendu sur le mur d'en face au-dessus du lavabo. Ses doigts parcouraient certaines zones de son corps, reliant de ses va-et-vient des traces bleutés qui n'auraient pas dû s'y trouver.
D'ordinaire Lucy n'avait pas la peau qui marquait, elle en savait quelque chose à force de se prendre des tables et des chaises à la guilde ou même les contres coup d'une mission, elle aurait dû être recouvertes de bleus, or ils n'étaient que très rare. Mais dorénavant, elle était bien loin de son teint rosé naturel. La pâleur de sa peau jurait presque avec la tonalité violine qu'avait pris les traces de ces baisers, qui lui semblait maintenant si fugaces.
Elle frissonna en se remémorant le touché du mage sur sa peau. Mon dieu qu'elle avait aimé ça, elle s'était sentie si vivante et bêtement elle venait de renoncer à cette sensation. Puis il y eut son bras droit qui était recouvert d'une masse sombre qui la démangeait et bougeait de quelques millimètres plus les secondes passaient, s'enracinant telles des ronces dans sa chaire.
Le poing serré, elle se décida enfin à sortir de sa léthargie. Prise d'une énergie soudaine, elle se sécha rapidement et enfila les premiers vêtements qu'elle trouva. Le sweat à capuche gris n'épousait pas ses formes et le pantalon troué par endroits finirait par tomber si elle n'avait pas décidé de lui mettre une ceinture, mais son apparence n'était pas sa priorité. Sans regarder derrière elle, elle ferma la porte et descendit les escaliers aussi vite que lui permettait ses jambes.
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— Entre Luxus.
— Salut, le vieux.
À force le maître s'était résigné à ne plus relever le manque de politesse de son petit-fils.
— Tout se passe bien avec Lucy ?
— Son état s'était stabilisé, mais je ne sais pas si ça va durer, souffla-t-il alors qu'il s'affalait dans le siège en face du bureau.
Le maître scrutait Luxus en silence. Il s'avait très bien ce qui le perturbait. Dans un sens il avait espéré que le caractère doux de Lucy influe sur la personnalité taciturne de son petit-fils. Seule ombre au tableau cette malédiction qui semblait ronger les deux mages.
— J'ai peut-être trouvé quelque chose qui pourrait t'être utile, dit Makarov brisant le silence qui s'était installé.
Luxus releva la tête vers son grand-père les yeux brillants.
— J'ai fait des recherches dans la bibliothèque et ce livre répertorie bon nombre de malédictions et la façon de les briser. Je l'ai étudié sans vraiment trouver de réponse, mais peut être auras-tu une vision différente ?
L'espoir qu'avait pu ressentir Luxus l'espace d'un instant s'évanouit aussi vite qu'il était venu. Il commençait à y être habitué depuis quelque temps, mais il n'aimait toujours pas la sensation de vide que cela laissait derrière lui. Il ne l'aimerait probablement jamais.
Le vieil ouvrage entre ses mains, il feuilleta sans trop faire attention aux inscriptions. Makarov lui tendit une paire de lunettes qu'il saisit volonté et repris le livre du début. La lecture ne dura pas plus d'une dizaine de minutes.
Une grimace s'afficha sur le visage de Luxus alors qu'il retirait la monture. Moins il utilisait ce genre d'objets magique mieux il se portait. Sa tête commençait à le lancer, ce dont il se serait bien passé. D'autant plus que l'impressionnante quantité de données qu'il venait d'ingurgiter ne lui semblait d'aucune utilité. La colère reprit, alors le dessus.
— Fais chier ! J'en ai marre de devoir m'occuper d'elle. Pourquoi m'as-tu demandé de la surveiller le vieux ? C'est qu'une perte de temps.
Assis dans sa grande chaise, seul Makarov pouvait saisir toute l'étendue du désespoir qui brillait dans ses yeux d'un bleu électrique.
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Le temps n'était pas au beau fixe quand Lucy passa la porte du hall d'entrée de son appartement pour sortir dans la rue. Le ciel commençait tout juste à verser ses premières gouttes de pluie. La capuche de son sweat allait bien lui servir.
Les mains au chaud dans l'unique poche ventrale, elle commença sa marche en direction de la guilde, puis accéléra de plus en plus le pas au fur et à mesure que le mauvais temps s'intensifiait.
