Chapitre 3 : Thunderstruck
Son geste devait être précis. Il devait se concentrer pour viser et pour lancer en maîtrisant sa force. Deux rebonds. Jim lança la balle. Elle rebondit une première fois sur le sol, une deuxième fois sur le capot d'un panneau de contrôle et tomba juste à côté de la boîte à outils de Scotty.
_Rah zut !
Keenser récupéra la balle et Jim se leva pour échanger leurs places. A côté d'eux, Scotty vérifiait les câblages dans les conduits qui menaient aux tubes de Jefferies.
_La Mercedes-Benz, ça c'était une voiture classe !
Jim tourna la tête vers Scotty en fronçant les sourcils alors que Keenser lançait à son tour la balle.
_Quoi ?! La Chevrolet Corvette était une pure merveille, bien meilleure que la Benz ! (Jim regarda la balle atterrir dans la boîte) Mais ce n'est pas vrai ! Comment vous faites Keenser pour gagner tout le temps ?!
Scotty commenta alors qu'il avait la tête sous un autre capot.
_Ouai il est chiant, il gagne tout le temps à ce genre de jeux ! Non mais sérieusement, Capitaine, vous ne pouvez pas dire ça de la Benz ! C'est comme dire que notre Belle est moins bien qu'une poubelle !
Jim lança la balle dans la tête de Scotty. Elle était trop légère pour lui faire le moindre mal.
_Comment vous pouvez dire une horreur pareille !
Keenser récupéra la balle et la renvoya à Jim, qui se repositionna pour la lancer.
_Vous savez ce qui était vraiment une horreur ? La coccinelle !
Jim visa et lança. Encore raté. Scotty sortit la tête et se tourna vers le blond.
_Ah non, là Capitaine, je ne peux vraiment pas vous laisser dire ça !
Keenser et le Capitaine échangèrent de place.
_Et moi je ne peux vraiment pas vous laisser dire que notre Belle est (Jim mima avec ses mains les guillemets) « moins bien qu'une poubelle » !
Scotty fit une grimace et caressa la paroi du vaisseau.
_Désolé ma Belle, j'ai été méchant.
Jim secoua la tête en regardant Scotty. Quand il retourna la tête vers la boîte à outils, il pesta en voyant Keenser réussir à nouveau son lancer. Scotty enchaîna.
_Ferrari aussi faisait des chouettes bêtes.
Jim visa à son tour, réfléchissant brièvement.
_La 328 était pas mal.
Il tira. Premier rebond, deuxième rebond. Il lâcha un cri de joie alors que la balle atterrissait dans la boîte à outils.
_La 328 en jetait pas mal. Mais la Testarossa… vraiment jolie celle-là aussi !
Jim approuva d'un signe de tête alors qu'il changeait à nouveau de position.
_Vous en êtes à combien ?demanda Scotty.
Le blond fit une grimace. Il avait marqué 4 fois. Keenser n'avait pas raté une seule fois, quel que soit l'endroit où était mise la boîte. Jim était bien là depuis plus d'une heure…Keenser devait bien avoir plus d'une centaine de points d'avance… Un score honteux pour le Capitaine.
_Keenser a un compas dans l'œil, grommela-t-il alors que ce dernier marquait encore une fois.
Il entendit Scotty pouffer de rire et croisa les bras en grognant. Il continua :
_N'empêche, j'ai quand même un faible pour les Chevrolet. J'ai toujours rêvé de pouvoir en acheter une et la retaper, mais elles sont si rares…
_Une de 69 ?demanda Scotty.
Jim eut un sourire rêveur.
_Une de 67. J'adore ces voitures.
Scotty leva la tête en l'air en refermant le dernier panneau. Jim récupéra la balle et se positionna pour tirer.
_Eh bien, je connais deux frères tellarites, bon, ils sont particuliers ces gars-là et pas très sympas mais ils ont toute une collection d'anciennes voit-
_Capitaine.
Jim se figea dans son geste en entendant la voix ferme de son commandant en second. Scotty lui adressa une grimace peinée et il se retourna, pris sur le fait. Il savait pourquoi Spock était là.
_Oh, Commander… Je ne pensais que vous passeriez dans le coin.
