Notation : ce chapitre fait 32 pages donc j'espère que ce looong chapitre vous plaira et que vous arriverez à rester éveillés jusqu'à la fin.
Remerciements : A haniPyanfar pour sa correction et à Ness et Sean pour leurs encouragements *_*
Pour quiqui ?: Toujours pour ma Nessy que je nem. J'espère que le peu que tu n'as pas lu te plaira coupine o/
Chapitre 4 : Le Poète.
La « Victorieuse » abandonne.
A deux semaines de la première épreuve, un drame familial frappe Jayanti Rayat, la championne de Poudlard pour le Tournoi des Trois Sorciers. Alors qu'elle partait favorite de la compétition, la jeune Serdaigle a décidé de retourner en Angleterre. En effet son père, le célèbre avocat Taral Rayat, se trouve hospitalisé à Sainte Mangouste entre la vie et la mort. Il a été victime d'une agression hier matin alors qu'il se rendait à son travail. Les Aurors cherchent encore le ou la responsable mais la piste d'un ancien Mangemort reste la plus probable.
Taral Rayat est en effet connu pour sa participation active à la « Purge des Mangemorts ». Ses excellentes plaidoiries ont envoyé aux Détraqueurs pas moins de neuf partisans de celui dont on ne devait pas prononcer le nom, et il en a fait condamner treize autres à la prison à vie. Il est donc logique de penser que certains sorciers peu recommandables aient décidé de venger leurs camarades.
En attendant, Poudlard doit se trouver un nouveau champion qui partira avec un sacré handicap puisqu'il ou elle n'aura que quatorze jours pour se préparer à la première épreuve. Espérons que cela suffise pour faire face à Taurus Petersen de Durmstrang et Margaux Héritier de BeauxBâtons. Quoiqu'il en soit, nous serons là pour assister au spectacle et encourager le représentant de nos couleurs.
La Victorieuse n'est plus mais l'Espoir sera toujours.
Rita Skeeter.
°O°O°O°O°
-Grant ?
-Présente.
-Jonson ?
-Là !
-Leto ?
-Là.
-Marley ?
-Siiiii.
-… Mars ?
-Dooooo !
Harry s'interrompit et regarda par-dessus la feuille d'appel.
-Monsieur Marley et Miss Mars, rappelez-moi pourquoi je vous ai emmenés en France déjà ? demanda-t-il en soupirant.
-Vous nous avez dit que c'était pour être certain de ne pas vous ennuyer, répondit Elisa Mars apparemment contente d'elle.
-Maintenant que j'y pense, c'était un peu offensant, réalisa Marley en cessant brusquement de se balancer sur sa chaise.
-Marley qui pense ! s'éleva la voix railleuse d'Ophiuchus Leto. Comme quoi tout arrive. Il reste encore un espoir pour toi, O'Flaherty.
-Stop ! coupa Harry alors que Devnet s'apprêtait à répliquer. Félicitations Monsieur Leto, vous venez de faire perdre dix points à Serpentard.
Le gamin lui envoya un regard noir mais Harry fit comme s'il n'avait rien vu et continua l'appel. Leto était en général un élève plutôt respectueux mais il perdait toute notion de contrôle de lui dès qu'il s'agissait de O'Flaherty. Cependant Harry était mal placé pour leur faire la morale. Ils lui rappelaient tellement Malfoy et lui qu'il se sentait idiot dès qu'il les punissait. Et en présence de MacGonagall c'était encore pire. Il savait qu'elle souriait dès qu'il devait intervenir entre ces deux-là. Au moins ici, la directrice de Poudlard n'était pas là pour se divertir de la situation.
Il ne manquait personne. Excepté Jayanti. La Serdaigle était rentrée en urgence en Angleterre la veille au soir, abandonnant de ce fait officiellement le concours.
« J'ai parlé au professeur Malfoy » lui avait-elle dit tandis qu'il essayait de la consoler - et il n'était vraiment pas doué pour ça -. « Lui aussi pense que ce serait mieux que je me rende auprès de mon père.»
« Tu m'étonnes ! » avait pensé Harry les dents serrées. « Ça doit bien l'arranger que tu partes ! »
Mais il s'était abstenu de tout commentaire. Ceci dit, il était bien obligé d'admettre que Malfoy avait raison, le mieux pour Jayanti était qu'elle rejoigne sa famille.
En réalité, l'idéal serait que son père s'en sorte et que les Aurors attrapent le sorcier qui lui avait fait ça. C'était dans ses moments-là que Harry regrettait le plus d'avoir arrêté sa formation d'Auror. Il détestait cette sensation d'inutilité.
Au moins il pouvait tenter de remonter le moral à ses dix-neufs élèves restants.
-Bien, reprit-il, avant de nous rendre devant la Coupe de Feu, je tenais à vous dire ceci. Je suis conscient que ce ne va pas être facile de remplacer Jayanti. Celui ou celle que la Coupe va désigner n'aura que quatorze jours de préparation avant la première épreuve. Mais je sais aussi que chacun d'entre vous est capable de faire de grandes choses.
Harry ne put d'empêcher de jeter un bref coup d'œil à Leto. Il était évident que la Coupe allait le choisir. De quoi faire regretter à Malfoy de ne pas avoir plutôt persuadé Jayanti de rester.
-Enfin, rectifia Harry pour alléger l'atmosphère, à part Miss Mars et Monsieur Marley, vous êtes tous capables de grandes choses.
Comme prévu Elisa et Opiter s'empressèrent de protester à grands coups de cris indignés qui amusèrent tout le monde. Même Linda Grant, la meilleure amie de Jayanti pourtant inconsolable depuis le départ de la jeune Indienne, ne put s'empêcher de sourire.
Cela confirma à Harry qu'il avait bien fait d'emmener Mars et Marley et que les grandes choses, ces deux-là les faisaient déjà tous les jours.
°O°O°O°
Harry était presque dans la cour lorsque Decroy se retrouva devant lui, lui barrant la route.
-Professeur Potter, puis-je vous parler ? demanda-t-il de son habituel ton froid.
Harry s'arrêta et bien entendu tous ses élèves firent de même. Il se demanda s'ils pousseraient le mimétisme jusqu'à en faire autant s'il se mettait à danser la samba – enfin tout du moins un semblant de samba -.
-Ça ne peut pas attendre après la désignation ? répondit-il légèrement agacé.
Il n'aimait pas beaucoup cet homme. Parfois le professeur de botanique semblait simplement aussi sympathique qu'un hippogriffe qu'on aurait traité de volaille avariée mais d'autres fois, son regard bleu s'animait d'une lueur démente. Selon Harry, il avait dû rester trop longtemps à respirer à proximité de certaines plantes psychotropes.
-C'est à propos du professeur Malfoy.
Ce fut comme si Decroy venait de prononcer une formule magique. Harry se trouva tout d'un coup tout disposé à l'écouter.
-Allez jusqu'à la Coupe, annonça-t-il à ses élèves. Je vous rejoins tout de suite.
Ils le dépassèrent non sans lui lancer des regards intrigués. Ces gamins étaient parfois pires qu'une horde de chats question curiosité.
-Je vous écoute, dit Harry en croisant les bras sur son torse.
« Position qui montre clairement que tu es sur tes gardes » aurait dit Hermione alors il laissa retomber ses bras le long de son corps.
-Je soupçonne Malfoy d'avoir attaqué le père de Jayanti Rayat.
Cette fois Harry oublia ce que Hermione pourrait bien en dire et recroisa machinalement les bras sur sa poitrine.
-Il n'aurait jamais fait ça, répondit-il calmement.
Decroy eut un reniflement dédaigneux.
-Comme vous le savez, dit-il, avant-hier soir je me suis entretenu avec Monsieur Malfoy. Je lui ai parlé d'un sortilège qu'on m'a jeté. Et le lendemain Rayat se retrouve touché par un sortilège ayant curieusement les mêmes propriétés. Sauf que Monsieur Malfoy est plus doué que ma femme pour jeter des sorts de Magie Noire donc je suppose que Monsieur Rayat va vite s'éteindre…
-De quoi parlez-vous ? siffla Harry.
Que ce mec accuse Malfoy lui déplaisait au plus haut point. Il savait pourtant que le blond n'avait rien d'un enfant de chœur mais de là à supposer qu'il ait fait quelque chose au père de Jayanti …
Decroy lui expliqua alors qu'il avait reçu un sortilège qui le condamnait. C'était certes tragique pour lui mais ce que Harry pouvait surtout entendre à travers ses mots, c'était la haine du professeur de botanique pour tout ce qui touchait à la Magie Noire.
-Admettons que votre conversation lui ait donné l'idée de jeter ce sortilège, reprit-il. Pourquoi Taral Rayat ? Je ne pense pas que son envie de gagner la compétition vaille qu'il prenne de tels risques. Et même s'il voulait sortir Jayanti du Tournoi, il y avait des moyens plus simples que de retourner en Angleterre … D'ailleurs il n'a pas pu y aller, il était ici toute la journée.
Que Malfoy ait sauté sur l'occasion pour encourager Jayanti à partir, ça il n'en doutait pas. Mais qu'il ait fomenté tout ça lui-même, il ne pouvait pas le croire.
-Parce que vous l'avez suivi à chaque minute ? demanda Decroy. Vous êtes décidément plus proches que je ne le pensais.
Harry ne releva pas l'allusion voilée. Mais son aversion envers cet homme augmentait de seconde en seconde.
-Et je vous croyais plus futé que ça, continua Decroy. Taral Rayat est celui qui a envoyé Lucius Malfoy en prison. Même en France on sait ça. Vouloir venger son père me semble être un mobile plutôt convaincant.
-Pourquoi me dites-vous tout ça ? s'énerva Harry. Je ne suis pas Auror.
-Je n'ai aucune preuve. Mais je pensais que vous m'auriez aidé à en trouver, pas que vous mettriez autant de cœur à le défendre. Et en ce qui concerne son envie de gagner le Tournoi, vous ne savez pas jusqu'où il peut vraiment aller. Étiez-vous au courant que la directrice de Durmstrang n'est pas enceinte finalement ? Fournier m'a dit que Mazaltov soupçonnait Malfoy de lui avoir donné des potions pour lui faire croire qu'elle attendait un enfant.
Harry sentit sa gorge s'assécher. Ce genre de coup par contre ressemblait plus à Malfoy.
-Pourquoi le laisse-t-elle ici si elle le soupçonne ? dit-il quand même.
-Les deux directrices ont trouvé plus sage de ne pas faire de scandale et d'étouffer l'affaire. Mais Malfoy sera probablement renvoyé à la fin de l'année, si Mazaltov trouve des preuves.