Passant les portes de l'établissement, elle avisa le premier étage. Personne. Tous les mages s'esclaffaient au rez-de-chaussée, rigolant, criant, trinquant. Ce spectacle extorqua un rictus à la jeune femme. Elle avait oublié à quel point cet endroit était chaleureux. Ne voyant pas ce qu'elle cherchait à l'étage, elle s'avança vers les tables, zigzaguant entre pour ne pas se cogner.
Mira s'attelait à sa tâche de barmaid, prenant les commandes de plusieurs mages attroupés. De dos, elle ne pouvait pas voir Lucy arriver, alors la mage lui tapota légèrement l'épaule pour lui signaler sa présence. Présence qui déstabilisa quelque peu la blanche.
— Lucy ! Comment...
Lucy ne lui laissa pas le temps de terminer sa phrase.
— Tu sais où est Luxus ?
Surprise, Mirajean ne répondit pas avec autant de spontanéité qu'à l'accoutumée.
— Oh, euh je crois qu'il est avec le maître dans son bureau.
Sur cette réponse, Lucy tourna les talons lâchant un faible merci avant de se diriger vers les escaliers qui menait vers l'endroit indiqué. Deux par deux, elle monta les marches. C'était sûrement l'effort de trop pour sa condition, car elle manqua les dernières marches. De justesse, son bras s'était agrippé à la rambarde, évitant la chute. Une certaine stabilisation retrouvée, c'est essoufflée qu'elle continua son chemin jusqu'à la porte du bureau.
Arrivée devant, toute la détermination qui avait afflué en elle sembla s'envoler en miette. Qu'allait-elle lui dire au fait ? Et devant le maître qui plus est. Abattue, elle préféra attendre qu'il sorte pour lui parler en privé. Mais, il fallait l'avouer les murs et les portes sans runes pour les protéger, étaient aussi isolants qu'une planche de bois.
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Il y eu un long silence avant que Makarov se décide à répondre.
— Je ne pensais pas que nous, nous retrouverions dans une impasse telle que celle-ci. Il est pourtant dit que rien n'est plus fort que l'amour en ce bas monde, mais il faut croire qu'il engendre plus de triste que de bonheur.
L'amour ? Un sourire cynique glissa sur ses lèvres. Ouais, il fallait bien qu'il se l'avoue à lui-même pour commencer, il l'avait dans la peau et franchement ça lui faisait un mal de chien.
Soudain son expression changea, d'un rapide geste de la main il reprit l'épais volume et parcourra à nouveau les pages, relisant plusieurs fois le même paragraphe pour être sûr.
Sans dire un mot, il reposa le livre sur le bureau, se leva de son siège et se précipita vers la sortie bousculant Mira sur son passage.
— Luxus ! Attends !, s'exclama la mage alors qu'il s'élançait dans les escaliers.
Voyant que cette simple interpellation ne suffirait pas à le stopper dans sa course. Elle ajouta.
— C'est Lucy, elle s'est évanouie !
Le mage se stoppa net et se retourna le visage barré d'inquiétude.
— Où est-elle ?
— Erza et Wendy l'ont emmené à l'infirmerie, répondit la mage, la tête basse.
— Qu'est-ce-que tu ne me dis pas Mira ?, gronda Luxus.
— Je... Wendy a réalisé un diagnostic complet et il semblerait qu'elle ne puisse pas se réveiller cette fois-ci.
Il n'attendit pas plus pour s'engager vers sa nouvelle destination.
✶.✶
Il faisait noir. Recroquevillée au milieu des ténèbres, Lucy, nue, se balançait d'avant en arrière, ses bras encerclaient ses jambes, alors qu'elle psalmodiait la même phrase en boucle « Endors-toi » . Crescendo, les mots fusèrent de plus en plus fort, jusqu'à lui écorcher les cordes vocales. Puis elle se stoppa rabattant sa tête contre ses genoux.
Elle avait froid, elle était seule, si seule. Dernière elle une présence lui fit tourner lentement la tête sans pour autant changer sa position.
— Va t'en, supplia-t-elle d'une voix rocailleuse.
— Mais nous sommes ensemble à partir de maintenant, répondit une voix enjouée.
— Je...
