Merci pour vos lectures et vos reviews!

Tout d'abord, je tiens à m'excuser de la lenteur de cette publication! J'ai mis beaucoup de temps à rédiger dernièrement, en partie dû à ma situation pro/perso… Pour en rajouter une couche, je suis actuellement en déplacement et ne peux donc pas écrire aussi régulièrement que je le voudrais. Je vais quand même tenter de publier toutes les 2 semaines, en espérant revenir à un rythme un peu plus soutenu par la suite!

Sur ce, bonne lecture!

L0r13 Hahaha oui effectivement avec l'alcool on justifie tout n'est-ce pas? Mais j'essaie de ne pas tomber dans les clichés, même si c'est très tentant! Et tu touches quelque chose du doigt, j'ai eu très envie de développer certains persos comme tu pourras le voir dans la suite, donc sans perdre de vue le couple far de l'histoire, d'autres persos vont avoir droit à leur moment privilégiés... Mais je te laisse découvrir par toi-même!

Julie Merci! Mmmh, tu veux donc voir Levi succomber? Comment penses- tu qu'il va réagir à la tentation Eren? Mais Levi n'est pas si facile à atteindre tu sais, il a une carapace bien dure (et oui le pauvre a vêcu pas mal de choses assez traumatisantes, il en veut pas souffrir plus!)

Melina : Merci! j'espère que celui-là va te plaire aussi ;)

Noah: Alors je m'excuse d'avoir fait attendre encore plus pour le dernier… j'ai vraiment déconné! En tout cas j'espère que celui là te plaira ;)


« Qu'est ce que tu mets pour dormir ? »

Une chemise blanche dans une main, et une tunique marron dans l'autre, Mikasa se tenait devant la petite commode qui abritait le peu d'habits personnels que possédaient les recrues. Sa question resta en suspens. Sasha, adossée contre le mur depuis son lit, souffla bruyamment tout en agitant sa main dans l'air comme pour balayer la question.

Mikasa l'avait amené dans la chambre qu'elles partageaient avec Historia, et l'avait aidé à se déshabiller après lui avoir débarbouillé sommairement la figure. Sasha était maintenant à moitié nue sur les draps, marmonnant quelques mots incompréhensibles, la tête oscillante.

« J'imagine que ça n'a pas trop d'importance… » répondit finalement toute seule Mikasa en reposant la chemise blanche. Elle s'approcha de son amie pour lui enfiler la tunique, tirant délicatement sur ses bras pour les passer dans les manches. Le cœur de Mikasa se serra un peu, alors qu'elle lui ramenait les cheveux en arrière après lui avoir enfilé le col. Sasha avait été bizarrement très collante ce soir mais la voir dans cet état lui faisait un peu de peine. Elle était si gentille et sincère. Ses manières un peu sauvages et son obsession maladive pour la nourriture n'enlevait rien au charme de la jeune femme, qui, par sa candeur naturelle, avait conquis le coeur de la troupe dès leur première rencontre. Sa spontanéité et sa simplicité apportaient la fraîcheur nécessaire à la survie du petit groupe, qui arrivait souvent à reprendre des forces à la seule vision de ses yeux pétillants de malice et de son sourire innocent.

Cependant, Mikasa ne doutait pas un instant des difficultés qu'elle avait dû connaître dans sa jeunesse. Si son passé de chasseuse au village Dauper expliquait son ouïe exceptionnelle, la dextérité avec laquelle elle manoeuvrait l'équipement tridimensionnel, et la précision parfaite qu'elle donnait au tir, il expliquait également l'angoisse profonde qui l'oppressait lorsque le manque de ressources se faisait sentir. Sasha avait connu la faim, celle qui vous tiraille le ventre toute la nuit et vous empêche de dormir, celle qui vous pousse à mâchouiller quelques écorces ou racines pour calmer les crampes d'estomac, celle qui vous pousse à commettre des actes désespérés…

Sasha s'amusait peut-être à la traiter de maraîchère, mais Mikasa avait elle-même vécu recluse dans la montagne durant les premières années de sa vie, et comprenait donc la cruauté impitoyable que cachait l'apparente quiétude de la nature, et les dangers qui rôdaient dans le noir des nuits calmes. Mais alors que Mikasa avait connu la solitude, dans sa montagne froide, la chasseuse, elle, avait baigné dans la chaleur d'une grande famille, d'un clan, dont les rires avaient rempli son quotidien. Mikasa l'enviait parfois, avec tendresse. Quelque part, Sasha avait hérité d'un instinct de survie exceptionnel tout en bénéficiant d'un cocon aimant et chaleureux qui l'avait naturellement rendu joviale et positive.

C'est pourquoi elle fut surprise lorsque Sasha releva des yeux brillants de larmes sur elle. « Jusqu'à quand va-t-on survivre Mikasa? C'est ça non, on survit? » Puis, elle effleura ses joues du bout des doigts en murmurant d'une voix à peine perceptible : « J'ai l'impression que tant que tu es là, il ne peut rien nous arriver… » Mikasa resta muette. Elle laissa la brune enfouir sa tête dans son cou, n'essayant pas de retenir les larmes chaudes qui roulaient sur sa peau froide. Finalement, sentant la jeune femme trembler de froid, elle referma ses bras autour d'elle et la tint serré, ne la lâchant que lorsqu'elle ne sentit plus les battements de cils lui chatouiller la clavicule.