-Pourquoi le détestez-vous ? demanda soudainement Harry.
Decroy le dévisagea froidement.
-Pourquoi ne le détestez-vous plus ? lui retourna-t-il.
Parce qu'il a baissé sa baguette quand il aurait dû tuer Dumbledore. Parce qu'il a fait semblant de ne pas me reconnaître lorsque les Mangemorts m'avaient attrapé. Parce qu'il a retenu la main de Goyle lorsqu'il voulait me tuer. Parce qu'il s'inquiète pour ses élèves. Parce qu'il a souffert. Parce qu'il sourit trop et que c'est une façade pour se protéger. Parce qu'il est intelligent. Parce qu'il souffre encore. Parce qu'il m'a manqué. Parce qu'il me fait bander.
-J'essaie simplement de ne pas tirer de conclusions hâtives. Malfoy n'a jamais été un tueur.
Decroy ne sembla pas heureux de ne pas obtenir le soutien de Harry.
-C'est un Mage Noir, articula-t-il en posant une main décharnée sur l'épaule de l'ancien Gryffondor. Vous et moi savons ce que deviennent les idolâtres de cette magie. Peut-être qu'il n'a pas encore tué. Mais il y viendra. Ils y viennent tous.
Harry détourna les yeux. Il voulait croire que Malfoy ne tournerait pas mal. Mais Decroy avait en partie raison. La plupart des Mages Noirs finissaient par tuer ou par devenir complètement cinglés.
Et Malfoy ne pouvait même plus faire de la magie normale.
« Mieux vaut la Magie Noire que pas de magie du tout ! »
C'était ce qu'il lui avait dit avec sa baguette tremblante pointée sur lui.
« Il n'est pas Voldemort », essaya-t-il de se raisonner. « Il est sensible et trop intelligent pour se laisser dévorer par cette Magie. »
-Pour l'instant il n'a encore rien fait. Et je ne sais pas comment ça se passe en France, mais chez nous on n'est coupable que lorsque le crime a été commis, pas avant. Maintenant si vous permettez, j'aimerais savoir quel nouveau champion la Coupe va choisir pour Poudlard.
Il le planta là, avançant rapidement dans le parc. Il était un des derniers à arriver sur place. Malfoy était en train de parler avec ses élèves, il paraissait calme et attentif comme toujours lorsqu'il était avec eux.
Harry l'observa, ralentissant inconsciemment le pas. Malfoy possédait dans chacun de ses gestes une grâce masculine qu'il n'avait pu observer que chez Sirius Black. Mais le charme qu'il dégageait restait unique. Unique et corrosif. Un mélange détonnant d'humour cynique et de sex-appeal.
L'ancien Gryffondor fronça les sourcils en remarquant ses traits fatigués. Il se demanda si l'ex Serpentard avait mal dormi à cause de ses côtes douloureuses ou parce qu'il connaissait son secret. Quand Malfoy tourna la tête vers lui et que les yeux gris le fixèrent avec défi, il eut sa réponse.
Le discours de Fournier fut nettement moins long que la fois précédente. De même qu'il n'y eu ni politiciens, ni journalistes et fort heureusement pas de chorale. Il faut dire que cette seconde désignation était totalement imprévue et étant donné que la première épreuve était dans deux semaines, ils n'avaient pas vraiment de temps à perdre en invitations protocolaires.
Adélaïde Fournier tendit finalement sa main devant la Coupe. Le papier qui en sortit avait la forme d'un trèfle. Harry se demanda brièvement pourquoi Ophiuchus était représenté par un trèfle. Puis la directrice de BeauxBâtons annonça le nouveau champion de Poudlard et ce n'était pas Ophiuchus.
-Devnet O'Flaherty ! s'exclama-t-elle.
Déjà les Gryffondors félicitaient bruyamment le grand roux. Marley et Mars poussaient des hourras retentissants tout en entamant leur interprétation de ce qui devait être une danse de la victoire. Une très jolie étudiante française se jeta dans les bras du nouveau champion. La seconde d'après ils échangeaient un baiser passionné.
-Je vois que votre élève prend à cœur l'amitié entre nos écoles, commenta Fournier à ses côtés.
Elle regardait la scène, visiblement partagée entre la surprise et la contrariété.
-C'est une coutume irlandaise, affirma Harry pince-sans-rire. Pour signifier son … profond respect.
Fournier lui lança un coup d'œil amusé avant de pousser un soupir impatient.
Leto, lui, observait son ennemi de toujours et sa nouvelle conquête avec un mépris non dissimulé. Il susurra quelque chose à l'oreille de Nott qui la fit ricaner. Et comme le baiser s'éternisait et que les mains de O'Flaherty s'aventuraient sur le corps de la Française à la limite de la bienséance, Harry décida qu'il était temps pour lui de féliciter son élève. Et lui éviter ainsi que la directrice de BeauxBâtons ne l'émascule.
Après tout, il avait encore besoin du Gryffondor pour le Tournoi.
-Monsieur O'Flaherty, s'exclama-t-il après s'être raclé la gorge, toutes mes félicitations … pour votre désignation bien sûr.
Les deux élèves s'étaient détachés brusquement l'un de l'autre, semblant se rappeler enfin où ils étaient. La Française rougissait même sous le regard de Harry.
-Merci, M'sieur ! répliqua le rouquin non sans jeter un coup d'œil en direction du groupe des Serpentards.
-Rassurez-moi, reprit Harry plein d'espoir, Devnet signifie « le Victorieux » ou autre chose, genre « le Vainqueur » … « Le Conquérant » peut-être ?
O'Flaherty secoua la tête négativement.
-Ça veut dire « le Poète ».
…
-Nous sommes foutus.
-Hey ! Vous êtes censé m'encourager !
-Ah oui, c'est vrai ..., abdiqua Harry tout en redressant ses lunettes sur son nez. On oublie trop le rôle déterminant de la poésie lors des Tournois des Trois Sorciers. Monsieur Petersen et Miss Héritier ne vont pas comprendre ce qu'il va leur arriver.
Devnet secoua la tête d'un air désespéré mais la petite Française gloussa.
-Plus sérieusement, reprit Harry, j'ai toute confiance en vous Monsieur O'Flaherty.
L'Irlandais hocha la tête d'un air dégagé mais Harry pouvait voir ses yeux briller de fierté. Il se demanda si lui-même était autant en quête de considération quand il était jeune. Puis il se rappela Sirius, Remus et Dumbledore et son envie dévorante de les rendre fiers de lui et il eut sa réponse.
-Je vous vois cet après midi, reprit-il. Entraînement intensif ! Vous allez en baver.
-J'ai hâte, marmonna le rouquin.
Harry s'éloigna, amusé malgré lui par O'Flaherty. Il perdit son sourire en voyant Leto un peu à l'écart. Il profita de l'occasion pour s'approcher de lui. Pour une fois que le Serpentard n'était pas en compagnie des deux filles de sa Maison ou des élèves de Durmtrang ...
-Monsieur Leto ?
Le jeune homme brun se tourna vers lui, le visage impassible.
-Oui Professeur ?
-Puis-je savoir pourquoi vous n'avez pas déposé votre nom dans la Coupe ?
Leto haussa les épaules, ne semblant pas surpris que Harry ait vu juste. Lorsque Fournier avait lu le nom de O'Flaherty l'ancien Gryffondor avait enfin compris. Ça lui avait déjà semblé étrange que Jayanti passe devant Ophiuchus mais que O'Flaherty fasse de même, c'était impossible. Pas que O'Flaherty soit nul, il était bon – même s'il semblait plus préoccupé par les filles et le Quidditch que par les études - mais Leto était un sorcier bien meilleur. La seule explication était que le Serpentard n'avait jamais mis son nom dans la Coupe de Feu.
-Je n'avais pas envie de perdre mon temps avec tout ça, répondit Leto en agitant vaguement sa main en direction de l'attroupement d'élèves encore présents.
Ainsi, depuis le début, ce gamin n'avait pas l'intention de participer au Tournoi alors que c'était le rêve de tous les autres. Harry soupira, se demandant pourquoi il était venu.
-Mais vous êtes quand même venu en France …
Leto haussa les épaules une nouvelle fois.
-Un séjour gratuit à l'étranger est toujours bon à prendre.
-Ou alors vous aviez l'intention de participer mais vous ne l'avez pas fait pour laisser une chance à monsieur O'Flaherty d'avoir son heure de gloire.
Cette fois Leto perdit son flegme et tout son corps se crispa comme si Harry lui avait envoyé une décharge électrique.
-C'est ridicule ! siffla-t-il visiblement écœuré que son professeur ait pu émettre une telle hypothèse. De toute façon, ce crétin d'Irlandais ne tiendra pas dix minutes dans ce Tournoi. Mais je serai ravi d'assister à son humiliation publique.
Une autre voix, surgissant tout droit de son passé, plus traînante, méprisante et cynique que celle de Leto, fusa dans sa tête.
« Combien de temps croyez-vous que Potter va tenir ? Je suis prêt à parier qu'il ne dépassera pas les dix premières minutes de la première tâche. » (1)
Harry se secoua, irrité de se souvenir aussi bien de chaque mot qu'ait pu dire Malfoy, même douze ans plus tard.
-Je suppose que cela veut dire que vous ne comptez pas l'encourager, dit-il tout en cherchant des yeux l'ancien Serpentard.
-Pas forcément, objecta Leto. Par exemple, je l'encourage vivement à se rétamer.
Harry renonça à le convaincre de s'entendre avec le Gryffondor roux. C'était une cause perdue d'avance. Quand il avait commencé à enseigner, Leto et O'Flaherty débutaient leur seconde année et ils se détestaient déjà, mais Harry remarquait cependant - non sans un certain défaitisme - que chaque année était pire que la précédente.
Pour tout avouer, il était plus préoccupé par le fait que Malfoy ait disparu de son champ de vision que par la relation chaotique de ses deux élèves.
Pour la forme il enjoignit tout de même Leto à se comporter plus civilement avec O'Flaherty même s'il savait qu'il venait d'user sa salive pour rien. Puis il partit à la recherche de Malfoy.
Après avoir interrogé Fournier, il apprit que ce dernier s'était excusé de leur fausser compagnie en prétextant qu'il avait des copies en retard à corriger.
Harry se retrouva donc devant la porte de sa chambre, le cœur battant un peu trop vite mais déterminé à lui parler.
Il avait laissé Malfoy tranquille hier soir mais il avait besoin d'obtenir des réponses. Cependant il savait qu'il y avait très peu de chances pour que l'ancien Serpentard soit sincère avec lui. Il allait encore dissimuler.