Il n'y avait jamais personne dans les couloirs menant au moteur warp et aux tubes de Jefferies. Jim avait accompagné Scotty avec Keenser parce qu'il devait vérifier les câblages. Et aussi parce qu'il évitait habilement Bones, qui tenait à lui faire passer une autre visite médicale. Encore.
_Le Docteur McCoy vous cherche. Il m'a chargé de vous trouver afin de vous faire passer un bilan complet et de vérifier la cicatrisation de votre dernière blessure.
Jim savait que feindre l'ignorance ne convaincrait personne. Il soupira et se tourna vers la boîte à outils, tentant sa dernière chance. La balle atterrit juste derrière la boîte. Jim grogna.
_Keenser, vous êtes indétrônable.
Le petit extra-terrestre cligna des yeux avant de le saluer avec sa petite main. Jim lui rendit son salut alors qu'il rejoignait Spock.
_A plus tard !
Scotty le salua et ils descendirent les différentes passerelles avant d'atteindre le turbolift.
_Comment vous m'avez trouvé ?demanda-t-il, curieux.
_Le Docteur McCoy vous a cherché à vos endroits habituels. Le pont supérieur, vos quartiers, le mess des officiers, le hall du pont 10, la salle de pause des officiers, les allées botaniques, le mess du pont 17, la salle de pause du pont 17 et la grande bibliothèque. Ne vous trouvant pas, il m'a chargé de le faire, puisque vous ne répondiez pas à votre communicateur. Sur ce point vous vous devez d'être toujours joignable.
Jim avait les yeux grands ouverts d'étonnement et ignora la dernière remarque.
_Vous me pistez tous les deux ?! C'est carrément les endroits où je passe le plus clair de mon temps !
Ils sortirent du turbolift pour traverser le couloir et rejoindre le deuxième turbolift.
_Il est inutile de vous pister quand on vous connaît assez bien.
Jim se sentit rougir d'un coup. Il détourna la tête alors qu'il laissait Spock le dépasser pour ne pas qu'il voit sa gêne. Il était content, qu'on le connaisse assez pour savoir ça. Il pensait que personne n'avait remarqué qu'il aimait se rendre dans les allées botaniques pour se détendre, ou encore errer dans le hall du pont 10, qui était assez petit, pour admirer la vue sur l'espace à travers l'immense vitre du vaisseau. C'était son endroit favori.
_Mais… comment vous avez su que j'étais ici ? Personne ne vient là. Enfin, à part Scotty pour des petites vérifications.
Il rattrapa Spock pour observer son visage. Il semblait légèrement soucieux. Ils entrèrent dans l'autre turbolift.
_J'ai effectué une élimination logique parmi les possibilités les plus probables.
Jim haussa un sourcil.
_Il y a 23 ponts sur ce vaisseau et je n'y étais pas. A quel moment dans vos probabilités vous en êtes venus à-
Il fut bousculé par une enseigne lorsque les portes du turbolift s'ouvrirent.
_Oh, désolé Capitaine !
Jim eut à peine le temps de réagir qu'il était déjà en dehors du turbolift et que les portes se fermaient. Quand il se retourna, Spock était déjà en train de partir vers l'infirmerie. Deux minutes plus tard, Bones lui tombait dessus :
_Bon Dieu Jim ! Je t'ai appelé au moins dix fois sur ton communicateur personnel ! Qu'est-ce que tu fichais bon sang ?! Tu dois toujours être joignable !
Jim leva les yeux au ciel alors qu'il s'asseyait sur la table.
_Spock m'a déjà fait la remarque. Et sachez que je l'ai oublié dans mes quartiers ! Aïe !
Il lança un regard noir à Bones, qui venait de lui injecter un produit quelconque en hypospray. Bones l'agressait toujours avec de foutus hyposprays. Le médecin afficha un sourire sadique alors qu'il passait son tricordeur sur lui.
_Bon, tes courbes remontent mais ce n'est pas encore la grande forme. Retire tes vêtements, que je regarde ta cicatrice.
Jim leva les yeux au ciel alors qu'il s'exécutait. Il retira son polo jaune et son t-shirt noir. Spock était toujours là. Il étrécit les yeux alors que Bones regardait ses côtes, son attention toujours portée sur le vulcain.
_Impossible que vous m'ayez trouvé par de simples probabilités. Y'avait autre chose. C'est Scotty que vous avez cherché ?