Elle avait remonté les draps sur les épaules de sa camarade et la regardait dormir, pensive. Ce fut un bruit de porte qui claque à l'extérieur qui la sortit de sa rêverie, et l'oreille dressée, elle jeta un coup d'œil par la fenêtre. Les pas qui suivirent dans l'escalier lui confirmèrent que c'était Eren qui venait de sortir des toilettes extérieures, mais alors qu'elle s'apprêtait à détourner les yeux, elle vit Levi sortir de l'abri à son tour. Plissant les yeux en essayant de percer l'obscurité, elle distingua sa silhouette s'immobiliser quelques instants, à demi-tournée vers la fenêtre éclairée de la cuisine. Il tourna finalement les talons et se dirigea vers la grange où Hanji devait encore se trouver.

Mikasa fronça les sourcils. Il avait eu l'air d'hésiter à entrer. Et ce n'était pas le genre du Caporal, d'hésiter.


Ils furent de corvée d'écurie pour les deux jours suivants. Nettoyer les box, les montures et les équipements, doucher et brosser les chevaux allaient maintenant remplir leurs journées du matin au soir, au grand dam de Jean, et à la bonne surprise du palefrenier de la ferme.

Hanji était tombée sur le groupe à moitié endormi dans la cuisine au milieu de bouteilles vides, et feignant la colère, elle avait dû réprimander les têtes brûlées qui s'étaient laissées aller aux délices de l'ivresse sans autorisation. Les appels aux châtiments corporels que Levi avait grincé dans son dos l'avait encouragé à se composer pour les rappeler à l'ordre de sa voix tonitruante, mais elle avait dû se faire force pour ne pas crier d'indignation en constatant que les plus jeunes ne l'avaient pas invité à se joindre à eux. Elle aurait tout particulièrement aimé observer comment le corps du jeune titan absorbait et réagissait à l'alcool.

Eren se sentit un peu coupable de ne pas avoir aidé Armin à se mettre au lit, mais il était si fatigué après s'être laissé allé à ses caresses, dont le seul souvenir suffisait encore à le rendre flageolant, qu'il s'était endormi presque aussitôt. Et pour la première fois depuis des semaines, il avait dormi d'une traite, sans cauchemars, sans visions d'horreur. Il se serait senti libéré s'il n'avait pas la certitude que ce n'était dû qu'à la présence rassurante de Levi qui s'était immiscée dans ses rêves.

Alors Hanji leur fit le compte-rendu de la séance de torture qui avait eu lieu la veille, une question lui brûlait les lèvres: Où était Levi? Il attendit patiemment qu'Hanji finisse d'expliquer les milles et une techniques qu'ils avaient utilisées pour faire parler l'homme, qui avait finalement lâché quelques mots : « Ils vous feront payer ». Il était ensuite tombé dans les pommes, épuisé, et Hanji et Levi avaient décidé d'arrêter la séance. Jean affichait une mine dégoûtée alors qu'elle terminait son monologue.

Eren ne tint plus. « Où est le Caporal? » Mikasa le regarda furtivement. « Il est parti à Trost pour ramener notre prisonnier. Il doit également s'entretenir avec Erwin, et par la même occasion rendre visite au pasteur Nick. »

Était-il soulagé? Où était-ce une pointe de déception qu'Eren sentit lorsque son coeur sembla se dégonfler d'un coup?


Levi galopait comme s'il fuyait quelque chose. Le soldat du bataillon qui dirigeait la charrette avec le prisonnier peinait à maintenir le rythme, et grogna entre ses dents quand il réalisa qu'il passerait le plus clair du voyage dans le dos du Caporal. Espérer échanger quelques mots avec lui était encore plus dérisoire…

Levi fixait l'horizon, espérant apercevoir le mur Rose au plus vite, et avec lui les premières habitations qui indiquaient les abords de Trost. Ce trajet était trop long à son goût, et laissait bien trop de place aux pensées qui tournaient dans sa tête depuis la veille.

L'étrange interaction qu'il avait eu avec le gamin le travaillait encore, si bien qu'il tentait d'expliquer sa nervosité par la série d'évènements qui s'étaient enchaînés ces dernières quarante huit heures. Tout d'abord, La séance de torture avec Hanji l'avait particulièrement éreinté, l'homme s'étant débattu comme un forcené lorsqu'il avait voulu lui arracher la première dent. Et même si la vue du sang ne lui faisait ni chaud ni froid, c'était tout de même fatiguant de voir quelqu'un souffrir. Même avec l'aide d'Hanji, ils n'étaient parvenus à rien.

Puis, les tentatives d'intimidation doublées de chantages émotionnels dont Hanji jouaient pour tenter d'amadouer le prisonnier avaient rajouté une couche à son épuisement. Son exubérance lui tapait sur les nerfs… Alors, lorsqu'il était tombé sur un Eren éméché et frustré, il se sentait lui-même vidé, irritable et, plus que tout, sale.