Lucy n'acheva pas sa phrase que pouvait-elle dire de toute façon. Elle était coincée ici jusqu'à ce que son corps physique dépérisse avec le temps. C'était vraiment une situation bien pire que la mort elle-même.
Derrière elle la présence s'avança jusqu'à se coller contre elle. Toujours dans sa léthargie, Lucy ne broncha pas d'un pouce. Alors qu'un amas de matière noire et visqueux commençait lentement à la recouvrir, comme si elle fusionnait
— Nous serons ensemble pour toujours, renchérit la voix, endors-toi sans peine.
Sans peine ? Pourtant, à cet instant précis son cœur en était rongé. Elle devait dire adieu à ses rêves, à ses amis, à l'amour... À ces pensées, les larmes trop dures à retenir dévalèrent ses joues creuses.
— Je ne veux pas...
Étrangement, la matière noire stoppa son avancée. L'atmosphère pesante qui se dégageait de la pièce changea, et une étrange odeur d'ozone fit son apparition. Au loin des clapotis semblables à la pluie qui rencontre la surface d'une fenêtre se faisait entendre, puis un autre son qui se transforma en murmure planait dans l'air.
— Lucy, réveille-toi...
C'était son nom, on l'appelait !
✶.✶
Elle était blanche, presque aussi blanche que le linge qui la recouvrait. Son visage inexpressif pouvait à s'y méprendre, faire penser qu'il ne s'agissait là que d'une débrouille prête à être transporté pour sa dernière demeure. Pourtant, un détail pouvait casser cette théorie, au niveau de son abdomen le drap qui la recouvrait montait, descendait, montait, descendait révélant un semblant de vie chez la jeune femme.
Luxus s'arrêta au plus près du lit d'hôpital. Ses yeux se plissèrent sous la douleur que provoquait la scène qu'il avait face à lui. Il respira une bouffée d'air frais dans l'espoir de ne pas craquer, mais c'était peine perdue, les larmes ne tardèrent pas à glisser sur ses joues. Aussitôt, il leva la tête vers le plafond pour retenir le plus possible cette eau salée qu'il détestait. Bien sûr, cela ne marcha pas, la peine était trop grande, les nœuds qu'il avait dans l'estomac étaient là pour lui rappeler.
Son regard voilé de tristesse se risqua à se poser à nouveau sur le visage de la mage. D'un mouvement d'une lenteur déconcertante, il avança son bras jusqu'à ce que le dos de sa main entre en collision avec son front gelée, il eut un mouvement de recul avant de réitérer le geste. Cette fois-ci, il s'aventura plus loin, du bout des doigts, il parcourut sa joue gauche. Ce fut bref, mais il lâcha la gorge serrée comme si cela pouvait marcher :
— Lucy, réveille-toi...
D'un mouvement lent de la tête, il se rapprocha jusqu'à ce que ses lèvres entrent en contact avec celles glacées de la jeune femme.
L'atmosphère changea soudainement. Une odeur d'ozone qu'il connaissait que trop bien flottait dans la pièce, mais une chose était sûre, il n'en était pas à l'origine.
Sa main toujours contre la joue de Lucy reçut comme une décharge, son regard se reporta automatiquement vers elle et il croisa deux iris noisette qui le fixèrent. Sa respiration se bloqua quelques secondes, avant de repartir de plus belle au rythme de ses battements de cœur qui pulsaient sous l'effet de surprise.
Un bras frêle se souleva et se dirigea dans sa direction pour poser la paume de ses mains contre la joue du mage.
— Merci, souffla-t-elle détournant le regard.
Le visage de Luxus se tordit encore plus face à ce geste. D'un geste plutôt brut, il coinça son menton entre ses doigts pour la forcer à lui faire face.
— Regarde-moi, gronda-t-il.
Des larmes se formèrent aux coins de ses yeux, le nez froncé elle se força à les maintenir dans ses orifices. Elle en avait marre de pleurer surtout devant lui, elle ne se sentait pas digne.
Puis la réalité les rattrapa tous les deux. Le tonnerre gronda, la pièce trembla et une pression magique maléfique emplit la pièce. Un ombre projeté dans un coin de la pièce bougea pour prendre une pseudo-forme humaine.