Il était tellement bouleversé hier lorsque Harry avait compris qu'il ne pouvait plus faire de magie normalement ! Ça lui avait fait mal de le voir comme ça. Le Malfoy qu'il connaissait était censé garder toujours son sang-froid. Sa baguette ne tremblait jamais dans sa main. Et ses yeux gris ne le regardaient pas démesurément ouverts par la terreur …
Il aurait voulu le prendre dans ses bras et lui dire que ça allait s'arranger. Ce qui était tout à fait ridicule. Malfoy n'était pas un gosse et il lui arracherait un bras plutôt que de le laisser faire. Et surtout c'était Malfoy. Harry pouvait à peine imaginer quel effet ça lui ferait de ne plus pouvoir faire de magie, mais lui savait qu'il y avait une vie en dehors de ça. Pour Malfoy et les autres enfants élevés uniquement dans la Magie, c'était bien moins évident.
Après avoir pris une grande inspiration, il frappa à sa porte. Il lui sembla qu'il se déroulait une éternité avant que Malfoy daigne ouvrir. Il ne parut pas surpris de le voir là et de près, il semblait encore plus fatigué malgré son sourire narquois. Il avait aussi une tache d'encre noire sur la mâchoire qui le rendait tout d'un coup plus accessible. Plus humain. Cela donnait aussi à Harry l'envie de le toucher. Il décida de mettre sagement ses mains dans ses poches.
-Potter…Serait-ce déjà l'heure de la confrontation ? dit-il, faussement alarmé.
Ce sourire et ces phrases pleines de dérision semblaient être devenus son meilleur moyen de défense. Il était déjà un peu comme ça du temps de Poudlard mais il était aussi plus agressif et il s'emportait plus vite. Le Malfoy adulte avait l'air de tout prendre de haut et avec légèreté mais ce n'était qu'une façade. Cependant son sourire, même factice, faisait mouche à chaque fois.
-Je peux entrer ? répondit simplement Harry en essayant de ne pas trop le dévisager.
Le sourire de Malfoy se fit plus fin.
-Oh une confrontation privée ? C'est tellement plus intéressant ! Pas de témoin. Pas d'échappatoires.
Il s'effaça pour le laisser entrer. Harry passa devant lui essayant de ne surtout pas le frôler. Sur le bureau du blond il y avait des parchemins qui traînaient dans un fouillis qui jurait avec le reste de la pièce.
-Je finis juste de corriger une copie, reprit Malfoy sans se départir de son sourire, et après je suis tout à toi.
Harry hocha la tête un peu sèchement, refusant d'imaginer de quelle manière il aurait voulu que Malfoy soit à lui. Le professeur de Magie Noire avait aussi les doigts tachés d'encre. Il ne sembla pas se rendre compte de l'examen dont il était l'objet puisqu'il retourna à son bureau d'un air dégagé.
Harry resta silencieux tout en regardant le dos de Malfoy. Il cherchait comment lui dire que Decroy le soupçonnait d'avoir attaqué Monsieur Rayat sans pour autant le mettre dans une colère noire. Il n'avait pas tellement envie de voir le blond partir à la recherche du professeur de botanique pour le lapider.
Le seul bruit de la pièce était celui de la plume du blond voyageant sur les parchemins, jusqu'à ce que Harry entende une voix basse aux accents sifflants. Il baissa les yeux. A quelque pas de lui se tenait Marc-Antoine qui le regardait avec circonspection. Il semblait prêt à déguerpir au moindre geste brusque.
-Ami ? Ennemi ? Nourriture ? répéta le lézard.
-Hey salut Marc-Antoine! siffla Harry tout en s'accroupissant, ravi de revoir l'animal.
Il tendit la main mais Marc-Antoine la considéra avec hauteur.
-Ami ? Ennemi ? Nourriture ?
Cette fois le reptile semblait perdre patience.
-Ami, répondit Harry.
Le lézard eut l'air un peu déçu.
-Tu es sssssûr de ne pas être de la nourriture ? demanda-t-il.
-Certain. Mais je pourrais t'en amener la prochaine fois que je viens.
Cette fois le lézard approcha et renifla ses doigts. Ça se voyait qu'il n'avait jamais connu la vie sauvage, il suffisait de lui promettre de la nourriture pour qu'il rapplique.
-Des ssssauterelles, commanda-t-il en le fixant de ses yeux noirs. J'en veux plein.
Harry hocha la tête sans pouvoir s'empêcher de sourire. Le zonure semblait venir d'un autre âge avec ses grosses écailles couleur sable sur tout le corps. Il toucha la tête triangulaire du bout du doigt et commença à la caresser. Marc-Antoine ne cessait de le fixer.
-Tu es comme le Sssssang-Chaud, dit-il.
-Qui est le Sang-Chaud ? demanda Harry.
Le zonure tourna la tête en direction de Malfoy. Le dos du blond était tendu à l'extrême et sa plume n'écrivait plus rien. Apparemment, il n'aimait pas beaucoup l'entendre parler fourchelangue.
-Ssssang-Chaud apporte à manger. Toi ausssssi ?
-La prochaine fois, promit Harry, sans quitter Malfoy des yeux.
Il avait l'envie ridicule de poser ses mains sur les épaules crispées et de les masser pour tenter de le détendre. Il eut un sourire amer en se rappelant la réaction de Malfoy quand il avait proposé de lui passer l'onguent sur le dos. Il lui aurait annoncé qu'il devait se taper une chèvre, Malfoy n'aurait pas eu l'air plus dégoûté.
Le zonure se désintéressa de lui et s'affala au pied de la cheminée avec un soupir. Harry se rendit compte que le sortilège qui maintenait la chaleur dans l'espace réservé à Marc-Antoine avait cessé de faire effet. Il ne faisait pas froid dans la pièce, le château étant chauffé, mais le zonure semblait quand même préférer la proximité de la cheminée. Harry se doutait que Malfoy avait dû la mettre en marche à cause de ça. Il lui aurait bien proposé de refaire le sortilège mais le blond allait le rembarrer.
-J'ai terminé, dit finalement Malfoy en se retournant vers lui. Même si ça me fait mal d'encenser un de tes élèves, Leto est brillant. Je viens de lui mettre un Optimal.
-C'est un Serpentard, répliqua Harry, je ne crois pas que ce soit vraiment un problème pour toi de lui mettre une bonne note.
Malfoy haussa un sourcil amusé mais ne répondit rien. Harry crut qu'il allait se lever pour qu'ils soient sur un pied d'égalité en quelque sorte mais Malfoy resta simplement assis. Levant ses yeux gris sur lui, attendant qu'il parle. Peut être que son dos lui faisait encore mal ? C'était sûrement pour ça qu'il laissait à Harry cette impression de domination physique.
Harry grimaça. Avec n'importe qui d'autre, il n'aurait même pas fait attention à ce genre de chose. Mais c'était Malfoy et Harry le connaissait assez pour savoir que pour ce type, tout avait un sens. Et le fait de devoir lever les yeux vers lui, il ne le faisait sûrement pas de gaîté de cœur. Peut-être même que c'était parce qu'il souffrait trop qu'il avait fui la cérémonie de la Coupe aussi vite et corriger des devoirs n'avait été qu'une excuse …
-Comment va ton dos ? demanda Harry sans pouvoir s'en empêcher.
-Parfaitement bien, répliqua Malfoy glacial.
Ce qui signifiait que ça n'allait pas.
-Tu aurais dû me dire que tu ne pouvais pas faire de la magie normale, attaqua Harry agacé de se sentir coupable.
Malfoy esquissa un sourire narquois.
-Bien sûr ! Nous sommes tellement proches tous les deux, railla-t-il. C'est connu, avouer ses faiblesses à son plus vieil ennemi, ça change la vie.
Harry fronça les sourcils. Comme toujours Malfoy tournait tout en dérision.
-Quand est-ce que c'est arrivé ? dit-il, restant concentré sur la malédiction et pas sur le fait que c'était étrange de le trouver séduisant même dans un moment pareil.
La question à peine posée, Harry se demanda si ça choquerait Malfoy qu'il se tape deux ou trois fois la tête contre le mur, histoire d'essayer d'être un peu moins con.
-A la fin de la guerre, répondit l'ancien Serpentard et son visage parut s'assombrir.
Harry s'humecta les lèvres, peu sûr de vouloir entendre la réponse à sa prochaine question mais il fallait qu'il la pose.
-Et qui t'a jeté la malédiction ?
Cette fois le blond sembla se reprendre ou plutôt redresser ses barrières de défense car il esquissa un sourire moqueur. Charmant lui aussi.
-A ton avis ? demanda-t-il avec nonchalance.
-Voldemort, souffla Harry qui aurait voulu plus que tout pouvoir le tuer une seconde fois.
Cette fois, Malfoy éclata de rire, ce qui désarçonna complètement l'ancien Gryffondor.
-Merde, j'étais sûr que tu allais répondre ça ! Malfoy riait encore. Tellement typique. « Voldemort » répéta-t-il en imitant le ton bas et froid de Harry.
-Qui alors ? Ton père ?
Malfoy cessa immédiatement de rire et un éclair agacé passa dans les yeux gris.
-C'est toujours un plaisir de voir tout le bien que tu penses de feu mon père, dit-il. Ceci dit, tu chauffes.
-Ça ne m'amuse pas, répondit Harry. Je ne vais pas jouer aux devinettes avec toi.
-Tu n'es pas drôle, soupira Malfoy.
-J'en ai surtout marre que tu te foutes de moi. Je me demande si tu es toujours aussi brillant en occlumencie à présent. Je pourrais tester et voir si je peux trouver les réponses par moi-même.
Il ressentit un immense plaisir en voyant le regard gris se troubler légèrement.
-Toujours aussi délicat, constata Malfoy.
Harry soupira et fourragea une main dans sa tignasse.
-OK, ça devient ridicule là, dit-il. Je ne vais pas te faire de mal, je veux savoir qui t'a fait ça pour pouvoir t'aider à t'en défaire.
Malfoy leva des sourcils surpris.
-Je pensais que sauver le Monde sorcier d'un affreux Seigneur des Ténèbres aurait satisfait ton complexe de héros pour au moins une décennie, susurra-t-il. Potter, le pépère petit professeur qui rêve encore de sauver les gens, c'est un peu ridicule non ?
-Va te faire, sourit Harry de toutes ses dents, essayant de se convaincre de garder son calme. Et réponds à ma question.
-Ou alors c'est parce qu'en fait tu m'apprécies, poursuivit Malfoy imperturbable.