Mais la suite, il ne savait comment l'expliquer… Et il n'avait pas très envie de se confronter aux sensations qui l'avaient assaillies à ce moment précis. En tout cas, il avait dû être particulièrement fatigué car il n'avait pas pris la peine de confronter le groupe des recrues même s'il avait très bien compris ce qui se tramait dans la cuisine. Peut-être avait-il senti que l'étrangeté de la situation qu'il venait de vivre l'aurait poussé à être beaucoup plus cruel que d'habitude? Les gamins n'avaient pas besoin de ça, pas maintenant.

Levi poussa un soupir de soulagement lorsqu'il vit le mur Rose se dessiner au loin. Il relâcha un peu les épaules et stimula les flancs de son cheval avec ses bottes pour l'entraîner dans un galop plus soutenu, au grand dam du soldat qui le suivait.

Une discussion avec Erwin lui changerait les idées.


Lorsqu'il arrivèrent à Trost, l'air se fit soudain plus dense. La tension qui flottait dans l'air était presque palpable, les badauds dans les rues pressaient le pas, les marchands installés à leur stands échangeaient des regards nerveux, et même les enfants, d'habitude si bruyants, semblaient se déplacer sur la pointe des pieds. Ça ne présageait rien de bon, et Levi avait une impression de calme avant la tempête. Il sentit quelques regards s'attarder sur lui. Heureusement, le prisonnier dans la charrette ne broncha pas sous la toile qui le cachait et ils atteignirent les écuries des quartiers militaires sans encombre. Après avoir pris soin d'accompagner le prisonnier aux cachots, Levi se dirigea vers les quartiers privés du Bataillon et toqua directement à la chambre du Commandant.

Il fut accueilli par une paire d'yeux bleus aciers soutenant un visage sans expression. Le grand blond se tenait au milieu des piles de livres et manuscrits qui jonchaient sa chambre, éclairée par deux chandeliers accrochés au mur. Sa chemise froissée était ouverte au col. Il avait probablement passé plus d'une nuit blanche dans cette chambre… Le Commandant ne s'étonna pas de la visite de Levi dans ses quartiers privés. La relation entre les deux hommes s'était façonnée autour d'une entente mutuelle qui honorait leur rang respectif, mais tolérait l'absence de formalité. Prendre la liberté de toquer à la porte de ses quartiers privés faisait partie des familiarités auxquelles le Commandant avait dû s'habituer avec Levi.

Malgré l'air froid et insondable de son supérieur, Levi se sentit tout de suite en confiance.

« Les Trostiens ont l'air plutôt constipés en ce moment, ils ont changé la farine du pain? »

Erwin ignora sa remarque et se plongea dans le compte rendu des expérimentations d'Eren que Levi lui avait tendu. Celui-ci s'installa sur la chaise près de la table ronde en bois qui servait de bureau au Commandant, croisant les jambes en attendant qu'il finisse de lire le rapport. L'endroit était poussiéreux, l'air étouffant. Il n'avait sans doute pas aéré cette chambre depuis des jours… Erwin fronçait de plus en plus ses sourcils épais en lisant. Levi, appréciant le silence, se mit à imaginer le quotidien de son supérieur dans les quartiers du Bataillon. Il n'avait pas dû avoir beaucoup d'interactions humaines récemment, à en juger par son apparence négligée et l'état de sa chambre. Quand il n'était pas en mission, Erwin était capable de se couper du monde pour élaborer les prochaines missions du Bataillon, passant parfois plusieurs jours sans parler à personne, étudiant des montagnes de paperasses et de bouquins dont Levi soupçonnait la plupart d'être interdits à la circulation.

Levi se surprit à se demander s'il avait une quelconque sympathie pour le Commandant et sa solitude pathétique, et décida que non, il n'en avait aucune.

Malgré le profond respect et la confiance sans faille qu'il avait pour son supérieur, il ne le considérait pas comme un ami, et sentait que l'homme cachait quelque chose de terrifiant sous son autorité inébranlable et son charme froid. De plus, même s'il en bénéficiait rarement, Levi aimait la solitude. Il n'était donc pas vraiment apte à juger comment celle-ci pouvait affecter un homme comme le Commandant qui ne se préoccupait clairement pas de ce que les autres pouvaient penser de lui.

Le nez toujours dans les papiers, Erwin marmonna enfin : « Je vois, encore un échec… » Il parlait d'Eren et du don d'auto-pétrification sur lequel il comptait tellement.

« Le gamin n'est pas prêt, il va lui falloir plus de temps. Je te rappelle que nous n'avons pas de manuel sur l'auto-pétrification, difficile de faire plus vite quand on tâtonne dans le noir. » Erwin lui jeta un regard vide. Il avait presque l'air de regarder au-dessus de sa tête, perdu dans ses pensées.

« J'ai reçu un rapport de votre mission de reconnaissance à Idgarto. Le prisonnier vous a-t-il dit quelque chose?

- On a juste réussi à lui faire cracher des menaces pas cohérentes. Apparemment, "Ils vont nous faire payer". On est pas sûrs de savoir s'il parle de son propre clan ou d'un groupe extérieur.

- Intéressant. J'irai lui rendre visite ce soir. J'arriverai peut-être à en savoir plus. » Levi le regarda fixement, les sourcils froncés. Il n'était pas sûr que le prisonnier ait vécu le pire avec Hanji et lui, finalement. « Bon courage pour comprendre ce qu'il dit, il n'a plus beaucoup de dents », cru-t-il bon de faire remarquer.