Spock tourna la tête vers lui, mais ne répondit pas immédiatement. Il réfléchissait avant de répondre. Un vulcain ne mentait jamais, mais il contournait la vérité. Jim adorait ce concept.
_Je ne cherchais pas Monsieur Scott.
Jim afficha un large sourire. Là, il tenait quelque chose pour titiller Spock, qui ne semblait pas vouloir lui dire tout. Bones intervint :
_Tu avais raison Jim, c'est nickel ! Tu as une petite marque mais elle va disparaître.
Le blond hocha vaguement la tête alors qu'il avait toujours son sourire. Spock ne devait pas tout dire parce qu'il devait y avoir une part d'impartialité dans sa réflexion. Qui disait impartialité disait émotions humaines. Jim adorait faire ressortir cet aspect que Spock cachait.
_Y'avait de l'instinct, dans votre réflexion, non ?
Il scrutait Spock, certain de ses déductions. Le vulcain s'était contenté de pencher la tête sur le côté.
_Fascinant.
Jim élargit son sourire alors qu'il était sûr que ça voulait dire qu'il avait raison.
_Tu peux y aller, lâcha Bones sur un ton agacé.
Jim sortit de sa contemplation quand Bones lui balança ses vêtements dans la tête.
_Hey !
_Sauves-toi, Roméo, j'ai du boulot.
Jim attrapa son t-shirt et commença à l'enfiler.
_Je vais également retourner sur le pont supérieur.
Spock les salua d'un signe de tête et sortit. Jim enfila son polo jaune, grognant sur le fait d'en avoir toujours deux à mettre : foutu froid spatial. Il réarrangea ensuite ses cheveux et descendit.
_Merci Bones. « Roméo » ?
Le médecin secoua la tête alors qu'il rangeait du matériel.
_Non, rien. Enfin, j'suis ravi de voir que tu vas déjà mieux.
Jim lui adressa un sourire sincère.
_Merci Len.
Bones lui lança un regard noir mais il souriait quand même.
_Toi, t'es vraiment un cas social, tu le sais ça ?
Jim se dirigea vers la sortie en lui adressant un clin d'œil.
_C'est sûrement pour ça qu'on s'entend bien, on est pareil !
Il passa la porte juste à temps pour ne pas être touché par le projectile de Bones.
Jim avait éparpillé et laissé une partie de son travail sur la table de ses quartiers. Il avait des dizaines de brouillons de son code informatique. Une fois qu'il serait certain de son fonctionnement, il se mettrait à faire des simulations. Il avait donc amené avec lui les derniers brouillons à la salle de pause et siphonnait du café. Bones lui faisait souvent la remarque qu'il devait avoir plus de café que de sang dans les veines, au rythme où il pouvait en boire plusieurs litres par jour.
Il soupira en relisant ses notes. De toute façon, il n'avait pas vraiment le choix. Ce que Bones lui avait donné pour mieux dormir fonctionnait : il ressentait moins la fatigue physique, mais ça ne chassait pas complètement ses cauchemars. Ça restait supportable, certaines nuits. Quand il ne voyait pas Spock, Bones, ou les autres mourir sous ses yeux. Quand ses souvenirs ne refaisaient pas surface.
Il allait bientôt découvrir qui était son harceleur. Jim attendait avec impatience le moment de la confrontation. Il saurait bientôt qui sur le pont lui reprochait ce qui était arrivé. Il voulait régler cette histoire au plus vite avant de reprendre pleinement son commandement. Et son commandement, il voulait aussi le récupérer au plus vite. Cette situation l'angoissait et devenait difficile à supporter.
Il s'écarta pour regarder ses brouillons de code qu'il avait griffonné. Il pensait avoir fini. Il devait tout vérifier avant de rentrer ça dans la console et de lancer les premières simulations. Jim récupéra toutes ses affaires et se rendit dans la bibliothèque, où les consoles étaient isolées au fond de la salle et disponibles. Il allait pouvoir être tranquille pour travailler. Il commença à rentrer les données. Ça allait lui prendre pas mal de temps, mais le jeu en valait la chandelle. Il se motivait en se disant ça.