Harry se hérissa, refusant de penser que Malfoy était en train de viser juste. Qu'il aille se faire foutre. Il grogna :
-Ou c'est juste parce que je ne suis pas terriblement rassuré à l'idée de savoir que la seule magie que tu saches encore faire, c'est de la Magie Noire, et que si jamais un de tes élèves est blessé, tu ne seras même pas capable de faire le plus basique des sortilèges de soin.
Cette fois Malfoy se redressa sur son siège, Harry crut qu'il allait bondir sur lui pour le frapper mais il inspira profondément et retrouva son sourire.
-Pour répondre à ta question, dit-il, je n'ai reçu aucune malédiction. Mon problème est d'ordre psychologique. Je fais un blocage sur la magie normale. Je suis pris d'une peur panique rien qu'à l'idée de devoir en faire.
Harry fronça les sourcils. Impressionné que Malfoy lui avoue ça de sa voix posée – limite amusée même - et déconcerté parce que cet homme était celui sur qui tout glissait sans que rien ne le touche vraiment. Apparemment il s'était trompé et Malfoy était humain.
-Mais … pourquoi ?
-Tu penses bien que si je le savais, tu serais la première personne à qui je le dirais, ironisa Malfoy. Mais cet état n'est que provisoire, reprit-il plus sérieusement, je guérirai. En attendant j'espère que ça restera entre nous.
-Provisoire ? Si ça dure depuis la fin de la guerre, ça fait déjà sept ans.
Malfoy crispa ses mains sur les accoudoirs de son fauteuil mais se força de nouveau à sourire. A ce rythme-là, il allait se faire une luxation de la mâchoire.
-Y a pas à dire Potty, tu sais remonter le moral aux gens. Je comprends mieux pourquoi la petite Rayat est venue chouiner dans mes bras.
Oh, ce connard aurait dû éviter de ramener Jayanti sur le tapis.
-Ce que je comprends moi, c'est que tu en as profité pour l'éloigner du Tournoi.
-Oui, j'ai fait ça pour le Tournoi, bien sûr et pas parce que je sais ce que ça fait que de perdre son père. Désolé Potty mais tu n'as plus le monopole du pauvre petit orphelin, du moins côté paternel. Cependant, tu gagnes encore avec ta mère si ça peut te rassurer.
-Tu ne devrais pas plaisanter sur ce sujet Malfoy. D'autres que moi te soupçonnent de bien pire que d'avoir persuadé Jayanti d'abandonner la compétition.
Malfoy plissa les yeux.
-Que veux-tu dire ?
Harry hésita un instant à balancer Decroy mais il fallait que Malfoy sache à quoi s'attendre avec le professeur de botanique.
-Decroy est venu me parler. Il pense que c'est toi qui as attaqué le père de Rayat.
Harry s'attendait à ce que Malfoy réagisse avec colère ou du moins qu'il lâche une de ces tirades sarcastiques et blessantes dont il était passé maître, mais il baissa simplement le regard.
-Je vois, dit-il enfin. Et toi qu'est-ce que tu en penses ?
Harry fut déstabilisé par cette question mais il tenta de se reprendre, même si son cœur battait bien trop vite à présent. Tout ça parce que Malfoy avait l'air de s'intéresser à l'opinion qu'il pouvait avoir de lui.
-Je pense, commença-t-il prudemment, que tu es prêt à beaucoup pour venir travailler à Poudlard. Comme par exemple faire croire à une femme qu'elle est enceinte…
Le blond cilla. Il ne souriait plus à présent. Harry eut envie de caresser sa joue pour l'apaiser. Et quelque part c'était plus inquiétant que de vouloir simplement le baiser.
-Cependant, reprit l'ancien Gryffondor, je ne te crois pas capable d'attenter à la vie de quelqu'un pour un job.
Malfoy ricana mais c'était un rire amer et forcé.
-Ce n'est pas simplement un job, c'est le seul boulot décent et légal que je suis capable de faire. Et je veux rentrer chez moi.
-A t'entendre on croirait qu'on t'a banni d'Angleterre. Tu es parti tout seul.
Et son absence avait touché Harry bien plus qu'il l'aurait voulu.
-Parce que tu crois que la société anglaise sorcière va m'accueillir les bras ouverts ? Ouvre les yeux, Potter, je suis un paria. Il suffit de lire la presse pour s'en rendre compte. La seule façon pour moi de redorer le blason des Malfoy est de revenir en tant que respectable enseignant et si je réussis, ça sera parce que j'aurai bénéficié de ton soutien. Donc pour que tu te décides à convaincre la direction de Poudlard de m'embaucher en tant que professeur de Magie Noire, il faut que je gagne notre pari …
C'était valable. Sauf que Harry avait une longueur d'avance. Il savait en quoi consistait la première épreuve. S'il était fair-play, il dirait à Malfoy de quoi il s'agissait. Après tout, à présent qu'il savait que le blond ne pouvait faire que de la magie Noire, la donne avait changé. Harry était toujours opposé à ce que cette matière soit enseignée à Poudlard mais Malfoy n'avait guère le choix. Comme il l'avait dit, c'était le seul boulot respectable qui soit en adéquation avec ses aptitudes. Si Harry l'aidait pour cette première épreuve, alors il dormirait sans doute mieux la nuit. Il voulait toujours battre le blond mais il voulait le faire à armes égales … loyalement.
-Ecoute, soupira-t-il en passant une main nerveuse dans ses cheveux noirs, pour la première épreuve …
Et il s'arrêta net. Malfoy le fixait sans rien dire, attendant la suite, toujours assis dans son fauteuil … en position de faiblesse.
Harry réalisa alors qu'il était sur le point de se faire avoir. Malfoy venait de le manipuler en beauté. Il lui avait parlé de son problème avec un peu trop de facilité pour lui faire baisser sa garde. Dès que les questions étaient devenues trop gênantes pour lui, il avait amené le sujet sur Rayat. Parce qu'il savait que Harry allait lui parler des accusations de Decroy.
Cet enfoiré de professeur de botanique devait être dans le coup. Le fait qu'il balance une vérité au milieu de tout ça – Malfoy qui avait fait en sorte que sa directrice se croit enceinte, ça Harry était persuadé que c'était vrai - ne rendait tout le reste que plus crédible.
D'être injustement accusé d'avoir attaqué le père de Jayanti, ça le faisait passer pour une victime aux yeux de Harry. Il le connaissait trop bien pour savoir que l'injustice le débectait.
Ce connard avait donc mis en place cette méticuleuse mise en scène. Bon sang, il ne devait même plus avoir mal au dos. Il avait juste voulu que Harry le croit vulnérable.
A mesure que Harry se rendait compte qu'il s'était fait balader dès l'instant où il avait franchi le seuil de la pièce, Malfoy l'observait et un sourire narquois se dessinait sur ses lèvres.
-Dommage, commenta-t-il finalement de son impertinente voix traînante, comme s'il lisait directement dans l'esprit de Harry, ce n'est pas passé loin.
Il se leva souplement et se frotta la mâchoire pour tenter d'y faire disparaître la tâche d'encre. Bordel, même ça, ça avait été intentionnel.
-Putain d'enfoiré ! grogna Harry entre ses dents.
Dire qu'il avait songé l'espace d'un instant qu'ils ne s'affrontaient pas à armes égales ! C'était exactement ce que le blond avait voulu qu'il pense. Mais il n'y avait rien de plus faux. Ce type possédait bien trop de ressources. Malfoy haussa les épaules et s'approcha de lui.
-C'était soit ça, soit coucher avec Merle, dit-il. Mais bon, sans compter mon homophobie chronique, faire la pute c'est plus ton domaine, n'est ce pas ?
-Ne me fais pas rire, sourit Harry, dissimulant le fait qu'il était touché par l'insulte et qu'il avait failli se faire avoir, il suffirait que je t'ouvre les portes de Poudlard en échange d'une gâterie et tu serais déjà à genoux en train de me bouffer les couilles.
Malfoy parut un instant choqué et son regard gris eut l'air de descendre presque malgré lui au niveau de son entrejambe. Harry se mordit la lèvre inférieure, regrettant immédiatement d'avoir dit une chose pareille. Ce qu'il ne regrettait pas par contre, c'était d'avoir gardé son trench-coat en rentrant. Ainsi Malfoy ne pouvait pas se rendre compte qu'il était excité, juste parce que l'espace d'une seconde, une partie de lui – celle qui ne se situait pas dans son cerveau - s'était demandée si Malfoy serait prêt à accepter ce genre de proposition.
Malfoy émit alors une sorte de son étranglé et détourna finalement les yeux. Il semblait perdu, incapable de parler et regardait ostensiblement le feu qui crépitait dans sa cheminée.
Merde, il devait penser que Harry venait réellement de lui faire une sorte de proposition alors qu'il avait sorti ça juste pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Son besoin de le rassurer dépassa sa colère mais ne calma pas pour autant le désir qu'il avait de lui. Il avait juste envie d'attraper sa nuque, de l'embrasser, de coller son corps contre le sien …
Il secoua la tête.
-Tu sais que je ne te ferais jamais de chantage d'ordre sexuel, n'est ce pas ?
Dire ça tout en ayant une érection, ce n'était guère crédible mais Harry aurait encore préféré se la couper que de devoir forcer Malfoy à coucher avec lui. L'ancien Serpentard tressaillit et riva ses yeux dans les siens.
-N'aie crainte, articula-t-il avec une moue dégoûtée, je ne vais pas te sauter dessus.
Ouais … ça Harry n'en doutait pas. Il était par contre moins catégorique sur la réciprocité de cette affirmation.
Il hocha la tête lentement les yeux fixés sur les lèvres de Malfoy. Il fallait vraiment qu'il sorte d'ici avant de faire quelque chose de stupide.
-Je dois aller voir O'Flaherty, croassa-t-il. L'entraînement …
Le blond haussa les épaules, peu intéressé par sa lamentable excuse. Il ne le regardait déjà plus, il devait avoir hâte de le voir foutre le camp.
Alors Harry tourna les talons et sortit de la pièce.
°O°O°°O°O°O°°O°O°
-… dis juste que tu devrais être plus prudent, marmonna Ron légèrement exaspéré après qu'ils eurent tous les deux salué le ministre des Sports français. Rayat n'est pas le seul à avoir été attaqué. Le juge Sundal aussi, hier soir. Tué tard dans son bureau alors que tout le monde était déjà parti.
Harry fronça les sourcils. Le juge Sundal avait activement participé à la « Purge des Mangemorts » en en mettant plus de la moitié en prison. Il était aussi celui qui avait condamné Lucius Malfoy au baiser du Détraqueur.