Erwin se replongea dans ses papiers, en faisant doucement les cent pas : « On doit trouver un moyen d'accélérer la transformation d'Eren. Historia et lui ne sont clairement pas en sécurité, et j'ai la sensation que le Bataillon d'Exploration non plus. Tu l'as remarqué toi-même, la ville est sur le qui-vive, des rumeurs circulent depuis les bas fonds des souterrains qu'une partie de la noblesse est en train de s'organiser. Je ne sais pas encore pourquoi Historia est si importante pour eux*… Mais ce qui est clair, c'est que nous avons besoin d'Eren plus que jamais. Levi, sa sécurité est primordiale.

-J usque là, je ne crois pas t'avoir déçu sur ce point, Erwin. »

- Refermer la brèche de Shiganshina est notre seul espoir de découvrir ce qui se cache dans ce sous-sol. On a jamais été si près d'en savoir plus sur notre condition. Il est notre seul espoir. » Levi serra les dents. Encore ce fichu dernier espoir, et ce que ça impliquait. Erwin serait prêt à tout pour en avoir le contrôle. Levi fixa le mur devant lui: « Tu sais que tu peux me faire confiance pour le protéger, Erwin. Mais n'oublie pas qu'il vient à peine de découvrir son pouvoir et qu'il est loin de savoir le gérer. Et qu'il se bat encore avec les fantômes qu'il a laissé sur son chemin. »

Erwin s'arrêta d'un coup de faire les cent pas et observa Levi pendant une longue minute, de son air insondable.

« Je vois. Tu sais sûrement de quoi tu parles. » Levi détourna la tête en entendant ces mots. Il ne voulait pas avoir cette discussion avec Erwin.

Le Commandant le sonda un peu plus longtemps de son regard d'azur glacé, puis reprit les cent pas : « En attendant, faites vous les plus discrets possible, et restez au aguets. Personne ne doit savoir où vous vous trouvez. Quand tu repartiras de Trost, habille-toi en civil, et surveille qu'on ne te suit pas. » Levi était maintenant agacé. Ses ordres, bien que logiques et pertinents, n'étaient pas nécessaires. Il savait ce qu'il devait faire. Merde, il l'avait compris à la seconde où il avait franchi le mur Rose et reniflé la tension à couper au couteau qui s'insinuait dans la ville...

Il devait avoir l'air tendu, les poings crispés et la mâchoire serrée, car Erwin le scruta une fois de plus en s'asseyant sur la chaise située sur sa gauche.

Un silence pesant commençait à s'installer quand Erwin articula :

« Levi, ne fait pas l'erreur de t'imaginer le sauver de ses propres démons. Ça ne l'aidera pas, et tu risques d'y perdre des plumes, en plus de tes hommes. »

Levi tressaillit. Il parlait d'Eren.

Après un nouveau silence, Erwin ajouta calmement : « Tu sais bien que ça n'a pas marché avec toi. M'ériger en héros après t'avoir tiré des souterrains ne t'as jamais aidé à te débarrasser des démons qui te suivent toujours aujourd'hui. Et qu'il faudra que tu confrontes un jour ou l'autre, Levi. En attendant, laisse le gamin gérer les siens. »

Levi tourna lentement la tête vers lui, et planta son regard dans le sien. Un seul long regard suffit pour communiquer au Commandant tout ce qu'il voulait lui répondre sans trouver les mots justes. Son agacement face à son audace, sa gêne d'entendre des mots si profonds et si intimes, son respect et son admiration pour l'homme qui l'avait sauvé, sa haine et son mépris pour ce qu'il représentait, et l'acceptation d'une vérité qui s'était articulée comme ça, sans prévenir.

Sans un mot, il se leva et quitta la pièce. Erwin resta seul entre ses piles de livres, les mains croisées sur ses genoux et un sourire à peine perceptible flottant sur ses lèvres.


Eren marchait droit, dans une rue qui lui était familière, sans pour autant la reconnaître. Elle ressemblait aux nombreuses allées de Shiganshina. Les pavés étaient recouverts de débris et de sang, et lorsqu'il leva la tête, il vit une colonne de fumée noire devant lui, monter vers le ciel. Un silence assourdissant l'enveloppait. Puis il les vit. Sur les côtés de la ruelle pavée, une foule de gens le regardait. Ils étaient debout, leurs faces barbouillés de traces noires, de poussière et de sang. Les visages le fixaient, et lorsqu'il tourna la tête pour regarder de nouveau devant lui, il n'y avait plus personne. Seulement les pavés ronds maintenant immaculés, et les maisons intactes et proprettes qui bordaient la rue.

Pourtant, dès qu'il se tournait de nouveau, ils étaient là.

Le fixant. Par centaines. Des vieillards, des femmes et des enfants, des hommes aussi.

Eren suivit les pavés sans savoir où il allait, l'intuition le guidant vers la colonne noire qui grossissait de plus en plus. Il reconnut soudain la rue qui menait à sa maison, et les marches longues et étendues qui lui étaient si familières. Il accéléra le pas, et lorsqu'il atteint le haut de la montée, il poussa un cri devant les ruines qui remplaçaient maintenant la maison. Mais rien ne sortit de sa bouche, pas un son.

Et soudain, il se dressa devant lui.

Son père.