Jim avait toujours eu un certain talent pour créer des programmes. Sa plus belle œuvre fut le virus qu'il avait créé pour tricher au test du Kobayashi Maru. Enfin, non, ce n'était clairement pas sa meilleure œuvre, mais il avait au moins été reconnu pour ça. Il avait commencé jeune, quand il s'était intéressé à l'informatique, après avoir étudié la vieille mécanique. Il se souvenait encore des premières lignes de codes qu'il avait écrites dans le sable de l'Iowa, avant de partir pour Tarsus IV. C'était assez ridicule, mais à l'époque il avait eu un accès restreint aux consoles informatiques. Depuis, il avait gardé en partie son tic.
S'il adorait écrire des programmes, les retranscrire sur une console avait toujours représenté la partie la plus ennuyante au monde. Plus c'était complexe, plus c'était long. Parfois, ça lui prenait des jours de tout taper. Heureusement pour lui, sa séquence était bien plus courte, mais la tâche restait chiante à mourir.
Au moins, pianoter sur la console pour retaper son code sans erreur lui permettait de rester concentré afin d'éviter les erreurs de frappe. Ça lui faisait un peu oublier pourquoi il faisait ça et il se vidait un peu la tête. Jim ne faisait pas attention à ce qu'il se passait autour de lui et il ne vit pas non plus le temps passer. Il n'entendit même pas son communicateur sonner et il mit du temps à réagir quand on l'appela.
_Capitaine ! Ça vous dirait de venir dîner avec nous ?
Jim se tourna vers Kéra, une bajoran qui était dans la même équipe de surveillance que Caleb. Il lui adressa un sourire.
_Merci, ça ira. Je vais encore travailler un peu.
Son estomac choisit cet instant pour vivement protester. Le silence fut pesant alors que Kéra croisait les bras, un sourire victorieux sur son visage.
_Dois-je vraiment insister, Capitaine ?
Jim fit une grimace puis se leva, ressemblant ses affaires avant.
_Vous avez gagné, je vous suis !
Kéra rejeta sa longue tresse brune en arrière et Jim suivit l'enseigne. Il n'avait pas mangé de la journée et il commençait à avoir vraiment faim, maintenant que l'idée lui avait traversé l'esprit. Il savait qu'il devait faire plus attention à ses prises de repas.
_On vous voit peu souvent au mess du pont 10. En général, vous remontez déjeuner au mess des officiers ?
La bajoran l'avait pile relancé dans le sujet. Jim se frotta l'arrière du crâne, un peu gêné.
_Disons que dernièrement, j'ai un peu fait l'impasse sur les repas. Avec le boulot…
Ils sortirent de la bibliothèque pour retomber sur Caleb et Hedik, un trill alpha avec qui les deux autres travaillaient. De tous les trills que Jim avait rencontrés, celui-ci était le plus effacé et distant qu'il connaissait et il n'avait jamais vu une quelconque manifestation de son symbiote, ni entendu son nom comme la tradition le voulait. La voix de Kéra le sortit de ses pensées.
_Vous devriez faire plus attention, vous savez.
Kéra s'était permise de lui dire ça sur un ton de reproche. Jim ne lui en tint pas rigueur. Hedik et Caleb passèrent devant.
_Faire attention à quoi ?demanda Caleb.
_Aux prises de repas. Notre Capitaine n'y prête pas assez attention.
Jim devint rouge tant il était gêné. Il savait qu'il devait faire plus attention et qu'il était totalement fautif. Mais certaines choses avaient la vie dure et les quelques années qu'il avait vécu durant sa préadolescence sur Tarsus IV l'avaient marqué à jamais. Il changea de sujet.
_Et c'est avec plaisir que je vous suis ! Comment s'est passé votre journée ?
Caleb haussa les épaules.
_Rien de bien particulier, la routine. Felgor s'est ouvert la main en se pinçant dans les rouages quand il révisait les recycleurs d'eau, mais sinon il n'y a rien de particulier à signaler.
Jim hocha la tête alors qu'il cherchait mentalement qui était Felgor. Afin d'être un meilleur capitaine, il s'était efforcé de connaître au mieux son équipage. Felgor était un andorien cadet de la branche ingénierie.
_Ça devrait aller pour lui, il possède des bonnes capacités de régénération. Les médecins sauront bien le soigner.
Kéra approuva d'un signe de tête. Ils entrèrent dans le mess où déjà, les personnes commençaient à se rassembler pour dîner.