Face à ce spectacle, Lucy se tordit de douleur. Son corps tout entier la brûlait. La marque de la guilde tatouée sur sa main droite changea de couleur au fur et à mesure que les ronces qui recouvraient ses membres sortaient de sa peau, la piégeant de leurs épines acérées.
Luxus observa la scène, impuissant, avec effroi. D'instinct des éclairs jaillir de son corps et il se dirigea à une vitesse folle sur l'être désincarné qui lui faisait dorénavant face. En contact avec la masse d'ombre, l'électricité ne fit que la transpercer sans lui infliger la moindre séquelle. Un rire aussi glauque que son apparence fit écho dans la pièce.
La rage transperçait le visage du mage de foudre, il tenta à nouveau d'user de ses pouvoirs, en vain. Les cris de douleur que lançait Lucy continuait de lui marteler la tête, attisant sa haine.
— JE TE JURE QUE J'VAIS TE BUTER, hurla-t-il.
L'entité ricana à nouveau et rétorqua :
— Tu pensais vraiment qu'un simple baiser suffirait à me sceller ?! Une simple attirance n'y changera pas grand chose ! Bientôt les ronces l'auront entièrement englouti et nous serons enfin ensemble !
Ivre de colère, Luxus balança son poids dans ce qu'il pensait être le visage de cette chose, mais comme pour sa magie, c'était inutile, tout le traversait sans l'atteindre.
— Abandonne, je te l'ai dit un aussi petit acte ne peut rien contre nous !
Les dents serrées, le mage assena un autre coup dans le vide, puis un autre. La fureur l'aveuglait, il n'avait qu'une seule envie : détruire, mais l'ombre avait raison, il était impuissant alors que la personne qui avait réussi à transpercer sa carapace, était en train d'agoniser juste à côté.
— Luxus...
La douleur la faisait divaguer, ses yeux mi-clos brouillaient sa vision, pourtant une chose lui manquait. C'était sa chaleur, celle qui l'enveloppait d'un voile de sécurité. Soudain, elle sentit une pression sur sa main droite. Doucement, le mage exerçait des petits va et vient lui répétant que tout irait bien, comme pour se convaincre lui-même.
Les ronces qui recouvraient dorénavant ses bras et ses jambes réagirent et s'élancèrent à une vitesse folle. D'un coup, la douleur s'arrêta, lentement, elle papillonna des yeux et ajusta son regard sur la masse qui la surplombait. Un flot de larmes dévala les joues rouges de tristesse de Lucy, puis un hurlement à en déchirer les cieux résonna dans la pièce.
— Chut, Lucy tout va bien, les points vitaux ne sont pas touchés, souffla-t-il entre deux toux un mince filet de sang s'échappant du coin de ses lèvres.
Mais rien à faire, les larmes continuait de couler sans pause ni répit. Une main calleuse se plaqua contre sa joue, la ramenant peu à peu à la raison.
— Lu-Luxus...
Elle ne parvient pas à continuer sans un gémissement de tristesse.
— Je suis tellement dé-désolée. Je ne pensais pas ce que je t'ai dit... Je ne voulais pas qu'on me voie dans ce-cette état, c'est pour ça que j-j'ai...
D'un geste tendre, le mage passa son pouce sur sa joue, la stoppant dans sa triade.
— Je sais, ne t'inquiètes pas je suis là.
Une grimace traversa son visage accentuant les sanglots de Lucy qui le regardait impuissante. L'ombre, quant à elle, était immobile au bout du lit. Seuls les contours de cette masse noire ondulaient. Elle semblait observer la scène qui se déroulait. La mâchoire serrée et d'un geste brusque Luxus tira sur les tiges épineuses qui transperçaient le haut de son torse. Outre le mal de chien qui lui procura leur extraction, la décharge d'électricité localisée qu'il s'infligea pour essayer de cautériser la plaie lui fit lâcher un "putain" dont il se serait bien passé dans cette situation. Lucy, toujours sous lui ne cessait de le regarder de ses yeux imbibés et il ne put s'empêcher de penser qu'il l'avait plus vu pleurer ces derniers jours que depuis qu'il était revenu officiellement dans la guilde.
— Quand tout sera terminé, une grimace barra à nouveau son visage, même si c'est voué à l'échec promet moi qu'on essayera, d'accord ?