Grisha se tenait devant la maison, un sourire au lèvres. Sa mère apparut à ses côtés, affichant elle aussi un sourire étrange. Elle lui tenait la main, ou plutôt, son père lui agrippait la sienne. Eren n'arrivait pas à capter son regard, qui se concentrait sur un point au-dessus de sa tête et semblait vide. La lueur vive qui les animait d'habitude était éteinte. Il sentit des larmes lui obstruer la vue. Un nœud lui serrait si fort la gorge qu'il en eut mal. Il essaya pourtant de crier de nouveau, d'appeler Carla, mais une fois de plus, aucun son ne sortit.

Elle se plaça lentement devant Grisha, obéissant à la main délicate de son mari qui la guidait. Des cendres voletaient doucement autour d'eux, déposant une fine couche grise sur sa robe blanche. Eren sentit son cœur battre plus vite, et voulut avancer vers eux, lorsqu'il aperçut le couteau dans la main gauche de son père. Mais ses membres ne lui obéissaient plus. Il n'arrivait plus à bouger, paralysé. Grisha leva le couteau au ralenti, le plaçant devant la gorge de Carla, qui souriait toujours. Il ne voyait pas la totalité du visage de son père, à moitié caché derrière sa femme, mais pouvait apercevoir son oeil droit plissé comme s'il était déformé par la rage.

Eren tenta d'avancer de nouveau, mais son corps ne répondait toujours pas. Et soudain, il comprit qu'on le tenait, qu'on l'empêchait d'avancer. La foule de personnes qu'il avait dépassée était derrière lui, des volées de bras le maintenant en place, accrochées à ses jambes, sa poitrine, ses bras. Un sueur froide lui traversa l'échine quand il comprit ce qui allait se passer. Il se débattit, hurla une fois de plus sans qu'aucun son ne perce le silence assourdissant, et assista impuissant à la mise à mort de sa mère.

Grisha lui trancha la gorge, d'un coup sec, et, un sourire toujours accroché au lèvres, elle tomba au sol comme une poupée de chiffon. Il le fixait maintenant, impassible et droit, le couteau dans sa main. Son sourire avait disparu.

Eren se redressa en hurlant dans son lit. Un bourdonnement assourdissant résonnait dans ses oreilles. Trempé de sueur, il chercha de l'air et alors qu'il suffoquait, paniqué, et tenta d'attraper quelque chose autour de lui, n'importe quoi qui aurait pu l'aider à le ramener à la réalité, l'empêcher de sombrer. Il sentit une main attraper la sienne et une autre se poser sur son épaule. Un son étouffé lui parvint, qui s'aiguisa peu à peu et perça finalement le bourdonnement.

« Eren! Eren! » Il reconnut la voix d'Armin, à côté de lui, et sentit ses petites mains se placer sur ses épaules et le secouer. «Eren, tu m'entends? » Il distingua enfin le visage du jeune blond, et les lignes d'inquiétude qui lui plissaient le front. Eren posa ses mains sur les bras de son ami, et laissa tomber sa tête en reprenant son souffle. « … Oui. Je crois. » Armin relâcha un peu sa pression et vint s'agenouiller en face de lui, le scrutant toujours d'un air anxieux. « Tu bougeais dans ton sommeil, puis tu t'es mis à crier. » Comme dans son rêve, sa gorge lui faisait mal, trop mal. Il étouffa une plainte de douleur. Un nœud le tiraillait et il ne parvenait pas à déglutir correctement. « Regarde moi, lui intima Armin, et respire doucement. »

Eren le regarda et trouva les pupilles bleues rassurantes de son ami, qui le tenait toujours par les épaules. Il respira en suivant le rythme qu'Armin lui imposait, reprenant lentement ses esprits. Il déglutit une dernière fois pour faire passer la douleur dans sa gorge et lui dit « Mon père… Grisha, il était là. Et ma mère.. elle… Il l'a tuée, Armin, il l'a tuée devant moi ! » Il s'affala sur l'épaule d'Armin en sanglotant, tentant d'articuler quelques mots indistincts. Son ami le laissa faire sans chercher à comprendre ce qu'il pouvait dire, et se releva ensuite pour chercher une serviette qu'il avait mouillée juste avant. « Tiens, passe la sur ton visage et ton cou, ça te fera du bien »

En effet, la fraîcheur de la serviette au contact de sa peau quand il la passa dans son cou l'apaisa tout de suite. Armin s'assit à côté de lui, attentif.

« C'est la première fois que tu rêves de ton père, non? Commença-t-il quand il sentit Eren se relaxer.