Jim prit le temps de réfléchir à ce qu'il allait manger alors que les autres passaient devant lui. Il devait manger le plus équilibré possible pour n'avoir aucun manque nutritif que Bones se ferait un plaisir de lui faire remarquer.
Il prit un plat riche en fibres composé essentiellement de légumes qui poussaient dans la serre du vaisseau, leurs aliments frais du départ étant dépassés depuis des mois. Jim avait parfois du mal à imaginer que ça faisait des mois qu'ils avaient quitté la base stellaire en orbite au-dessus de la Terre.
Ils s'installèrent sur l'une des tables disponibles, juste à côté de celle où Carol s'était installée, discutant avec Leyria, une fille d'Orion et, si Jim ne se trompait pas, les deux izarites avec elles étaient Emily et Charlotte. Mais il n'était pas sûr de savoir vraiment de laquelle des deux il s'agissait, elles se ressemblaient vraiment beaucoup.
_Oh, Lieutenant Marcus ! Je suis ravi de vous voir dans les bas-fonds de l'Enterprise !lança Caleb, qui était assis à côté de Jim et en bord de table.
Carol, elle aussi installée en bout de table, lui adressa un sourire gêné.
_Les mess sont disponibles pour tous il me semble. Et puis, celui-ci n'a rien de comparable aux bas-fonds…
Les regards de Jim et Carol se croisèrent. Jim préféra se réfugier la tête dans son plat, amusé par la gêne de Carol. Il savait que Caleb ne cessait de lui faire des avances. Elle ne le rejetait pas, mais ne semblait pas prête non plus à donner suite. Parfois, quand Jim discutait avec elle, il se disait que dans une autre vie, peut-être, Carol et lui auraient pu avoir une histoire. Ils avaient été intéressés l'un par l'autre, c'était clair et ils se l'étaient dit. Mais aucun d'eux n'avait voulu s'engager. Jim n'était pas prêt, et il était son Capitaine.
_-oui, mais le Capitaine a tous les droits, non ? Et puis, si c'était vrai, ça ne s'appellerait pas le « mess des officiers » ! N'est-ce pas Capitaine ?
Jim loupa sa bouche quand Caleb lui donna un coup de coude dans son bras. Il s'essuya, confus, alors qu'il avait loupé tout un bout de la conversation.
_Pardon, c'était quoi la question ?
Kéra lui répondit en souriant alors qu'elle servait de l'eau à Hedik.
_Si les mess sont accessibles pour tous, pourquoi il y a un spécifiquement un « mess des officiers » ?
Jim remarqua que tous le regardaient, y compris les dames d'à côté. Carol semblait aussi gênée par la question que lui. Il afficha un sourire pour reprendre un peu de contenance.
_Le mess des officiers est sous les ponts supérieurs de commandement et il est plus petit. Donc en général, ce sont les officiers de quart qui y mangent parce que c'est plus près. Mais on y voit aussi des enseignes et des cadets. Tiens, ça m'arrive souvent de déjeuner avec Chekov et c'est une enseigne.
Carol approuva vivement.
_Et quelle est son activité ?demanda Charlotte, sincèrement curieuse.
Jim se fit la réflexion qu'il venait de se tirer une balle dans le pied.
_C'est notre principal navigateur. Mais ça n'a rien à voir !
Il sentit qu'il perdait de la crédibilité. Caleb fronça les sourcils puis les regarda tous les deux.
_Et vous, pourquoi vous mangez ici, si vos habitudes c'est de manger à l'autre mess ?
Jim et Carol s'adressèrent à nouveau un regard. Carol ouvrit la bouche la première et Jim en profita pour manger rapidement.
_Et bien parce qu'ici, l'environnement est moins stressant, c'est plus spacieux et agréable d'y manger, déclara Carol.
Jim hausa un sourcil.
_Vous ressentez vraiment le mess des officiers comme un environnement stressant ?
Carol afficha un grand sourire.
_Par période, c'est le cas. Tout dépend de l'humeur des officiers en général.
Jim se frotta l'arrière du crâne, repensant à toutes les fois où l'atmosphère aurait pu être dérangeante. Il eut quelques pensées sur ses petites disputes avec Spock et ses chamailleries avec Bones. Il espérait ne pas faire partie des facteurs de cette ambiance.