La voix tendre avec laquelle il avait prononcé ses paroles, donna l'impression à Lucy que son cœur pouvait exploser d'un instant à l'autre. Elle avait mal, tellement mal, pourtant enfouit au plus profond d'elle un infime sentiment de sérénité émergea de ses entrailles. Les larmes s'estompaient peu à peu, laissant place à un doux sourire.
— Oui...
Une lumière aveuglante engloutit toute la pièce, l'entité qui jusque-là était restée immobile commença à s'estomper pour réapparaître sous les traits d'une jeune femme, le sourire aux lèvres.
— Merci, souffla-t-elle avant de disparaître.
Sonnés, les deux mages se regardèrent dans le blanc des yeux, trop choqués par ce qui venait de se passer pour mettre une explication sur ce qui venait de se dérouler devant eux.
— C'est fini ?, questionna Luxus.
Le sourire à lui décrocher la mâchoire, Lucy inspira puis expira comme si tout le poids du monde venait de la quitter et lâcha pour une fois sans trémolo dans la voix.
— C'est fini !
Pris d'une poussée de dopamine, le mage fendit vers les lèvres de la jeune femme qu'il s'empressa de savourer, se satisfaisant des petits gloussements qu'elle poussait entre deux baisés. Un toussotement gêné se fit entendre à l'autre bout de la pièce, mais Luxus ne semblait pas décidé à lâcher prise. Il fallut que Lucy se débatte un peu pour qu'il daigne enfin se reculer et jeter un regard noir en direction des visiteurs non désirés.
— Qu'est-ce que vous voulez, lança-t-il avec l'amabilité d'une porte de prison.
— Ça fait vingt minutes que vous étiez enfermés dans cette pièce sans qu'on puisse ouvrir ni défoncer la porte, mais à part ça tout va bien, railla Gray le torse nu comme à son habitude. On comprend pourquoi, continua-t-il d'un sourire narquois.
Un coussin ne tarda pas à voler dans sa direction, suivit d'un Natsu et d'un Happy tout feu tout flamme qui s'élança vers le lit ou trônait Luxus et Lucy enchevêtré.
— Tu nous as fait super peur Lushy !, pleurnicha le chat bleu se jetant contre sa poitrine et repoussant au passage le mage de foudre de ses ailes.
Une vive douleur se répercuta sur son visage qui se crispa, le faible grommellement qu'il émit attira l'attention de Lucy qui repoussa gentiment Happy, tout en lui intimant de rentrer ses ailes.
— Quelqu'un peut appeler Wendy, Luxus est plutôt mal au point.
— Je suis là !, s'exclama la petite Dragonne Slayer tout en fonçant vers le dit blessé déjà prête à lui prodiguer les premier soins.
Bien obligé de se décaler pour que Wendy puisse faire son travail, Luxus ne détacha pas pour autant son regard de la blonde. Natsu lui ne se fit pas prier et s'empressa de prendre sa place sur le lit, assaillant la blonde de tout un tas de question, suivi de Gray qui ne pouvait s'empêcher de lancer des piques à la tête brulée. Bien qu'il ne vît pas d'un bon œil ce rapprochement, c'est les traits du visage adoucis qu'il observait Lucy rigoler aux frasques de ses amis. Il ne savait pas où tout ça pouvait bien les mener, mais à cet instant précis, il sut, qu'il ne la lâcherait pour rien au monde.
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Le maître aidé de sa canne, descendit les escaliers à petite jambe. Le son de son appui contre le sol emplissait la cavité d'un écho régulier. Arrivé devant une grande porte en bois, il déverrouilla les runes qui retenait cette dernière fermée et s'engouffra dans la vaste pièce qui s'offrait à lui.
Il sortit un collier de sa poche qu'il s'empressa de ranger soigneusement dans une boîte renforcée par des sorts de protection.
— Ici, tu seras plus en sécurité.
Pivotant de quatre-vingt-dix degrés, il leva son regard vers la masse sombre qui lui faisait dorénavant face.
— Faites que nous n'ayons jamais à l'utiliser.
Puis, il tourna les talons verrouilla la porte, enfermant derrière lui le portail d'un destin funeste.
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« Le regret est le plus grand vice de l'homme. Il vit pensant pouvoir l'éviter et meurt en regrettant sa vie. »
Fin