J'ai parfois des souvenirs de lui qui se mêlent à mes rêves. Mais cette fois-ci ce n'était pas un souvenir. On aurait dit qu'il s'adressait à moi en particulier. Comme un message. Et il avait l'air si… réel. »

Armin regarda le sol, et répondit, hésitant : « En tout cas, ce n'est pas la première fois que tu cries dans ton sommeil… » Eren tiqua. Il faisait donc ça depuis que ses cauchemars le hantaient? Et il ne lui avait rien dit? Les autres devaient donc avoir entendu ses cris, surtout s'ils avaient été répétitifs… Armin lui offrit une réponse sans qu'il n'ait eu le temps de lui demander : « Ça arrive de temps en temps. Enfin, de plus en plus souvent… Tout le monde sait, pour tes cauchemars. La première nuit, Mikasa avait déboulé dans la chambre en catastrophe. Je lui ai dit que je m'occuperai de toi à l'avenir. La plupart du temps, tu ne te réveilles pas. Ils se sont donc habitués. »

Eren se sentit honteux et en colère à la fois. Il doutait qu'ils se soient "habitués" à ses cris la nuit. Ils lui faisaient surtout la grâce de ne pas lui rappeler ses terreurs nocturnes. Sachant qu'ils devaient eux-mêmes essayer de surmonter leur propres anxiétés, c'était plutôt gênant de leur imposer ça…

Il serra les poings. Il en avait marre de cette situation, de cette incertitude qui les encerclait constamment et qui les mettait à fleur de peau. Il fallait que ça change, il devait retrouver la confiance qu'il avait quand il avait rejoint la brigade, et qui se nourrissait de la certitude absolue que les titans devaient disparaître, jusqu'au dernier. Sa volonté n'avait pas disparu, il en était sûr. Mais il devait faire face aux pertes pour pouvoir avancer, honorer ceux qui avaient rendu possible tout ce qu'ils avaient achevé jusque-là. Ne plus les pleurer, mais leur rendre hommage.

Il prit une inspiration et afficha un sourire rassurant : « Ça va mieux Armin. Je vais essayer de dormir, et tu devrais faire pareil. »

Il passa le reste de la nuit les yeux fixés au plafond, cherchant la raison pour laquelle son père apparaissait si clairement dans ses rêves, et pourquoi maintenant. Il avait toujours pensé qu'il était mort, ayant disparu durant la brèche du mur Maria et n'ayant plus donné aucun signe de vie par la suite. Eren n'avait jamais eu le temps de faire son deuil, comme si l'idée de dire Adieu à quelqu'un qu'il ne pouvait pas voir était complètement absurde. Les pertes consécutives de ses proches avaient toujours été si visuelles, et si sanglantes, qu'il n'arrivait pas à accepter la mort s'il ne l'avait pas vue de ses yeux…

Peut-être qu'il n'avait jamais réussi à lâcher prise car au fond de lui, il ne croyait pas vraiment en sa mort. Mais il refusait également d'imaginer que son père ait pu l'abandonner…

Il sentit une vague de colère l'envahir à cette pensée et tenta de respirer profondément pour se calmer. Le visage de Levi lui apparut immédiatement alors qu'il expirait doucement, les poings serrés. Son cœur se mit à battre plus fort, mais son corps se fit plus lourd, et ses muscles se détendirent petit à petit.

Comme dans la clairière…

Et alors que les premières lueurs du jour pointaient au loin, Eren se sentit flotter dans les eaux brumeuses du songe, où se mélangeaient rêves et souvenirs.


Levi tournait dans son lit, n'arrivant pas à trouver le sommeil. Il repoussa nerveusement la couverture de ses pieds pour laisser passer un peu d'air frais sur ses jambes. La chaleur était écrasante, et il transpirait dans la seule chemise qu'il avait trouvée dans sa chambre à moitié abandonnée.

Après son entrevue avec Erwin, il avait arpenté les couloirs du QG en ignorant les quelques regards curieux qu'il avait croisés, et avait réussi à mettre la main sur un repas plus ou moins consistant avant de rejoindre ses quartiers. C'était une chambre encore plus modeste que celle d'Erwin, dans laquelle il n'avait pas dormi depuis quelques semaines. Il remarqua avec agacement la poussière qui s'était accumulée et ne put s'empêcher de passer un coup de chiffon sur les meubles avant de s'asseoir sur son lit, évaluant la sensation de vide qui l'assaillait soudain. Il eut tout de même la force d'aller se rafraîchir un peu dans les salles d'eau de l'étage et fut d'autant plus satisfait qu'il ne croisa pas un chat.

Quand il s'allongea enfin sur le matelas dur, ses pensées dérivèrent automatiquement sur ce qu'il avait tenté de mettre de côté depuis la veille. Eren. Son talent pour refouler toute pensée qui risquait de réveiller des émotions trop enfouies semblait l'avoir subitement quitté depuis cette fichue soirée. Pour rajouter à cela, le discours d'Erwin ne l'avait pas aidé à se voiler la face, au contraire, et ses mots résonnaient encore dans sa tête. Qu'est ce qu'avait voulu dire le Commandant? Laisser Eren se débrouiller seul, alors qu'il devait le protéger lui et leur mission? Cela n'avait aucun sens. Et s'ériger en mentor n'était pas son intention. Le protéger, oui, le guider, aussi, mais se nourrir de son admiration, ce n'est pas ce qu'il voulait. Il avait toujours détesté les regards que les badauds impressionnés posaient sur lui à son passage, et encore moins les minauderies des soldats intimidés par sa réputation et qui lui donnaient envie de vomir.

Mais avec Eren, il y avait autre chose. Même si les mines embarrassées et les gaucheries du cadet l'agaçaient souvent, elles ne le dégoûtaient pas comme celles des autres pour autant. Et la curiosité qu'il avait pour lui le taraudait toujours…

Et puis, plus troublant encore, c'était ce désir qui s'était réveillé en lui à son contact la veille, dans les toilettes sombres de la ferme. Quand il avait vu l'émoi du jeune homme, tremblant et haletant sous ses mains, il avait eu envie de défaire ses sangles une à une, de toucher sa peau qu'il sentait chaude à travers sa chemise, de l'entendre gémir…

Bordel.