_J'avais dans l'idée de nous arrêter dans une base stellaire après la traversée de la Nébuleuse. Histoire de changer les idées à tout le monde, avant de quitter le Quadrant Bêta. Il faut qu'on étudie la question, donc ce n'est pas encore officiel.
Les sourires apparurent sur les visages. Tous avaient de la famille ou des amis à voir. Jim tourna à nouveau la tête vers Carol. Cette histoire de mess l'embêtait.
_Et en ce moment, c'est stressant ?
Carol haussa les épaules.
_Je ne saurais pas dire, c'est comme une impression… Vous devriez en parler au Commander.
Jim fronça les sourcils.
_Au Commander ? C'est probablement celui à bord du vaisseau qui s'y connait le moins en émotions et ressentis.
Les mots étaient sortis, mais Jim n'y croyait pas vraiment. Il connaissait bien Spock. Carol se pinça les lèvres avant d'insister.
_Tentez quand même. Vous pourriez être surpris.
Ok, Jim était plus qu'intrigué. Il reposa sa fourchette.
_J'irais voir ça. Merci de m'en avoir parlé, Carol.
Il se servit en eau alors que Caleb adressait un sourire charmeur, reprenant alors la conversation sur un ton charmeur.
_Et sinon, comment s'est passé votre journée, les filles ?
Kéra leva les yeux au ciel. Jim se leva.
_Le devoir m'appelle. Bonne soirée à tous et merci pour l'invitation !
Caleb lui adressa un clin d'œil, les izarites poussèrent un soupir en voyant Caleb et les autres s'amusèrent de la situation, sauf la bajoran et le trill. Kéra se leva, lâchant un soupir désespéré.
_Je vous suis Capitaine.
Hedik se leva également.
_Moi aussi.
Jim sourit, se faisant la remarque qu'il entendait très peu le son de la voix du trill. Il se dirigea pour déposer son plateau quand il ressentit des vibrations.
Aussitôt, Jim sut que quelque chose n'allait pas avec sa belle. Un problème. Il leva les yeux vers le reste du mess, où il croisa les regards inquiets de ceux qui avaient senti les vibrations. Jim bougea pour déposer son plateau. Il eut juste le temps de le lâcher que cette fois-ci, des secousses firent trembler tout le vaisseau, générant des cris de surprise.
Jim attrapa son communicateur alors que ses yeux parcourraient la pièce pour voir s'il n'y avait pas de dégâts. Quelques plateaux et chaises renversées. Les meubles qui bougeaient représentaient un danger.
_Eloignez-vous des-
Un grondement violent retentit à l'instant même où le vaisseau fut violemment frappé sur le flanc. Ce fut si violent qu'ils se retrouvèrent tous propulsés à travers le mess. Jim n'eut pas le temps de réagir. Il heurta violemment le comptoir où ils déposaient les plateaux.
L'espace d'un instant, tout devint noir. Quand le cerveau de Jim reconnecta ses neurones, l'alerte jaune était activée, les lumières d'alarme étaient allumées et la sonnerie d'alerte retentissait dans le vaisseau. Il y avait des dégâts visibles. Le cœur du capitaine s'accéléra alors qu'il essayait de se lever malgré ses vertiges.
_Capitaine !
Kéra l'aida à se relever. Jim chercha son communicateur. Impossible de le trouver parmi les plateaux et les meubles renversés. Plusieurs personnes étaient inconscientes et à terre. Carol, Caleb et les femmes avec eux en faisaient partie.
_Allez les aider !
Jim envoya Kéra par le bras et se dirigea vers la sortie.
Il courut dans les couloirs, paniqué à l'idée d'une attaque. Non, si c'était une attaque, Spock aurait déclenché l'alerte rouge. Il aurait donné l'ordre de se mettre aux postes de combat. Il réfléchissait à toute allure alors qu'il courrait dans les couloirs, secoué par les autres impacts contre les déflecteurs. Car malgré tout, leurs déflecteurs encaissaient.
La voix de Chekov lui vrilla les oreilles alors qu'il annonçait dans les haut-parleurs qu'ils entraient dans une zone de fortes turbulences. Sans déconner. Tout l'équipage l'avait déjà remarqué. Mais à quoi c'était dû ?! Son inquiétude montait et Jim fit de gros efforts pour avancer malgré les vertiges et la nausée. A être secoué comme ça, il allait finir par vomir. Que faisaient leurs absorbeurs inertiels ?!