-Les journaux n'en ont pas parlé, dit-il calmement tout en regardant la foule qui commençait à s'agglutiner sur les gradins.
-Pas encore, soupira Ron. Shakelbolt veut éviter tout mouvement de panique.
Harry ricana.
-Oui, un ou plusieurs pro-Mangemorts en quête de vengeance qui se trimbalent tranquillement parmi la population et tuent même au sein du ministère, il y a en effet de quoi être inquiet.
Ron l'attrapa par le coude.
-C'est pour toi que je suis inquiet, dit-il. Tu es sûrement le premier sur leur liste.
-A mon avis, tu dois y être pas mal classé aussi, Auror Weasley. Sauf que toi tu ne vis pas dans une école ultra protégée. J'espère que tu fais attention et Hermione aussi. Bon sang, j'espère que toute ta famille fait attention.
Ron soupira.
-Ils vont être sur leur garde mais Ginny tient quand même à finir la saison de Quidditch. Après-demain elle a un match…
L'angoisse de Ron commençait à être communicative. Ginny avait toujours été bien trop intrépide pour son propre bien. Elle avait dû dire à son frère quelque chose comme « Je refuse de me terrer et de gâcher ma vie à cause d'un taré ». Il le savait car c'était exactement ce qu'il avait voulu répondre à Ron les douze fois où celui-ci lui avait recommandé d'être prudent. Et ça ne faisait qu'une demi-heure qu'il était là. Ginny et lui se ressemblaient bien trop.
En fait non, elle était bien plus courageuse que lui. C'était elle qui avait rompu et elle aussi qui lui avait ouvert les yeux sur ses préférences sexuelles, alors qu'elle l'aimait. Il aurait été incapable de faire ça si leur rôle avait été inversé.
-Je lui parlerai si tu veux, dit-il à Ron.
Mais il se doutait déjà que ça ne servirait à rien. Cependant Ron hocha la tête avec reconnaissance.
-Ils ne font pas les choses à moitié les Français, siffla-t-il admiratif et Harry fut soulagé qu'ils changent de sujet de discussion. Est-ce que ce sont des écrans géants ?
Harry regarda au centre du terrain qui servait habituellement aux matchs de Quidditch. Plusieurs écrans géants y avaient été placés et volaient tranquillement dans les airs.
-L'épreuve va se dérouler dans les Bois Noirs, expliqua-t-il à Ron. A mon avis ils ont dû y placer des caméras pour qu'on puisse la suivre en direct.
Ron l'écoutait en fronçant les sourcils, extrêmement attentif. Il faisait à chaque fois ça quand Hermione et lui discutaient de choses moldues, si bien que parfois Harry avait l'impression de parler une langue étrangère.
-Les caméras c'est ce qui sert à fulmer, c'est ça ?
-Filmer, corrigea Harry en essayant de ne pas sourire, et oui c'est ça.
Ron eut l'air très content de lui.
-Je me demande si chaque école sorcière a une forêt potentiellement mortelle à proximité. D'après ce que j'en sais, la Forêt Interdite est un gentil parcours de santé comparée aux Bois Noirs.
-Normalement les élèves ne devraient pas s'y enfoncer trop loin.
Ron lui jeta un regard suspicieux.
-Dis-moi, tu m'as l'air bien au courant…
Harry eut un sourire légèrement supérieur.
-Je ne parlerai qu'en présence de mon avocat, dit-il en contemplant ses ongles.
Ron lui donna une tape sur l'épaule qui le déséquilibra, tout en s'extasiant sur l'esprit sournois de son meilleur ami.
-Merci, merci, sourit Harry tout en exécutant une courbette.
-Hey, mais ce n'est pas Nott, là bas ? demanda Ron les yeux rivés sur la tribune réservée aux invités de Poudlard.
Théodore Nott faisait partie des Langues de Plomb et il bossait de temps en temps avec les Aurors. D'après ce que Harry savait, Ron et lui s'entendaient plutôt bien.
-Sa sœur est dans ma classe. Les élèves ont le droit d'inviter leur famille. Et si je puis me permettre, ça fait un moment que ton visage ne s'éclaire plus comme ça quand tu me vois.
Ron parut un instant décontenancé, puis ses yeux brillèrent d'amusement.
-Peut-être que tu ne t'en rends plus compte parce que tu es parti t'exiler en France.
-C'est pour le boulot, grinça Harry sur un ton faussement énervé, et tu as dit que ça ne changerait rien. Que tu m'attendrais.
Ron eut alors l'air tellement gêné que Harry faillit éclater de rire.
-Bien sûr que je vais t'attendre mais tu dois bien comprendre que j'ai certains besoins …
-Ronald … tu n'as pas fait ça …
Ron détourna les yeux, passant une main nerveuse derrière sa nuque mais il se mordait aussi la lèvre inférieure. Sûrement pour s'empêcher de rire.
-Tu n'es pas allé voir un match de Quidditch avec ce type ? articula Harry dangereusement.
-Ça n'est arrivé qu'une fois ! dit Ron précipitamment. Et ça n'a eu aucune importance pour moi.
-Merde, souffla Harry en tombant pesamment sur une chaise puis il se pencha et posa ses coudes sur ses genoux tout en mettant ses mains dans ses cheveux.
Il sentit la main de son meilleur ami se poser sur son épaule et fit semblant de tressaillir.
-Harry … commença Ron.
Mais il fut coupé par un «-Vous savez que vous êtes complètement cinglés ? » venant de leur droite.
Harry se redressa et adressa un sourire navré à Hermione.
-Il a commencé ! lui dit-il tout en pointant Ron du doigt.
-Hey ! C'est faux ! s'insurgea Ron tout en débarrassant sa femme des boissons qu'elle venait d'apporter.
Hermione leva les yeux au ciel.
-J'ai croisé Malfoy, annonça-t-elle l'air de rien.
Et toute la bonne humeur de Harry s'envola. Son amie lui jeta un coup d'œil aigu.
-Il m'a salué poliment, reprit-elle.
-Ça lui arrive lorsqu'il est en société, répondit Harry maussade en haussant les épaules.
Ils sursautèrent tous les trois lorsque les hauts-parleurs annoncèrent le commencement de la première épreuve pour dans dix minutes.
-Je dois y aller ! dit Ron.
-Aller où ? demanda Harry qui avait espéré ne pas se retrouver seul avec Hermione.
Elle semblait avoir des tas de questions à lui poser à propos de Malfoy. Et Harry n'avait pas vraiment envie qu'elle comprenne qu'il était un peu obsédé par le connard de service.
-Dans la tribune de Poudlard, répondit Ron. On me verra mieux qu'ici.
Ici, c'était la Tribune Officielle où Harry était obligé de rester. Il aurait préféré se mêler à ses élèves et aux autres supporters de Poudlard plutôt que d'être assigné avec le gratin sorcier français.
-Ron a fabriqué une banderole, expliqua Hermione. Tu sais à quel point il était content quand tu nous as annoncé que O'Flaherty était le nouveau champion …
Harry se tourna vers le rouquin, pas vraiment rassuré par l'air satisfait qu'il affichait.
-George m'a aidé, dit-il en bombant le torse.
L'inquiétude du brun monta d'un cran.
-On se voit après l'épreuve, reprit Ron visiblement impatient.
Harry et Hermione le suivirent des yeux alors qu'il se hâtait de rejoindre la tribune réservée aux supporters de Poudlard. Le regard de Harry bifurqua vers la tribune de Durmstrang, beaucoup plus éloignée. De là où il était, il ne voyait pas grand-chose mais tout à l'heure ils avaient croisé Leto qui s'y rendait avec les élèves de Malfoy. Le Serpentard portait la tenue de sa Maison, à part l'écharpe qui était indéniablement à Durmstrang. Harry lui avait demandé en soupirant, s'il n'en faisait pas un peu trop. Leto lui avait répondu que non, qu'il avait même pensé à faire des badges anti-O'Flaherty mais qu'il y avait finalement renoncé parce que ça lui aurait demandé trop d'efforts.
Ça avait fait ricaner Ron et Hermione et Harry leur avait jeté un regard noir, sachant exactement ce qu'ils pensaient. Malfoy, lui, n'avait jamais rechigné devant l'effort pour faire de sa vie en enfer.
-Ah, j'ai failli oublier! s'exclama Hermione, le sortant de ses pensées. J'ai cherché des informations pour ton problème avec ton Patronus mais je n'ai rien trouvé dans les livres.
Harry lui avait expliqué que son Patronus avait un comportement déroutant mais il avait omis de préciser que ça ne lui arrivait que lorsqu'il se retrouvait devant Malfoy. Hermione risquerait de tirer des conclusions hâtives. Et Harry n'avait aucune envie d'admettre que l'ancien Serpentard avait une incidence sur sa magie. Il avait déjà assez d'influence comme ça sur ses hormones. Harry ne comptait plus le nombre de fois où il s'était branlé en pensant à ce connard depuis le début de l'année.
-Cependant, reprit Hermione, j'ai une théorie.
Harry esquissa un sourire. Hermione avait toujours des théories.
-Tu utilises ton Patronus toutes les nuits pour surveiller le couloir, dit-elle en levant un doigt. Il passe des heures relié à ton inconscient puisque tu dors. Je pense que ton cerf a pris une sorte d'indépendance magique. Rien de grave mais il … disjoncte un peu. Peut-être que c'est tout simplement ton inconscient qui agit. Un peu comme les enfants sorciers qui font des choses étranges, tout ça parce que leur magie n'est pas canalisée. Est-ce que ça arrive quand tu ressens des émotions fortes ?
-Non.
Il avait répondu un peu trop rapidement. Hermione ouvrit la bouche mais la referma, les yeux rivés derrière son épaule.
L'ancien Gryffondor se retourna. Malfoy se tenait derrière eux. Le blond portait décidément son sourire narquois comme d'autres porteraient des vêtements de grand couturier. Avec style et ça lui allait bien. Harry haussa les épaules, blasé et défaitiste.
-Je vous en prie, susurra Malfoy, ne vous interrompez pas pour moi. Cette histoire de Patronus m'intéresse grandement.
-Va te faire, grogna simplement Harry.
Hermione eut l'air un peu outré par sa vulgarité mais Malfoy se contenta de sourire encore plus. Puis ses sourcils se froncèrent.
-A quoi joue Weasley ? demanda-t-il.
Harry regarda par-dessus son épaule, assez fier de pouvoir détourner les yeux de Malfoy aussi facilement. Dans la tribune de Poudlard, la banderole de Ron était gigantesque, Marley et Mars semblaient visiblement ravis de l'aider à la tenir. Les lettres dorés se voyaient on ne peut mieux sur le fond rouge.