Il devait se l'avouer, il avait eu envie de lui. Et il ne se rappelait pas avoir déjà eu envie de quiconque de cette façon auparavant…

Levi passa en revue les rares personnes avec qui il avait partagé un moment érotique ou sexuel dans le passé, et soupira. Si sa sexualité était une réalité, elle n'était pas particulièrement intéressante. Il avait bien été avec une ou deux jeunes femmes de l'armée après s'être établi lui-même au sein du Bataillon, mais ça s'était arrêté là. Il n'avait pas particulièrement apprécié les femmes ou leurs échanges, et encore moins la situation délicate dans laquelle il se trouvait lorsqu'il les croisait dans les couloirs et qu'elles lui jetaient des regards mi suppliants, mi meurtris. Trop de complications pour si peu de plaisir. L'une d'elle était d'ailleurs morte durant la trentième expédition du bataillon, et il n'avait pas pu s'empêcher de penser qu'elle aurait peut-être été plus attentive face aux titans s'il ne l'avait pas ignoré après avoir couché avec elle seulement deux semaines auparavant…

La plupart de ses expériences remontaient donc à l'époque où il vivait encore dans les souterrains. Et il se gardait habituellement de se les remémorer, les souvenirs étant encore trop vifs et douloureux. Il se rappelait cependant n'avoir jamais apprécié le contact avec les femmes… Leurs corps n'avaient jamais provoqué chez lui de passion brûlante, de désir ardent comme pouvait le décrire parfois assez crûment certains hommes du quartier. Il s'était résigné en se disant que sa nature taciturne expliquait ce manque d'engagement, et qu'un être aussi imperméable aux émotions et allergique à l'attachement ne pouvait ressentir ce que les hommes qui l'entouraient décrivaient. Il ne s'était donc jamais vraiment étonné de ne jamais se sentir transporté lors de ses échanges charnels, qu'il n'initiait d'ailleurs jamais.

Puis, une nuit, il était tombé sur Farlan et une de ses dernières conquêtes, en plein ébats. Il avait distingué le corps de son ami se mouvant dans un va et vient suggestif dans leur chambre qu'il avait oubliée de fermer. Et plus que de les avoir surpris en plein acte, c'était la vue des formes dessinées de son ami, ses fesses galbées et son dos musclé qui avait laissé Levi pantois.

Il avait revisité plusieurs fois ces images par la suite, se surprenant à admirer le corps musclé du garçon, jusqu'à ce qu'il reprenne ses esprits en se maudissant d'avoir ce genre de pensées pour son frère d'arme. Farlan n'était pas seulement membre de leur petite organisation criminelle, il était sa famille. Et il s'interdisait de penser à lui d'une quelconque autre manière.

Et puis, c'était un homme. Levi savait très bien ce qu'il se passait avec les hommes qui aimaient les hommes, dans les souterrains. Et il avait bien compris que dans ce monde, il valait mieux cacher ce genre d'attirance…

Les sobriquets dégradants, les insultes, et les agressions qui les visaient étaient monnaie courante, et Farlan et lui en avaient été les premiers témoins lorsqu'ils avaient un jour aidé un voisin à venger son fils en retrouvant ceux qui l'avaient tué. Une bande de truands l'avait battu à mort en découvrant son penchant pour les hommes, alors que le pauvre garçon s'était aventuré un peu trop près des quartiers réservés aux "détraqués", comme ils appelaient toute personne qu'ils ne considéraient pas "normales" dans les souterrains, et où les homosexuels se retrouvaient parfois. Levi n'en avait pas pensé grand-chose à cette époque, à part que c'était une preuve de plus que l'espèce humaine avec laquelle il cohabitait ne valait pas grand-chose, surtout lorsqu'elle s'entassait dans un trou à rat comme le leur. Ce n'était peut-être une mission très noble vu son aspect mercenaire, mais le père avait offert une récompense plus que généreuse, et Levi n'avait eu aucun état d'âme à voir ces hommes payer pour ce qu'ils avaient fait.

Cela dit, il ne pouvait s'empêcher de penser qu'il fallait être fou pour prendre le risque de montrer son attirance pour les hommes ici, et qu'il était plutôt content d'en être lui-même épargné. Cela aurait été un problème de plus à gérer dont il n'avait pas besoin.

Il avait donc paniqué quand le souvenir du corps de Farlan commenca à s'inviter un peu trop souvent dans son quotidien, et s'était forcé à les oublier en trouvant les distractions qu'il pouvait. Dans ce cas, ça avait été d'accepter les avances de plusieurs filles en couchant avec elles, tout en multipliant les activités criminelles. La deuxième distraction avait été la plus efficace, la violence canalisant plutôt bien la colère qu'il éprouvait envers lui-même, mais aussi envers Farlan, sans savoir vraiment pourquoi.