Il pénétra dans le turbolift qui l'emmena au pont supérieur. Quand les portes s'ouvrirent sur la passerelle principale, il eut l'impression d'entrer dans une véritable ruche. Les signaux s'affolaient de partout, tout le monde aux communications essayait de joindre les autres zones du vaisseau, les navigateurs donnaient leurs indications et tout ça formait un énorme brouhaha. Spock se tenait debout, à côté de Sulu et Chekov et il semblait regarder les écrans. Dehors, Jim pouvait clairement voir la foudre tout autour d'eux.
_Monsieur Spock ! Qu'est-ce qu'il se passe ?!
Jim atteignit difficilement ses hommes et se cramponna au fauteuil de Sulu pour se tenir juste à côté de Spock.
_Nous sommes au cœur d'un violent orage, Capitaine.
Jim leva les yeux sur les éclairs qui sortaient des épais nuages, se diriger dans tous les sens. Les questions après. Il devait réfléchir et il n'arrivait pas à mettre de l'ordre dans ses idées.
_Calculez les manœuvres d'évitement, Chekov.
Le russe hocha la tête.
_C'est en cours, Capitaine.
_Nous estimons sortir de cet orage d'ici deux minutes, indiqua Spock.
Jim hocha la tête, se cramponnant plus fermement au siège de Sulu.
_Comment ça a pu arriver, Spock ?
Le vulcain était concentré sur les manœuvres du pilote.
_Nous avions analysé le phénomène, mais il paraissait inoffensif. Il semblerait que les choses aient évolué.
Jim avait du mal à rester concentré. L'adrénaline ne l'aidait pas du tout. Il ne se sentait vraiment pas bien.
_Capitaine.
Il tourna la tête vers Spock. Le vaisseau cessa en cet instant de vibrer et tout fut à nouveau calme autour de l'Enterprise. Son regard s'orienta vers l'extérieur.
_Jim.
Le blond fronça les sourcils à l'entente de son prénom. Il se tourna vers Spock, qui attrapa délicatement son menton. Jim fut si surpris qu'il n'eut aucune réaction lorsque Spock tourna sa tête sur le côté.
_Il faut que vous alliez voir le Docteur McCoy immédiatement.
Jim retourna la tête vers Spock. Il fut captivé par l'inquiétude visible sur les traits du vulcain. Enfin, l'inquiétude qu'il pensait percevoir. Puis le décor s'assombrit l'espace d'un instant. L'instant d'après, il était dans le turbolift et l'alerte jaune était arrêtée.
_Qu'est-ce qu'il se passe… ?
Spock était là. Il le maintenait debout par la hanche et avait passé son bras sur ses épaules. Jim affermit sa station debout alors que le commander lui maintenait fermement la hanche.
_Vous avez eu une absence. Vous avez une blessure sérieuse à la tête. Où étiez-vous ?
Cette main sur sa hanche le dérangeait. Enfin, ce n'était pas désagréable comme contact, mais ça lui semblait bien trop intime de la part du vulcain. Une main chaude et ferme qui le maintenait contre un corps chaud et ferme.
_Jim.
Il tourna la tête vers Spock alors qu'il l'entrainait dehors. Jim n'avait pas vu qu'ils étaient sortis du turbolift.
_Vous avez les mains chaudes.
Spock accéléra le pas et il eut du mal à suivre. Il remarqua le nombre conséquent de personnes qui prenaient la même direction que lui.
_Capitaine, concentrez-vous. Où étiez-vous ?
Ils entrèrent dans l'infirmerie. Jim fronça les sourcils.
_Sur le pont, avec vous ?
Spock leva le bras pour héler quelqu'un.
_Docteur.
Jim suivit son regard pour voir Bones.
_Qu'est-ce qu'il se passe ?demanda-t-il en arrivant.
_Il a été blessé à la tête. Il a eu des absences.
Jim se tourna vers Spock, outré.
_N'importe quoi.
Bones attrapa son menton et lui tourna doucement la tête. Jim sentit une vive douleur quand les doigts du médecin passèrent dans ses cheveux.