« Le roux vaincra ! »
Harry plissa les yeux, essayant de ne pas rire. Les mots s'effacèrent pour laisser la place à un autre slogan.
« Avec Devnet, ça va roux-ler ! »
-Je crois qu'il est content qu'un roux soit champion de Poudlard, expliqua Harry.
Malfoy était sur le point de répondre, sûrement une remarque désobligeante, lorsque Fournier les héla. Elle avait les joues rouges et elle était tout essoufflée. Elle faillit d'ailleurs tomber en descendant les marches en courant. Malfoy l'attrapa par le bras juste à temps.
-Oh merci, Professeur Malfoy ! s'écria-t-elle, sa main s'agrippant toujours au bras du blond. « C'était moins une. »
Malfoy en gentleman hocha simplement la tête. Harry se dit que s'il il avait été à la place de Fournier, Malfoy lui aurait probablement donné l'élan nécessaire pour passer par-dessus la rambarde. Elle ne lâchait pas son bras en tout cas. Elle avait vingt ans de plus que lui et elle était mariée mais il supposait que ça ne dérangeait pas Malfoy si ce dernier avait quelque chose à y gagner.
Après tout c'était une femme, elle.
-Professeur Potter, venez aussi à côté de moi. Je vais donner le départ. Mon Dieu, nous avons du retard !
Harry se déplaça docilement après avoir promis à Hermione de revenir une fois l'épreuve commencée.
Dans les tribunes le brouhaha habituel fit place à une véritable cacophonie et les flashs des appareils photos crépitèrent un peu partout. Harry baissa les yeux. Les trois champions venaient d'entrer sur le terrain.
Devnet semblait d'abord nerveux, puis le grand écran le montra en train de sourire. Les caméras suivirent son regard. Sur l'écran, la banderole de Ron affichait à présent « Si t'es fier d'être rouquin tape dans tes mains ! ». Et Devnet frappa deux fois dans ses mains avant de faire à la foule le signe de la victoire.
Ce gamin était incroyable décida Harry en entendant la foule l'acclamer. Même s'il l'aurait préféré un peu plus réservé – et plus humble -, il venait de tous les mettre dans sa poche.
A côté de lui, l'élève de Malfoy avait l'air plutôt renfrogné et la Française était toute pâle.
Harry jeta un rapide coup d'œil à Malfoy. Il semblait décontracté alors qu'il avait toutes les raisons d'être stressé. Il ne connaissait pas l'épreuve et savait que Devnet, lui, était au courant. Peut-être même que la championne de Beaubâtons l'était aussi.
Harry ne se sentait pas menacé par la gamine. L'épreuve était surtout physique. Les concurrents allaient devoir s'enfoncer dans le bois, trouver une grotte et récupérer un objet à l'intérieur. Le professeur Merle n'avait pas su lui dire ce qu'il fallait ramener. Mais il lui avait expliqué qu'une créature différente se trouvait devant chacune des trois grottes.
L'une d'entre elles était gardée par une Nymphe. La seconde par un troll. Et la dernière par une tarasque. Il suffisait que Devnet arrive le premier et choisisse la grotte de la Nymphe pour gagner cette épreuve. Et Harry plaignait à l'avance celui qui tomberait sur la tarasque. Le monstre était réputé pour tenir tête aux dragons s'il le fallait et pour manger des humains au petit déjeuner.
Même si la championne de BeauxBâtons était au courant, elle n'avait pas l'air d'une sportive accomplie. Quant à Taurus Petersen, avec son allure nerveuse et sa petite taille, il devait être rapide mais Harry le voyait mal tenir tête à O'Flaherty question endurance.
-….déclare la première épreuve ouverte ! cria la voix de Fournier.
Une partie du terrain menait tout droit aux Bois Noirs. Les trois champions s'élancèrent en courant. Avec ses grandes jambes O'Flaherty était déjà en tête. Sauf que la championne française ne fit que trois enjambées, à la quatrième elle n'était plus là. Un cri strident de rapace se répercuta dans les hauts-parleurs. Harry leva les yeux. Un faucon s'élevait au-dessus des Bois. Harry vit les doigts de Malfoy blanchir contre la rambarde.
-Oh, gloussa Fournier avec un petit sourire satisfait, j'ai oublié de vous le dire mais comme vous pouvez le constater, Mademoiselle Héritier est une animagus.
Harry soupira. Il ne manquait plus que ça.
O°O°O°O°O
-Deuxième ce n'est pas si mal.
Harry hocha la tête sombrement. Ron haussa les épaules avec mauvaise humeur.
Ils prenaient un verre dans un village moldu pas très loin de l'école et Hermione essayait de leur remonter le moral. La nuit était tombée depuis longtemps et bientôt Ron et Hermione repartiraient en Angleterre. Ça aussi ça n'arrangeait pas l'humeur de Harry, même s'il allait les revoir d'ici une semaine pour les vacances de Noël. La vérité c'était que ses amis lui manquaient. L'Angleterre aussi. Et il n'aurait jamais cru penser ça un jour mais même la pluie lui manquait.
Il pleuvait de temps en temps en Provence bien entendu mais ça n'avait rien à voir avec le climat anglais ou écossais. On était mi-décembre et il n'avait pas encore vu un seul flocon. D'après ses collègues français, il neigeait peu ou pas durant les hivers dans la région. Il espérait que pendant les vacances il neigerait en Angleterre.
-Il faut avouer que la petite Française s'est bien débrouillée, reprit Hermione.
-Avec une paire d'ailes, même la grand-mère de Neville aurait réussi l'épreuve, grogna Harry avant d'avaler une gorgée de sa bière.
Ron approuva d'un signe de tête et fit trinquer sa bière contre la sienne.
Ils étaient de mauvaise foi tous les deux car ils savaient qu'être animagus demandaient une sacrée maîtrise de soi et un travail phénoménal. Mais ça faisait du bien d'être hypocrite de temps en temps.
Harry se demandait comment Devnet allait pouvoir rattraper son retard. La gamine avait eu le temps de s'occuper de la Nymphe, de revenir, de faire ses interviews et de boire un chocolat chaud alors que les deux autres n'avaient même pas encore atteint leur grotte.
O'Flaherty était arrivé second, le troll ne lui avait pas donné trop de mal. C'étaient des créatures bien trop stupides pour être vraiment une menace. Le rouquin s'était même payé le luxe de faire de l'humour pendant qu'il évitait les attaques du troll, ce qui avait eu le mérite d'accroître encore sa popularité dans le stade. S'il n'avait pas gagné l'épreuve, au moins l'Irlandais avait-il gagné le cœur du public.
C'était loin d'être le cas de l'élève de Malfoy qui avait dû affronter la tarasque. Il s'en était sorti malgré une blessure au bras droit. Le combat avait été long et impitoyable. Harry n'oublierait jamais le regard froid et déterminé du jeune Bulgare alors qu'il jetait des sortilèges tous plus dangereux les uns que les autres sur la bête.
Malfoy avait bien formé son étudiant à la Magie Noire. Cet affrontement-là n'avait rien eu à voir avec celui des deux autres. La tarasque n'était pas morte sous leurs yeux puisqu'elle s'était finalement enfuie dans un gémissement lugubre mais Harry pensait qu'elle n'en avait plus pour très longtemps. A l'heure qu'il était, elle était probablement morte. La façon de combattre du champion de Durmstrang avait jeté un froid dans l'assemblée.
Harry fut sorti de ses réflexions par la voix enjouée de son meilleur ami.
-Hey mais c'est Nott ! dit-il en se levant à moitié.
Sur le palier du bistro Theodore Nott venait de faire son entrée. Ron se rassit immédiatement en voyant que le Langue de Plomb n'était pas seul. Zabini et Malfoy l'accompagnaient.
Le blond n'eut pas l'air ravi de les trouver là mais Zabini, un petit sourire satisfait sur les lèvres, s'avança immédiatement vers leur table.
-Quelle heureuse surprise de vous voir ici ! dit-il d'un ton pourtant pas très surpris ni spécifiquement heureux.
Harry le salua d'un bref signe de tête. Malfoy avait décidé d'approcher aussi mais visiblement avec moins d'enthousiasme que les deux autres.
-Pas vraiment une surprise, objecta Nott après les avoir salués. Ça fait cinq bars qu'on visite et je commence à comprendre pourquoi ils ne te satisfaisaient pas.
Zabini jeta un regard noir à son pote. Harry soupira, il avait réussi à échapper aux journalistes aujourd'hui mais Zabini semblait tout de même l'avoir pisté.
Il entendit Hermione leur proposer poliment de se joindre à eux et ce fut à ce moment-là que Harry réussit à détourner ses yeux du professeur de Magie Noire pour foudroyer son amie.
-Pourquoi pas ? répondit Nott en haussant les épaules alors que Zabini était déjà en train de s'installer à côté de lui.
-Nous voilà tous réunis comme au bon vieux temps ! annonça Zabini d'un ton enjoué qui sonnait particulièrement faux une fois qu'ils furent tous assis.
Le pauvre ne devait pas être habitué à être aimable avec des anciens Gryffondors et particulièrement avec tout ce qui n'était pas des Sangs-Purs.
-Alors je dois être amnésique, susurra Harry, je ne me souviens pas avoir jamais bu un verre avec vous trois.
Ron ricana et Harry fut surpris de voir un bref sourire amusé éclairer les traits de Malfoy qui était installé juste en face de lui. Il baissa les yeux, attendant que les battements désordonnés de son cœur se calment.
-Comment va Petersen? lui demanda-t-il après avoir bu une nouvelle rasade de bière.
-Son bras est totalement guéri, répondit le blond en haussant les épaules. Mais il doit rester en observation à l'infirmerie pour cette nuit. Enfin il ne sera pas seul. O'Flaherty s'y trouve aussi.
-Devnet ? s'inquiéta immédiatement Harry en se redressant sur sa chaise. Mais qu'est-ce qu'il a ?
Le champion de Poudlard allait très bien après l'épreuve mais peut-être qu'il avait une blessure post-traumatique.
-Il va bien, le rassura Malfoy. Il s'est battu avec Leto dans un couloir. Rien de grave.
Harry soupira, ces deux-là allaient l'entendre. Dès qu'il rentrerait à BeauxBâtons, il passerait tout de même à l'infirmerie pour s'assurer de l'état du rouquin. Il s'attendait à ce que Malfoy lui fasse une remarque acerbe sur le fait qu'il ne savait pas tenir ses élèves mais à la place le blond changea de sujet.