Cela avait été une période particulièrement sanglante pour ses adversaires, et mais qui avait achevé de consolider sa réputation de criminel dans les bas-fond de la ville…

Se retrouver aujourd'hui à penser à Eren de cette façon ne le rassurait pas, parce que cela réveillait en lui quelque chose de trop fort, trop enfoui… et c'était dangereux. C'était peut-être un mécanisme de défense mais il était tellement bien ancré en lui qu'il ne pouvait s'en défaire…. Il devait repousser autant qu'il pouvait ce désir tout nouveau qui le tiraillait avant que ça ne devienne un vrai problème.

Levi soupira et croisa ses bras derrière sa tête. C'est avec un sourire ironique qu'il repensa aux paroles d'Erwin. Quand il lui avait conseillé de se confronter à son passé, il n'avait certainement pas voulu parler de cette partie-là…


Le Caporal arriva à la ferme aux alentours de 16h heures le lendemain. La visite aux cachots du pasteur Nick avait retardé son départ, Erwin lui ayant demandé de rédiger un rapport et de lui amener directement après. Toute cette paperasse l'agaçait au plus haut point, surtout qu'elle l'avait forcé à partir en plein soleil et à chevaucher sous les heures les plus chaudes. Résultat, ils avaient dû s'arrêter plusieurs fois pour se reposer, et quand il pénétra dans la cour de la ferme, où il croisa Armin et Jean qui balayaient mollement, son cheval était luisant de sueur.

Il le dirigea directement vers son box par la bride, décidé à le soulager de sa selle et le frotter avec la paille qu'il trouverait pour le protéger des heures fraîches qui allaient s'installer dans quelques heures.

Une fois l'entrée des écuries franchie pour pénétrer dans l'allée au milieu des box, il s'immobilisa.

Et merde.

Eren était là, occupé à balayer l'allée principale. Le soleil de fin d'après-midi se frayait un chemin à travers les planches de bois et un rideau de rayons dorés illuminait l'endroit. Eren se tenait au milieu, bataillant avec un tas de paille sur le sol. Le nuage de poussière qui s'était créé scintillait au contact des rayons de soleil. Le col de sa chemise blanche était ouvert, laissant apparaître ses clavicules et quelques mèches collées par la sueur dans son cou. Ses joues rosies et son cou humide témoignaient de la chaleur écrasante qui avait dominé la journée. Eren dégageait quelque chose de très… sensuel.

Agacé, Levi reprit sa marche et Eren l'aperçu. Levi le vit s'appuyer maladroitement sur son balai alors qu'il balbutiait: « Caporal… Vous êtes revenu! Laissez-moi vous aider à…

- Je peux me débrouiller tout seul », coupa Levi en rentrant dans un box. Mais Eren ignora son commentaire et le suivit pour l'aider à débrider la bête. Il s'occupa des mors tandis que Levi défaisait la selle, mais bien vite Eren réapparut à ses côtés, comme s'il attendait quelque chose. Le Caporal tiqua : « Qu'est-ce que tu fais au juste? » Eren réagit en tendant les mains, souriant : « Oui pardon, donnez moi ça ! » Ce n'est pas ce qu'avait voulu dire Levi… Il détestait vraiment qu'on l'assiste.

En lui prenant la selle des mains, les doigts d'Eren effleurèrent ceux du Caporal. Leurs yeux se croisèrent alors et un frisson électrique lui parcourut l'échine. Eren semblait l'avoir senti également. Il avait légèrement tressailli et s'était vite détourné pour suspendre la selle sur la poutre derrière lui.

Tout cela devenait ridicule.

Levi s'attela à bouchonner le cheval en silence. Eren revint vers lui, et une poignée de paille dans la main, imita le Caporal en frottant le flanc du cheval. Il avait les joues rouges, et ses cheveux en bataille remuaient au rythme de ses frottements. Levi pouvait sentir l'odeur fraîche et suave qui s'en dégageait, et quand Eren se retrouva à quelques centimètres de lui, son nez s'emplit d'une effluve bien trop prononcée pour qu'il arrive à rester concentré sur sa tâche.

C'était trop.

Le morveux le collait trop.

Il s'éloigna brusquement du cheval et saisit une brosse qui traînait sur le côté. Il la posa sur le torse du cadet, le poussant violemment au passage. Son geste surprit le cheval qui s'ébroua, agacé. Eren manqua de tomber sous la force du mouvement et se cogna au panneau de bois derrière lui. Levi s'approcha alors de lui, menaçant:

« Puisque tu as l'air d'adorer travailler dans les écuries, tu vas me récurer ce cheval jusqu'à ce qu'il brille. Et tous les autres aussi, d'ailleurs. »

Eren écarquilla les yeux : « Mais, nous l'avons fait ce matin… Ça va me prendre des heures!

- Ca tombe bien, on n'en manque pas en ce moment. Et n'oublie pas de nettoyer l'allée une fois de plus quand tu auras fini.

- Mais…

- Ne discute pas. Je viendrai vérifier où tu en es dans deux heures. »

Eren regarda Levi sortir du box et s'éloigner, abasourdi. Il ne comprenait rien.

Qu'est-ce qu'il lui avait fait?


*J'ai fait une erreur dans le 2ème chapitre, car personne n'est encore au courant qu'Historia fait effectivement partie de la descendance royale. Le déroulement de l'histoire suit le Canon à ce moment de l'histoire, personne n'est encore au courant! Je n'ai pas modifié l'erreur donc cela explique l'incohérence.

A Suivre!