_Bones, arrête…
La douleur lui redonnait des vertiges et il avait toujours la nausée.
_Je soupçonne également des troubles de la mémoire.
_Merde, il doit avoir un traumatisme crânien. Il a l'air de s'être ouvert le crâne. Infirmier ! (Bones se tourna vers eux). Désolé, j'ai des patients plus graves. Je reviens vers vous dès que je peux.
L'instant d'après, un cadet était là, examinant à nouveau sa tête. La douleur commençait à l'envahir. Le cadet sortit son tricordeur et l'examina.
_Capitaine, regardez-moi.
Jim fut incapable de regarder le cadet. Il eut le réflexe de s'avancer vers les meubles, d'en sortir un haricot et d'y rendre tout le contenu de son estomac. L'effort lui fit encore plus tourner la tête. Il s'accrocha à la première chose qu'il avait pour ne pas s'écrouler. L'épaule de Spock.
_Désolé… j'me sens pas bien.
Jim s'essuya la bouche en récupérant les serviettes que lui tendait le cadet.
_Vous avez perdu beaucoup de sang. Il faut que vous restiez calme. Je vais m'occuper de votre tête. Vous avez aussi des vertiges ?
Jim fit un hochement de tête. Spock l'aida à s'assoir sur l'une des tables d'auscultation. Le regard de Jim se perdit alors sur le reste de l'infirmerie. Ce n'était pas la panique, mais beaucoup de personnes blessées étaient présentes. Il était là pour une blessure à l'arrière du crâne. Il avait déjà connu pire, non ?
_Jim, regarde-moi.
Bones, sortit de nulle part, avait agrippé sa tête.
_T'es déjà là ?
Spock et Bones s'adressèrent un regard.
_Tu viens d'avoir une absence. Jim, ton traumatisme crânien est sérieux. Tu n'as peut-être pas de lésions internes mais il faut que tu ailles te reposer.
Jim se toucha l'arrière du crâne. A quel moment le pansement avait été mis ? Bones se tourna vers Spock.
_Donc vous êtes sûr de pouvoir vous occuper de lui ?
Spock hocha la tête.
_Vos examens ne révèlent pas de séquelles ni de lésions nécessitant une intervention chirurgicale. Vous lui préconisez du repos et l'infirmerie est en pleine activité. Il pourra mieux se reposer dans ses quartiers.
_Ne le perdez pas de vue, Commander. Le faible saignement interne a été traité, mais une fracture pareille à l'occiput devrait être plus grave. Je ne veux pas nous porter la poisse en m'avançant trop mais jusqu'ici, il a eu une sacrée chance.
Jim prit conscience de la gravité de la situation. Il attrapa le bras de Bones.
_Len…
Il fut incapable d'en dire plus. Bones posa la main sur son épaule.
_Va te reposer Jim. On se revoit vite. Spock te surveillera.
Jim hocha légèrement la tête et se leva. Son équilibre était douteux, mais aussitôt Spock l'attrapa pour le soutenir alors qu'ils avançaient dans le couloir. Il pouvait encore sentir la main de Spock sur sa hanche, la chaleur de son corps contre la sienne. Ce fut la dernière pensée que le cerveau de Jim enregistra.
Julindy : Merci beaucoup, je trouve que les ressentis sont pour moi, une bonne difficulté et si l'écrit le fait bien ressortir et rend ça réaliste, je suis ravie ! J'espère que ça ira sur la continuité, et que ça se tiendra. Il y aura aussi le point de vue de Spock qui sera abordé, et qui est pour moi une galère ! J'espère donc que ça sera assez cohérent avec le personnage. En tout cas, ça l'est avec la vision que j'ai de lui ^^
Minicicile : Je suis tellement d'accord avec toi ! Uhura est adorable, je ne peux pas la voir autrement ! Elle a du caractère, c'est une femme forte, intelligente et qui a un grand coeur ! Pour ce qui est du passé de Jim, je le tease au fur et à mesure, car évidemment, ça aura forcément son importance :D Bon, je suis contente d'avoir bien cerné ce Spock, c'est assez difficile pour moi de retranscrire sa personnalité comme je la perçois dans la version AOS de 2009 ! En espérant que la suite te plaira ;)
Soupir 424 : Merci pour ta review ! J'espère que la suite continuera de te plaire !