-Qui aurait cru que cette petite Française fut une animagus ? dit-il dans un soupir. Ceci dit, je comprends mieux pourquoi c'est un oiseau en papier qui est sorti de la Coupe lorsqu'elle a été désignée.
Harry hocha la tête. Il avait complètement oublié ce détail mais ça ne l'étonnait pas que Malfoy, lui, ait fait le rapprochement.
-Elle va être dure à battre, commenta Nott qui contemplait sa boisson moldue avec circonspection.
Malfoy haussa de nouveau les épaules.
-Difficile ne veut pas dire impossible.
Harry se demanda si l'assurance de Malfoy après le fiasco de son élève lors de la première épreuve était du chiqué ou s'il avait réellement un plan pour remonter au classement.
-Tu sais comment revenir au score? demanda Zabini l'air de rien. Des informations sur la seconde épreuve peut-être ?
L'ancien Gryffondor fronça les sourcils. Est-ce que Malfoy avait déjà des renseignements sur la suite du Tournoi ?
-Je ne te dirai rien Blaise, répondit simplement le blond.
-En tous cas, nous savons déjà en quoi va consister la dernière épreuve, dit Hermione.
Tout le monde hocha la tête autour de la table. Harry en avait déjà parlé avec ses amis. Les concurrents avaient ramené chacun une graine de Mirabilis expensa (2). C'était une plante rare d'Amérique du Sud. Les trois champions allaient devoir s'en occuper tous les jours et les faire pousser jusqu'à ce qu'elles atteignent leur pleine maturité pour la dernière épreuve.
Il fallait être plutôt doué en botanique, étant donné les soins constants qu'il fallait leur prodiguer. Mais Harry s'était déjà promis de joindre Neville par Cheminette dès le lendemain.
La plante avait une particularité. Si on mâchait les pétales des fleurs de Mirabilis, cela vous provoquait des hallucinations.
Il suffisait de lancer un sortilège de « Fantasma » en même temps et alors les sorciers pouvaient « invoquer » des créatures tout droit sorties de leur imagination.
Ils en avaient donc tous conclu que la dernière épreuve serait d'ordre cérébral. Un combat de monstres qui n'existaient même pas et qui sortaient uniquement des cerveaux des trois élèves.
Ça allait être aussi l'épreuve la plus compliquée pour O'Flaherty. Sans compter la Mirabilis qui devait être parfaite, il fallait aussi avoir un niveau de concentration impressionnant. Et Devnet ne parvenait déjà pas rester plus de deux minutes assis en cours sans avoir la bougeotte.
-Ouaip, les Français ont visé un grand final, commenta Ron. Mais ces pauvres gosses n'ont que dix-sept ans…
-Les épreuves qu'a eu à subir Potter étaient du même niveau, répondit Malfoy, et il n'avait que quatorze ans.
Harry lui lança un regard surpris.
-Mais, poursuivit le blond avec un léger sourire, on sait tous que Potter a une chance de cocu. Ça ne compte donc pas vraiment.
-Ma chance t'emmerde, répliqua Harry vertement. Et profondément.
Malfoy se tourna vers ses amis, souriant encore plus.
-N'est-il pas adorable?
-Très, répondit Nott puis il commença enfin à goûter sa bière.
Il en prit une petite gorgée en fronçant les sourcils puis sembla décider que c'était sans danger et continua à boire.
-Potter ne fait que se défendre, répondit Zabini en adressant à Harry un sourire aimable.
-Tu peux lui lécher le cul tant que tu veux, Harry ne te donnera pas d'interview, commenta Ron.
Zabini parut choqué qu'on le soupçonne d'une telle bassesse et se drapa dans un silence outragé.
-En parlant de pot de colle, commença Nott en ignorant le grognement de Zabini. Je suis désolé pour l'attitude de ma sœur, Draco.
Malfoy haussa les épaules. Harry avala une autre gorgée de bière en se demandant de quoi il s'agissait. Peut-être qu'il devrait poser la question, après tout Elizabeth était son élève.
-Pas grave, ça lui passera, annonça Malfoy.
Harry fut encore plus intrigué.
-C'est quoi l'histoire ? demanda Ron et le brun eut envie de l'embrasser pour ça.
-Ma sœur s'est amourachée de notre ami blond ici présent, expliqua Nott. Et elle a la subtilité d'un troupeau de Scrouts à pétard. Je lui ai pourtant expliqué que Draco était gay mais elle pense être celle qui le ramènera dans le droit chemin.
Harry recracha presque sa bière, en tous cas il fut obligé de tousser pour éviter de s'étouffer. Il sentit Ron lui taper dans le dos.
-J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? reprit Nott d'un ton indifférent.
Il y eut un silence alors que Harry se remettait et finalement Malfoy – qui n'était pas hétéro - prit la parole.
-Potter est simplement choqué de comprendre que celui qu'il prenait pour l'homophobe de service aime en fait s'amuser avec les hommes.
Malfoy le fixait avec un sourire moqueur. S'il était furieux que son pote ait révélé son homosexualité à trois personnes qu'il ne pouvait pas voir en peinture, il le cachait bien. Harry sentit ses joues le brûler. Bon sang, Malfoy avait dit qu'il aimait s'amuser avec les hommes…
Malfoy était homo.
Il sentit le regard d'Hermione posé sur sa nuque. Et même Ron à côté de lui restait étrangement silencieux, comme s'ils savaient tous les deux à quoi il pensait.
Harry se releva brusquement.
-Je vais pisser, annonça-t-il à la ronde. Trop de bière …
Il était déjà presque au niveau de la porte des toilettes – non il ne courait pas, il avait juste une démarche rapide - quand il entendit à nouveau la voix traînante de Malfoy.
-Toujours aussi raffiné, Potter.
Une fois dans les toilettes, Harry s'aspergea le visage d'eau froide, essayant de se remettre les idées en place.
Comment avait-il pu louper une chose pareille ?
Malfoy était gay.
…aimait s'amuser avec des hommes.
Il l'avait réellement cru homophobe. Il ne comprenait plus alors pourquoi il était aussi odieux avec Merle. Il savait juste que Malfoy aimait s'amuserbaiserforniquercopuler avec des hommes.
Harry se mordit la lèvre inférieure. Il n'était plus certain de pouvoir le regarder en face à présent. Il avait déjà du mal à rester stoïque, avant ça. Et qu'est-ce qu'il lui avait pris de décamper comme s'il avait le Diable aux trousses ?
Hermione allait deviner.
Elle devinait toujours.
Et les autres allaient le prendre pour un cinglé.
Harry s'obligea à respirer calmement, se répétant que ça ne changeait rien que Malfoy soit gay. Ça restait un connard manipulateur qui le détestait. Ça restait impossible.
Cette dernière affirmation pinça quelque chose au niveau de sa poitrine. Il ferma brièvement les yeux et décida de retourner courageusement dans son enfer personnel.
Un lieu où Malfoy était gay et où il n'avait pas le droit de poser les mains sur lui.
Harry poussa la porte des toilettes et retourna dans le bar.
°O°O°O°
Finalement la soirée n'avait pas été si terrible, songea Harry alors qu'il se dirigeait vers le Portoloin de l'Académie en compagnie de Malfoy.
Nott était plutôt cool mais peut-être que Harry pensait ça parce que le frère d'Elizabeth était celui qui avait dévoilé le fait que Malfoy était gay.
Et ça avait été assez distrayant de voir Zabini essayer d'être cordial (3) avec eux sans pouvoir pour autant s'empêcher de les toiser dédaigneusement à mesure que son taux d'alcoolémie augmentait.
Mais le plus surprenant dans cette soirée avait été Malfoy. Il n'avait insulté personne – les piques qu'il avait échangées avec Ron ne comptaient pas -. Le professeur de Défense Contre les Force du Mal était même certain que Hermione avait apprécié de discuter avec l'ancien Serpentard.
Harry ne savait pas pourquoi ce constat le rendait aussi content. A croire qu'il avait perdu tout son discernement depuis qu'il savait que Malfoy aimait coucher avec des mecs. Il n'avait pas envie d'une quelconque relation avec ce type et le fait qu'il plaise à ses amis n'aurait pas dû autant le satisfaire. Au contraire, ça devrait l'agacer que cette fouine soit parvenue à faire baisser la garde d'Hermione.
-Potter…
Par réflexe – et alors qu'il s'en était abstenu avec succès depuis qu'ils avaient quitté le bar - Harry tourna sa tête vers lui puis grogna. Malfoy avait les pommettes et le bout du nez rougis par le froid et de la buée blanche sortait de sa bouche. Il devrait sans doute attacher son écharpe au lieu de la laisser pendre autour de son cou. Mais l'hiver lui allait bien. Harry avait juste envie de combler la distance entre eux et de l'embrasser. De le réchauffer.
Bon sang pourquoi avait-il fallu que Nott dise que Malfoy était homo ? C'était presque comme s'il avait donné à Harry l'autorisation de tenter quelque chose. Sauf qu'il pourrait bien être le dernier homme sur terre, jamais Malfoy ne penserait à lui comme ça.
-Hmm ? répondit Harry contrarié.
-Je voulais te … remercier, reprit finalement le blond avec hésitation comme s'il ne savait pas vraiment comment faire sonner ces mots.
Harry haussa ses sourcils.
-Ah ? En quel honneur ?
Ils étaient devant le Portoloin à présent. C'était un lampadaire défectueux situé à l'écart de la voie passante.
-Tu n'as rien dit à propos de mes « problèmes de Magie ».
« Problèmes de magie »…après tout si ça amusait Malfoy d'appeler ça comme ça.
-Tu m'avais demandé de garder ça pour moi.
-C'est vrai mais honnêtement je ne pensais pas que tu le ferais, surtout quand on sait que notre conversation ce jour-là s'est plutôt mal terminée. Ça fait deux semaines que je m'attends à faire les gros titres.
Malfoy ricana un peu nerveusement avant de poursuivre. «-Tu ne l'as même pas dit à la Sang … à tes amis. Ou alors Granger est devenue très douée en dissimulation. »
Harry supposa que c'était pour ça que Malfoy avait décidé de parler à Hermione dans le bar. Il avait dû tâter le terrain.
-Toutes nos conversations se terminent en dispute, fit-il remarquer, ce n'est pas pour autant que je vais te donner en pâture aux journalistes. Et je n'ai rien dit à Hermione et Ron parce que à part de te conseiller d'aller voir un psychomage, je ne vois pas ce qu'ils peuvent faire pour t'aider.
Malfoy grimaça à la mention du psychomage comme s'il venait de mordre dans un fruit pourri. L'ancien Gryffondor préféra laisser tomber pour le moment. Mais il pensait sincèrement qu'une thérapie ne pourrait pas lui faire de mal. Lui-même en avait suivi une, sur les conseils d'Hermione, juste après la guerre, quand il était au plus bas. Ça n'avait pas réglé ses problèmes dans un claquement de doigts mais son psychomage lui avait fourni des clefs pour l'aider à les surmonter et, quand cela se révélait impossible, pour au moins vivre avec.
-Quelles que soient les raisons, reprit Malfoy le sortant de ses pensées, j'apprécie ta discrétion.
-Je resterai discret, répondit Harry. Pour le « reste » aussi. Et je sais que Ron et Hermione ne diront rien non plus.
Malfoy hocha la tête, visiblement soulagé. Apparemment c'était ce qu'il espérait entendre. Il serait étonné d'apprendre à quel point le brun comprenait qu'il ne veuille pas que la presse s'empare de la nouvelle de son homosexualité.
Harry eut alors une conscience aiguë du fait qu'ils étaient seuls et beaucoup trop proches, et qu'ils venaient d'avoir une conversation civilisée. Que Malfoy était bien trop fascinant. Qu'il était gay. Et que son envie de lui le faisait presque trembler.
-Il est tard, dit-il d'une voix trop rauque. Je vais rentrer. Bonne nuit Malfoy.
Il posa sa main sur le lampadaire et bien qu'il portât des gants il sentit que le métal était glacé.
Il arriva dans l'arrière-cour de l'Académie et attendit que les effets désagréables du voyage passent avant de regarder autour de lui. Des minuscules sphères lumineuses volaient paresseusement entre les arbres et les fleurs, éclairant par intermittence le parc d'une lumière tamisée.
Cette ambiance romantique - « Foutus Français baratineurs ! » - lui fit presser le pas. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il se retrouvait dans cette partie du château en pleine nuit mais Malfoy allait arriver d'une seconde à l'autre et Harry n'avait pas envie de traverser ce piège à filles en sa seule compagnie.
Tant pis si ça faisait de lui un trouillard.
Il était déjà à dix bons mètres lorsqu'il l'entendit atterrir.
-Attends Potter !
Harry se crispa et s'arrêta. Rien ne lui serait épargné ce soir.
Malfoy arriva rapidement à ses côtés et semblait complètement hermétique à l'atmosphère féerique qui les entourait. Ce qui n'était pas plus mal.
-Tu vas à l'infirmerie voir O'Flaherty, n'est-ce pas ?
-Ouais.
L'ancien Gryffondor ne prit même pas la peine de demander comment Malfoy avait deviné. Ça l'agaçait qu'il le connaisse aussi bien.
Le blond eut un regard résigné.
-Bon… Puisque tu vas finir par l'apprendre de toute façon, alors autant que je te le dise.
-Me dire quoi ? demanda Harry en plissant les yeux.
Bon sang, pour que même Malfoy hésite à lui annoncer quelque chose, c'est que la nouvelle n'allait vraiment pas lui plaire.
-Si O'Flaherty se retrouve à l'infirmerie c'est parce que Leto a lancé sur lui un Opitum. C'est un sortilège de Magie Noire.
Malfoy venait de lâcher sa petite bombe presque avec indifférence.
-Quoi ? explosa Harry. Bordel tu comptais me le dire quand ? Est-ce qu'il va bien ?
-Je t'ai déjà dit qu'il allait bien, répondit Malfoy qui, lui, restait toujours aussi calme. Il a été soigné très vite. Il sera juste un peu groggy durant deux ou trois jours.
Juste un peu groggy … Harry secoua la tête, choqué et incroyablement déçu. Il ne pensait pas que Leto en arriverait là. Il allait devoir le renvoyer à Poudlard …
-J'ai parlé à Ophiuchus, reprit le blond, il est très perturbé par son geste et le regrette vraiment. D'après ce que j'ai compris, O'Flaherty sortait seul de la fête que les Françaises avaient organisée et ils se sont percutés accidentellement dans le couloir. Ensuite ça a vite dégénéré. Ils se seraient violemment insultés. O'Flaherty aurait voulu le frapper à la moldue et Leto a jeté le sortilège.
Harry pouvait facilement imaginer la scène. Il n'avait aucune difficulté aussi à comprendre que si l'Irlandais n'avait pas été soigné très vite, il serait sûrement mort à l'heure qu'il est ou en tous cas en très mauvais état. Ces gosses étaient sous sa responsabilité et ce n'était que maintenant que Malfoy le mettait au courant.
-Je suppose qu'il a appris ce « Opitum » en suivant tes cours, répliqua Harry froidement. Alors toujours convaincu qu'enseigner la Magie Noire nous sauvera tous ?
-Ne m'accuse pas. Je n'étais pas celui qui tenait la baguette.
Harry renifla. Tellement typique de ce connard de se défausser.
-Quoi qu'il en soit, Leto est allé trop loin cette fois-ci. Il peut regretter tout ce qu'il veut, je m'en fous. Je vais le renvoyer à Poudlard.
Malfoy fronça les sourcils et secoua doucement la tête.
-Ne fais pas ça Potter. Tu sais comment sont ces deux gamins, tu les connais mieux que moi. Quand ils sont ensemble, ils ne réfléchissent plus. Enlève-lui des points, punis-le si tu veux mais ne le renvoie pas comme s'il était devenu un pestiféré, tout ça parce que tu ne supportes pas la Magie Noire.
-Ne me dis pas comment je dois gérer mes élèves, prévint Harry dangereusement. Ce qu'il a fait est grave. Si tu es trop aveuglé par ton culte pour la Magie Noire pour le voir, ce n'est pas mon foutu problème !
Le blond eut un sourire amer.
-Tu as la mémoire courte Potter. Tu as agi exactement comme ce gamin dans le passé. Sauf que lui regrette son geste. Toi, tu avais l'air plutôt satisfait de me voir agoniser dans une mare de sang.
Harry sursauta comme si Malfoy venait de le frapper. Il était furieux qu'il mette ça sur le tapis. Furieux qu'il se permette de penser qu'il avait été content de l'avoir presque tué. Bordel, le peu de fois où il s'autorisait à y repenser, ça lui donnait la nausée.
-Tu ne sais RIEN Malfoy ! cracha-t-il. J'ai cru que mon foutu monde s'effondrait quand je t'ai vu t'écrouler. Quand j'ai vu tout ce sang que tu per…
-Tais-toi ! gronda Malfoy.
Et Harry eut le temps d'apercevoir ses yeux gris bien trop sombres pendant que le blond franchissait les deux pas qui les séparaient. La seconde d'après l'ancien Serpentard l'embrassait.
Harry répondit au baiser par réflexe, parce qu'il avait besoin de passer ses nerfs sur quelque chose.
Parce qu'il en crevait d'envie.
Malfoy sembla surpris par sa réaction et Harry crut qu'il allait reculer. Alors il agrippa les deux pans de son écharpe pour le retenir. Finalement Malfoy dut comprendre le message car dans un grognement il posa une main sur sa hanche et glissa l'autre sur sa nuque.
Et c'était injuste. Injuste qu'un type aussi incisif et froid ait les lèvres aussi douces. Injuste qu'il sente aussi bon. Injuste que Harry comprenne qu'il n'arriverait jamais à le repousser. Pas quand ses jambes semblaient vouloir arrêter de le porter et que son cœur cognait si fort. La bouche de Malfoy bougeait sur la sienne avec une délicatesse surprenante et pourtant totalement érotique. Puis Harry frémit en sentant sa langue toucher ses lèvres et il poussa un soupir alangui.
Malfoy fit glisser sa langue dans sa bouche. Dans le ventre de Harry quelque chose se mit à galoper et son érection n'avait jamais été aussi dure. Il oublia qu'ils étaient en train de se disputer. Il oublia Leto, O'Flaherty, la Magie Noire et le Tournoi. Il n'eut même pas conscience qu'il s'accrochait à présent aux épaules de Malfoy et que le blond aussi accentuait leur étreinte. Ils étaient maintenant pressés l'un contre l'autre avec une tonne de vêtements pour les séparer. La main de Malfoy qui se trouvait sur sa hanche se posa sur ses fesses. Harry émit un son étranglé et força sa jambe droite entre celles de Draco. Il avait besoin de plus de contacts. De se frotter. De s'occuper de sa foutue érection.
La voix qui parlait français ne parvint pas tout de suite à ses oreilles aussi ne comprit-il pas immédiatement pourquoi Malfoy venait de mettre fin au meilleur baiser de sa vie et qu'il était à présent bien trop loin pour que Harry puisse le toucher même s'il tendait les bras.
Puis la voix parla encore et Malfoy répondit en français quelque chose d'un ton tout de même un peu tremblant. Le blond évitait de le regarder et il était en train de remettre son manteau correctement avec des gestes rapides et un peu maladroits.
Harry avait progressé en français depuis qu'il séjournait ici – en même temps son vocabulaire de départ ne comprenant que cinq mots, il ne pouvait que s'améliorer - mais là il était tellement perturbé par ce qui venait de se passer qu'il n'était même pas certain de comprendre de l'anglais.
Ceci dit, l'instant d'après, la sorcière à qui appartenait la voix arriva et Harry reconnut la concierge de l'école. Elle paraissait soulagée de voir qu'ils n'étaient pas des élèves qui enfreignaient le couvre-feu mais le brun se sentit aussi gêné que s'il avait quinze ans et que MacGonagall venait de le surprendre en pleine séance de branlette.
Sauf que la femme ne semblait avoir rien vu. Elle discutait à présent avec Draco. Harry s'humecta les lèvres malgré lui, juste parce qu'elles le picotaient encore.
Et parce qu'il était sûr que le goût de Malfoy s'attardait encore sur elles.
Il réalisait qu'il venait d'embrasser Malfoy. Il lui jeta un regard en coin.
-Je … je vais accompagner Madame Lefèvre pour la fin de sa patrouille, lui expliqua alors l'ancien Serpentard, les yeux fixés quelque part par-dessus l'épaule de Harry. Bonne nuit professeur Potter.
Harry le regarda fuir et eut un sourire désabusé. Apparemment Malfoy aussi avait réalisé qu'ils venaient de s'embrasser sauf que lui, ça lui donnait envie déguerpir.
A suivre…
(1)Harry Potter et la Coupe de Feu
(2)La Mirabilis expensa existe bien mais à part le fait qu'on la trouve en Amérique du Sud, tout le reste est de mon invention, donc désolée par avance pour les connaisseurs.
(3)Le véritable Blaise cordial se trouve dans la fic « Réponses à la chaîne » de SeanConneraille et même qu'il roxx *_*
Merci d'avoir lu jusqu'ici.
